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Les enseignements secrets de Martinès de Pasqually

Franz Baader
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      En 1816, il y eut une nouvelle tentative de fusion qui échoua comme la première, parce que le Directoire helvétique refusa de déclarer sa complète indépendance à l'égard du Grand-Maître allemand, le prince de Hesse, successeur du duc de Brünswick.
      Le Directoire helvétique continua de végéter jusqu'en 1830. Il n'y avait plus alors de Directoires ni en France, ni en Allemagne, ni en Russie [Note de l'auteur : A la vérité, le Directoire de Brünswick disparut en juillet 1792 à la mort du duc. Le dernier Directoire de la province de Russie disparut le 12 août 1822, à la suite de l'ukase de l'empereur Alexandre. En France, la seule loge du Centre des Amis, qui en sa qualité de loge réorganisatrice du Grand Orient de France, s'était entremise en 1808 pour obtenir aux Directoires français la protection du prince de Cambacérès, et à laquelle Willermoz, Grand-Maître de la province d'Auvergne avait décerné en échange le titre de préfecture, continua jusqu'en 1829 à pratiquer le rite templier rectifié concurremment avec le rite français et le rite écossais ancien et accepté.] ; et, à partir de 1836, on ne nomma plus de Grand-Maître général de l'Ordre ni de Grands-Maîtres des provinces, ni même de Grand-Prieur helvétique. Aussi le mouvement unioniste suisse gagna-t-il du terrain.
      Cependant, ce ne fut que le 22 janvier 1844 que le Directoire helvétique se décida à fusionner. Dès lors, le Danemark fut le dernier rempart du rite templier rectifié et de ses chevaliers bienfaisants réfugiés dans la loge de l'Etoile polaire de Copenhague ; il le fut jusqu'au 06 janvier 1855, date à laquelle le roi de Danemark abolit définitivement le système de la Stricte-Observance rectifiée pour le remplacer par le système de Zinnendorf.
      Maintenant que nous croyons avoir démontré qu'il est enfantin de confondre l'Ordre des Elus-Coëns, que M. Matter a désigné sous le nom de « Martinésisme », avec l'Ordre de la Stricte-Observance même rectifiée, introduit en France vers 1774 sous les auspices de Willermoz et qu'un autre auteur a jugé utile de baptiser « Willermosisme » ; il nous reste à rechercher si, comme le prétend ce dernier auteur, Saint-Martin est réellement le fondateur d'un Ordre qualifié « Martinisme » et dont les sectateurs se désigneraient du nom de martinistes. »
      Ce que nous avons exposé de la vie de Saint-Martin au cours de cette Notice prouve déjà clairement que, si un tel Ordre avait existé, il aurait eu bien peu de rapport avec l'Ordre des Elus-Coëns ; mais nous prétendons de plus que Saint-Martin ne fonda jamais aucun Ordre, et que le nom de « Martinistes » ne peut désigner que ceux qui avaient adopté une manière de voir conforme à celle du théosophe, tendant plutôt à s'affranchir de tous travaux rituels et à rejeter toute science occulte pour ne se livrer qu'à l'étude des divers mystiques de l'Europe. C'est ce que nous avons déjà avancé assez succintement il y a un an, et il faut qu'on nous ait prêté de bien noirs desseins pour qu'on nous ait soupçonnés d'avoir écrit semblable chose sans avoir auparavant pris connaissance de tous les documents pouvant jeter quelque lumière dans une question qu'aucuns cherchent à rendre fort trouble.
      Sans'avoir recours à aucun document inédit, nous avions pu aisément constater que la plupart des auteurs maçonniques ou autres qui ont bien voulu nous laisser quelques lignes sur la question « Martinisme », s'étaient servilement copiés en se bornant à amplifier les récits de leurs devanciers des détails les plus invraisemblables. Les uns ont confondu franchement Martinès de Pasqually et Saint-Martin. Ignorant l'existence du premier, ils ont attribué au second son œuvre de propagande qu'ils nomment alors avec logique « Martinisme ».
      Les autres ont distingué nettement les deux personnages. Il désignent alors Martinès comme ayant propagé le rite des Elus-Coëns et nous présentent Saint-Martin comme le fondateur d'un Martinisme qui est tour à tour : le rite écossais rectifié dit de Saint-Martin, le rite de la Stricte-Observance temptière, le système des Illuminés de Weishaupt, le rite des Philalèthes, la société des Philosophes Inconnus, le rite hermétique des Illuminés d'Avignon, l'académie des vrais maçons de , etc., etc., soit beaucoup de choses souvent fort différentes et dont aucune n'a de rapport avec la pensée de Saint-Martin [Note de l'auteur : Dans ce genre de sport, la palme revient à M. Papus. Ici comme ailleurs, cet auteur a fait ce qu'il appelle de la synthèse. Pour lui, cette opération revient à additionner les opinions les plus contradictoires pour brocher ensuite sur le tout au petit bonheur de l'imagination. M. Papus ayant probablement lu dans Marconis de Nègre que Saint-Martin avait fondé la société des Philalèthes renchérit immédiatement et déclare que « les Philalèthes, les Illuminés d'Avignon, l'Académie des Vrais Maçons de dérivent directement du Martinisme ». Ailleurs, il ne néglige pas de citer après Ragon et de l'Aulnaye, l'Ecossais rectifié de Saint-Martin qu'il attribue à Saint-Martin ; et il va jusqu'à reproduire, dans son ouvrage sur Martinès de Pasqually et son œuvre de réalisation, un ornement de loge qu'il nous donne comme provenant des archives de Lyon. Ce dernier fait n'est pas invraisemblable, mais nous ferons observer que l'ornement en question appartient à l'Ordre de la Stricte-Observance, dont Willermoz fut un des Grands-Maîtres provinciaux. Nous pensons que si M. Papus avait eu, comme nous, entre les mains, la Grande Etoile d'Ordre dont se décorait Willermoz et qui porte en exergue la devise templière, il n'aurait pas manqué de la reproduire comme une décoration des Elus-Coëns ou de l'Ordre du Martinisme (?). N'a-t-il pas attribué à Saint-Martin un pantacle qui figure dans une édition de Boehme antérieure à 1770, comme il lui a attribué le « nom mystique du Christ » qui figure dans un ouvrage du R. P. Kircher, pour ne parler que de cet auteur ?].
      Si tant d'affirmations contradictoires ne témoignaient pas en faveur de l'existence d'un Martinisme, un autre indice non moins significatif était le suivant : Alors que ta. correspondance de tous les Elus-Coëns, De Lescourt, Salzac, Fournié, De Calvimont, D'Ossun, Disch, Villaréal, etc, était remplie du détail presque journalier de tous les faits concernant l'Ordre des Elus-Coëns, la correspondance de tous ceux qui, comme Maubach, Divonne, Madame de Bœcklin, Thieman, Gombaud, Salzmann, Gence ou Gilbert, avaient vécu dans l'intimité de Saint-Martin après la séparation de ce dernier de l'Ordre des Elus-Coëns, ne faisait pas la moindre allusion à un Ordre du Martinisme. La correspondance pourtant si intime du baron de Liebisdorf avec Saint-Martin ne parle pas davantage de ce Martinisme ; et cependant, Liebisdorf qui connaissait plusieurs des amis de Saint-Martin, qui aurait eu maintes occasions d'entendre parler du Martinisme, et qui entretenait fréquemment son correspondant de l'école de Martinès Pasqually, de l'école du Nord et de celle de Cagliostro, n'aurait pas manqué de faire quelque allusion à une telle société, si cette société eût existé.
      Joignons à ce silence l'absence complète de tout document dans les archives des divers rites et dans les collections particulières les plus riches, et nous arrivons à penser que le mot Martinisme n'a pu prendre naissance ni parmi les Maçons-Elus-Coëns, ni dans l'entourage de Saint-Martin.
      La question se pose cependant d'une manière fort nette : ou le mot Martinisme dérive de Martinès, ou bien il dérive de Saint-Martin. Dans le premier cas, on peut objecter d'abord le silence des initiés. Ceux-ci d'ailleurs n'ignoraient pas que le nom du Grand-Souverain des Maçons-Elus-Coëns, tout en s'écrivant Martines se prononçait Martinès. On peut objecter ensuite que les personnes mal informées orthographiant ce nom Martinez, le mot Martinisme en dériverait si difficilement que M. Matter a cru devoir forger le mot nouveau Martinésisme. Il semble donc que le mot Martinisme dérive bien de Saint-Martin ; et alors on peut se demander comment s'est faite cette dérivation et quel est cet Ordre fantôme, que certain auteur nous présente si joyeusement comme répandu dans toute l'Europe, et qui serait resté si supérieurement inconnu qu'on n'en trouverait aucune trace dans les archives et dans les correspondances privées de l'époque.
      Il n'y a plus pour nous aucun doute. Si le mot Martinisme dérive de Saint-Martin, ce n'est certainement pas parce que ce dernier a voulu faire de son nom l'enseigne d'un nouvel Ordre. Il y aurait là une vanité dont nous verrons plus loin Saint-Martin se défendre.
      Il est aujourd'hui de toute évidence que Saint-Martin n'a organisé aucun Martinisme, que ce mot vient du public, du monde profane, et ne signifie rien parce que la dérivation ne s'en est faite que par suite d'une confusion regrettable des personnalités de Saint-Martin et de Martines de Pasqually, confusion qui a fait attribuer au premier l'œuvre du second. Une certaine similitude dans le nom des deux hommes, jointe au fait que Saint-Martin, qui était resté cinq ans dans la loge de Martinès de Pasqually, la désignait couramment dans sa correspondance et dans sa conversation par ces mots : « Mon ancienne école » firent tous les frais de cette méprise qui fut telle que lorsqu'en 1803, les feuilles publiques annoncèrent le décès de Saint-Martin, elles le confondirent avec Martinès de Pasqually mort depuis 1774.




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