LXI LXXX
LXI
Lorsque
Diane est toute nue,
Apollon de même, on les distingue facilement et rien n'empêche leur légitime
conjonction pour la
procréation du
soleil qui est leur
enfant. Mais, pour réveiller leur fécondité et les rendre propres à la
génération, il a fallu les
animer en les purifiant avec l'
huile vitale qui est l'
eau de la pierre, dit un philosophe. Il a fallu
diviser le
corps coagulé en deux parties pour en tirer cette
huile vitale, ou ce lait destiné à la nourriture de l'
enfant nouveau-né qui contient en soi les deux sexes et les assemble en unité de nature et
d'
essence.
LXII
Notre laton est rouge dans son commencement. Mais il nous est inutile si la rougeur ne se change pas pour faire place à la
blancheur.
Si on l'a une fois, il blanchit et il devient de très grand prix, enseigne d'Astin. Mais comme dit ce philosophe avec tous les autres, la première
couleur qui paraît dans notre sujet est la noirceur, après laquelle vient la
blancheur et ensuite se fait voir la rougeur claire et brillante et pour lors, dit la savante
Marie, son obscurité s'étant retirée, ce laton se change en pur or et ce qui lui procure cette
blancheur, et cette splendeur est notre azot.
LXIII
L'azot qui a été formé du limon resté après la retraite des
eaux du
déluge, comme le
serpent Python, est vaincu par les
flèches d'Apollon qui sont les rayons de notre
soleil ou par la
force
de notre
airain qui enfin devient le maître et se faisant justice, rend le sec de première
couleur orangée rouge. Il ôte même la robe blanche à l'azot qui en devient si changé qu'il prend la
couleur et la nature de notre
airain et tout se fait rouge, dit le docte Parménidès ; et c'est le signe que le Seigneur a fait son temps et qu'après le temps se fait l'éternité fixe et incorruptible.
LXIV
Apprenons ici de Morien qu'il faut bien laver ce
corps immonde qui est le laton qui doit être desséché et blanchi parfaitement et l'on doit lui infuser une
âme et lui ôter toute son ordure afin qu'après
la mondification, la teinture blanche entre en lui. Car un
corps étant bien purifié, l'
âme entre d'abord dans ce
corps ; et il ne s'unit jamais à un
corps étranger ni même au sien propre s'il n'est pur et net, car les superfluités qui se trouvent dans nos
corps, quoiqu'elles ne soient pas en grande quantité, empêchent leur union parfaite.
LXV
On ne lave le laton que pour le rendre propre d'embrasser sa latona et s'unir avec elle d'une
Union indissoluble. Mais comme l'un porte le
feu et l'autre contient l'
eau, on doit bien purifier l'un et l'autre de leurs
immondices naturelles. Il est vrai qu'ils se trouvent tous dans notre
androgyne, mais comme c'est un
chaos où les
éléments sont plutôt confondus qu'ils ne sont unis, on ne saurait les unir fortement sans les purifier, ni les purifier sans les séparer, ni les séparer sans détruire le
composé. Il faut les
diviser en partie et séparer ainsi les
éléments.
LXVI
Comme notre pierre doit naître de ce
chaos ou masse confuse dans laquelle tous les
éléments sont confus, il est nécessaire de séparer la terre du
feu et le subtil de l'épais, comme dit notre père
Hermès, le subtil monte en haut avec l'
air et l'épais demeure au fond avec le sel. Mais la terre contient le
feu avec le sel de gloire et l'
air se trouve avec l'
eau. On ne voit pourtant que la terre et l'
eau. Ôtez donc le phlegme de l'
eau et la pesanteur de la terre, et les
éléments seront purs et bien
unis.
LXVII
Cette union ou
conjonction des
éléments purifiés est la seconde opération de la pierre qui se trouve après la mondification, et la pierre se trouve parfaite si l'
âme est fixée dans le
corps. Mais comme ce n'est que le terme du premier ouvrage, la matière est bien parfaite et sera l'or vif et le soufre
incombustible. Mais il n'est pas tingeant et l'on doit tourner la roue pour la seconde et troisième fois, avec le même soufre qui sert de
ferment, mais le premier ouvrage fini, commence le second où la sublimation philosophique est nécessaire afin que le fixe soit fait volatil et le
corps esprit.
LXVIII
Dans le premier ouvrage qui comprend plusieurs opérations, on ne travaille qu'à volatiliser le fixe et à
fixer le volatil, ressusciter le mort et tuer le vif, et son terme est lorsque le tout est réduit comme en poudre
fixe qui est l'or pur, meilleur que celui des minières. Sans lui, on ne saurait avoir la pierre quoiqu'il ne soit pas la pierre. La pierre est pourtant en lui comme dans son berceau. Il n'est pas l'or vulgaire, car il est plus pur et n'est qu'un pur
feu en mercure. On peut néanmoins le
fondre et le débiter pour or vulgaire, car il est or à toute épreuve.
LXIX
Dans le second ouvrage qui est la multiplication de cet or, l'or est augmenté en quantité par l'addition de nouvelle matière et l'or sert de levain à sa propre multiplication par une simple
digestion de ce levain avec la
farine et l'
eau métallique. On fait de l'or et le levain sert toujours de minière. Les philosophes procèdent encore autrement. Ils élèvent leur or ou levain en degrés et l'augmentent si bien en qualité qu'il surpasse l'or et devient teignant et
fondant. C'est ce qu'on appelle pierre qui se multiplie à l'
infini.
LXX
L'
eau métallique, qui revivifie l'or fixé à la fin du premier ouvrage, est cette
huile vitale dont parle un anonyme et qui est unie à l'essenciel, au minéral et
eau végétable pour être comme elle est, le
dissolvant radical de l'or. C'est cette
huile dont les philosophes font bonne provision afin qu'elle ne leur manque pas au besoin, comme elle fit aux vierges folles. Cette
huile est l'
eau de la pierre tirée d'elle en la première opération dit le sage jardinier. Sans cette
eau, rien ne se fait dans le second ouvrage et le premier ne se fait pas sans elle. Cette
eau est un
feu car elle le porte et sur elle est porté l'
esprit du Seigneur.
LXXI
En cette
eau consiste le plus grand secret des sages. Nous avons dit que c'était l'
eau de la pierre quoiqu'il soit vrai qu'elle n'est pas dans un sens l'
eau de la pierre. C'est une
eau mercurielle, mais ce n'est pas le mercure des philosophes. C'est plutôt le mercure du mercure de la nature, le bain-marié des sages, le
feu humide et secret d'Artéphius, le vase des philosophes auquel
la chose sèche adhère dans la sublimation. C'est le sperme des métaux, l'humide radical, l'
eau philosophique d'
Hermès qui suffit avec une seule chose. Cette
eau lave le laton et dissout l'or parfaitement.
LXXII
La chose unique qui suffit à notre
eau hermétique est la terre vierge qui contient les quatre
éléments. C'est notre première matière, à savoir un
corps solide et le commencement de l'uvre, comme dit
Basile Valentin. C'est cette chose si cachée et si précieuse dont se fait uniquement tout notre ouvrage et laquelle se perfectionne en elle-même n'ayant besoin que de la
digestion, sans addition d'aucune chose étrangère. Cette chose est notre pierre qui n'a besoin que du secours de l'artiste. C'est cet
airain que
Dieu a créé, qu'on peut aider, en détruisant son
corps crud et tirant le bon noyau.
LXXIII
Si la
dissolution de notre
corps qui est l'
airain susdit est nécessaire, la
congélation de l'
eau mercurielle resserrée dans les liens de la pierre saturnienne ne l'est pas moins et pour toutes les différentes
opérations, la putréfaction est absolument nécessaire. Cette
putréfaction se fait par le moyen d'une petite
chaleur afin que la pierre se putréfie en soi-même et se résolve en sa première
humidité, que son
esprit invisible et tingeant où l'
esprit de l'or est enclos dans le profond d'un sel congelé, soit mis au dehors et que son
corps grossier étant subtilisé soit ainsi uni indivisiblement avec son
esprit.
LXXIV
II n'y a aucune autre
eau sous le
ciel qui soit capable de
dissoudre notre
airain, exceptée une
eau très pure et très claire, laquelle dissout sans
corrosion. Cette
eau s'échauffe elle-même à la rencontre
du
feu qui lui est
homogène. C'est l'
eau dissolutive et permanente et la fontaine du rocher, dont les philosophes ont parlé diversement. Il ne faut pas s'étonner si cette
eau dissout l'
airain, parce qu'elle est de sa nature. Car l'
airain est l'or sans ambiguïté et cette
eau est une
eau d'or laquelle transmue le
corps en soi. En sorte que tout devient
eau, et puis transmuée en
corps, est
corps.
LXXV
II sort une
eau de notre
airain qu'Aristée appelle
eau permanente. C'est elle qui gouverne le
corps et qui pourtant est gouvernée par lui. Car elle le rompt, elle le brise et le
corps la tue et la fait mourir. Elle le réduit en
eau et lui la réduit en terre, mais il faut qu'ils soient mêlés ensemble par le
feu d'amitié. Il faut continuer ce procédé jusqu'à ce que tout soit fait rouge. C'est ici l'
airain brûlé et la
fleur ou levain de l'or et par un prodige étonnant, cet
airain est brûlé par l'
eau et lavé par le
feu, et on voit en tout cela, l'accord des
éléments et l'accord de tous les philosophes.
LXXVI
Les philosophes ont appelé l'
eau dont nous venons de parler, un
serpent qui mord sa queue. Mais les
envieux, dit Parménidès, ont parlé de plusieurs sortes de manières d'
eau, des bouillons et des pierres et des métaux, et qui entend cette doctrine entend ce qu'il y a de plus fin dans notre art et de plus difficile dans notre ouvrage et dans nos matières. Mais laissez tout cela et prenez l'
eau vive puis la
congeler dans son
corps et son soufre qui ne
brûle point et tout sera blanc.
LXXVII
Tout sera blanc dit Parménidès et vous ferez notre nature blanche. Sachez, dit Aristeus, que tout le secret est l'art de
blanchir. Or, ce blanchissement est un pas fort difficile, dit Flamel. Il ne peut se faire sans
eau, dit Artéphius. Car c'est elle qui lave le laton, c'est cette
eau qui fut montrée à Sietus et que ce philosophe assure être pur vinaigre très aigre, qui a le pouvoir de donner la
couleur blanche et rouge au
corps noir et le revêt de toutes les
couleurs qu'on peut imaginer, qui convertit le
corps en
esprit. C'est le vinaigre des
montagnes qui défend le
corps de
combustion, car
sur le
feu, il se
brûle sans ce vinaigre.
LXXVIII
Ce vinaigre très aigre est notre
eau première et le vinaigre des
montagnes, du
soleil et de la
lune ou plutôt de
Mercure et de
Vénus. C'est une
eau permanente, car elle demeure constamment unie à notre
corps ou à nos
corps du
soleil et de la
lune lorsqu'elle les a dissous radicalement. Notre
corps reçoit de cette
eau une teinture de
blancheur si spéciale et si éclatante qu'elle jette ceux qui la contemplent en admiration. Cette
eau si blanche tient du mercure et du soufre. Elle est
soleil et
lune en dedans, comme le
corps est en dehors. Elle blanchit notre
airain et dissout le
corps amiablement.
LXXIX
L'
eau qui dissout notre
corps si amiablement est une
eau qu'on peut appeler la première quoiqu'il y en ait de plusieurs sortes qui l'aient précédée mais elles sont
hétérogènes et ne sont point comptées dans notre ouvrage. Elles ne sont pas du nombre de nos menstrues
homogènes comme est notre
eau blanche première, dissolutive, qui est métallique, mercurielle, saturnienne, antimoniale, ainsi qu'en parle Artéphius. Cette
eau blanchit l'or, c'est-à-dire notre laiton et le réduit en sa première matière qui est le soufre et le mercure, qui brillent comme un miroir.
LXXX
Ce soufre et ce mercure qui restent après la
dissolution du
corps crud et qui brillent comme une glace de cristal bien poli, sont tirés de ce
corps crud par le moyen d'une
eau ou
fumée blanche, intérieurement mais qui est dans le commencement couverte de ténèbres, de l'abîme ; et ces ténèbres sont chassées par l'
esprit du Seigneur qui se meut sur les
eaux qui ont été créées avant l'arrangement des parties du
chaos, lorsque le
ciel et la terre furent faits. Cette
eau première, dissolutive du
corps, est une
eau claire et sèche, c'est un mercure de la nature qui en
dissolvant tire le mercure du
corps.