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La crédulité occultiste

article de Diogène Gondeau (juin 1930)
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Cet article a paru originellement dans le N°141 de la revue Le Symbolisme (juin 1930). Il a été ressaisi et corrigé par France-Spiritualités.
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      On peut s'intéresser à l'occultisme sans être occultiste, quitte à passer pour profane aux yeux des initiés que caractérise une foi particulière. C'est, en effet, l'intuition qui confère l'Initiation occulte. L'occultiste s'enthousiasme pour certaines conceptions qui lui apparaissent comme incontestablement vraies et il s'initie par ce fait. Ceux qui partagent sa croyance le reconnaissent comme disciple de la science des choses cachées, comme un élu capable de comprendre ce que le vulgaire ignore fatalement.

      Si, en présence des théories occultistes, nous adoptons une attitude critique s'inspirant de l'esprit scientifique, nous nous comportons en profanes indignes de voir la lumière. Doués, au contraire, d'un sens divinatoire plus ou moins somnambulique, nous bénéficions d'une illumination mystérieuse qui nous ouvre d'emblée la porte du sanctuaire occulte.

      Ce temple est celui de la Papesse du Tarot, grande prêtresse que couronne le croissant lunaire. C'est l'initiatrice qui éveille la curiosité de l'inconnu, sans jamais révéler le secret dont elle est la gardienne. Elle ne peut montrer que les images projetées sur l'écran qui se tend entre les deux colonnes, images chatoyantes auxquelles se complaisent les occultistes.

      Qu'ils soient dupes des fantasmagories du Bateleur, c'est ce dont ils conviennent à la rigueur. Le voile d'Isis est pour eux celui de Maya, déesse de l'illusion. Mais derrière le rideau des apparences, une réalité se conçoit et tout occultiste qui se respecte soulève le fameux voile pour contempler très nettement l'essence cachée des choses.

      N'est-il pas victime en cela de sa subtilité métaphysique ? Les images qui s'objectivent sont, après tout, moins trompeuses que les abstractions avec lesquelles jongle notre esprit acrobate. Rien n'est plus fécond en déraisonnements que la logique transcendante et, quand nous prétendons tirer des nombres la vérité pure, nous risquons fort de résoudre de fallacieuses équations. Qu'importe aux pontifes du savoir occulte : leur illumination subjective leur suffit amplement. Ils savent qu'ils savent et sont satisfaits. Tout est pour eux limpide, car ils possèdent la Pierre des Sages qui transmue l'obscurité en lumière.

      Ce sont des croyants qui ont retrouvé le Paradis ; ils sont heureux et n'écoutent plus le Serpent tentateur, celui du doute blasphématoire, qui contraint à la recherche laborieuse du vrai. Ils mangent de tous les fruits permis de leur jardin de délices et s'entretiennent dans une pieuse orthodoxie occultiste. Nous ne les blâmons pas ; leur tradition en vaut une autre ; ils ont leur rôle et leur clientèle. Ils sont en droit de se considérer comme des initiés, puisqu'ils sont plus instruits que le premier venu ; mais ils n'ont pas poussé leur initiation au delà des préliminaires du programme. Les uns s'assimilent des notions dites initiatiques et se hâtent d'en faire étalage ; d'autres sont moins loquaces et acquièrent des talents qui stupéfient le public. De part et d'autre, il y a colportage plus ou moins profanatoire de secrets occultistes, profanation qui n'expose plus le profanateur aux représailles de jadis. Il s'expose tout au plus à se détraquer mentalement et physiologiquement ; les autres s'intoxiquent avec n'importe quoi.

      Conservons donc toutes nos sympathies à l'occultisme qui peut conduire à l'Initiation ceux de ses adeptes dont la mentalité se dégage d'un excès de crédulité occultiste. Il est bon de faire crédit à ceux qui enseignent ; mais un élève diligent contrôle l'enseignement reçu et tue même son initiateur pour passer maître lui-même. Nos occultistes ne vont pas si loin. Ils ne veulent pas être accusés de meurtre et ont horreur de certaine Chambre du Milieu où toute illusion s'évanouit. Reconnaître qu'ils ne savent rien, eux, les privilégiés de l'intelligence ! Non, ils préfèrent croire qu'ils savent et, comme leur conviction est sincère, nous devons la respecter.

Diogène Gondeau




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