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Lettres des Mahatmas M. et K. H. à A. P. Sinnett

A. T. Barker
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SECTION I – SÉRIE DU MONDE OCCULTE (1880-1881)

Lettre N° IV – Apparemment reçue le 05 novembre

      Madame et le Colonel O. arrivèrent chez nous, à Allahabad, le 1er décembre 1880. Le Col. O. alla à Bénarès le 03, Madame le rejoignit le 11. Tous deux revinrent à Allahabad le 20 et restèrent jusqu'au 28.

Amrita SARAS (7), 29 octobre


Mon cher Frère,                                    

Je ne puis assurément rien objecter contre la façon que vous avez aimablement adoptée de m'appeler par mon nom, puisque cela est, comme vous dites, la conséquence d'égards personnels supérieurs même à ce que j'ai pu mériter de vous jusqu'à présent. Les conventions du monde fastidieux, à l'extérieur de nos « Ashrams » retirés, ne nous troublent jamais beaucoup ; moins que jamais en ce moment où nous cherchons non des maîtres en cérémonial, mais des hommes et du dévouement, et non de simples rites. De plus en plus, le formalisme mort gagne du terrain et je suis vraiment heureux de trouver un allié si inattendu dans un milieu où, jusqu'ici, nous n'en avons guère rencontré, je veux dire parmi les classes hautement instruites de la société anglaise. Nous traversons en ce moment ce que l'on pourrait appeler une crise, et il nous faut y faire face. Je pourrais même dire deux crises – l'une est celle de la Société et l'autre concerne le Tibet. Car je puis vous dire en confidence que la Russie masse graduellement ses forces en vue d'une future invasion de ce pays, sous le prétexte d'une guerre chinoise. Si elle ne réussit pas, ce sera grâce à nous ; et en cela au moins, nous mériterons votre gratitude. Vous voyez donc que nous avons à penser à des sujets bien plus graves que de petites sociétés. Cependant la Société Théosophique ne doit pas être négligée. L'affaire a subi une impulsion qui, mal dirigée, peut aboutir aux plus fâcheux résultats. Rappelez-vous les avalanches de vos Alpes admirées auxquelles vous avez souvent pensé, et souvenez-vous que d'abord leur masse est petite et leur force médiocre. Comparaison usée, direz-vous. Mais je ne vois pas de meilleure image, quand je regarde l'accumulation graduelle d'événements de mince importance qui en grandissant pourront menacer la destinée de la Société Théosophique. Cette image s'est imposée à moi, l'autre jour, alors que je descendais les défilés de Kouenlun – vous les appelez Karakorum – et que je vis tomber une avalanche. J'étais allé personnellement soumettre à notre Chef l'offre importante de M. Hume et je me dirigeais vers Ladhak pour rentrer chez moi. Quelles autres spéculations auraient suivi, je ne puis le dire, car, juste comme je profitais du silence imposant qui suit ordinairement ces cataclysmes pour prendre une plus nette vision de la situation présente et des dispositions des « mystiques » de Simla, je fus rudement rappelé à moi. Une voix familière, aussi perçante que celle attribuée au paon de Saraswati – qui, si nous en croyons la tradition, mit en fuite le Roi des Nagas – s'écria le long des courants : « Olcott a de nouveau fait surgir le diable lui-même... Les Anglais deviennent fous... Koot Hoomi, venez au plus vite et aidez-moi ! » – et dans son excitation, elle oubliait qu'elle parlait anglais. Je dois dire que les télégrammes de la « Vieille Dame » frappent comme les pierres d'une catapulte !


      Que pouvais-je faire sinon venir ? Argumenter à travers l'espace avec une personne en proie au morne désespoir et dans un état moral chaotique était inutile. Aussi décidai-je de sortir d'une réclusion de nombreuses années pour passer quelque temps avec elle et la réconforter de mon mieux. Mais notre amie n'est pas femme à faire refléter dans son mental la philosophique résignation de Marc-Aurèle. Le destin n'a jamais écrit qu'elle dirait : « C'est une chose royale pour celui qui fait le bien d'entendre dire du mal de lui »... J'étais venu pour quelques jours, mais je découvre maintenant que je ne puis plus endurer le magnétisme suffocant même de mes propres compatriotes. J'ai vu quelques-uns de nos fiers et vieux Sikhs, ivres et titubant sur les dalles de marbre de leur Temple sacré (8). J'ai entendu un Vakil, parlant anglais, dénoncer la Yog Vidyga et la Théosophie comme des illusions et des mensonges, déclarant que la science anglaise les avait émancipés de ces « superstitions dégradantes » et disant que c'était insulter l'Inde que de soutenir que les malpropres Yogis et Sannyasis connaissent quoi que ce soit des mystères de la nature ou qu'aucun homme vivant puisse ou ait jamais pu produire un phénomène quelconque. Je retourne demain chez moi.

      La remise de cette lettre risque d'être différée de quelques jours pour des causes qu'il ne serait pas intéressant pour vous que je spécifie. En attendant, néanmoins, je vous ai télégraphié mes remerciements pour votre obligeance à accéder à mes désirs en ce qui concerne les sujets auxquels vous faites allusion dans votre lettre du 24 courant. Je vois avec plaisir que vous n'avez pas manqué de me présenter au monde comme un « allié » possible. Cela porte, je crois, notre nombre à dix. Mais je dois dire que votre promesse fut bien et loyalement tenue. Reçue à Amritsar le 27 courant à 2 heures de l'après-midi, votre lettre m'est parvenue à environ trente milles au-delà de Rawalpindi, cinq minutes plus tard, et je vous fis télégraphier un avis de réception de Jhelum, à 4 heures, le même après-midi. Nos modes de distribution de courrier accélérée et de rapides communications ne sont pas à dédaigner, comme vous voyez, par le monde occidental ou même par les sceptiques Vakils aryens qui parlent anglais.

      Je ne pourrais demander à un allié une disposition d'esprit plus judicieuse que celle où vous commencez à vous trouver. Mon Frère, vous avez déjà manifestement changé d'attitude à notre égard : qu'est-ce qui pourrait empêcher une parfaite compréhension mutuelle un jour ?

      La proposition de M. Hume a été dûment et soigneusement considérée. Il vous avisera, sans doute, des résultats que je lui ai indiqués dans ma lettre. Qu'il essaie aussi loyalement que vous de mettre à l'épreuve nos « méthodes d'action » – c'est une autre question. Notre Maha (le « Chef ») m'a autorisé à correspondre avec vous deux et même – au cas où une Branche Anglo-Indienne serait formée – à me mettre quelque jour en contact personnel avec elle. Maintenant, cela dépend entièrement de vous. Je ne puis vous en dire davantage. Vous avez tout à fait raison : la position de nos amis dans le monde anglo-indien a été matériellement améliorée par la visite de Simla ; et il est vrai aussi, quoique votre modestie s'abstienne de le dire, que c'est à vous principalement que nous le devons. Mais, en mettant tout à fait à part les fâcheux incidents des journaux de Bombay, il n'est pas possible, dans le cas le plus favorable, que vos compatriotes témoignent aux nôtres beaucoup plus qu'une bienveillante neutralité. Il y a un si faible point de contact entre les deux civilisations qu'ils représentent respectivement, qu'on peut presque dire qu'elles ne se touchent pas du tout. Et elles ne se toucheraient pas du tout n'eussent été les rares personnes (excentriques, dirai-je ?) qui, comme vous, font des rêves meilleurs et plus hardis que les autres et, forçant à réfléchir, rapprochent les deux civilisations par leur audace admirable. Vous est-il apparu qu'il se peut que les deux publications de Bombay, si elles n'ont pas été suggérées, n'ont du moins pas été empêchées par ceux qui auraient pu le faire, parce qu'ils voyaient la nécessité d'une telle grande agitation en vue d'obtenir un double résultat : 1° produire une diversion nécessaire après la bombe de la Broche, et 2° mettre peut-être à l'épreuve la force de votre intérêt personnel pour l'occultisme et la Théosophie ? Je ne dis pas qu'il en fut réellement ainsi ; je demande seulement si une telle éventualité s'est jamais présentée à votre esprit. Je vous ai déjà fait savoir que si les détails fournis dans la lettre volée avaient été indiqués à l'avance par le Pioneer – endroit beaucoup mieux approprié où ils auraient été présentés plus avantageusement – personne n'aurait eu le moindre intérêt à voler ce document pour le Times of India, et, par conséquent, aucun nom n'aurait paru.

      Le Colonel Olcott n'est sans doute « pas en accord (9) avec les sentiments des Anglais » des deux classes, mais cependant beaucoup plus en accord avec nous que ces deux classes. Nous pouvons avoir confiance en lui en toutes circonstances et son fidèle service nous est assuré quoi qu'il advienne. Mon cher Frère, ma voix est l'écho de la justice impartiale. Où pouvons-nous trouver un dévouement égal ? C'est quelqu'un qui jamais ne questionne, mais obéit ; qui peut faire d'innombrables erreurs par zèle excessif, mais jamais n'hésite à réparer sa faute même au prix de la plus grande humiliation ; qui estime qu'il doit faire joyeusement le sacrifice de son confort et même de sa vie si cela est nécessaire ; qui mange n'importe quoi, ou même rien du tout ; dort dans n'importe quel lit, travaille n'importe où, fraternise avec n'importe quel hors-caste, endure n'importe quelle privation pour la cause... J'admets que ses rapports avec une Branche anglo-indienne seraient « un mal » – il n'aura donc pas plus affaire à elle qu'à la Britannique (Branche de Londres). Ses rapports avec elle seront purement nominaux si vous établissez vos Règles plus soigneusement que les leurs et si vous donnez à votre organisation un système de Gouvernement autonome tel qu'il ne nécessitera que rarement, sinon jamais, une intervention extérieure. Mais former une Branche anglo-indienne, indépendante, ayant totalement ou partiellement les mêmes buts que la Société-Mère, et avec les mêmes directeurs dans la coulisse, serait non seulement porter un coup mortel à la Société Théosophique, mais aussi nous imposer un labeur et un souci doubles, sans qu'aucun de nous puisse apercevoir en compensation le plus petit avantage. La Société-Mère n'est jamais intervenue le moins du monde dans les affaires de la British Theosophical Society, ni en vérité dans celle d'aucune autre Branche, soit religieuse, soit philosophique. Ayant formé, ou fait former une Branche nouvelle, la Société-Mère lui délivre sa charte (ce qu'elle ne peut faire maintenant sans notre sanction et nos signatures) et ensuite se retire habituellement dans la coulisse, comme vous diriez. Ses autres rapports avec les Branches qui lui sont assujetties sont limités à la réception trimestrielle des rapports sur leurs activités et des listes de nouveaux membres, la ratification des expulsions – seulement lorsque la Société est spécialement appelée à intervenir comme arbitre en raison de la liaison directe des Fondateurs avec nous – etc., etc... Jamais elle ne se mêle autrement de leurs affaires, excepté quand on y a recours comme à une sorte de cour d'appel. Et, puisque cette dernière intervention dépend de vous, qu'est-ce qui empêche votre Société de demeurer virtuellement indépendante ? Nous sommes même plus généreux que vous, Britanniques, ne l'êtes pour nous. Nous ne vous forcerons pas à avoir, ni même ne vous demanderons pas d'admettre un « Résident » Hindou dans votre Société pour veiller aux intérêts du Pouvoir Paternel Suprême, après vous avoir déclarés indépendants, mais implicitement nous nous fierons à votre loyauté et à votre parole d'honneur. Mais si vous détestez l'idée d'une supervision exécutive purement nominale par le Colonel Olcott – un Américain de votre propre race –, vous vous rebelleriez sûrement contre l'autorité d'un Hindou, dont les habitudes et les méthodes sont celles de son peuple et dont, en dépit de votre bienveillance naturelle, vous n'avez même pas encore appris à tolérer la race, encore moins à l'aimer ou à la respecter. Réfléchissez bien avant de nous demander notre direction. Nos adeptes les meilleurs, les plus instruits et les plus saints appartiennent aux races des « Tibétains graisseux » et des Penjabi Singhs – vous savez que le lion est proverbialement une bête sale et agressive, en dépit de sa force et de son courage. Est-il certain que vos bons compatriotes pardonneraient plus aisément nos solécismes hindous concernant les manières, que ceux de leurs propres parents d'Amérique ? Si mes observations ne m'ont pas trompé, je dirais que c'est douteux. Les préjugés nationaux sont susceptibles d'obscurcir les lunettes de quiconque. Vous dites : « Combien nous serions heureux si vous étiez vous-même notre guide », voulant dire par là votre indigne correspondant. Mon bon frère, êtes-vous certain que l'impression agréable que vous pouvez avoir maintenant d'après notre correspondance ne serait pas instantanément détruite si vous me voyiez ? Et lequel de nos saints Shaberons a eu en partage comme moi le bénéfice d'un peu d'éducation universitaire et d'une légère teinture des manières européennes ? Un exemple : je désirais que Mme B. choisît parmi les deux ou trois Aryens du Pendjab qui étudient la Yog Vidya et sont des mystiques naturels, quelqu'un que je pusse désigner (sans trop me révéler à lui) comme intermédiaire entre vous et nous, étant désireux de vous le dépêcher, avec une lettre d'introduction, pour qu'il vous parlât du Yoga et de ses effets pratiques. Ce jeune homme, qui est aussi pur que la pureté même, dont les pensées et les aspirations sont de l'espèce ennoblissante la plus spirituelle et qui, uniquement par ses propres efforts, peut pénétrer dans les régions des mondes sans forme – ce jeune homme n'est pas adapté à... un salon. Lui ayant expliqué que le plus grand bien pourrait en résulter pour son pays, s'il vous aidait à organiser une Branche de mystiques anglais, en leur prouvant pratiquement à quels merveilleux résultats conduit l'étude du Yog, Mme B. lui demanda, en termes prudents et très délicats, de changer son vêtement et son turban avant de partir pour Allahabad – car bien qu'elle ne lui donnât pas cette raison, ils étaient très sales et sans soin. Vous informerez M. Sinnett, dit-elle, que vous lui apportez une lettre de notre Frère K., avec lequel il correspond. Mais s'il vous demande quoi que ce soit sur lui ou les autres Frères, répondez-lui simplement et sincèrement qu'il ne vous est pas permis de vous étendre à ce sujet. Parlez du Yog et prouvez-lui quels pouvoirs vous avez atteints. Ce jeune homme, qui avait consenti, écrivit peu après la curieuse lettre suivante : « Madame » , déclarait-il, « vous qui prêchez les plus hauts préceptes de moralité, de véracité, etc., vous voudriez me faire jouer le rôle d'un imposteur. Vous me demandez de changer mes vêtements au risque de donner une fausse idée de ma personne et de mystifier un monsieur auquel vous m'envoyez. Et s'il me demandait si je connais personnellement Koot Hoomi, aurais-je à garder le silence, lui permettant ainsi de penser que je le connais ? Ce serait un mensonge tacite ; et m'en étant rendu coupable, je serais rejeté dans le terrible tourbillon de la transmigration ! » Voilà un exemple des difficultés parmi lesquelles nous avons à travailler. Ne pouvant vous envoyer un néophyte avant que vous ne soyez lié à nous par serment, il nous faut, soit ne vous envoyer personne, soit vous dépêcher quelqu'un qui vous choquerait s'il ne vous inspirait pas du dégoût ! La lettre lui aurait été donnée de ma propre main ; il devait seulement promettre de garder le silence sur des questions au sujet desquelles il ne connaît rien et dont il n'eût donné qu'une fausse idée et se donner une apparence plus propre. Encore les préjugés et la lettre morte. Pendant plus d'un millier d'années – dit Michelet – les Saints Chrétiens ne se lavèrent jamais ! Pendant combien de temps nos Saints redouteront-ils de changer de vêtements par crainte d'être pris pour des Marmaliks (10) et des néophytes de sectes rivales et plus propres ?

      Mais de telles difficultés qui sont les nôtres ne doivent pas vous empêcher de commencer votre travail. Le Colonel O. et Mme B. paraissant consentir à devenir personnellement responsables de vous et de M. Hume, si vous êtes prêt, vous-même, à répondre de la fidélité de l'homme que votre groupe choisira pour chef de la Société Théosophique anglo-indienne, nous voulons bien que l'essai soit fait. Vous avez le champ libre ; et nul ne sera autorisé à intervenir dans vos affaires si ce n'est moi, au nom de nos Chefs, dès lors que vous me faites l'honneur de me préférer aux autres. Cependant, avant de construire une maison, on fait le plan. Supposons que vous traciez une esquisse de la constitution et de la direction de la Société anglo-indienne que vous avez dans l'esprit et que vous la soumettiez à notre examen ? Si nos Chefs l'agréent – et ce n'est sûrement pas eux qui feront obstacle à l'universelle marche en avant ou qui retarderont ce mouvement vers un but plus élevé – alors vous aurez aussitôt votre Charte. Mais ils doivent d'abord voir le plan ; et je dois vous demander de vous rappeler que la nouvelle Société ne sera pas autorisée à se séparer de la Société-Mère, quoique vous ayez la liberté de diriger vos affaires à votre propre façon sans crainte de la plus petite intervention de son Président, tant que vous ne violerez pas les Règles générales. Et, sur ce point, je vous renvoie à la règle 9. C'est la première suggestion pratique venant d'un « habitant des cavernes » Cis et Trans-Himalayen, que vous avez honoré de votre confiance.

      Et maintenant, arrivons-en à ce qui vous concerne personnellement. Loin de moi la pensée de décourager quelqu'un aussi plein de bonne volonté que vous en élevant devant votre progrès d'infranchissables barrières. Nous ne nous lamentons jamais devant l'inévitable, mais essayons de tirer le mieux du pire. Quoique nous ne poussions ni n'attirions jamais dans le mystérieux domaine de la nature occulte ceux qui sont peu disposés à y pénétrer et bien que nous n'hésitions jamais à exprimer librement et sans crainte nos opinions, nous sommes cependant toujours tout aussi prêts à assister ceux qui viennent vers nous ; même jusqu'aux agnostiques qui adoptent cette position négative ; « ne connaître que les phénomènes et refuser de croire à quoi que ce soit d'autre » . Il est vrai que l'homme marié ne peut être un adepte, pourtant sans s'efforcer de devenir un « Raja Yogi » , il peut acquérir certains pouvoirs et faire autant de bien au genre humain, et souvent plus, en demeurant dans les limites de son monde à lui. Par conséquent, nous ne vous demanderons pas de changer précipitamment vos habitudes de vie bien établies, avant que vous ne soyez pleinement convaincu de la nécessité et de l'avantage de ce changement. Vous êtes un homme qu'on doit laisser se diriger lui-même et qui peut être ainsi laissé sans danger. Votre résolution est prise de méditer beaucoup : le temps fera le reste. Il y a plus d'une voie pour acquérir la connaissance occulte : « Nombreux sont les grains d'encens destinés à un seul et même autel : l'un tombe plus tôt dans le feu, l'autre plus tard – la différence de temps n'est rien » , a dit un grand homme quand lui furent refusées l'admission et la suprême initiation aux mystères. Il y a une nuance de récrimination dans votre question au sujet du renouvellement de la vision que vous eûtes dans la nuit qui précéda le jour du pique-nique. Il me semble que si vous aviez une vision chaque nuit, vous cesseriez bientôt d'y attacher du prix. Mais il y a une raison beaucoup plus importante pour que vous n'en soyez pas rassasié – ce serait un gaspillage de notre force. Aussi fréquemment que moi, ou l'un de nous, pourra communiquer avec vous, par rêves, par impressions à l'état de veille, par lettres (à l'intérieur ou à l'extérieur de coussins) ou par visites personnelles en forme astrale – ce sera fait. Mais souvenez-vous que Simla est à 7000 pieds plus haut qu'Allahabad et que les difficultés à surmonter dans cette dernière ville sont énormes. Je m'abstiens de vous encourager à trop espérer, car, comme vous, je déteste promettre ce que, pour des raisons diverses, je ne pourrais peut-être pas accomplir.

      La « Fraternité Universelle » n'est pas une expression creuse. L'Humanité, dans son ensemble, a sur nous des droits suprêmes, comme j'essaie de l'expliquer dans ma lettre à M. Hume, que vous feriez mieux de lui demander de vous prêter. C'est le seul fondement solide de la moralité universelle. Si c'est un rêve, c'en est du moins un noble pour le genre humain, et c'est l'aspiration du véritable adepte.

      Fidèlement vôtre,

KOOT' HOOMI LAL SINGH


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(7)  Habituellement orthographié, en français et en anglais, Amritsar. La forme Amrita Saras est une translittération plus correcte des deux mots sanscrits qui composent le nom de cette ville sainte des Sikh : amrita (immortalité et breuvage d'immortalité) et saras (lac). Amrita Saras signifie donc « Lac d'Immortalité » (N.d.T.)

(8)  Il s'agit du célèbre « Temple d'Or » édifié à Amritsar, au XVIème siècle, sur le « Lac d'Immortalité » et où se rendent les Sikhs, chaque année, en pèlerinage, par centaines de mille (N. d. T.).

(9)  Out of time. Cf. infra p. 23 (N. d. T.)

(10)  Sans doute un synonyme de « Mlechchas » (barbares) (N. d. E.)




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