Sigebert, troisième fils de
Clotaire Ier, eut en partage le royaume d'
Austrasie, en l'an 561, et épousa
Brunehaut, fille d'Athanagilde, roi des
Visigoths. Cette reine est célèbre dans l'
histoire par l'ascendant qu'elle prit sur son
époux, par son courage, ses crimes et ses malheurs. Chilpéric,
frère de Sigebert, avait répudié son
épouse pour vivre avec
Frédégonde, née dans la classe du peuple, mais plus étonnante encore par la
force de son caractère, la hardiesse de ses résolutions, les ressources de son
esprit, qu'odieuse par les meurtres dont elle s'est souillée. L'alliance royale que Sigebert venait de contracter fit désirer à Chilpéric d'en former une semblable. Il éloigna
Frédégonde, demanda en
mariage Galsuinte, sur de
Brunehaut, et l'obtint par les soins de celle-ci ; mais sa passion pour la maîtresse qu'il avait quittée l'emportant de nouveau, il la fit reine légitime, après avoir autorisé l'assassinat de Galsuinte. La haine de
Brunehaut pour la rivale de sa sur, ses projets de vengeance, les fureurs de
Frédégonde, les moyens qu'elle employa pour se conserver et triompher de ses
ennemis coûtèrent la vie à dix princes de la famille royale et furent l'unique cause des événements les plus remarquables de cette époque, si fertile en événements. Ainsi la violence de
Clotaire Ier, sa cruauté à l'égard de Chramne, son fils préféré, en brisant tout ressort dans l'
âme de ses autres
enfants, les disposèrent à se laisser diriger par des femmes dans les affaires les plus importantes de l'Etat, faiblesse que les Français de cette époque ne pardonnaient pas et qui commença à diminuer en eux la reconnaissance qu'ils avaient pour la maison de Clovis.
Les premières années du règne de Sigebert furent troublées par une irruption que les
Huns firent dans ses Etats ; il remporta sur eux une grande victoire et les força à repasser le Rhin. Le poète Fortunat remarque que ce jeune monarque se mit à pied au premier rang, et que, la
hache à la main, il chargea les
ennemis avec une intrépédité héroïque. Pendant cette expédition, Chilpéric s'était emparé de
Reims et de quelques autres places qui appartenaient à Sigebert ; celui-ci lui fit une guerre vive et si heureuse qu'il dicta les conditions de la paix. Une nouvelle irruption des
Huns ayant rappelé Sigebert au delà du Rhin, et ce prince, s'étant encore abandonné à son courage, se trouva seul au milieu des barbares et fut obligé de se rendre prisonnier.
Son adresse et ses libéralités triomphèrent alors de ceux qu'il n'avait pu vaincre ; ils lui rendirent la
liberté. Revenu dans ses Etats, il fut bientôt encore forcé de reprendre les armes contre le perfide
Chilpéric, qui, vaincu à plusieurs reprises, fut resserré dans Tournai, et ne pouvait échapper, lorsque deux scélérats
envoyés par l'implacable
Frédégonde poignardèrent Sigebert à Vitry, où il s'était rendu pour recevoir les
hommages des
Neustriens. Ce prince, le meilleur qui eût encore paru sur le trône de Clovis, périt ainsi au milieu de ses triomphes, en 575, dans la 40ème
année de son âge et la quatorzième de son règne. Généreux, bienfaisant, jamais souverain ne régna avec plus d'empire sur le cur de ses sujets. Intrépide dans le danger, inébranlable dans le malheur, il sut jusque dans les fers se concilier le respect et l'
amour d'un vainqueur
barbare ; réglé dans ses murs, son règne fut celui de la décence et de l'honneur. C'est sous ce règne qu'il est parlé pour la première fois, dans notre
histoire, de la dignité de
maire du palais, qui fut par la suite si funeste à la puissance royale.
(Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 39 - Page 321)