La nature engendre ce minéral
dans le sein de la terre. Il y en a deux espèces que l'on peut
trouver en diverses localités de l'
Europe. Le meilleur que j'ai
eu et qui a été trouvé bon après essai est
extérieur dans la figure du monde supérieur, à
l'Orient de la
sphère solaire. Le second se trouve dans l'
astre
méridional et aussi dans la première
fleur que le gui
de la terre produit sur l'
astre (1). Après
la première
fixation, il devient rouge ; en lui sont cachées
toutes les
fleurs et toutes les
couleurs minérales. Les Philosophes
ont beaucoup écrit sur lui parce qu'il est d'une nature froide
et humide voisine de celle de l'
eau.
Pour tout ce qui est science et expérience,
les Philosophes qui m'ont précédé ont pris pour
cible le
Rocher de la vérité, mais aucun de leurs traits
n'a rencontré le but, ils ont cru que le
Mercure et le Soufre
étaient les principes de tous les Métaux, et ils n'ont
pas mentionné, même en songe, le troisième principe.
Cependant, si par l'art spagyrique, on sépare en plus de l'
Eau,
il me semble que la Vérité que je proclame est suffisamment
démontrée ; ni Galien, ni Avicenne ne la connaissaient.
S'il me fallait décrire pour nos excellents physiciens le nom,
la
composition, la
dissolution, la
coagulation, s'il me fallait dire
comment la nature agit dans les êtres depuis le commencement du
monde, il me suffirait à peine d'une année pour l'expliquer
et des peaux de tout un troupeau de vaches pour l'écrire.
Or, j'affirme que dans ce minéral, on trouve
trois principes, qui sont : le
Mercure, le Soufre et l'
Eau métallique
qui a servi à le nourrir ; la science spagyrique peut extraire
cette dernière de son propre suc quand elle n'est pas tout à
fait mûre, au milieu de l'
automne, de même la poire sur
l'
arbre. L'
arbre contient la poire en puissance. Si les astres et la
nature concordent, l'
arbre émet d'abord des branches vers le
mois de mars, puis les boutons poussent, ils s'ouvrent, la
fleur apparaît,
et ainsi de suite jusqu'en
automne où la poire mûrit. C'est
la même chose pour les métaux. Ils naissent d'une façon
semblable dans le sein de la terre. Que les alchimistes qui cherchent
le Trésor des trésors notent ceci soigneusement. Je leur
indiquerai le chemin, le commencement, le milieu et la fin ; dans ce
qui suit, je vais décrire l'
eau, le soufre et le baume particulier
du trésor. Par la résolution et la
conjonction, ces trois
choses s'uniront en une.
DU
SOUFRE DU CINABRE
Prends du
cinabre minéral et opère
ainsi. Cuis-le avec de l'
eau de
pluie dans un vase de pierre pendant
trois heures ; purifie-le ensuite avec soin et dissous dans une
eau
régale composée de parties égales de
vitriol, de
nitre et de sel ammoniac (autre formule :
vitriol, salpêtre,
alun
et sel ordinaire).
Distille dans un
alambic en cohobant. Tu sépareras
ainsi soigneusement le pur de l'impur. Mets ensuite à
fermenter
pendant un mois dans le
fumier de cheval. Ensuite, sépare les
éléments selon ce qui suit : quand le signe apparaîtra,
commence par distiller dans l'
alambic avec le
feu du premier degré.
L'
eau et l'
air monteront, le
feu et la terre resteront dans le fond.
Cohobe et mets l'
alambic au
feu de cendres. L'
eau et l'
air monteront
d'abord, puis l'élément du
feu, que les artistes habiles
reconnaîtront facilement. La
Terre restera dans le fond de l'
alambic,
tu la recueilleras ; beaucoup l'ont cherchée et peu l'ont trouvée.
Tu prépareras selon l'Art cette terre morte dans un
fourneau
à réverbère, puis tu lui appliqueras le
feu du
premier degré pendant quinze
jours et quinze nuits. Ceci fait,
tu lui appliqueras le second degré pendant autant de
jours et
autant de nuits (ta matière aura été enfermée
dans un vase scellé
hermétiquement). Tu trouveras enfin
un sel volatil semblable à un alcali très léger,
contenant en soi l'
essence du
feu et de la terre.
DU
LION ROUGE
Ensuite, prend le
lion qui a passé le premier
dans le récipient dès que tu aperçois sa teinture,
c'est-à-dire le
feu qui se tient au-dessus de l'
eau, de l'
air
et de la terre. Sépare-le de ses impuretés par trituration.
Tu auras alors le véritable or potable. Arrose-le d'
alcool de
vin pour le laver ; puis distille dans un
alambic jusqu'à ce
que tu ne perçoives plus au
goût l'acidité de l'
eau
régale.
Enferme ensuite avec soin cette
huile de
soleil
dans une retorte fermée
hermétiquement. Chauffe pour l'élever,
de telle sorte qu'elle se sublime et se dédouble. Place alors
le vaisseau toujours bien
fermé dans un endroit frais. Chauffe
de nouveau pour élever, replace au frais pour condenser. Répète
cette manuvre trois fois. Tu auras ainsi la teinture parfaite
du
soleil. Réserve-la pour plus tard.
DU
LION VERT
Prends du
vitriol de
Vénus, préparé
selon les règles de l'art spagyrique ; ajoutes-y les
éléments
de l'
eau et de l'
air que tu avais mis de côté. Mélange,
fais putréfier pendant un mois comme il a été dit.
La putréfaction finie, tu remarqueras le
signe des
éléments. Sépare et tu verras bientôt
deux
couleurs, le blanc et le rouge. Le rouge est au-dessus du blanc.
La teinture rouge du
vitriol est tellement puissante qu'elle teint en
rouge tous les
corps blancs, et en blanc tous les
corps rouges, ce qui
est merveilleux. Travaille sur cette teinture dans une cornue et tu
en verras sortir la noirceur. Remets dans la cornue ce qui a distillé,
et recommence jusqu'à ce que tu obtiennes un liquide blanc. Sois
patient et ne désespère pas de l'uvre.
Rectifie jusqu'à ce que tu trouves le
lion
vert, brillant et véritable, que tu reconnaîtras à
son grand poids. C'est la teinture de l'Or. Tu contempleras les signes
admirables de notre
lion vert, qu'aucun des trésors du
lion romain
ne pourrait payer. Gloire à celui qui a su le trouver et en tirer
la teinture ! C'est le vrai baume naturel des planètes célestes
; il empêche la putréfaction des
corps, et ne permet pas
à la lèpre, à la goutte, à l'hydropisie
de s'implanter dans le
corps humain. Lorsqu'il a été
fermenté
avec le soufre de l'or, on le prescrit à la dose d'un grain.
Ah ! Charles l'Allemand, qu'as-tu fait de tes trésors
de science ? Où sont tes physiciens ? Où sont tes docteurs
? Où sont ces bandits qui purgent et médicamentent impunément
? Ton
firmament est bouleversé ; tes astres, hors de leurs orbites,
se promènent bien loin de la voie marécageuse qui leur
avait été tracée ; aussi tes yeux ont-ils été
frappés de cécité, comme par un
charbon incandescent,
quand tu as contemplé notre splendeur et notre fierté
superbe. Si tes
adeptes savaient que leur prince Galien (qui est en
enfer) m'a écrit des lettres pour reconnaître que j'ai
raison, ils feraient le signe de la
croix avec une queue de renard !
Et votre Avicenne ! Il est assis sur le seuil des enfers ; j'ai discuté
avec lui de son or potable, de la teinture physique, du mithridate et
de la thériaque. Ô hypocrites, qui méprisez les
vérités que vous enseigne un vrai médecin, instruit
par la nature, fils de
Dieu lui-même ! Allez toujours, imposteurs,
qui ne prévalez qu'à l'aide de hautes protections. Mais
patience ! Après ma mort, mes
disciples se lèveront contre
vous, ils vous traîneront à la face des cieux, vous et
vos sales drogues, qui vous servent à empoisonner les princes
et les grands de la chrétienté.
Malheur sur vos têtes au
jour du
jugement
! Moi au contraire, je sais que mon règne viendra. Je règnerai
dans l'honneur et la gloire. Ce n'est pas moi qui me loue, c'est la
Nature, car elle est ma mère et je lui obéis encore. Elle
me connaît et je la connais. La lumière qui est en elle,
je l'ai contemplée, je l'ai démontrée dans le
Microcosme
et je l'ai retrouvée dans l'Univers.
Mais il me faut revenir à mon sujet pour
satisfaire les désirs de mes
disciples, que je favorise volontiers,
quand ils sont pourvus des lumières naturelles, quand ils connaissent
l'astrologie, et surtout quand ils sont habiles dans la philosophie,
qui nous apprend à connaître la matière de tout.
Prends quatre parties en poids de l'
Eau métallique
que j'ai décrite, deux parties de la
Terre de
Soleil rouge, une
partie de Soufre du
Soleil. Mets le tout dans un
pélican, solidifie
et désagrège trois fois. Tu auras ainsi la Teinture des
alchimistes. Nous ne parlerons pas ici de ses propriétés
puisqu'elles sont indiquées dans le
Livre
des Transmutations. Avec une once de Teinture du
Soleil,
tu pourras teindre mille onces de
Soleil ; si tu possèdes la
teinture du
Mercure, tu pourras de même teindre complètement
le
corps du mercure vulgaire. De même, la teinture de
Vénus
transmuera complètement en métal parfait le
corps de
Vénus.
Toutes ces choses ont été confirmées par l'expérience.
Il faut entendre la même chose pour les teintures des autres planètes
:
Saturne, Jupiter,
Mars, la
Lune. Car de ces métaux, on tire
aussi des teintures ; nous n'en dirons rien ici, en ayant amplement
parlé dans le traité de la Nature des choses et dans les
Archidoxes.
J'ai suffisamment décrit, pour les spagyristes,
la matière première des métaux et des minéraux
; maintenant, ils connaissent la teinture des alchimistes. Il ne faut
pas moins de neuf mois pour préparer cette teinture ; travaille
donc avec ardeur, sans te décourager ; pendant quarante
jours
alchimiques, fixe, extrais, sublime, putréfie, coagule en pierre,
et tu obtiendras enfin le
Phénix des philosophes.
Mais ne vas pas oublier que le soufre du
cinabre
est un
Aigle, qui vole sans faire de vent, et qu'il transporte le
corps
du vieux
Phénix dans un nid où il se nourrit de l'élément
du
feu. Ses petits lui arrachent les yeux, ce qui produit la
blancheur.
C'est là le baume de ses intestins qui donne la vie au cur,
selon ce qu'ont enseigné les cabalistes.
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(1) Ce passage
est incompréhensible. Pour ne pas qu'on puisse s'en prendre à
nous, voici le texte :
Optimum quod mihi oblatum, ac in experimentando,
genuinum inventum est extra in figura majoris mundi, est in oriente
astra sphœræ solis Alterum in Astro meridionaÏi, jam in primo flore
est, quem Viscus terræ per suum Astrum protrudit. [Retour
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