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Théories et symboles des alchimistes

Albert Poisson
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PREMIÈRE PARTIE – LES THÉORIES

CHAPITRE IV

L'Alchimie mystique – Théories fantaisistes – La Cabale alchimique
Triple adaptation de la théorie hermétique – Le sanctuaire

      L'Alchimie chez les Grecs était, en raison même de son origine, mêlée à la magie et à la théurgie. Plus tard, grâce aux philosophes arabes, cette science s'épura, et ce n'est qu'au XVème et XVème siècles qu'elle s'allia de nouveau aux sciences occultes proprement dites.

      Dès lors, un grand nombre d'alchimistes demandèrent à la Cabale, à la Magie, à l'Astrologie, la clef du Grand Œuvre. Paracelse n'admettait parmi ses disciples que des gens versés dans l'astrologie, comme il l'affirme lui-même : « Mais il me faut revenir à mon sujet pour satisfaire mes disciples que je favorise volontiers quand ils sont pourvus des lumières naturelles, quand ils connaissent l'Astrologie et surtout quand ils sont habiles dans la Philosophie qui nous apprend à connaître la matière de tout. » (Paracelse : Le trésor des trésors)

      Alors que ses prédécesseurs ou contemporains, Calid, Valois, Blaise de Vigenère admettaient simplement l'action des astres dans la génération des métaux, Paracelse allait plus loin et prétendait calculer quand et comment les planètes influaient sur les métaux. Suivant cette doctrine, quelques alchimistes alliaient intimement l'astrologie à l'hermétisme, et ils ne commençaient jamais une opération sans s'être assurés auparavant que les planètes étaient favorables.

      C'est encore à Paracelse que l'on doit d'avoir introduit des données cabalistiques dans l'Alchimie. Il a condensé ses doctrines occultes dans son Traité de philosophie occulte et dans ses Archidoxes magiques.

      Ceci nous amène à parler de la Cabale. Cette science consiste à décomposer les mots, à additionner la valeur numérique des lettres et à en tirer, selon des règles spéciales, toutes les déductions possibles (1). Ainsi, le nombre de l'or en hébreu est 209 ; c'est l'ornement du règne minéral. Il correspond à Jéhovah dans le monde des esprits.

      Hoeffer, dans son Histoire de la Chimie, a consacré quelques pages à la Cabale appliquée aux métaux. L'Alchimie, science d'observation, ne pouvait profiter en rien de son alliance à la cabale, science purement spéculative. L'adjonction d'éléments étrangers ne devait que la rendre plus obscure ; aussi Paracelse eut-il tort sur ce point. Avant lui, Basile Valentin avait fait quelques essais dans le même sens ; il décompose le mot Azoth de la façon suivante : « Azoth, commencement et fin, car il est A et O, présent en tout lieu. Les philosophes m'ont orné du nom d'Azoth, les Latins A et Z, les Grecs Alpha et Omega (alpha et oméga), les Hébreux Aleph et Tau (Aleph et Tau), tous lesquels signifient et font Azoth. » (L'Azoth des philosophes)

      Après Paracelse, on ne trouve guère que deux auteurs ayant traité spécialement de Cabale alchimique. Ce sont Panthée, prêtre vénitien, et John Dee, alchimiste et mathématicien anglais. Panthée a écrit deux traités : l'un est l'Ars et Theoria transmutationis metallicæ, et l'autre Varchadumia. On y trouve que le nombre de la génération est 544, celui de la putréfaction 772, que le mercure, l'or et l'argent correspondent aux lettres hébraïques, beth, hé, vau, et autres rêveries semblables. John Dee, dans son traité La Monade hiéroglyphique, a essayé de constituer une cabale particulière à l'aide des symboles alchimiques. Ainsi, pour lui, le symbole du mercure Symbole du Mercure représente la Lune Symbole de la Lune, le Soleil Symbole du Soleil et les quatre éléments Symbole des 4 éléments. De plus, pour lui, le signe du Soleil représente la monade figurée par le point autour duquel le cercle symbolise le monde. Ce curieux traité se trouve imprimé dans le second volume du Theatrum Chimicum.

      Ces alchimistes, et quelques autres tels que Khunrath, Maier, Blaise de Vigenère, introduisirent dans la Science une interprétation nouvelle de la théorie alchimique. Alors que les sciences exactes et naturelles procèdent par induction et déduction, les sciences occultes procèdent par analogie ; ils appliquèrent la méthode de l'analogie à l'alchimie. Ainsi, ils disaient : il y a trois mondes, le matériel, l'humain, le divin. Dans le monde humain, nous avons le Soufre, le Mercure et le Sel, principes de toutes choses, et une Matière ; dans le monde humain ou microcosme, le corps, l'esprit et l'âme réunis en l'homme ; dans le monde divin, trois personnes en un seul Dieu. « Ainsi est Trinité en unité, et unité en Trinité, car là sont corps, esprit et âme. Là est aussi Soulphre, Mercure, Arsenic. » (Bernard le Trévisan : La Parole délaissée) Le Grand Œuvre a par suite un triple but dans le monde matériel : la transmutation des métaux pour les faire arriver à l'or, à la perfection ; dans le microcosme, le perfectionnement de l'homme moral ; dans le monde divin, la contemplation de la Divinité dans sa splendeur. D'après la seconde acception, l'homme est l'athanor philosophique où s'accomplit l'élaboration des vertus ; c'est dans ce sens, selon les mystiques, qu'il faut entendre ces paroles : « Car l'Œuvre est avec vous et chez vous, de sorte que le trouvant en vous-même, où il est continuellement, vous l'avez aussi toujours, quelque part que vous soyez, sur terre et sur mer. » (Hermès : Les sept chapitres)

      Les alchimistes mystiques entendaient par Soufre, Mercure et Sel, la Matière, le Mouvement et la Force. Le Mercure, principe passif et femelle, c'est la matière ; le Soufre, principe actif et mâle, c'est la force qui façonne la matière et lui donne toute espèce de formes par le moyen du mouvement, qui est le Sel.

      Le Sel, c'est le moyen terme, c'est le résultat de l'application de la force à la matière. Symboliquement, c'est le nouvel être qui prend naissance par l'union du mâle et de la femelle. Cette haute théorie ne semble pas en contradiction avec la science actuelle. La chimie ne répugne pas à l'hypothèse d'une Matière unique, hypothèse admise depuis longtemps par la métaphysique comme indispensable à l'explication du monde. Le savant anglais Crookes appelle cette Matière unique le "Protyle" ; dans sa théorie, nos corps simples actuels ne sont que des polymères du Protyle. D'autre part, il est très juste que la Matière n'agit, n'a de propriétés particulières que lorsqu'elle est en mouvement. Tout mouvement suppose chaleur ; par suite, à 271 degrés au-dessus de zéro, au zéro calorique absolu, les propriétés chimiques sont nulles, l'acide sulfurique est sans action sur la potasse caustique ; enfin, l'unité de la Force s'impose aussi aux physiciens. Quel est le savant qui fait aujourd'hui une différence entre la cause du magnétisme, de la chaleur, de l'électricité, de la lumière, du son ? Les fluides n'existent plus, ils sont remplacés par des forces réductibles les unes des autres ; ce qui différencie la Force d'elle-même à nos yeux, c'est le nombre de vibrations qu'elle imprime à tel ou tel corps, et encore n'y a-t-il pas de limite absolue, un corps vibrant ou en mouvement, ce qui est la même chose, produit d'abord un son ; que les vibrations deviennent plus nombreuses, le corps s'échauffe sensiblement, et bientôt il se produit des phénomènes lumineux. Où finit le Son, où commencent la Chaleur et la Lumière ? Il n'y a pas d'intervalle.

      Natura non facit saltus.

      Il faut ajouter que les alchimistes n'avaient qu'entrevu cette haute théorie ; l'état des sciences à leur époque ne leur permettait pas de lui donner le développement que nous lui avons donné. Pour eux, comme nous l'avons démontré, la Matière était unique en principe ; ils l'appelaient "Matière Première" ou "Hyle" ; ils reconnaissaient aussi une force universelle. Baudoin l'appelle "magnétisme universel", "souffle magnétique" ; pour les mystiques, la Force, c'est le Souffle de Dieu, principe premier de la vie, du mouvement. Paracelse l'appelle "Archée". L'Archée, c'est la force, toujours active, qui, en s'appliquant à la matière, la met en mouvement, lui donne une forme. Les termes "Arcs" et "Clissus" ont, dans Paracelse, à peu près le même sens.

      Quant au mouvement, ils l'assimilaient au feu, qui est en effet l'image la plus parfaite de la matière actionnée par la force.

      Telle était la haute théorie alchimique que peu d'adeptes ont possédée. Que l'on ne s'étonne pas de cette admirable synthèse ; le raisonnement avait suffi ici aux alchimistes, comme il suffit jadis à Pythagore, à Démocrite et à Platon pour s'élever à la conception des plus hautes vérités.

      Les alchimistes représentaient cette théorie par un triangle, symbole de l'équilibre absolu : au premier angle, le signe du Soufre, symbole de la Force ; au second, le signe du Mercure, la Matière ; au troisième, le signe du Sel, le Mouvement.

      Pour terminer, voici le tableau analogique de la triple adaptation de la théorie alchimique.

Soufre Mâle Force Cause
Mercure Femelle Matière Sujet
Sel Enfant Mouvement Effet

      Et pour résumer toute la théorie : la Matière, une dans son essence, se différencie d'elle-même par la Forme, effet du Mouvement que lui communique la Force.


FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE




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(2)  Note FS : L'auteur fait ici allusion à la partie de la Kabbale appelée "Guématria"




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