CHAPITRE V
La réalité de l'existence hyperphysique
Il semble difficile aux personnes qui ne sont familiarisés qu'avec les
vues ordinaires et tant soit peu matérialistes du
XIXème siècle, de croire à l'existence d'un état de conscience parfait, indépendant du
corps physique, et de s'en faire une idée bien nette. A coup sûr, tout chrétien est tenu de croire c'est même le principe fondamental de sa
religion qu'il possède une
âme. Mais, si vous lui suggérez que l'
âme a peut-être une réalité suffisante pour devenir dans certaines conditions visible indépendamment du
corps, soit pendant la vie, soit après la mort, il y a dix chances contre une pour qu'il vous réponde avec mépris qu'il ne croit pas aux revenants et qu'une idée pareille n'est qu'un
anachronisme, un reste de superstition du
moyen-âge ayant fait leur temps.
Si donc nous voulons comprendre quelque chose au travail
de la troupe des aides invisibles et peut-être apprendre nous-mêmes
a y participer, il faut, dans cet ordre d'idées, rejeter les entraves des
notions contemporaines et nous efforcer de saisir cette grande vérité,
fait prouvé maintenant pour beaucoup d'entre nous, que le
corps physique
n'est réellement et simplement qu'un véhicule ou vêtement
de l'homme proprement,dit. Nous le quittons d'une manière définitive
en mourant, mais nous le quittons aussi d'une manière temporaire, chaque
soir en nous endormant. Si nous nous endormons, c'est même précisément
parce que l'homme véritable, dans son véhicule astral, se glisse
hors du
corps physique.
Ce n'est là, je le répète, ni une simple
hypothèse, ni une ingénieuse supposition. Il y a parmi nous beaucoup
de personnes qui savent pratiquer et pratiquent tous les
jours de leur vie, en
pleine conscience, cet acte de magie élémentaire : passer à
volonté d'un plan sur l'autre. Ceci une fois admis, le lecteur comprendra
combien doit leur paraître grotesque et absurde l'assertion habituelle (où
la réflexion n'entre pour rien), que pareille chose est complètement
impossible. Autant dire à une personne qu'il lui est impossible de s'endormir
et que, si elle s'imagine l'avoir jamais fait, c'est qu'elle a été
victime d'une hallucination.
Si un homme qui n'a pas encore développé le
lien entre les consciences astrale et physique ne peut quitter à volonté
son
corps le plus dense, ni garder un souvenir bien complet de ce qui lui est
arrivé au loin, il n'en est pas moins vrai qu'il le quitte chaque fois
qu'il s'endort et peut être aperçu par une personne clairvoyante
et expérimentée quelconque, planant au-dessus de son
corps ou, suivant
le cas, s'en écartant à une distance plus ou moins considérable.
Une personne de développement nul flotte généralement au-dessus du
corps physique ; c'est à peine si elle est moins endormie
que lui ; sa forme est relativement vague et à peine esquissée ; en outre, elle ne peut être entraînée à plus d'une courte
distance de ce
corps physique, sans lui faire éprouver des sensations pénibles qui, de fait, provoquent le réveil. Mais, à mesure que son évolution
progresse, l'homme acquiert un
corps astral de plus en plus distinct et conscient et, par suite, un véhicule plus en rapport avec ses besoins. Chez la plupart
des personnes intelligentes et cultivées, le degré de conscience est déjà très marqué. Quant à l'homme d'un
développement spirituel même peu avancé, il est, dans ce véhicule, aussi pleinement lui-même que dans son
corps plus dense.
S'il peut, durant le sommeil, être parfaitement conscient sur le plan astral et y circuler librement et à sa volonté, il ne
s'ensuit pas cependant qu'il soit prêt à grossir les rangs des aides. L'homme de cette catégorie est en général tellement plongé dans ses propres pensées habituellement une continuation de ses pensées de l'état de veille qu'il ressemble à une personne abîmée dans ses réflexions, trop absorbée pour faire aucune attention à ce qui se passe autour d'elle. A beaucoup d'égards, il est bon qu'il en soit ainsi, car il y a sur le plan astral bien des choses capables d'énerver et de terrifier un homme à qui manquerait le courage né d'une familiarité complète avec la nature réelle de tout ce qu'on y voit.
Il peut arriver qu'un homme sorte graduellement de cet état et que ses yeux s'ouvrent, pour ainsi dire, au milieu astral, mais le plus souvent il reste dans cette situation jusqu'à ce qu'une personne, active déjà sur ce plan, se charge de lui et le réveille. Ce n'est pas là, pourtant, une responsabilité à prendre à la légère, car, s'il est relativement facile d'éveiller un homme sur le plan astral, il est presque impossible de le rendormir, à moins de recourir à des moyens mesmériques fort peu recommandables. Avant de vouloir tirer ainsi une personne de ses rêves, un membre de la troupe des aides doit donc s'assurer pleinement que ses
dispositions soient telles qu'elle fasse un bon usage des facultés nouvelles mises à sa portée et, de plus, que ses connaissances et
son courage soient suffisants pour que son réveil n'ait vraisemblablement pas pour elle de conséquences fâcheuses.
Ainsi réveillé, un homme sera mis à même de se
joindre, s'il le désire à ceux qui aident l'humanité.
Mais, il faut bien le comprendre, ceci n'implique pas nécessairement, ni même généralement, la faculté de se rappeler, au retour
à l'état de veille, rien de ce qui a été fait. Cette faculté, l'homme doit la développer par lui-même. Elle ne
se manifeste le plus souvent que bien des années après ; peut-être même ne sera-ce pas dans la même vie. Ce défaut de mémoire
dans le
corps physique ne nuit heureusement en rien au travail fait hors du
corps ; aussi, à part la satisfaction qu'on peut éprouver à connaître,
pendant l'état de veille, le travail fait pendant le sommeil, ce défaut de mémoire n'a-t-il aucune importance. Le point capital, c'est que le travail
soit fait ; ce n'est pas de se rappeler le nom des ouvriers.