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Le Nouvel Homme

Louis-Claude Saint-Martin
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Colombe


46.

      La raison pour laquelle le nouvel homme, en s'unissant à la source de vie, se trouve dépositaire de si grands trésors, et pouvant manifester dans lui-même de si grandes, et de si salutaires multiplications, c'est que cette source de vie lui fait découvrir, au fond de son être, sept sources actives qui, unissant mutuellement leurs forces diverses, développent les unes par les autres, leurs propriétés particulières, et cela d'une manière qui ne peut plus s'interrompre, et qui rend ces sources intarissables, puisque c'est la source de la vie qui les anime, et qui les entretient.

      Ce sont là comme autant de bases sacramentelles que nous portons tous en nous-mêmes, et sur lesquelles doit s'élever tout édifice sacerdotal auquel l'homme fut destiné par sa nature première, et selon les plans de son origine. Ce sont là les sept colonnes produites par cette pierre innée en nous, et sur laquelle le Réparateur a dit qu'il voulait bâtir son Eglise.

      Cette pierre est carrée, et taillée par le ciseau de l'esprit, et elle doit servir de base à ce temple divin destiné à remplacer dans le nouvel homme les tentes qui, jusqu'alors, ont été le seul asile de l'arche sainte, ou de la vérité. C'est là cette porte du temple qui était carrée, selon le prophète Ezéchiel (41:21) et à laquelle répondait la face du sanctuaire, étant en regard l'une devant l'autre. C'est par cette porte que les oracles du sanctuaire doivent se promulguer au peuple, selon Isaïe (9:8) : Le seigneur a envoyé sa parole à Jacob, et elle a été vérifiée dans Israël, tout le peuple le saura, Ephraïm, et les habitants de Samarie. C'est par cette même porte que doivent entrer les nations pour venir adorer dans le temple de Jérusalem, et ce sont les sept colonnes élevées dans le temple qui font que ce temple est parfaitement solide, et que les nations peuvent y habiter en sûreté, puisque Salomon nous dit (Proverbes 9:1) que la sagesse elle-même s'est bâtie une maison, et qu'elle a taillé sept colonnes.

      Nouvel homme, contemple-toi donc avec respect. Tu as, en face de toi, le sanctuaire ou l'unité éternelle et divine ; tu as, au fond de ton être, la base fondamentale du temple, et tu trouves en activité dans ce temple, les sept sources sacramentelles qui, étant vivifiées par la source de vie, doivent à jamais fertiliser toutes les régions qui te composent. C'est à toi de veiller sans cesse pour que les eaux de cette source de vie ne se détournent point de leur cours naturel, et qu'elles viennent journellement se rendre dans tes sept canaux spirituels. Jamais elles ne se détourneront d'elles-mêmes, parce que, par leur propre pente, elles tendent à venir chercher leur repos en toi : mais si tu n'as pas un soin continuel de leur préparer les voies, en faisant tailler, et polir par l'esprit la pierre fondamentale de ton temple, et en la maintenant exactement dans son aplomb, ces eaux divines se répandront, au lieu d'entrer dans tes sept canaux spirituels, et elles ne te procureront aucun avantage ; parce que c'est cette pierre fondamentale de ton temple qu'elles ont choisie, comme étant la seule mer assez immense pour leur servir de réservoir.

      Cette pierre fondamentale est réellement la racine de ces sept sources sacramentelles que le nouvel homme découvre en lui lorsqu'il a subi les épreuves préparatoires, et indispensables, comme c'est là où il a découvert ce divin instituteur dont nous avons parlé précédemment, et qui, étant assis sur la chaire antérieure à toutes les chaires temporelles, a prononcé devant lui, sur la vraie montagne, les discours et les instructions qui doivent servir de guide, et de règle au peuple d'Israël, s'il veut maintenir dans les privilèges de son élection.

      La racine de ces sources sacramentelles se trouvant donc la pierre fondamentale de notre temple, nous portons en nous-mêmes le témoignage et le caractère vivant qui doit nous faire respecter des nations ; et le nouvel homme peut dire à l'imitation du Réparateur : "Comme le père a la vie en lui-même, il né aussi au fils d'avoir la vie en lui-même, et il lui a donné la puissance d'exercer le jugement parce qu'il est fils de homme..." Aussi il peut dire comme le Réparateur : "Je ne reçois point le témoignage d'un homme... j'ai un témoignage plus grand que celui de Jean... et mon père qui m'a envoyé a rendu lui-même témoignage de moi."

      Le nouvel homme peut, dis-je, tenir ce langage, parce que quand il a découvert en lui la pierre fondamentale du temple, il a reconnu également qu'elle n'était que le fruit, l'extrait, le produit et le témoin de l'unité même, et que si cette pierre fondamentale était le témoin de l'unité, l'unité à son tour était le témoin de cette pierre fondamentale, puisque le fils est le témoin du père, comme le père est le témoin du fils.

      C'est ce double témoignage qui assure à jamais la dignité de ce nouvel homme, et qui fait la base de sa confiance et de sa sécurité ; c'est, en même temps, ce qui donne tout leur prix et toute leur vertu à ces sept sources sacramentelles, qui dérivent de cette pierre fondamentale sur laquelle doit se bâtir l'Eglise, comme cette pierre fondamentale dérive de l'unité. Aussi l'harmonie se fait connaître dans ces sources, puisqu'elles sont l'expression de l'harmonie qui doit régner dans la pierre fondamentale à l'imitation de celle qui règne dans l'unité ; elles sont toutes intimement liées, quoiqu'ayant des caractères distincts, et elles se prêtent un secours mutuel, non point pour s'éclipser les unes et les autres, mais pour faciliter leurs diverses manifestations.

      Or, leurs manifestations, quoique diverses, tendent cependant à un but commun et unique qui est la propagation, et la communication de la chose sacrée ; car un sacrement porte ce nom, parce qu'il est la voie par laquelle les choses saintes et divines se transmettent là où elles manquaient, et où elles étaient nécessaires pour que la mort et le néant disparussent ; et sous ce rapport nous voyons encore s'agrandir devant nos yeux la dignité de l'homme qui est choisi pour être la pierre fondamentale du temple, et en outre pour posséder les sept sources spirituelles par où la vie divine veut bien se communiquer dans les lieux arides et stériles. Or nous ne pouvons plus ignorer aujourd'hui ce qui développe en lui ces sept sources sacramentelles, puisque nous avons, à tant de reprises, présenté l'homme comme étant la pensée, la parole, l'opération de l'éternel, et comme ayant eu un besoin indispensable du secours de la parole pour que la parole lui fût rendue, et pour qu'il pût parvenir à la dignité du nouvel homme.

      Disons donc que le nouvel homme ne possède en lui ces sept sources sacramentelles ou ces sept sacrements, que parce qu'il a reçu réellement en lui le sacrement de la parole, et que c'est ce sacrement de la parole qui a fait jaillir en lui ces sept sources, qui auparavant étaient dans la stagnation et dans la mort ; mais comme ce sacrement de la parole n'a pu atteindre jusqu'à ces sept sources sacramentelles du nouvel homme, sans avoir opéré auparavant sur la pierre fondamentale du temple, il s'ensuit que cette pierre fondamentale du temple, doit d'abord être pénétrée et revêtue de ce sacrement de la parole, pour que les sept sources qui en vont provenir soient toujours dans l'abondance, et que les fleuves divins puissent les remplir sans interruption et dans toute leur pureté.

      Recueillons-nous ici devant Dieu, devant cet éternel principe de toute vie et de toute existence, à qui seul puissent être offerts des hommages mérités, et qui n'appartiennent à aucun être. Recueillons-nous devant lui, dans notre respect, et dans notre admiration de ce qu'il a permis que l'âme de puisse partager ainsi la douceur de son existence divine, et l'administration de ses trésors sanctifiants ; recueillons-nous, dis-je, dans un saint tremblement, afin que notre essence immortelle rassemble ainsi toutes ses puissances pour ne pas recevoir en vain ce sacrement de la parole, et pour qu'elle puisse contenir les eaux de ce fleuve immense que ce sacrement couler en elle.

      Ayons sans cesse devant les yeux le sort si glorieux du nouvel homme que le sacrement de la parole vient de régénérer. Il a été sacré par cette parole, et pour ainsi dire, comme sacramentisé dans son essence ; dès l'instant tout est devenu sacrement en lui, et tout a été sacramentisé dans son être, puisque les sept sources sacramentelles qui ont jailli de sa pierre fondamentale embrassent sa région terrestre et corporelle, sa région céleste et spirituelle, et sa région divine.

      Après avoir été ainsi sacramentisé dans tout son être, il a sacramentisé à son tour tous les objets qui l'environnent, et tous les êtres qui attendaient que ces sources sacramentelles fussent ouvertes pour recevoir les eaux du fleuve de la vie ; et tel est le sort dont l'homme eut joui s'il eut conservé sa dignité première ; tel est celui dont il peut ici-bas recouvrer de vives traces, en s'humiliant devant le sacrement de la parole, et en administrant avec sagesse et une sainte frayeur les dons qui sortiront de ses sept sources sacramentelles ; tel est enfin le sort qui doit encore s'embellir pour lui un jour à venir, s'il sait s'unir à demeure à ce sacrement de la parole dont il est fait pour être éternellement sacramentisé.


47.

      Ce sacrement de la parole donne trois noms au nouvel homme, conformément aux trois facultés qui nous distinguent. Ainsi dans son action il s'appellera célérité de l'œuvre ; dans son amour il s'appellera unité des reflets de l'affection divine ; dans sa pensée il s'appellera le matin perpétuel du plus beau jour, et tout son être en se développant ainsi fera sentir tellement ses forces à l'ennemi qu'il tremblera de frayeur en apprenant que le lion se réveille, et le menace de ne pas lui laisser un moment de repos, mais de le poursuivre jusqu'à ce qu'il ait lâché sa proie, et qu'il soit brûlé par le feu de la parole du nouvel homme.

      Comment la parole a-t-elle traité Ephraïm et Juda, ces peuples qui ont rompu, comme Adam, l'alliance qu'ils avaient faite avec elle, et qui dans leur culte avaient violé les ordres du Seigneur ? (Osée 6:7). Je les ai traités durement par mes prophètes, je les ai tués par la parole de ma bouche (dit le Seigneur ; id. 5) et je rendrai claire comme le jour l'équité des jugements que j'exercerai sur eux. Si c'est ainsi qu'ont été traités des peuples prévaricateurs qui étaient cependant le peuple choisi, la justice ne traitera-t-elle pas plus sévèrement encore le prince de l'iniquité, et le père de toutes les abominations de la terre ? Et c'est au nouvel homme qu'est remise l'exécution de ces terribles jugements dans tout son être, avant de les exercer sur les nations qui sont hors de lui.

      Aussi il s'assoira jour et nuit sur son trône, il ne quittera point la salle du conseil, que les décrets qui en émanent n'aient été portés par des messagers fidèles jusqu'aux extrémités de ses possessions et de son empire particulier; que ces décrets n'aient été reçus avec tremblement de la part des peuples coupables, et qu'il n'ait le témoignage authentique que ces décrets ont produit leur effet et qu'ils ont eu leur exécution, Le sceptre s'affaiblirait si l'œuvre ne s'accomplissait pas. L'homme doit veiller et ne respirer que pour le triomphe de la loi ; et s'il veut que l'autorité ne perde pas le respect qui lui est dû, il faut qu'elle n'ordonne rien en vain.

      C'est afin qu'elle n'ordonne rien en vain que le nouvel bomme s'unira sans cesse aux hommes de Dieu, pour qu'ils oignent ses membres de l'huile sainte, et qu'ils les préservent d'être meurtris par l'ennemi, ou desséchés par la langueur ; il priera le grand prêtre de venir renouveler en lui les diverses alliances que Dieu veut toujours faire avec l'homme, et que l'homme s'efforce toujours d'annuler ; il le priera de venir à toutes les heures, et à tous les moments administrer dans le sein de son âme le sacrement de la renaissance et de la revivification. Car sans cela, comment pourrait-il rassembler les portions éparses du nom du Seigneur ? Or, voici comment la sagesse a distribué les organes du nouvel homme, afin qu'il puisse remplir sa destinée sainte, et rassembler les portions éparses du nom du Seigneur.

      Le cœur est assis à la droite de l'âme, c'est lui qui doit l'aider à mettre tous ses ennemis sous ses pieds. L'esprit est à sa gauche, pour l'avertir de l'approche de l'ennemi. Quand il a le bonheur de faire triompher la loi, et de mettre ses ennemis sous ses pieds, alors l'esprit rentre dans la droite, et la droite rentre dans la ligne de l'unité. Le Réparateur qui est le modèle divin du nouvel homme, n'est-il pas annoncé partout comme étant la droite de Dieu ? L'esprit en est la gauche ; il est chargé de veiller contre l'ennemi et de promulguer les jugements de l'intelligence éternelle ; expressions qui n'ont lieu que pour le temps, et sur lesquelles l'homme éclairé ne peut pas faire de méprises ; parce qu'il sait qu'au-dessus du temps tous les noms ne font qu'un seul nom, comme ils n'expriment qu'un seul acte. Mais dans le tableau de cette disposition temporelle des œuvres divines, le nouvel homme voit pourquoi on nous a dit que notre vie était cachée dans le Réparateur ; c'est que le Réparateur est la vie, et que nous ne vivons que par le cœur, et voilà une raison de plus pourquoi l'homme est à la droite du Seigneur.

      Oui, le cœur est le ciel de l'homme, et son âme en est le Dieu. Le Dieu ne peut pas mourir, mais ces cieux peuvent s'obscurcir, ils peuvent se rouler comme un livre. Le seul moyen par lequel le nouvel homme empêchera ses cieux de s'obscurcir, et de se rouler comme un livre, c'est qu'il s'est fait un cœur à l'image de Dieu, c'est qu'il s'est identifié avec celui qui est la droite de Dieu, et par là, il est devenu semblable à la vie. Hommes de paix, voulons-nous que notre ciel ne s'obscurcisse pas non plus, et ne se roule pas comme un livre, faisons-nous un cœur qui ressemble à la droite de Dieu, qui combatte, comme elle, universellement les désordres ; qui comme elle par son propre poids, précipite l'iniquité ; qui, comme elle, laisse continuellement sortir de lui-même des rameaux de toutes les vertus, et briller jour et nuit le chandelier à sept branches ; qui comme elle, puisse suffire à notre propre sûreté, et aux besoins spirituels des indigents ; enfin qui, comme elle, soit toujours prêt à faire l'œuvre de Dieu dans tous les genres, et dans toutes les occasions.

      Car le nouvel homme peut d'avance déclarer qu'à l'image du Réparateur il doit être livré entre les mains des hommes, qu'il faut qu'il souffre beaucoup, qu'il faut qu'il soit rejeté par les sénateurs, par les princes des prêtres, et par les docteurs de la loi, et qu'enfin il soit mis à mort, et qu'il ressuscite le troisième jour. Mais ce nouvel homme dévoué au service de son maître ne voit que les consolations qui l'attendent, et n'est point arrêté par les maux qu'il doit souffrir, parce qu'il a bu le médicament d'amertume, que par ce moyen son cœur lui a engendré l'intelligence, et que l'intelligence lui a engendré la parole avec laquelle il a une vive confiance qu'il renversera à la fin ses ennemis. En conséquence, voici de quelle manière il emploie les différents secours qui lui sont accordés par l'esprit, et qu'il trouve en lui par les divers développements de son être.

      Il place la constance à l'orient, il place la purification à l'occident, il place la confiance au nord, il place la sainte audace au midi, et ainsi il marche à son œuvre, toujours au milieu des vertus ; il ne se laisse pas même affaiblir par la tendresse de ses frères qui veulent le retenir, et l'empêcher d'aller à Jérusalem où il doit souffrir, et être mis à mort ; il ne connaît que les choses du ciel, et se "plaint vivement à ses frères de ce qu'ils ne renoncent pas à eux-mêmes pour le suivre, et de ce qu'ils n'ont ?de goût que pour les choses de la terre. Et que servirait à un homme de gagner tout le monde, et de se perdre soi-même ? Par quel échange se pourrait-il racheter, lorsque le fils de l'homme viendra dans la gloire de son père, avec ses anges, pour rendre à chacun selon ses œuvres ?"

      Telle est aussi la différence des voies par où les mouvements, et les ordres nous arrivent. Quand nous recevons d'en haut des ordres ou des conseils, le quaternaire procède par l'intelligence, l'adhésion, le zèle, et l'œuvre ; quand c'est notre âme qui se meut elle-même, elle procède par l'affection, le jugement, la volonté et l'expression, parce que, comme nous sommes dans les ténèbres, il faut nécessairement que nous allions soumettre nos mouvements au grand juge qui siège dans la région supérieure, et qui doit les sanctionner. Mais tant que nous n'avons pas mis tout en ordre dans notre être, il se peut que des intrus s'assoient sur le tribunal ; qu'ils sanctionnent, soit par ignorance, soit par dépravation les plans les plus pervers, et qu'ils nous mettent, par les œuvres qui en résultent, dans le cas de ne pouvoir plus recevoir d'en haut ni ordres, ni conseils. Car si un aveugle conduit un autre aveugle, que peuvent-ils devenir l'un et l'autre, et n'est-il pas à craindre qu'ils ne tombent tous les deux dans le fossé ?

      C'est pour cela que mon cœur a été frappé d'une plaie que rien ne peut plus guérir sur la terre, parce que cette plaie est semblable à celle qui a frappé le royaume de la vérité. Aussi je ne chercherai point sur la terre le remède à la plaie de mon cœur. Je le chercherai, ce remède, dans le royaume de la vérité, puisqu'il n'y a qu'elle qui ait pu résister à l'ennemi, et qui puisse guérir toutes les plaies. Le royaume des cieux lui-même pleure, et est rempli de tristesse depuis que le mal a versé son venin, et que le prince des ténèbres s'est assis sur le tribunal : comment le cœur de l'homme ne serait-il pas dans le deuil, et dans les lamies, puisque le royaume des cieux, et le cœur de l'homme sont unis par une alliance qui les rend comme inséparables ? C'est dans cette alliance qui les rend comme inséparables, que se trouve aussi la seule consolation qui soit faite pour l'homme ; car les pleurs du royaume de Dieu, en pénétrant mon être, lui rendront l'intelligence, comme les pleurs de la vigne rendent la clarté à nos yeux corporels.

      Pleurez donc, vigne sacrée, pleurez avec abondance, nous recueillerons soigneusement les pleurs que vous répandrez ; faites pleurer notre être avec vous, puisque si notre être doit être uni a vous dans les consolations, il doit l'être aussi dans votre tristesse. Ce sont vos pleurs qui seuls peuvent guérir la plaie universelle, mais ce sont les pleurs de l'homme qui doivent guérir ses plaies particulières. Plus il pleurera, plus il devra espérer être près de sa guérison, puisqu'il ne peut l'obtenir que par ses pleurs, et ses gémissements ; il ne fait en cela que répéter l'image de votre œuvre restauratrice ; plus vous pleurez, plus vous annoncez, comme la vigne, une grande récolte, et plus vous manifestez les vertus salutaires du printemps.


48.

      L'homme de Dieu est obligé de se diminuer sans cesse, et de se proportionner, comme Elie, à la petitesse du fils de la veuve de Sarepta pour le ressusciter. C'est là ce qui rend son ministère si laborieux ; il faut que cet homme de Dieu soit toujours en contradiction, pour approprier les vertus divines à notre demeure impure, et souillée. Car l'homme de Dieu est établi pour être perpétuellement l'organe de ces vertus, soit dans la prière, soit dans l'instruction, soit dans les œuvres.

      Que le nouvel homme ne s'effraie pas de ces fatigues, le temps du repos les lui fera toutes oublier. Le nouvel homme est un homme de vérité, et l'homme de vérité ne connaît aucun obstacle. Au milieu même de ses travaux, et de ses épreuves, il a toujours devant les yeux ce passage de David : que toute la terre se réjouisse en Dieu. Servez le Seigneur avec joie, entrez et présentez-vous devant lui dans de saints ravissements. Sachez que le Seigneur est le vrai Dieu, que c'est lui qui nous a faits, et que nous ne nous sommes pas faits nous-mêmes. Aussi toute la terre du nouvel homme est dans la sécurité, et dans la joie, parce qu'il sent que ses os deviennent semblables aux os de la vie, et que la vertu de la chair céleste, et du sang spirituel Pénètre, et nourrit sa chair et son sang.

      Hommes du torrent, vous voudriez connaître les volontés de Dieu dans les différentes situations où vous vous trouvez, comme si vous étiez unis à lui, tandis que rien ne se peut faire pour vous sans cette union ; vous voudriez être unis à Dieu, comme si vous étiez purifiés, tandis que cette union ne peut se faire qu'après votre purification ; vous voudriez être purifiés, comme si vous aviez fait tous vos efforts pour cela, tandis que votre purification ne peut avoir lieu, qu'après de longs, et de pénibles sacrifices. Vous voudriez que ces longs, et pénibles sacrifices fussent faits, comme si les objets de ces sacrifices étaient déjà disparus de devant vous, tandis que ces mêmes objets composent aujourd'hui toutes les substances de votre être.

      Commencez par mettre un voile entre vous, et les objets informes qui vous ont déformé la vue, et l'intelligence ; ce premier pas vous conduira aux sacrifices, les sacrifices vous mèneront à la purification, la purification vous mènera à l'union avec le principe actif de votre être, et ce principe actif vous dévoilera, à tous les instants, les volontés de votre Dieu ; car votre Dieu est toujours rempli de ses plans, et de ses desseins sur les hommes ; et lorsqu'il s'unit réellement à nous, ce doit être d'une manière vive et agissante, qui développe activement tous nos rapports et toutes nos lois.

      On nous a dit que Dieu était tout ; mais ce n'est point dans le langage d'une morale vague, et stérile que nous pouvons comprendre cette vérité, ce n'est que de lui, par lui, et dans lui qu'elle nous peut être intelligible. Hélas, que font les hommes du torrent au milieu de richesses si abondantes ! Au lieu de s'unir à cette action une, ils se laissent journellement attirer, et séduire par toutes sortes d'actions diverses, et multipliées qui les détruisent, et les décomposent à force de les abuser.

      Mais toi, ô sagesse sainte, toi qui ne perds jamais de vue tes enfants, si tu leur laisse faire des fautes de négligence, et d'erreur, ne peuvent-ils pas ensuite acquérir des vertus doubles, quand ils rentrent dans la voie droite ? Car tu peux leur rendre, à la fois, et les fruits du temps qu'ils ont employé, et les fruits du temps qu'ils ont perdu, puisque tu peux, si tu le veux, abolir et effacer pour eux la différence des heures. Mais que ces malheureux n'oublient jamais à quelles conditions cette différence des heures sera abolie pour eux. Ce ne sera que quand chaque portion de leur être sera devenue un organe de douleur, et de pénitence ; car sans cette cuisante transpiration, la corruption restera en eux, et les rongera jusqu'à la moëlle.

      Aussi, la loi elle-même, prise dans son sens intégral et l'essentiel, n'est-elle que la voie qui nous ramène à l'unité, et qui a l'unité pour terme, c'est-à-dire, la jouissance de la réalité. Car lorsque nous sommes dans l'unité, nous avons le sentiment de la jouissance, et nous n'avons plus l'idée de la loi ; mais dès que nous sortons de l'unité, la loi nous saisit, et voici qu'elles en sont les ramifications, si nous ne veillons pas pour prévenir les termes inférieurs dans lesquels elle peut nous faire descendre.

      Le devoir est à côté de la loi, la fatigue à côté du devoir, le découragement à côté de la fatigue, et la misère à côté du découragement : dans l'ordre même des jouissances légitimes de ce bas monde, et dans tout ce que nous pouvons appeler ici-bas les douceurs, et le bonheur de l'esprit, nous ne sommes guère plus en sûreté, tant que ce n'est pas l'unité, elle-même, qui nous dirige, qui nous domine, et qui nous maîtrise ; car le plaisir est à côté du bonheur, l'erreur à côté du plaisir, le crime à côté de l'erreur, et la mort à côté du crime.

      Oh ! Homme, retourne, retourne vers l'unité ; elle seule te tiendra au-dessus de tous les dangers, parce qu'elle te tiendra au-dessus de toutes les lois, par l'abondance de sa sagesse, et l'immensité de sa lumière. N'imite pas cet aveugle tyran qui tient les nations le col courbé sous son joug. Tu vois que le monde est content, parce que l'esprit se tait en lui, et ne lui demande rien, attendu que le corps y trouve tout ce qu'il demande. N'oublie pas que dans l'ordre vrai, ce serait à l'esprit à avoir tout ce qu'il demanderait, et qu'au contraire ce serait au corps à ne pas oser élever sa voix, et à ne rien demander, mais à attendre, comme un vil esclave, qu'on voulût bien lui donner son nécessaire. Sans cela l'esprit se dégrade en se rendant, lui-même, le serviteur de cet esclave. Ne sommes-nous pas déjà assez dégradés par les soins forcés que nous devons journellement à cette forme matérielle qui nous environne, et par l'obligation où nous sommes réduits de panser honteusement cette bête de somme ? Sang de l'homme, prophétise contre son injustice, et contre son crime ; prophétise que tu es le fardeau de son iniquité. Il paie avec usure ses premiers écarts, depuis que le sang est devenu son vêtement. Ce sang lui avait été donné pour qu'il y noyât tous les sujets de Pharaon, après y avoir passé lui-même à pied sec, comme Israël dans la Mer Rouge ; mais au lieu de se séparer journellement de ce vêtement qui le déshonore, il ne cesse d'y attacher encore de nouvelles marques d'infamies qui puissent achever de rendre l'homme un objet d'opprobre.

      Oui, le sang est l'enfer terrestre ; loin de calmer la tempête, il ne cherche qu'à la rendre si affreuse, que l'homme ne puisse éviter d'être englouti au fond de la mer. Il ordonne aux quatre vents du ciel de venir sans cesse agiter les flots de cette mer orageuse, et ces flots en s'agitant, s'élèvent assez pour révéler les fondements de l'autel de Baal. Ô sang, ô sang, chacune de tes paroles est une révélation de l'impiété de l'homme, et une prophétie du prince du mensonge ; voilà pourquoi tous nos jours se passent dans l'illusion, et dans le néant. Voilà pourquoi nous vivons au milieu des épaisses ténèbres de l'Egypte.

      Mais si la parole du Seigneur doit un jour révéler les fondements du monde (Psaume 17:16), ne peut-elle pas aussi révéler les fondements de l'âme de l'homme ? Et sans cela le nouvel homme pourrait-il encore avoir de l'espoir ? Il dira donc : "Seigneur ressouvenez-vous de la sagesse de vos desseins lorsque vous avez donné l'existence à l'homme. Ce grand objet de votre antique alliance avec lui, pourriez-vous jamais l'oublier ? Si le sage se ralentit devant vous, c'est en vain qu'il a ouvert les yeux sur les restes de l'œuvre ; il devient l'objet des larmes des prophètes qui le comparent aux lâches serviteurs ; car il ne peut plus chanter les cantiques de la paix et du bonheur, ces cantiques que l'oreille de la sagesse aime à entendre."

      Le nouvel homme l'entend au fond de lui-même ce cantique qui charme l'oreille de la sagesse : "C'est d'en haut que viendra ma force, c'est d'en haut que j'attendrai la lumière ; le poids de la puissance du Seigneur précipite tous les ennemis dans l'abîme, parce que sa puissance contraint l'âme humaine de développer la sienne à son tour, et que la puissance de l'âme humaine est comme un retranchement autour de l'année du Seigneur."

      Ame humaine, remplis-toi de confiance, et considère quels seraient tes avantages, si tu daignais les mettre à profit. L'ennemi n'a qu'une seule issue par où il puisse t'approcher, et cette issue, il t'est encore possible de la lui fermer à ta volonté. Mais pour toi, tes puissances peuvent se développer dans tous les sens, puisque tu es centre, et que tu tiens au centre universel. Car c'est de toi que parlait le Réparateur lorsqu'il disait : Comme mon père qui est vivant m'a envoyé, et que je vis par mon père, de même que celui qui me mange vivra par moi. Or, manger le Réparateur, c'est transmuer toutes tes substances dans les œuvres et l'activité de son esprit, et faire en sorte que cet esprit éternel et divin, pénètre dans toutes tes facultés, comme les sucs de tes grossiers aliments pénètrent dans toutes les fibres de ton corps.




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