CHAPITRE I
DIFFÉRENCES DU MERCURE VULGAIRE
ET DU MERCURE PHYSIQUE
Nous disons : le mercure vulgaire ne
peut pas être le
Mercure des Philosophes, par quelque artifice qu'on
l'ait préparé ; car le mercure vulgaire ne peut tenir au
feu qu'à
l'aide d'un
Mercure étranger corporel qui soit chaud, sec et plus
digéré que lui. C'est pourquoi je dis que notre
Mercure physique est
d'une nature plus chaude et plus fixée que le mercure vulgaire. Notre
Mercure corporel se convertit en mercure coulant, ne mouillant pas les
doigts ; quand il est joint au mercure vulgaire, ils s'unissent et se
joignent si bien à l'aide d'un lien d'
amour, qu'il est impossible de
les séparer l'un l'autre, de même de l'
eau mêlée à de l'
eau. Telle est
la loi de la nature. Notre
Mercure pénètre le mercure vulgaire et se
mêle à lui en desséchant son
humidité flegmatique, lui enlevant sa
froideur, ce qui le rend noir comme du
charbon et le fait enfin tomber
en poussière.
Remarque bien que le mercure vulgaire
ne peut être employé à la place de notre
Mercure physique, lequel
possède la
chaleur naturelle au degré voulu ; c'est même pour cela que
notre
Mercure communique sa propre nature au mercure vulgaire.
Bien plus, notre
Mercure, après sa
transmutation, change les métaux en métal pur, c'est-à-dire en
Soleil
et en
Lune, ainsi que nous l'avons démontré dans la seconde partie de
notre Pratique. Mais il fait quelque chose de plus remarquable encore :
il change le mercure vulgaire en Médecine pouvant transmuer les métaux
imparfaits en parfaits. Il change le mercure vulgaire en vrai
Soleil et
en vraie
Lune, meilleurs que ceux qui sortent de la mine. Notez encore
que notre
Mercure physique peut transmuer cent marcs et plus, à
l'
infini, tout ce que l'on aura, de mercure ordinaire, à moins que
celui-ci ne vienne à manquer.
Je veux aussi que vous sachiez autre
chose : le
Mercure ne se mélange pas facilement et jamais parfaitement
à d'autres
corps, si ceux-ci n'ont été auparavant ramenés à son espèce
naturelle. C'est pourquoi lorsque tu voudras unir le
Mercure au
Soleil
ou à la
Lune du vulgaire, il te faudra d'abord ramener ces métaux à
leur espèce naturelle qui est le mercure ordinaire, cela à l'aide du
lien d'
amour naturel ; alors le mâle s'unit à la
femelle.
Aussi notre
Mercure est-il actif,
chaud et sec, tandis que le mercure vulgaire est froid, humide, passif
comme la
femelle qui est retenue à la maison dans une
chaleur tempérée
jusqu'à l'obumbration. Alors ces deux mercures deviennent noirs comme
charbon ; c'est là le secret de la vraie
dissolution. Puis ils se
joignent entre eux de telle sorte qu'il devient impossible de les
séparer jamais. Ils se présentent alors sous forme d'une poudre très
blanche, et ils engendrent des
enfants mâles et
femelles par le vrai
lien d'
amour. Ces
enfants se multiplieront à l'
infini selon leur espèce
; car d'une once de cette poudre, poudre de projection,
élixir blanc ou
rouge, tu feras des Soleils en nombre
infini et tu transmueras en
Lune
toute espèce de métal sorti d'une mine.
CHAPITRE II
EXTRACTION DU MERCURE DU CORPS
PARFAIT
Prends une once de
chaux de
Lune
coupellée ; calcine-la selon la façon décrite à la fin de notre ouvrage
sur le Magistère. Cette
chaux sera ensuite réduite en poudre fine sur
une plaque de porphyre. Tu
imbiberas cette poudre, deux, trois, quatre
fois par
jour avec de la bonne
huile de tartre préparée de la manière
décrite à la fin de cet ouvrage ; puis tu feras sécher au
soleil. Tu
continueras ainsi jusqu'à ce que ladite
chaux ait absorbé quatre ou
cinq parties d'
huile, la quantité de
chaux étant prise pour unité ; tu
pulvériseras la poudre sur le porphyre comme il a été dit, après
l'avoir desséchée, car alors elle se réduit plus facilement en poudre.
Lorsqu'elle aura été bien porphyrisée, on l'introduira dans un matras à
long col. Vous y ajouterez de notre menstrue puant fait avec deux
parties de
vitriol rouge et une partie de salpêtre ; vous aurez
auparavant distillé ce menstrue par sept fois et vous l'aurez bien
rectifié en le séparant de ses impuretés terreuses, si bien qu'à la fin
ce menstrue soit complètement essentiel.
Alors on lutera parfaitement le
matras, on le mettra au
feu de cendres, avec quelques
charbons, jusqu'à
ce que l'on voie la matière bouillir et se
dissoudre. Enfin, l'on
distillera sur les cendres jusqu'à ce que tout le menstrue ait passé et
l'on attendra que la matière soit froide.
Quand le vase sera complètement
refroidi, on l'ouvrira, et la matière sera placée dans un autre vase
bien propre muni de son
chapiteau parfaitement luté. On placera le tout
sur des cendres dans un
fourneau. Le
lut étant sec, on chauffera
d'abord doucement jusqu'à ce que toute l'
eau de la matière sur laquelle
on opère ait passé dans le récipient. Puis on augmente le
feu pour
dessécher complètement la matière et
exalter les
esprits puants, qui
passeront dans le
chapiteau et de là dans le récipient. Lorsque vous
verrez l'opération arrivée à ce point, vous laisserez refroidir le
vaisseau en diminuant peu à peu le
feu. Le vase étant froid, vous en
retirerez la matière que vous réduirez en poudre subtile sur le
porphyre. Vous mettrez la poudre impalpable ainsi obtenue dans un vase
de terre bien cuit et bien vitrifié. Puis vous verserez par-dessus de
l'
eau ordinaire bouillante, en remuant avec un bâton propre, jusqu'à ce
que le mélange soit épais comme de la moutarde. Remuez bien avec la
baguette jusqu'à ce que vous voyiez apparaître quelques globules de
mercure dans la matière ; il y en aura bientôt une assez grande
quantité selon ce que vous aurez employé de
corps parfait, c'est-à-dire
de
Lune. Et jusqu'à ce que vous en ayez une grande quantité, versez de
temps en temps de l'
eau bouillante et remuez jusqu'à ce que toute la
matière se réduise en un
corps semblable au mercure vulgaire. On
enlèvera les impuretés terreuses avec de l'
eau froide, on sèchera sur
un linge, on passera à travers une peau de chamois. Et alors vous
verrez des choses admirables.
CHAPITRE III
DE LA MULTIPLICATION DE NOTRE
MERCURE
Au nom du Seigneur. Amen.
Prenez trois gros de
Lune pure en
lamelles ténues ; faites-en un amalgame avec quatre gros de mercure
vulgaire bien lavé. Quand l'amalgame sera fait, vous le mettre dans un
petit matras ayant un col d'un pied et demie.
Prenez ensuite notre
Mercure extrait
ci-dessus du
corps lunaire, et mettez-le sur l'amalgame fait avec le
corps parfait et le mercure vulgaire ;
lutez le vase avec le meilleur
lut possible et faites sécher. Ceci fait, agitez fortement le matras
pour bien mélanger l'amalgame et le mercure. Puis placez le vase où se
trouve la matière dans un petit
fourneau sur un
feu de quelques
charbons seulement ; la
chaleur du
feu ne doit pas être supérieure à
celle du
soleil lorsqu'il est dans le signe du
lion. Une
chaleur plus
forte détruirait votre matière ; aussi, continuez ce degré de
feu
jusqu'à ce que la matière devienne noire comme du
charbon et épaisse
comme de la bouillie. Maintenez la même température jusqu'au moment où
la matière prendra une
couleur gris sombre ; lorsque le gris
apparaîtra, on augmentera le
feu d'un degré et il sera deux fois plus
fort ; on le maintiendra ainsi jusqu'à ce que la matière commence à
blanchir et devienne d'une
blancheur éclatante. On augmentera le
feu
d'un degré et l'on maintiendra ce troisième degré jusqu'à ce que la
matière devienne plus blanche que la neige et soit réduite en poudre
plus blanche et plus pure que la
cendre. Vous aurez alors la
Chaux vive
des Philosophes et sa minière sulfureuse que les Philosophes ont si
bien cachées.
CHAPITRE IV
PROPRIÉTÉ DE LA CHAUX DES
PHILOSOPHES
Cette
Chaux convertit une quantité
infinie de mercure vulgaire en une poudre très blanche qui peut être
réduite en
argent véritable quand on l'unit à quelque autre
corps comme
la
Lune.
CHAPITRE V
MULTIPLICATION DE LA CHAUX DES
PHILOSOPHES
Prends le vaisseau avec la matière,
ajoutes-y deux onces de mercure vulgaire bien lavé et sec ;
lute avec
soin, et remets le vaisseau où il était d'abord. Règle et gouverne le
feu selon les degrés un, deux et trois comme ci-dessus, jusqu'à ce que
le tout soit réduit en une poudre blanche ; tu pourras ainsi augmenter
ta
Chaux à l'
infini.
CHAPITRE VI
RÉDUCTION DE LA CHAUX VIVE EN
VRAIE LUNE
Ayant donc préparé une grande quantité
de notre
Chaux vive ou minière, prends un creuset neuf sans son
couvercle ; mets-y une once de
Lune pure et lorsqu'elle sera fondue,
ajoutes-y quatre onces de ta poudre agglomérée en pilules. Ces petites
boules pèsent chacune le quart d'une once. On les jette une à une sur
la
Lune en
fusion, tout en continuant un
feu violent jusqu'à ce que
toutes les pilules soient fondues ; on augmente encore le
feu pour que
tout se mélange parfaitement ; enfin, on coulera dans une
lingotière.
Tu auras ainsi cinq onces d'
argent
fin, plus pur que le naturel ; tu pourras multiplier ta minière
physique à ton gré.
CHAPITRE VII
DE NOTRE GRAND ŒUVRE AU BLANC
ET AU ROUGE
Réduisez en
Mercure, comme il a été
dit plus haut, votre
Chaux vive tirée de la
Lune. C'est là notre
Mercure secret. Prenez donc quatre onces de notre de
Chaux, extrayez le
Mercure de la
Lune comme vous l'avez fait plus haut. Vous recueillerez
au moins trois onces de
Mercure, que vous mettrez dans un petit matras
à long col comme il a été dit. Puis faites un amalgame d'une once de
vrai
Soleil avec trois onces de mercure vulgaire et mettez-le sur le
Mercure de la
Lune. Agitez fortement pour bien mélanger.
Lutez le
vaisseau avec soin et mettez-le dans le
fourneau, en réglant le
feu au
premier, second et troisième degré.
Au premier degré, la matière deviendra
noire comme du
charbon ; on dit alors qu'il y a éclipse de
Soleil et de
Lune. C'est la véritable
conjonction qui produit un
enfant, le Soufre,
plein d'un sang tempéré.
Après cette première opération, on
continue par le
feu du second degré jusqu'à ce que la matière soit
grise. Puis on passe au troisième degré jusqu'au moment où la matière
apparaît parfaitement blanche. On augmente alors le
feu jusqu'à ce que
la matière devienne rouge comme du
cinabre et soit réduite en cendres
rouges. Tu pourras réduire cette
Chaux en
Soleil très pur, en faisant
les mêmes opérations que pour la
Lune.
CHAPITRE VIII
DE LA MANIÈRE DE CHANGER LA
SUSDITE PIERRE EN UNE MÉDECINE QUI TRANSMUE
TOUTE ESPÈCE DE MÉTAL EN VRAI SOLEIL ET VRAIE LUNE ET SURTOUT LE
MERCURE VULGAIRE
EN MÉTAL PLUS PUR QUE CELUI QUI SORT DES MINES
Après sa première résolution, notre
Pierre multiplie cent parties de matière préparée, et après la seconde,
mille. L'on multiplie en
dissolvant, coagulant, sublimant, fixant notre
matière, qui peut ainsi s'accroître indéfiniment en quantité et en
qualité.
Prenez donc de notre minière blanche,
dissolvez-la dans notre menstrue puant, qui est appelé vinaigre blanc
dans notre Testament, au chapitre où nous disons : «
Prends
du bon vin bien sec, mets-y la Lune, c'est-à-dire l'Eau verte et C,
c'est-à-dire du Salpêtre... » Mais ne nous égarons pas ;
prenez quatre onces de notre
Chaux vive et faites
dissoudre dans notre
menstrue ; vous la verrez se résoudre en
eau verte. D'autre part, dans
treize onces de ce même menstrue puant, vous dissoudrez quatre onces de
mercure vulgaire bien lavé, et dès que la
dissolution sera achevée,
vous mélangerez les deux solutions ; mettez-les en un vase bien scellé,
faites digérer au
fumier de cheval pendant trente
jours, puis distillez
au
bain-marie jusqu'à ce que qu'il ne passe plus rien. Redistillez au
feu de
charbon afin d'extraire l'
huile, et alors la matière qui restera
sera noire. Prenez-celle-ci et distillez pendant deux heures sur les
cendres dans un petit
fourneau. Le vase étant froid, ouvrez-le et
versez-y l'
eau qui a été distillée ci-dessus au
bain-marie. Lavez bien
la matière avec cette
eau. Puis distillez le menstrue au
bain-marie ;
recueillez toute l'
eau qui passera, joignez-la à l'
huile et distillez
sur les cendres, comme il a été dit. Recommencez cette opération
jusqu'au moment où la matière restera au fond du vaisseau, noire comme
du
charbon.
Fils de la science, tu auras alors la
Tête de
corbeau que les Philosophes ont tant cherchée, sans laquelle le
Magistère ne peut exister. C'est pourquoi, ô mon fils, remémore-toi la
divine
Cène de Notre-Seigneur Jésus-Christ qui est mort, a été
enseveli, et le troisième
jour est revenu à la lumière sur la terre
éternelle. Sache bien, ô mon fils, que nul être ne peut vivre s'il
n'est mort tout d'abord. Prends donc ton
corps noir, calcine-le dans le
même vaisseau pendant trois
jours, puis laisse refroidir.
Ouvre-le et tu trouveras une terre
spongieuse et morte, que tu conserveras jusqu'à ce qu'il soit
nécessaire d'unir le
corps à l'
âme.
Tu prendras l'
eau qui a été distillée
au
bain-marie, tu la distilleras plusieurs fois de suite, jusqu'à ce
qu'elle soit bien purifiée et réduite en une matière cristalline.
Imbibe donc ton
corps, qui est la
Terre noire, avec sa propre
eau, l'arrosant peu à peu et chauffant le
tout, jusqu'à ce que le
corps devienne blanc et resplendissant. L'
eau
qui vivifie et qui clarifie a pénétré le
corps. Le vaisseau ayant été
luté, tu chaufferas violemment pendant douze heures, comme si tu
voulais sublimer le mercure vulgaire. Le vase s'étant refroidi, tu
l'ouvriras et tu y trouveras ta matière sublimée, blanche : c'est notre
Terre Sigillée, c'est notre
corps sublimé, élevé à une haute dignité,
c'est notre Soufre, notre
Mercure, notre
Arsenic, avec lequel tu
réchaufferas notre Or ; c'est notre
ferment, notre
Chaux vive, et il
engendre en soi le Fils du
feu qui est l'
Amour des Philosophes.
CHAPITRE IX
MULTIPLICATION DU SOUFRE SUSDIT
Mets cette matière dans un fort matras
et verse par-dessus un amalgame fait avec la
Chaux vive de la première
opération, celle qui nous réduisions en
argent. Cet amalgame se fait
avec trois parties de mercure vulgaire et une partie de notre
Chaux ;
vous mélangerez et vous chaufferez sur les cendres. Vous verrez la
matière s'agiter ; augmentez alors le
feu, et en quatre heures, la
matière deviendra
sulfurée et très blanche. Lorsqu'elle aura été fixée,
elle coagulera et
fixera le
Mercure ; une once de matière changera cent
onces de
Mercure en vraie Médecine ; elle opérera ensuite sur mille
onces, et ainsi de suite à l'
infini.
CHAPITRE X
FIXATION DU SOUFRE MULTIPLIÉ
L'on prendra le soufre multiplié, on
le placera dans un matras et l'on versera par-dessus l'
huile qui avait
été mise de côté lors de la séparation des
éléments.
On versera de l'
huile jusqu'à ce que
le Soufre soit mou. Puis on mettra à
fondre sur les cendres, en
chauffant au second et troisième degré, jusqu'à la
blancheur
inclusivement. Alors, on ouvrira le vaisseau et l'on trouvera une
plaque cristalline, blanche. Pour l'essayer, mets-en un fragment sur
une plaque chaude, et s'il
coule sans produire de fumée, il est bon.
Alors, projettes-en une partie sur mille de mercure et celui-ci sera
complètement transmué en
Argent. Mais si la médecine avait été
infusible et n'avait pas coulé, mets-la dans un creuset et verse dessus
de l'
huile, goutte à goutte, jusqu'à ce que la médecine
coule comme de
la
cire, et alors elle sera parfaite et transmuera mille parties de
mercure et plus à l'
infini.
CHAPITRE XI
RÉDUCTION DE LA MÉDECINE
BLANCHE EN ÉLIXIR ROUGE
Au nom du Seigneur, prends quatre
onces de la lame susdite et dissous-la dans l'
Eau de la Pierre, que tu
as conservée. Lorsque la
dissolution sera achevée, mets à
fermenter au
bain-marie pendant neuf
jours. Alors, prends deux parties en poids de
notre
Chaux rouge et ajoute-les dans le vaisseau ; tu mettras à
fermenter de nouveau neuf
jours. Ensuite, tu distilleras au
bain-marie
dans un
alambic, puis sur les cendres, en réglant le
feu au premier
degré jusqu'au moment où la matière deviendra noire. C'est là notre
seconde
dissolution et notre seconde éclipse du
Soleil avec la
Lune ;
c'est là le signe de la vraie
dissolution et de la
conjonction du mâle
et de la
femelle.
Augmente le
feu jusqu'au second degré,
de façon que la matière devienne jaune. Ensuite, on élèvera le
feu au
quatrième degré jusqu'à ce que la matière fonde comme de la
cire et
qu'elle soit d'une
couleur hyacinthe. C'est alors une matière noble et
une médecine royale qui guérit promptement toutes les maladies ; elle
transmue toute espèce de métal en or pur meilleur que l'or naturel.
Maintenant, rendons grâces au Sauveur
glorieux qui, dans la gloire des cieux, règne un et trois dans
l'éternité.
CHAPITRE XII
RÉSUMÉ DU MAGISTÈRE
Nous avons démontré que tout ce que
renferme ce traité est véritable, car nous avons vu de nos propres
yeux, nous avons opéré nous-même, nous avons touché de nos propres
mains. Maintenant, nous allons, sans
allégories et brièvement, résumer
notre Œuvre.
Nous prenons donc la Pierre que nous
avons dite, nous la sublimons avec l'aide de la nature et de l'Art,
nous la réduisons en
Mercure. A ce
Mercure on ajoute le
Corps blanc qui
est d'une nature semblable, et on cuit jusqu'à ce qu'on ait préparé la
vraie minière.
Cette minière se multipliera à votre
gré. La matière sera de nouveau réduite en
Mercure, que vous dissoudrez
dans notre Menstrue jusqu'à ce que la Pierre devienne volatile et
séparée de tous ses
éléments. Enfin, on purifiera parfaitement le
corps
et l'
âme. Une
chaleur naturelle et tempérée permettra ensuite de
réussir la
conjonction du
corps et de l'
âme. La pierre deviendra
minière ; on continuera le
feu jusqu'à ce que la matière devienne
blanche ; nous l'appelons alors Soufre et
Mercure des Philosophes ;
c'est alors que par la violence du
feu, le fixe devient volatil, en
tant que le volatil se sera débarrassé de ses principes grossiers et se
sera sublimé plus blanc que neige. On jettera ce qui reste au fond du
vaisseau, car ce n'est bon à rien. Prenez alors notre Soufre, qui est
l'
huile dont on a déjà parlé, et vous le multiplierez dans l'
alambic
jusqu'à ce qu'il soit réduit en une poudre plus blanche que neige. On
fixera les poudres multipliées par la nature et par l'Art, avec de
l'
Eau, jusqu'à ce qu'à l'essai par le
feu, elles coulent sans fumée
comme de la
cire.
Il faut alors
ajouter l'
eau de la
première solution ; tout s'étant dissous, on y mettra quelque chose de
jaune qui est l'or, on unira et on distillera tout l'
esprit. Enfin, on
chauffera au premier, second, troisième et quatrième degrés jusqu'à ce
que la
chaleur fasse apparaître la vraie
couleur hyacinthe, et que la
matière fixe soit
fusible. Tu projetteras cette matière sur mille
parties de mercure vulgaire et il sera transformé en or fin.
CHAPITRE XIII
CALCINATION DE LA LUNE POUR
L'ŒUVRE
Prenez une once de
Lune fine coupellée
et trois onces de mercure. Amalgamez, en chauffant d'abord l'
argent en
lamelles dans un creuset et en y ajoutant ensuite le mercure ; remuez
avec une baguette tout en continuant à bien chauffer. On mettra ensuite
cet amalgame dans du vinaigre avec du sel ; on broiera le tout avec un
pilon dans un mortier de
bois, tout en lavant et enlevant les
impuretés. On cessera quand l'amalgame sera parfait. Puis on lavera
avec de l'
eau ordinaire chaude et limpide, puis on passera à travers un
linge bien propre.
Ce qui restera sur le linge étant la
partie la plus essentielle du
corps, on le mélangera avec trois parties
de sel, en broyant bien et en lavant. On calcinera enfin pendant douze
heures. On recommencera à
broyer avec du sel, et cela par trois fois,
en renouvelant chaque fois le sel. Alors on pulvérisera la matière de
manière à obtenir une poudre impalpable ; on lavera à l'
eau chaude
jusqu'à ce que toute saveur salée ait disparu. Enfin, on passera à
travers un filtre de coton, on dessèchera, et l'on aura la
Chaux
blanche. On la mettra en réserve, pour s'en servir lorsqu'on en aura
besoin, de peur que l'
humidité ne l'altère.
CHAPITRE XIV
PROCÉDÉ POUR PRÉPARER L'HUILE
DE TARTRE
Prenez du bon tartre, dont la cassure
soit brillante, calcinez-le au
fourneau à réverbère pendant dix heures
; ensuite, vous le mettrez sur une plaque de marbre après l'avoir
pulvérisé et vous le laisserez dans un lieu humide, il se résoudra en
un liquide huileux. Lorsqu'il sera entièrement liquéfié, on le passera
à travers un filtre de coton. Vous le conserverez soigneusement, il
vous servira à
imbiber votre
chaux.
CHAPITRE XV
MENSTRUE PUANT POUR RÉDUIRE
NOTRE CHAUX VIVE EN MERCURE,
APRÈS L'AVOIR DISSOUTE LORSQU'ELLE AURA ÉTÉ DÉJÀ IMBIBÉE D'HUILE DE
TARTRE
Prenez deux livres de
vitriol, une
livre de salpêtre et trois onces de
cinabre. On rougit le
vitriol, on
le pulvérise, puis on ajoute le salpêtre et le
cinabre, on
broie toutes
ces matières ensemble, et on met dans un appareil distillatoire bien
luté.
On distille d'abord à
feu lent ; c'est
de toute nécessité, comme le savent ceux qui ont fait cette opération.
Cette
eau distillera en abandonnant ses impuretés qui resteront au fond
de la
cucurbite, et vous aurez ainsi cet excellent menstrue.
CHAPITRE XVI
AUTRE MENSTRUE POUR SERVIR DE
DISSOLVANT À LA PIERRE
Prenez trois livres de
vitriol romain
rouge, une livre de salpêtre, trois onces de
cinabre, broyez toutes ces
matières ensemble sur le marbre. Puis mettez-les dans un grand et
solide matras ; ajoutez-y de l'
Eau-de-vie et mettez-le pendant quinze
jours dans du
fumier de cheval. Ensuite, on distillera doucement pour
que toute l'
eau passe dans le récipient. Puis on augmentera le
feu
jusqu'à ce que le
chapiteau soit porté au blanc ; on laissera ensuite
refroidir. On enlèvera le récipient que l'on
fermera parfaitement avec
de la
cire et on le conservera. Remarquez que ce menstrue doit être
rectifié sept fois, en rejetant chaque fois le résidu. Après cela
seulement, il sera bon pour l'œuvre.