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Brunehaut

(543, en Espagne - 613, à Renève, près de Dijon)
Reine d'Austrasie
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Brunehaut dans son temps
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      Brunehaut, fille d'Athanagilde, roi des Visigoths d'Espagne, épousa, en 568, Sigebert, roi d'Austrasie, l'un des quatre fils de Clotaire Ier. Cette princesse, séduisante par sa beauté, son esprit et son courage, eut le malheur d'avoir un grand ascendant sur son époux, et d'ignorer que les rois eux-mêmes ne peuvent pas toujours se venger impunément. Sa sœur Galsuinte, femme de Chilpéric, ayant été assassinée par Frédégonde, qui prit sa place sur le trône, Brunehaut conçut pour celle-ci une haine implacable, résolut de la perdre, et ne parvint qu'à attirer sur sa propre famille, et sur elle-même, une suite d'infortunes qui changèrent son caractère, et firent un monstre de cette reine, dont les premières actions ont été louées avec justice par les historiens contemporains. Chilpéric vivait d'une manière scandaleuse ; ce fut dans l'espérance de le rappeler à la dignité si nécessaire aux rois, que Brunehaut obtint pour lui la main de sa sœur Galsuinte ; et Chilpéric prit à cet égard les engagements les plus sacrés, qu'il viola bientôt en faisant assassiner Galsuinte, en refusant de rendre les trésors qu'elle lui avait apportés, et en retenant les places qu'il lui avait assurées pour dot ; il fit plus, il profita de l'éloignement de son frère Sigebert, qui était allé repousser les Huns au delà du Rhin, pour faire une irruption dans ses Etats : tels furent les crimes dont Brunehaut poursuivit la réparation, et dont elle aurait en effet obtenu une justice éclatante, si elle avait su mettre des bornes à sa vengeance.

      Trop bien servie par la victoire, elle voulut tenir ses ennemis en sa puissance ; ils firent assassiner Sigebert, son époux ; et cette mort, qui produisit une révolution dans l'armée du vainqueur, la rendit elle-même prisonnière de ceux qu'elle était au moment de saisir. Lorsqu'elle eut la permission de retourner en Austrasie, où régnait son fils encore mineur, elle trouva les grands en possession du pouvoir, et n'obtint pas même assez de crédit pour pouvoir garder auprès d'elle le fils de Chilpéric, le jeune Mérovée, que, malgré la différence d'âge, elle avait épousé avec beaucoup d'imprudence. Cette humiliation l'entraîna dans des cabales qui ne tournèrent pas toujours à son avantage ; mais elle se montra digne de ses premiers jours, lorsque, voyant en présence les partis formés en Austrasie, elle prit un habit de guerre, s'élança sur un cheval de bataille, se jeta entre les deux armées, et, malgré les injures et les menaces dont on l'accablait, parvint à arrêter l'effusion du sang en sauvant ceux qui s'étaient trop exposés pour la servir. Comment cette princesse, qui montra tant de courage et de générosité, à laquelle les papes témoignèrent publiquement leur reconnaissance pour le zèle qu'elle mit à les servir dans le dessein d'attirer à l'Eglise les Anglo-Saxons encore idolâtres ; qui fonda des hôpitaux, fit réparer des voies romaines dont les débris portent encore son nom ; qui fut épouse fidèle de Sigebert, sœur trop sensible, et mère digne d'être consultée par son fils Childebert ; comment devint-elle, dans sa vieillesse, une femme dissolue, l'auteur présumé de vingt assassinats, la marâtre d'un de ses petits-fils, la corruptrice de l'autre, et l'horreur de la France entière ? Lorsqu'elle tomba entre les mains de Clotaire II, fils de Frédégonde, elle fut condamnée à des tourments si rigoureux, qu'il est impossible de ne pas reconnaître dans son supplice les traces de la vengeance, car ce n'est pas ainsi que la justice punit. Brunehaut, fille, sœur, tante, mère, aïeule et bisaïeule de rois, fut, sans pitié pour sa vieillesse (elle avait 73 ans), pendant trois jours, exposée dans le camp aux insultes des soldats et à la cruauté des bourreaux ; on l'attacha ensuite à la queue d'un cheval indompté ; les lambeaux de son corps furent brûlés, et les cendres dispersées par les vents.

      Tant de barbarie serait inexplicable même dans les mœurs de ce temps, si l'on ne connaissait la haine que les grands de l'Etat portaient à cette princesse ; son plus grand crime fut d'avoir voulu gouverner sans leur assistance, et d'avoir voulu imposer aux barbares austrasiens les lois et les mœurs romaines : ils s'en vengèrent avec une férocité qui n'appartenait qu'à l'ambition. Plusieurs écrivains ont essayé de rétablir sa mémoire ; on ne doit pas s'en étonner : les accusations portées contre elle par ses bourreaux, l'ayant chargée des crimes mêmes qui avaient été commis pour la perdre, il n'est pas très extraordinaire que cette injustice ait frappé quelques esprits jusqu'à leur inspirer le désir de la trouver innocente ; mais les pièces manquent pour revoir ce grand procès. Le résultat d'un nouvel examen serait sans doute que cette reine n'a pas commis tous les crimes dont elle a été accusée, sans qu'on puisse conclure qu'elle n'a pas mérité la réputation que les historiens lui ont faite. La postérité a confondu dans le même jugement Frédégonde et Brunehaut. On peut remarquer cependant que la première fonda son élévation sur ses forfaits, et que la seconde fut entraînée par la vengeance jusqu'à imiter celle qu'elle voulait justement punir. « Brunehaut, dit Bossuet, livrée à Clotaire II, fut immolée à l'ambition de ce prince ; sa mémoire fut déchirée, et sa vertu, tant louée par le pape saint Grégoire, a peine encore à se défendre. »

      Brunehaut fut accusée d'avoir fait périr dix rois, deux maires du palais, saint Didier, etc., etc. Parmi les historiens ou chroniqueurs qui ont été peu favorables à cette reine, on remarque le moine Jonas, qui n'était point contemporain ; le crédule Frédégaire, qui écrivait un siècle après l'événement ; Adon, évêque de Vienne, postérieur à Frédégaire de cinquante ans, et Aimon, religieux de l'ordre de saint Benoît, qui vivait dans un temps encore plus éloigné. Mais les auteurs qui ont loué cette princesse étaient ses contemporains. Saint Grégoire de Tours, mort en 595, trouve en elle un modèle de vertu, de sagesse et de douceur. Fortunat, évêque de Poitiers, qui mourut vers l'an 609, loue ses grâces et sa beauté. Le pape saint Grégoire, mort en 604, la peint comme une reine pieuse, une vertueuse régente, une mère chrétienne. Parmi les historiens modernes qui ont défendu la mémoire de Brunehaut, nous citerons Mariana, du Tillet, Papire Masson, Paul-Emile, Boccace, Pasquier, Cordemoi et Velly.

      Son tombeau, élevé, en l'an 614, dans l'église de l'abbaye de St-Martin d'Autun, fut ouvert en 632 ; on y trouva ses cendres, des ossements, quelques morceaux de charbon, et une mollette d'éperon.  (Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 6 - Pages 21-22)




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