Cet article a paru originellement dans le N°3 de la revue
Le Symbolisme (décembre 1912). Il a été ressaisi et corrigé par France-Spiritualités.
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Franc-Maçonnerie >> Articles & Interviews Le
Masonic Bibliophile, de Cincinnati, publie, dans son numéro du mois d'août dernier, un important extrait d'une lettre que le F
:. A. G. Pitts avait adressée, le 09
juin 1912, au directeur de cette revue maçonnique.
Ce document intéresse trop les Maçons français
pour que nous le laissions passer sans le traduire. Nous engageons simplement nos lecteurs à s'efforcer de saisir la vraie pensée du F
:. Pitts, qui est un terrible ironiste.
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« Il y a quelques mois, j'ai reçu un diplôme
attestant que des Maçons
européens assemblés nous avaient
voté des remerciements, au F
:. Morcombe et à moi, en raison
de notre défense de la Maçonnerie française. Naturellement,
Morcombe a également reçu un diplôme. Les lettres parues dans
le dernier numéro de l'
Acacia ne sont que des accusés de
réception émanant du F
:. Morcombe et de moi.
Il se peut que le F
:. Morcombe soit partisan de la
reconnaissance des puissances maç
:. françaises, Grand Orient et Grande Loge de la Grande Loge tout au moins. Pour ma part, je n'y attache pas d'importance et je ne vois pas comment la chose pourrait s'accomplir, avant quelques années au moins, sans nous exposer à des malentendus. Je conçois fort bien que les Français ont parfaitement le droit d'élargir la
Franc-Maçonnerie, au point d'y rendre admissibles les agnostiques ; mais je suis disposé à admettre que nous avons le droit d'exiger, comme nous l'avons toujours fait, que chaque
initié déclare sa croyance et sa confiance en
Dieu. Or, si nous reconnaissions le Grand Orient, après tout le bruit que nous avons fait en refusant de le reconnaître, cela passerait, même chez nous, comme une déclaration de renonciation de notre part à l'exigence de la croyance en
Dieu. On devrait, en réalité, n'y voir qu'une déclaration de notre ferme propos de ne nous occuper désormais que de nos propres affaires ; mais ce serait là une attitude si étrangère au caractère américain, qu'il serait impossible de la faire comprendre à la moyenne des Américains.
La seule raison pour laquelle je continue à publier des sarcasmes relativement à l'attitude de nos puissances maçonniques à l'égard de la Maçonnerie française, est que je voudrais pouvoir réduire au silence, si possible, l'insupportable impertinence des Grands Officiers de nos Grandes Loges américaines et des rapporteurs des Comités de correspondance extérieure. Tout ce que je demande pour la Maçonnerie française, c'est que nous ayons pour elle le respect et la déférence auxquels elle a droit. Je ne me soucie pas de reconnaissance formelle, et je crois être parvenu à convaincre les Français à ne pas s'en soucier non plus. Je crois qu'il n'y a pas lieu à tentatives de rapprochement intime, car ce serait aller au devant d'un désenchantement réciproque. Nous sommes si infernalement infatués, qu'il nous serait pénible de constater que les Français nous désapprouveraient beaucoup plus cordialement que nous ne les désapprouvons nous-mêmes, en apprenant à quel point la Maçonnerie est chez nous insignifiante et inutile. Or, pour eux, la Maçonnerie signifie quelque chose et ils s'en servent pour quelque chose, alors que tout ce que nous avons su faire ici depuis soixante-dix ans, e'est de recevoir des
profanes et de fortifier la Maçonnerie, comme si un
jour nous avions l'intention de faire usage de la machine, sans cependant en avoir jamais fait usage et sans avoir actuellement plus de chance de nous en servir qu'au cours du dernier demi-siècle. »