CHAPITRE VI
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Caractère de l'école de . Ses erreurs. Ses dissentiments avec l'évêque. M. Bautain et ses disciples sortent du petit séminaire de Saint-Louis. Fondation d'une école libre. Ministère de M. l'abbé de Bonnechose. Il publie les leçons de philosophie de son maître. Mort de Mlle Humann.
Epreuves et consolations de M. l'abbé de Bonnechose. Il forme
l'abbé de Reinach. Il convertit plusieurs protestants. Son voyage à Rome avec l'abbé Bautain. Lettres et impressions de voyage de M. de Bonnechose. Examen de la doctrine de . Accueil très bienveillant de Grégoire XVI. Jugement du pape. Soumission de l'abbé Bautain et de ses disciples. Retour à . Mgr Affre et Mgr Ræss, coadjuteurs de Mgr Lepappe de Trévern. L'évêque rend ses bonnes grâces à M. Bautain et à ses disciples.
1834-1840
Aujourd'hui j'ai eu la consolation de célébrer
le saint sacrifice sur le tombeau de saint Ignace. Je l'ai invoqué de tout
mon cur, ainsi que saint François-Xavier, pour qu'ils soient favorables
à notre mission. J'ai eu ensuite un entretien avec le père Rosaver,
chargé, dit-on, d'examiner la
Philosophie du christianisme.
Il m'a paru bien disposé, convaincu de notre bonne foi, de notre orthodoxie,
et regrettant seulement des expressions qui lui paraissent inexactes et dont il
serait possible d'abuser. Je lui ai représenté la difficulté
de notre position en face des philosophes du
XVIIIème siècle, qui
avaient fait l'
apothéose de la raison, en face des
protestants, qui ne
reconnaissent point d'autre autorité que la raison, et en face des
hermésiens,
qui veulent fonder tout l'édifice
religieux sur la raison. Si nous avons
excédé les justes bornes en attribuant trop à la foi et en
ne faisant pas d'une manière assez distincte la part de la raison, c'est
que nous aurons cédé à la préoccupation du danger
que nous avions sous les yeux. Nous sommes venus à Rome pour que le
saint-siège
nous trace la ligne à suivre entre deux excès. Le P. Rosaver m'a
paru croire à la sincérité de notre démarche, et m'a
dit qu'on ne demandait ici qu'à s'arranger. »
« 10 mars.
Notre affaire suit une marche toute providentielle. Nous
sommes arrivés ici avec des lettres de Lacordaire, qui a laissé
dans Rome de précieux souvenirs. Nous en avions une pour Mgr Cappiami,
qui nous a reçus à bras ouverts ; il nous a recommandés au
secrétaire d'Etat, le
cardinal Lambruschini, et tous deux ont disposé
le saint-père en notre faveur ; ils ont obtenu qu'on nous désignât
un examinateur italien étranger aux préoccupations et aux passions
des partis français. Le pape a nommé le
cardinal Mezzofanti, pour
qui il a une estime particulière, le même qui avait été
chargé d'instruire l'affaire d'
Hermès. Ce
cardinal nous a reçus
avec les démonstrations d'une grande bienveillance. Il parle bien français
; il a maintenant l'ouvrage entre les mains et va l'examiner. Que
Dieu incline
son cur et l'éclaire, pour que la vérité seule triomphe
de cet examen ! Nous ne pouvons assez
rendre hommage au caractère de Mgr
Cippiami, sous-secrétaire d'Etat. Il montre un touchant intérêt
pour la cause que nous défendons ; et malgré la multitude des affaires
qui pèsent sur lui, il s'occupe de la nôtre avec application, avec
suite et persévérance. Il nous accueille et nous parle avec une
bonhomie, une obligeance et une netteté vraiment remarquables. Il a parfaitement
saisi la question. Cet homme, doué d'une grande capacité, est ici
le pivot du gouvernement, mais il asoin d'en laisser les honneurs à Lambruschini,
dont il est le second. Outre les affaires, il s'occupe d'astronomie, de chimie
et d'
histoire naturelle ; il suit avec intelligence et intérêt les
progrès des
esprits. Si la politique du
saint-siège en ces derniers
temps a été large et conforme aux besoins de l'époque, c'est
à lui surtout qu'on le doit. Il se lève tous les
jours à
quatre heures du matin, donne audience depuis sept heures, se récrée
un peu au milieu du
jour dans une petite maison de campagne qu'il possède
à Rome, ne va point dans le monde, ne demande rien, ne veut rien, n'accepte
rien, et conserve ainsi l'indépendance et l'ascendant d'un beau caractère.
Il a le coup d'sil rapide et clair, un
air de bonté dans le visage,
de la rondeur dans les manières.
Mgr Lambruschini, plus âgé, d'une santé
altérée, d'une haute stature, a quelque chose de doux et de
vénérable.
Il nous a reçus et parlé
paternellement. J'ai certifié au
saint-père, nous a-t-il dit, que vous n'aviez que de bonnes intentions
et que vous étiez de fidèles
enfants de l'
Eglise.
Une autre personne qui a parlé au pape en notre faveur
est le P. Faure,
pénitencier français. C'est un petit homme très
vif, spirituel, plein d'expérience de la cour de Rome, et qui nous paraît
tout dévoué. Comment expliquer l'intérêt spontané
que ces hommes ont senti pour nous et l'obligeance empressée qu'ils mettent
à nous servir,
sinon par l'action secrète de la douce et paternelle
Providence qui nous conduit par la main ? Oh ! qu'elle soit bénie, quoi
qu'il arrive, maintenant et dans tous les siècles ! »
« 12 mars.
Hier dimanche, nous sommes allés à la chapelle
Sixtine. C'est une vaste chapelle du
Vatican, ornée de peintures célèbres
que je n'ai pas pu voir à cause de ma
vue basse. Mais ce qui nous appelait
en ce lieu, c'était le pape assistant à la célébration
de la messe avec ses
cardinaux. Ce spectacle était des plus imposants.
L'
autel était dans le fond, en face de nous ; le pape, à gauche,
sur son trône, dans ses habits
pontificaux, les
cardinaux rangés
du même côté en demi-cercle. De temps en temps ils se levaient,
venaient former cercle devant l'
autel et le pape, se découvraient et s'inclinaient
en se découvrant. C'est ce qui se fit en particulier au
Sanctus,
qui en même temps était chanté avec gravité et une
douce
harmonie. Dans ces moments, ce que j'avais sous les yeux me rappelait la
Jérusalem céleste et les vingt-quatre vieillards prosternés
autour de l'
agneau et de l'ancien des
prêtres.
Et en contemplant le pape
immobile sur son trône et
la majesté de ce culte qui s'accomplit ainsi depuis tant de siècles,
je me rappelais le temple de Jérusalem, Moïse, Abraham ; je remontais
jusqu'au commencement du monde ; et toute sa durée entre la création
et la consommation des temps, jusqu'au nouvel avènement de Jésus-Christ,
me paraissait un point dans l'éternité.
Plus tard, dans la journée, nous sommes allés
faire une station devant le
corps de saint Jérôme ; puis à
l'
église de
Saint-Laurent, à un mille de Rome. Cette
église
est d'un style qui rappelle les temps primitifs : elle est une des plus anciennes,
ayant été construite sur le lieu de la sépulture du
corps
de saint Laurent, qui y repose avec saint Etienne et saint Justin. Les murs sont
peints à fresque et représentent le
martyre de saint Diacre. On
voit encore dans la
nef l'ambon et la chaire des anciens temps. Dans une chapelle
souterraine on a un aperçu des catacombes. On vous montre aussi la pierre
sur laquelle, suivant la tradition, aurait été déposé
le
corps de saint Laurent après avoir été brûlé,
et le vase de métal dont il se servait pour boire ou distribuer le vin
aux pauvres. En
entrant dans cette
église, qui a quelque chose de simple,
de champêtre et de singulièrement touchant, nous avons trouvé
quelques personnes du peuple chantant les litanies avec recueillement et dévotion.
Nous nous sommes joints à eux en priant le saint
martyr de nous être
favorable dans le
ciel. En revenant par la campagne de Rome, nous avons vu, hors
des murs et dans les murs, des ruines, des
aqueducs, des restes de temples païens,
des colonnes, des tours du moyen âge, des temples chrétiens ; nous
sommes passés auprès du Forum, du
Capitole, de la prison de saint
Pierre ; nous sommes entrés dans une petite
église, où un
prêtre annonçait la parole de Jésus-Christ à quelques
fidèles, nous nous sommes assis avec eux, puis nous avons continué
paisiblement notre chemin. Il commençait à faire nuit ; le peuple
était dans les rues, se promenant ou causant tranquillement, parce que
c'était dimanche. Mais point de désordre, point de bruit, point
de ces cris et de ces lieux de réjouissances grossières comme dans
nos capitales : tout était décent, calme et tel qu'il convient au
peuple habitant la ville éternelle. Le peuple paraît avoir conservé
encore beaucoup de la gravité des anciens Romains, et vraiment sa foi est
touchante et
inspire la foi. Plus on habite Rome, et plus on l'aime. C'est ici
qu'on peut vivre au-dessus des temps. Il me semble que les hommes qui, après
avoir servi leur pays, ont éprouvé des disgrâces et peuvent
consacrer leur vie à un saint repos, devraient venir le chercher à
Rome. Tout se fait ici, dit-on, avec lenteur ; oui, mais avec maturité,
sagesse et persévérance. Voyez la prodigieuse quantité d'édifices
immenses et magnifiques, antiques et modernes, qui couvrent le sol romain, et
vous reconnaîtrez pourquoi Rome ne se presse pas : c'est qu'elle veut achever
et qu'elle commence ; et qu'elle veut achever non pour quelques années,
non pour un siècle, mais pour toujours. »
« 16 mars.
C'était hier le
jour de notre audience du pape, hier
15 mars, jeudi,
jour de la messe de famille. Cette audience nous avait été
accordée à la demande du
cardinal Mezzofanti, qui devait nous présenter.
Le matin, nous avons dit la messe en demandant à
Dieu qu'il inclinât
le cur du
pontife dans le sens de sa volonté ; puis nous nous sommes
acheminés fraternellement et silencieusement vers
Saint-Pierre. Le
ciel
était serein, l'
air pur, nos curs tranquilles, et tout nous présageait
un accueil doux et consolant. A neuf heures, nous étions dans la bibliothèque
du
Vatican, où notre
cardinal nous avait donné rendez-vous ; il
s'est fait attendre jusqu'à dix, puis, après quelques excuses, nous
a conduits, à travers plusieurs escaliers et galeries, jusqu'aux appartements
du saint-père. Là il a fallu attendre longtemps encore, et nous
avons pu considérer ces appartements qui sont tendus de rouge avec quelques
dorures, mais, du reste, extrêmement simples et sans autre ornement. Enfin
la porte s'ouvre, on nous appelle ; nous avançons et nous nous trouvons
en face du successeur de saint Pierre ! Nous faisons une
génuflexion :
le cérémonial veut qu'on en fasse trois : le pape vint à
nous et ne nous laissa pas faire la dernière : nous nous tenons debout
devant lui, en présence de notre
cardinal protecteur, qui avait disposé
le saint-père à nous entendre. Il commença par nous parler
en italien, en nous disant de parler français, mais lentement, et à
ce sujet il nous raconta une petite anecdote relative à Chateaubriand.
Nous lui présentâmes l'
hommage de notre respect, de notre confiance
et de notre soumission. Il nous répondit qu'il l'agréait et qu'il
était assuré de nos bons sentiments et de nos bonnes
dispositions.
Il nous dit avoir lu la lettre du
frère à l'
évêque
de
, et nous ajouta qu'il croyait que les choses s'arrangeraient : alors
nous l'avons prié de donner des instructions à cet effet, lui exposant
notre situation critique en face du
rationalisme, des
protestants et des
hermésiens
; lui déclarant que si nous avions résisté à l'
évêque,
c'était uniquement par
scrupule de conscience, et que la parole du
saint-siège
pouvait seule mettre notre conscience à l'aise ; et nous lui avons alors
remis une note où nous avions succinctement exposé les quatre points
qui nous amènent ici : l'affaire avec l'
évêque, la
Philosophie
du christianisme, le nouvel ouvrage philosophique et l'institution
en congrégation. Le saint-père a reçu cette note avec bonté,
en a parcouru quelques articles et l'a gardée. Il nous a remis, pour toute
la suite de nos affaires, entre les mains de notre bon
cardinal, en nous disant
qu'il les examinerait et les réglerait ultérieurement avec lui.
Sa parole était franche, douce et paternelle. Il nous a donné sa
bénédiction, et nous nous sommes retirés. »
« 03 avril.
Nous vivons de confiance et d'espérance, au
jour le
jour, cherchant autant que possible à coopérer à l'action
de la providence, attendant ses indications, priant et évitant surtout
de substituer notre faire propre à cette action supérieure. Comme
on nous a dit qu'il était bon de nous faire connaître, et vous tous
en nous, aux
cardinaux et autres personnages dont les suffrages peuvent exercer
de l'
influence sur les décisions du
saint-siège, nous ne croyons
pas devoir négliger cette partie humaine de notre mission à Rome,
et nous cherchons avec empressement, et suivant les occasions données,
à nouer des rapports précieux pour l'avenir de la famille et favorables
au développement de son uvre : car voués à l'enseignement
de la vérité
catholique, nous ne pourrons le faire avec bénédiction
et succès qu'avec le concours et sous l'approbation de l'autorité
souveraine instituée par Jésus-Christ pour conserver et répandre
sa parole parmi les hommes. Depuis les derniers détails que je vous ai
donnés, nous avons vu trois
cardinaux : MM. Sala, Falconieri et Orioli.
Le premier est un vieillard de soixante-seize ans, très
vert, robuste, et d'un caractère fort prononcé. C'est lui qui était
avec Pie VII quand Napoléon voulut contraindre le
pontife à signer
des concessions contraires à sa conscience. Pie VII résistait, le
cardinal Sala appuyait sa résistance, ce qui irrita tellement l'empereur
qu'il saisit sur la table un encrier et le lui jeta à la tête ; mais
le
cardinal l'évita et demeura ferme dans son devoir. On l'avait prévenu
contre nous ; mais le P. de Géramb se chargea de nous présenter
à lui, et il y mit tant d'obligeance, de prudence et de délicatesse,
que bientôt le
cardinal dérida son front sourcilleux et se mit à
nous montrer lui-même tous les appartements de sa maison : il ne nous fit
grâce de rien : le P. de Géramb, qui est très lourd et marche
difficilement, était tout haletant et n'en pouvait plus. On ne peut se
montrer plus serviable, plus franc et plus affectueux qu'il ne l'est à
notre égard.
Le
cardinal Falconieri a quarante-quatre ans : autrefois
page de Napoléon, il est depuis plusieurs années
archevêque
de
Ravenne, bien aimé et respecté dans son
diocèse et dans
Rome, particulièrement affectionné du pape ; il nous a reçus
avec une grande bonté, approuvant nos
dispositions et nous invitant à
venir le voir à
Ravenne, où il retourne.
Le
cardinal Orioli est un moine cordelier,
évêque
d'Orvieto, parlant français comme un Français et jouissant d'une
grande réputation comme
théologien. Nous avions lieu de croire que
ses
dispositions ne nous étaient pas très favorables. Cependant
il n'en a rien paru dans l'accueil qu'il nous a fait. Au contraire, il a commencé
l'entretien en disant : « Vous ne m'avez donc pas compris l'autre
jour,
quand j'accompagnais le saint-père dans le cloître des
Dominicains
; je vous faisais signe d'approcher, afin qu'il vous bénît et vous
parlât. » Le reste de la conversation a été dans le
même sens, et nous l'avons quitté avec une bonne impression.
Nous avons encore vu le
cardinal Gregorio, âgé
de près de quatre-vingts ans,
grand pénitencier et
évêque
de Civita-Vecchia : il a toute l'urbanité des anciennes cours, un
esprit
serein, enjoué, et s'est montré à notre égard affectueux
et aimable. Lui et plusieurs autres, et parmi eux le plus influent de tous, disent
que dans les
dispositions où nous sommes, il est impossible que nos affaires
n'arrivent pas à une heureuse conclusion, et que dans les temps où
nous vivons, s'il y a quelque excès qui mérite
indulgence et intérêt,
ce serait celui de la foi ; et qu'ainsi, quand il serait démontré
que quelques-unes de nos expressions pour la foi contre la raison n'auraient pas
été mesurées, il y aurait encore dans cette exagération
même quelque chose de consolant pour l'
Eglise ; et qu'ensuite, en nous soumettant
humblement et filialement à son
jugement, nous donnions un exemple propre
à réjouir et à édifier tous les fidèles. Voilà
surtout ce qui les touche, et ce qui les touche plus ou moins, suivant qu'ils
ont plus ou moins de piété. Et il faut rendre ce témoignage
au sacré
collège, qu'il est
composé d'hommes vraiment recommandables
par leurs sentiments
religieux, leurs vertus et leurs pratiques chrétiennes.
Cela ne veut pas dire, suivant l'expression d'un de nos amis, qu'ils soient tous
des
aigles, il s'en faut, mais notre meilleure garantie est dans la droiture du
cur et dans les lumières qu'elle donne. »
« 20 mars.
Hier nous avons vu le
cardinal Fesch, petit vieillard vivant
retiré au fond d'un palais orné de magnifiques tableaux, mais qui
paraît comme abandonné. Lui-même nous a semblé comme
un vieux débris du monde qui n'est plus. C'était une visite de pure
politesse : il nous a beaucoup parlé de son
diocèse de
Lyon ; il
l'avait, dit-il, laissé en progrès ; il voudrait que le progrès
continuât : mais quand on en est venu à définir le progrès,
nous avons bientôt reconnu que le vieil oncle de l'empereur l'entendait
à peu près comme le vieux précepteur du prince Esterhazy.
Nous avons eu plus tard dans
Saint-Pierre un entretien avec le P. Vaure : c'est
le
pénitencier français, cordelier, plein de finesse et d'expérience
; il a ses entrées chez le pape et le voit quand il veut. Il nous a dit
que notre visite au saint-père avait laissé en lui une bonne impression,
et que le pape nous était favorable ; mais qu'il faudrait nécessairement,
dans notre affaire avec l'
évêque, s'attendre à quelque mesure
qui sauvât au moins le caractère
épiscopal. Car les
évêques
de France sont très jaloux de leur autorité, très susceptibles,
et par conséquent le saint siège met le plus grand soin à
les ménager. Dans la soirée, nous avons été conduits
auprès du
cardinal Pacca, doyen du sacré
collège : nous avons
trouvé près de lui le
cardinal Bernetti, qui naguère gouvernait
tout à Rome : l'un et l'autre nous ont fait bon accueil. Ce matin, c'était
le tour du
cardinal Castracane : nous lui avons été présentés
par M. Tavenet,
sulpicien, ami de M. Michelle. Ici il y a eu discussion vive sur
le fond de la question avec l'
évêque, sur les droits de la foi et
de la raison. Le
cardinal paraissait incliner vers l'opinion de l'
évêque
et croyait que nous anéantissions la raison ; il a paru satisfait des explications
données, et a mis beaucoup d'obligeance et de politesse dans ses procédés.
Oh ! mes chers
frères, qu'il me tarde que nous puissions en finir avec
cette vie extérieure ! Et cependant la maladie de notre
cardinal et ce
qui nous est dit de tous côtés nous menaient d'un long séjour.
Au milieu des belles choses que nous voyons, il y a bien du vide et plus d'une
tribulation que vous ne soupçonnez pas. Point d'études, point de
travail suivi. Mes meilleurs moments, au reste comme à
, comme
partout, sont ceux de la prière, le matin, avant le mouvement de la journée.
C'est là, devant
Dieu qui voit ses
enfants à Rome comme à
, que nous nous trouvons réunis à tout ce que nous aimons
dans ce monde et dans l'autre, et que sont absorbées toutes les distances
de lieu et d'espace. »