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La Toison d'Or

Baron H. Kervyn Lettenhove
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      Tel était le vœu de la jeunesse et de l'amour de ce modèle des preux du XVème siècle ! Mais ici « l'amour n'intervient que pour ajouter au courage, je ne sais quoi de noble, de généreux ».

      On ne peut, du reste, oublier qu'un double vœu lie la chevalerie et conséquent la Toison d'or qui en est la fleur ; c'est celui d'honorer et de servir les dames. « Oui, c'est bien à l'amour que toute la chevalerie et la Toison d'or doit ce réflet de délicatesse et de grâce dont le charme séduit encore. » (39).

      Quelque brillantes que soient les armures des chevaliers que nous avons vu descendre dans la lice, nous sommes sûrs d'y trouver une fleur, un ruban, un nœud de dentelles ou une écharpe qui nous apprend que celui qui brave ces périls, espère à son retour trouver « douce merci ». Froissart, d'ailleurs, nous avait déjà dit que parmi les poursuivants d'armes, il en est plus d'un qui se nomme lui-même le poursuivant d'amours. Ne savons-nous pas, du reste, que l'amour inspire le courage, est la source des grandes actions, le mobile des nobles dévouements et que dans les tournois, comme un poète le disait alors :

« Amour fait les lances briser.
Amour fait chevaux trébucher. »

      Rien n'était plus vrai, car nous avons bien des épisodes qui nous prouvent que les dames étaient l'âme des joûtes. Les chevaliers, par exemple, n'en terminaient jamais aucune sans faire en honneur des dames, une dernière passe qu'ils nommaient lance des dames : ils accentuaient encore cet hommage en combattant pour elles successivement à l'épée, à la hache et à la dague, avec une bravoure qui cherchait dans leurs regards son meilleur encouragement.

      Ils savent tous, comme Froissart l'enseigne, que « ce n'est pas par des discours, mais par de nobles faits d'armes qu'on sert les dames ».

      Celles-ci, d'ailleurs garnissent toutes les estrades. Ce sont elles qui voient et qui jugent ceux qui portent leurs chaînes ou leurs rubans.

      Alors, tout naturellement, « se battaient l'ung l'aultre si ardemment qu'on ne sçavoit nombrer les coups qui y étaient ruez ». Et si les chevaliers sont à cheval, de même ils s'atteignent de leurs lances sur leurs heaumes d'aciers avec une telle violence que « les étincelles toutes vermeilles en volent ».

      Mais rien n'encourageait plus les courages et n'augmentait davantage l'ardeur des combats que les « esbattements des dames et des damoiselles », car « par la présence d'une belle dame et son doulx admonestement un homme doit en valoir deux » (40). « Jamais ne suis-je salué de mon amie, disait un chevalier, si je n'ai versé mon adversaire à terre ! »

      C'était encore pour « raffreschier les cœurs » que les trompettes faisaient entendre leurs fanfares guerrières.


      Un bon chevalier, et surtout l'élite dont nous parlons, ne doit pas seulement son amour aux dames lorsqu'elles sont jeunes et belles, il doit à toutes celles qui sont faibles ou persécutées défense et protection.

      Et, en effet, ce n'est pas seulement lorsqu'un chevalier s'avance et qu'il demande si parmi ceux qui l'entourent, il n'en est pas quelques-uns amoureux qui accepteraient de joûter avec lui pour « l'amour de sa dame », que nombreux sont ceux qui relèvent le défi : Un jour (41), un gentilhomme étranger vint de la part d'une dame inconnue « très déconfortée, très oppressée par un de ses puissants voisins qui persevère contre elle en rigueur », demander au duc Philippe « qui est prince de pitié et de compassion envers toutes nobles femmes » si dans sa Maison il ne se trouverait pas quelque chevalier pour défendre en champ clos son honneur et ses intérêts.

      Le bâtard de Bourgogne, J. de Roubaix et le Sire de Commines, tous trois chevaliers de la Toison d'or, réclamèrent aussitôt le privilège de descendre dans la lice pour la « dame inconnue » (42).


      Cependant, en général, les dames ne s'entourent pas de tant de mystère. On en voit même qui accompagnent et tiennent jusqu'à la lice le coursier de leur chevalier.

      C'est ainsi qu'en 1468, à Bruges, au milieu d'un tournoi, où s'étaient déjà distingués plusieurs chevaliers de la Toison d'or, et notamment les sires de Luxembourg et le bâtard de Bourgogne, on vit arriver un chevalier bourguignon, qui avait pris le nom du Chevalier esclave, et qu'une demoiselle errante menait captif à sa suite. Il fit demander aux dames la permission de prendre part au tournoi. Sa lettre était ainsi conçue :

      « Très-excellente et très-redoutée dame, et vous, princesses, dames et damoiselles, plaisir vous soit de savoir qu'un chevalier esclave, né du royaume d'Esclavonie, est arrivé en cette noble ville sous la conduite d'une damoiselle errante au pouvoir de laquelle il est placé par la volonté de sa dame. Il est vrai, très-illustres princesses, que le chevalier esclave a toute sa vie servi et honoré une dame d'Esclavonie qui, sans l'accepter pour serviteur, lui accordait néanmoins quelque espérance. Cependant le mal d'amour, si longtemps nourri dans son cœur, qui a fait éprouver plus d'angoisses et de peines qu'il n'en pouvait souffrir ; et, par une espérance désespérée, il osa, mais en vain, requérir d'elle miséricorde, grâce et guerdon d'amour. Plein de déplaisir et de rage, il s'était retiré au milieu des bois, des roches de des montages où, pendant neuf mois, il ne vécut que de regrets, de soupirs et de larmes, lorsque la dame, reconnaissant son ingratitude, lui envoya une damoiselle errante, chargé de lui dire que les biens d'amour doivent être mérités par de longs travaux et de longues souffrances ; que plus ils coûtent, plus on s'y attache, et que de tous les péchés d'amour, le plus grand est le désespoir. Elle lui conseillait de voyager et de chercher à oublier sa tristesse, et lui proposait de l'accompagner pendant un an entier, afin de pouvoir raconter à sa dame ses diverses aventures. Le chevalier l'a crue volontiers, et bien que, né au pays d'Esclavonie, il ignore les usages de ces contrées, il s'est souvenu comment plusieurs païens et le preux Saladin lui-même, étant venus au royaume de France pour acquérir louanges et vertus, y avaient été si honorablement accueillis que leurs successeurs infidèles révèrent encore ce royaume plus que tous les autres Etats chrétiens. Il a entendu surtout célébrer la puissance et les vertus de l'illustre maison de Bourgogne. C'est guidé par cette damoiselle errante qu'il s'est rendu ici, où, pour sa première aventure, il a trouvé la noble emprise du chevalier à l'Arbre d'or, et il vient vous supplier de lui permettre d'y prendre part. »

      Cette lettre était signée : « le Chevalier esclave. »

      A ce même tournoi, Philippe de Poitiers se fit conduire sur la place du marché par une jeune fille qui était vêtue de satin et qui montait un cheval dont les mouchetures figuraient l'hermine ; elle était admirablement belle et on la nommait la Dame blanche.

      Faut-il citer encore le tournoi de St Omer, où le duc d'Orléans et le duc de Clèves rivalisèrent de générosité, alors que leurs hérauts criaient à haute voix : « largesse, largesse » et que les « damoiselles » remettaient aux vainqueurs objets d'or et pierres précieuses !

      Faut-il pour donner une idée non seulement du luxe mais encore de la bravoure, de la loyauté de la courtoisie qui présidaient à ces joûtes, raconter celle qui eut lieu, en présence du bon Duc, en 1445, entre le seigneur de Ternant, chevalier de la Toison d'or, et le noble écuyer Galiot de Baltasin, seigneur Castillan, au service du duc de Milan ?

      Le dit Galiot de Baltasin s'était mis en voyage « pour s'avancer en renommée (ce qui doit être le paradis terrestre de tout jeune et noble courage). Un poète lui avait dit :

.... « L'envie
D'honneur que tu as empris
Veut que ton cœur entendis
Soit et mis
A quérir chevalerie
En tous lieux. »

      Et il se dirigea tout naturellement vers la cour du duc de Bourgogne. Trente chevaux suivaient ce jeune écuyer « qui était âgé de trente ans environ et l'un des plus beaux hommes et de la plus belle taille que l'on pouvait voir ; il était puissant et léger à merveille et moult bien renommé pour son âge (43).

      Quand le sire de Ternant, chambellan du duc Philippe et chevalier de la Toison d'or, « sut l'arrivée de l'escuyer Galiot de Baltasin et son intention et qu'il vit ce beau personnage et entendit sa renommée, lui, qui de longuemain avait désiré et cherché de trouver un semblable adversaire pour faire armes, se décida à exécuter ce que tant il ambitionnait... Il choisit pour emprise une manchette de dame faite d'un delié violet, moult gentement brodé et fit attacher icelle emprise à son bras senestre à une aigrette noire et bleue, richement garnie de diamants, de perles et d'autres pierreries. Et moult bien lui séoit porter icelle emprise : car il était moult beau chevalier, sage prudent, et bien enmanieré. »

      Il envoya ensuite le roy d'armes de la Toison d'or « devers le dit Galiot de Baltasin pour lui signifier et dire de par lui qu'il avait chargé et élevé une emprise en intention de faire armes ; et que si son désir était de lever la dite emprise, il trouverait le dit seigneur de Ternant à une heure de l'après-midi en la salle et en la présence du duc de Bourgogne, son prince, son seigneur et maistre et que là il pourrait toucher l'emprise du dit seigneur de Ternant.

      « Moult joyeux se montra le dit seigneur Galiot quand il entendit qu'il trouverait en la maison de Bourgogne ce qu'il cherchait. Et il ne faillit pas de venir, et s'agenouilla devant le duc de Bourgogne, luy requérant à genoux de lui permettre de toucher à l'emprise que portait le seigneur de Ternant ; et le bon Duc le fit lever et le lui permit.

      Lors le roy d'armes dit au seigneur Galiat que quand le requérant arrache l'emprise de son compagnon, c'est pour la vie de l'un ou de l'autre ; mais quand on ne fait que toucher seulement, c'est pour chevalerie. Lors lui dit Toison d'or que le Duc voulait que ce fut pour chevalerie. Lors s'avance l'écuyer et toucha à l'emprise...

      Lors donc le seigneur de Ternant assembla dix ou douze chevaux, les meilleurs et les plus renommés du pays....

      Au bout de la lice, il dressa son pavillon qui était de drap de damas noir et bleu, et sur le capital ses armes et son timbre brodé moult richement ; et à l'entour des goutières était écrit en grosses lettres : « Je souhaite avoir assouvissance de mes désirs, et jamais autre bien n'eusse ! »

      Et pareillement fut le pavillon de Galiot tendu de soie à l'autre bout de la lice. Et aussi était le champ paré et la double lice pleine de gens d'armes, et la tribune où le Duc devait être était richement ornée de tapisseries.

      Une heure après midi, se partit le duc de son hôtel, accompagné de Monsieur Charles, Comte de Charolais, son fils, du Comte d'Etampes, du seigneur de Beaujeu, de Monsieur Adolf de Clèves, et de moult grande noblesse...

      Il ne tarda guères que le seigneur de Ternant entra en lice sur un cheval couvert de ses armes en bordure ; et avait sa cotte d'armes au dos et était armé de toutes pièces, le bacinet en la tête et la visière ouverte ; et certes, il avait le visage de chevalier et non pas de pucelle et semblait bien homme à redouter et à craindre. Il était accompagné du seigneur de Beaujeu et du Comte de Saint Pol ; et descendit de cheval sitôt qu'il fut en la lice... et se présenta moult humblement devant le Duc et porta lui-même la parole ; et bien le sut faire et le Duc le reçut avec bienveillance. Puis il rentra dans son pavillon.

      Le Galiot de Baltasion alors entra en lice et l'accompagnait le Comte d'Etampes. Il était armé de tout, la cotte d'armes au dos : il montait un cheval couvert de ses armes. Et sitôt qu'il entra en la lice, il sauta de plein saut hors sa selle, aussi légèrement, bien que tout armé, que s'il n'eût eu que le pourpoint. Le comte d'Etampes le présenta au Duc qui le reçut moult cordialement. Puis il se retire dans son pavillon. »

      « Les cris furent faits, puis les lances baillées par lesquelles le combat devait commencer... Le seigneur de Ternant saillit alors hors de son pavillon sa cotte d'armes au dos, le bacinet en tête, à visière close. Et il fit une grande croix de sa main dextre ; et lui bailla le Comte de St Pol sa lance et la portait plus droite que couchée et marchait froidement d'une marche puissante et assurée et certes il semblait bien chevalier de dure rencontre. D'autre part saillit de son pavillon Galiot de Baltasin, vêtu de sa cotte d'armes, le bacinet en tête et visière close. Et après qu'il se fut signé de sa banderolle, le Comte d'Etampes lui bailla sa lance, laquelle il prit et porta ainsi qu'on tient une lance pour pousser. Beau personnage était l'écuyer et si tôt qu'il tint sa lance, il commença à la manier comme s'il ne tenait qu'une flèche. Et il fit un saut ou deux en l'air si légers et si vite que l'on voyait bien que son armure ne le gênait pas. Et il marchait vigoureusement à la rencontre de son adversaire. Et ils se donnèrent mutuellement un si terrible coup de lance que le fer de celle de Galiot fut brisé d'un demi-doigt et que le bacinet du sire de Ternant fut faussé.

      Ils marchèrent une seconde fois l'un contre l'autre et se firent une nouvelle très dure atteinte. Puis recommencèrent pour la tierce fois et pour abréger le récit d'icelles armes, ils accomplirent les sept pousses ordonnées par les chapitres moult chevaleureusement.

      Les armes de la lance accomplies, les chevaliers retournèrent en leurs pavillons pour se raffraichir et se préparer à un nouveau combat. Et à chacun on présenta un estoc que l'on nomme épée d'armes. Sitôt après le seigneur de Ternant saillit de son pavillon armé comme dessus, mais au lieu de sa cotte d'armes, il avait mis une parure à manches d'un satin blanc tout découpé à manière d'écailles, brodé et chargé d'orfèvreries, d'or branlant, d'une moult élégante façon. Et en le voyant, on pensait à l'un des neuf preux. Il tenait son épée, la main senestre devant et renversée et couverte de sa rondelle.

      De l'autre côté, saillit de son pavillon Galiot de Baltasin et marchèrent l'un à l'encontre de l'autre et se rencontrèrent d'une moult dure atteinte... Et parfirent les onze coups d'épée bien et durement. Et ils se retirèrent dans leurs pavillons.

      Le maréchal de la lice apporta alors deux haches pour achever le combat à pied. Et il ne tarda gueres avant que le seigneur de Ternant ne sortit de son pavillon. Et il portait, au lieu de cotte d'armes, une parure à manches d'un drap de damas sur fleur de pêcher, tout couvert et brodé de fusils, de pierres et d'étincelles de feu, ce qui était la devise du bon duc Philippe, son bon seigneur et Maître. Il avait le bacinet sur la tête et tenait sa hache en ses mains. Et c'était une grosse hache pesante, dont l'émail était fait à manière de trois coings à fendre le bois... Fièrement marchait le seigneur de Ternant. Et d'autre part saillit Galiot et sitôt qu'il eut saisi sa hache, il se sourdit tout en l'air moult vigoureusement. Et marchait à l'encontre de son homme de telle vertu et de telle puissance que sa rencontre semblait la plus à redouter de toutes celles que j'ai vues avant et depuis...

      Et courut sus au seigneur de Ternant par telle force que fut obligé le seigneur de Ternant de reculer d'une fois trois ou quatre pas pour soutenir le poids de cette grande puissance. Toutefois il se remit à marcher et se maintint si chevalereusement qu'ils achevèrent les quinze coups.

      Et le Duc jeta sa baguette blanche et ils furent amenés devant lui visières levées, chacun la hache au poing ; et certes c'étaient deux moult beaux et deux moult fiers personnages à voir. Chacun s'offrit de son côté à parachever les armes si faute y avait : et le Duc répondit que bien et valeureusement ils avaient accomplis leurs armes. Ils prirent alors congé du Duc, mais sans se toucher parce qu'ils avaient encore à accomplir leurs armes à cheval.

      Le lendemain eurent lieu les armes à cheval... le seigneur de Ternant arriva le premier dans la lice armé de toutes pièces excepté la tête. Il était monté sur un coursier revêtu d'une couverture décorée de ses pleines armes et chargée d'orfèvrerie branlant. Et après lui venaient deux officiers d'armes qui menaient un autre coursier par la bride. Ce coursier était revêtu d'un drap (serré autour de son corps) qui était de damas mi-partie bleu, mi-partie noir, couleurs du dit seigneur. Cette parure du coursier était brodée entièrement de fil d'or. Et avait le dit coursier le crin, le toupet et la queue tout de fil d'or ; et fut ce cheval sellée de selle étoffée de même et d'un petit harnais de velours cramoisi... Ainsi se présenta au Duc le seigneur de Ternant, puis se retira pour armer sa tête.

      D'autre part, vint Galiot armé de toutes armes, l'armet en tête avec un grand plumet d'Italie : son cheval (qui fut un puissant roussin) était couvert d'une barde de cuir de buffle peinte à sa devise (qui fut à manière de ceintures tortillées). Il était suivi de trois chevaux couverts de soie et d'orfèvrerie de divers sortes... Et à chacun furent baillées une lance et une épée. Si se préparèrent les champions pendant qu'on faisait les cris accoutumés. Ils mirent chacun la lance sur la cuisse et le seigneur de Ternant avait ceint son épée comme on la porte communément à la guerre ; et Galiot avait mis la sienne en sa main sénestre toute nue et la tenait avec la bride. Ils se brochèrent l'un à l'encontre de l'autre. Et l'on voyait bien à sa manière de courir que le seigneur de Ternant voulait et cherchait à employer sa lance. Mais Galiot (qui se sentait puissamment monté) cherchait la rencontre des chevaux, tellement qu'ils se rencontrèrent et si durement que le cheval du seigneur de Ternant fut abattu sur son cul ; mais le coursier fut bon et le chevalier adroit et il se releva promptement... Et de nouveau, ils se coururent sus âprement. Galiot ferrait de haut et de taille moult grands coups. Ternant ferrait deux coups de haut, l'un devant main, l'autre de renvers : puis les chevaux se joignirent et le sieur de Ternant commença à charger son compagnon et à l'attaquer de la pointe de l'épée par dessous l'armet, visant à la gorge, sous les esselles, à l'entour du croissant de la cuirasse... et partout le trouva si bien armé et pourvu que nulle blessure n'en advint....

      Et le Duc jeta son baston et ils furent alors amenés devant lui les visières levées ; et ils lui demandèrent tous deux s'ils avaient bien accomplis les trente un coup prescrits. Le Duc leur dit qu'il était très content d'eux et il les fit se toucher et embrasser ensemble. Et ainsi furent terminées icelles armes qui furent dures et de grande estime » (44).

      Le chevalier de la Toison d'or en sortait tout glorieux, mais son adversaire avait montré tant de valeur et d'adresse que le bon Duc qui tenait en si haute estime « les gens chevaleureux », « festoya Galiot de Baltasin, et le fit asseoir à sa table et avant son départ lui donna de grands dons. »


      Les joutes qui suivent les chapitres tenus par Charles le hardi ne le cèdent en rien à celles que présidait son père et dont les détails que nous venons de donner, montrent l'éclat. Lorsque ce prince y vient, il est accompagné de toute sa cour et de la suite la plus brillante. Faut-il rappeler que ses grands pensionnaires comprennent six ducs, douze princes, marquis et comtes, que ses chambellans sont au nombre de cent trente, qu'il a seize écuyers, illustres damoiseaux, quarante varlets, etc., etc.

      Et alors encore, quand le tournoi finissait et que « les trompettes avaient sonné à gros deduyctz » pour honorer les partenaires et les chevaliers et que les combattants avaient fait la révérence au Duc et aux dames, de grands banquets étaient donnés par le Chef et Souverain de la Toison d'or.


      Des traités existaient pour régler chacun de ces détails et aussi pour célébrer dignement par des festins, des danses et des esbattements, ces compléments presqu'obligatoire des Chapitres de la Toison d'or.

      Rien ne peut donner une idée du luxe et du soin avec lesquels les entremets, les décors, et les spectacles de ces festins sont préparés. En 1450, cinquante et un peintres y travaillent pendant un mois ; et quels peintres puisque R. van der Weyden, Daret, etc., en sont ! En 1468, nous comptons cent trente six peintres et vingt neuf sculpteurs que le Duc a appelés à Bruges ! Les ménestrels n'étaient pas oubliés et non plus les joueurs de luth et de harpe.


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(39)  Froissart. Etude littéraire par le Bn Kervyn de Lettenhove.

(40)  Froissart.

(41)  C'était en 1462.

(42)  Ce tournoi eut lieu et porte ce nom.

(43)  Olivier de la Marche.

(44)  Olivier de la Marche.




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