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Diogène le Cynique

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Biographie universelle ancienne et moderne

      Diogène, surnommé le Cynique, né à Sinope, ville de l'Asie Mineure, était fils d'un changeur. Il embrassa la même profession ; mais ayant été convaincu d'avoir altéré la monnaie, de complicité avec son père, Diogène prit la fuite et vint à Athènes. Antisthènes, dont il voulait être le disciple, refusa d'abord de le recevoir, et le menaça même de son bâton ; mais Diogène lui ayant dit qu'il ne trouverait point de bâton assez dur pour le chasser, ce philosophe, touché de sa persévérance, lui permit de le suivre : Antisthènes était, de tous les disciples de Socrate, celui qui avait le plus de conformité avec son maître, par sa doctrine et par sa manière de vivre : Diogène conserva sa doctrine dans toute sa pureté ; mais il porta à l'excès le mépris des richesses et des usages reçus, dont Socrate avait donné l'exemple jusqu'à un certain point. « Je suis, disait Diogène, comme les « maîtres de chœurs, qui forcent le ton pour y ramener leurs élèves. »

      S'étant proctué un manteau assez grand pour pouvoir, en le déployant, s'y envelopper durant la nuit, et une besace pour y mettre sa nourriture et ses livres, il ne s'inquiéta de rien autre. Il ne lui était pas difficile d'obtenir de la charité des passants le peu qu'il lui fallait pour sa subsistance, et il couchait partout où il se trouvait. Théophraste rapporte qu'il disait, en montrant le portique royal, que les Athéniens avaient pris soin eux-mêmes de lui bâtir un palais. Il ne faut ajouter aucune foi à, ce que les anciens racontent de son tonneau. Il est possible qu'il ait couché quelquefois dans celui qui était dans le temple de la mère des Dieux ; mais ce n'était pas sa demeure habituelle, son caractère était trop indépendant pour qu'il voulût s'astreindre à venir toujours coucher dans le même endroit.

      Toutes les imprécations des tragiques, disait-il, s'étaient réalisées sur lui ; car il était exilé, sans patrie, sans habitation, errant, mendiant son pain, et vivant au jour le jour ; mais sa constance le mettait au-dessus des injures de la fortune. On le voyait quelquefois demander l'aumône à des statues ; c'était, à ce qu'il disait, pour s'accoutumer aux refus. Il faisait un jour des efforts pour entrer au théâtre lorsque tout le monde en sortait ; on lui demanda pourquoi il allait ainsi en sens contraire de la foule : « C'est, répondit-il, ce que je fais tous les jours. » Le riche Midias, si fameux par son insolence et par le plaidoyer de Démosthènes contre lui, lui ayant donné des soufflets, lui dit : « Il y a 3000 drachmes pour toi chez mon banquier. » Diogène, le lendemain, s'étant muni d'un gantelet d'athlète, battit Midias, et remit à sa disposition les 3,000 drachmes. Un jeune homme prodigue, à qui il demandait une mine (90 francs), lui disant : Pourquoi une somme si considérable, tandis que tu ne demandes aux autres qu'une obole ? « C'est, répondit Diogène, parce que j'espère que les autres me donneront encore, tandis qu'il est fort incertain que tu puisses me donner une seconde fois. »

      Uniquement attaché à la morale, il se moquait des vaines spéculations des autres philosophes. Platon ayant défini l'homme : un animal à deux pieds sans plumes, Diogène pluma un coq et le jeta devant lui, en disant : « Voilà l'homme de Platon. » Il raillait aussi ce philosophe sur son goût pour les abstractions, et ses liaisons avec Denys le Tyran. Platon l'avait surnommé Socrate en délire. On ne finirait pas si l'on voulait rassembler tous les bons mots que les anciens attribuent à Diogène, et toutes les anecdotes qu'ils en racontent, parmi lesquelles il y en a de fort indécentes ; mais on ne doit pas les adopter légèrement, les anciens, ainsi qu'on l'a déjà remarqué à l'article Cratès, s'étant plu à surcharger l'histoire des principaux philosophes de mille contes puérils.

      Nous ferons mieux connaître Diogène en rendant compte de la méthode qu'il suivit pour l'éducation des fils de Xéniades. Ce philosophe, déjà avancé en âge, s'étant embarqué pour l'île d'Egine, fut pris par des pirates qui l'emmenèrent dans l'île de Crète, et le mirent en vente comme esclave. Il fut acheté par Xéniades, riche Corinthien, qui, ayant eu le bon esprit de connaître son mérite, le chargea d'élever ses fils. Diogène leur fit apprendre à monter à cheval, à tirer de l'arc, à lancer le javelot ; il les fit aussi exercer à la gymnastique, mais seulement pour se former le corps, et non pour devenir des athlètes. Il les accoutuma à se passer de chaussure, à avoir la tête rasée, à ne boire que de l'eau, à vivre des aliments les plus grossiers, à être simples dans leurs vêtements, et à avoir un maintien modeste et silencieux. Il leur fit apprendre par cœur les plus beaux morceaux des poètes et des autres écrivains, et quelques-uns de ses propres ouvrages. Il les conduisait aussi lui-même à la chasse, et sut tellement se faire chérir d'eux, qu'ils ne cessaient de le louer devant leurs parents, et que Xéniades, qui lui avait confié le soin de toute sa maison, disait partout qu'il lui semblait que quelque bon génie fût venu s'établir chez lui : aussi, les amis de Diogène ayant voulu le racheter, ce philosophe refusa leur offre. Il paraît, au reste, que Xéniades lui laissait la plus grande liberté, surtout lorsque l'éducation de ses fils fut terminée.

      Sur la fin de sa vie, Diogène passait l'hiver à Athènes et l'été à Corinthe, et il se trouvait aussi heureux que le roi des Perses, qui partageait son temps entre Suses et Ecbatanes. Lorsqu'il était à Corinthe, il se tenait ordinairement dans le Cranion, gymnase voisin de la ville ; ceux qui voulaient jouir de sa conversation s'y rendaient, et c'est la qu'Alexandre, sur le point de partir pour l'Asie, eut avec lui cette entrevue si célèbre, mais dont les détails ne sont peut-être pas très exacts. Il put bien connaître à Corinthe la élèbre Laïs ; mais elle n'était plus en âge d'inspirer de l'amour, puisqu'elle était née avant lui, ainsi que nous le verrons à son article.

      On fait beaucoup de contes sur sa mort. Ce qui paraît le plus certain, c'est qu'on le trouva mort dans le Cranion, et l'on suppose qu'il avait avancé sa fin en retenant sa respiration ; mais, comme il avait alors 90 ans, il est tout simple de croire qu'íl s'éteignit naturellement. Il fut enterré près de la porte de Corinthe, sur la route qui conduisait au Cranion, et l'on plaça sur son tombeau un chien en marbre de Paros. Il mourut en l'an 323 avant J.-C., la même année qu'Alexandre le Grand. Il avait fait plusieurs ouvrages dont on faisait beaucoup de cas. Il ne nous en reste aucun ; car les lettres qu'on trouve sous son nom dans les collections d'épistolaires grecs, sont évidemment supposées, ainsi que l'a fort bien prouvé M. Boissonade, dans un mémoire lu à la troisième classe de l'Institut, et dans lequel il a fait connaître 22 de ces lettres encore inédites. Diogène eut un grand nombre de disciples, dont les plus célèbres furent Cratès et Ménandre.  (Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 11 - Pages 82-83)



Dictionnaire universel d'histoire et de géographie de Bouillet

       Marie-Nicolas Bouillet, Dictionnaire universel d'histoire et de géographie, 20ème édition (1866), p. .


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