Monsieur
Les offres gracieuses que vous me
faites au sujet du Arnold et les compliments flatteurs que vous
m'adressez pour l'
Eclair
sur l'association, me font un devoir
de dissiper votre incertitude sur les autres objets. Je ne suis
absolument pour rien dans le petit traité que je connaissais
déjà par des extraits que m'en a avait fait M.
Divonne
[Note de l'auteur
: Nous n'avons pu trouver à quel « petit
traité » Saint-Martin faisait ici allusion. Il ne
paraît pas que ce soit la Suite
des Erreurs et de la Vérité.
Ce pourrait être le Livre Rouge. M. Matter a bien écrit que Saint-Martin disait que le Livre Rouge était de lui, mais nous n'avons pu retrouver cette revendication.]. Ce sont de ces choses « bâtardes qui circulent dans le public » recherche de leur auteur. Celui-ci me paraît homme de bien, mais je vous avoue que je ne peux prononcer sur aucun de ses sujets.
Je vous prierai aussi d'accepter le même avertissement sur l'arrangement écossais. Cette
composition n'est pas de moi et je vous plaindrais si vous vous amusiez à perdre votre temps dans de telles broussailles. Une de mes connaissances de
, qui connaissait mes relations de librairie, m'avait prié de lui en négocier un exemplaire. Cette affaire n'a point eu de suite à cause du discrédit où est tombé ce genre de production depuis une douzaine d'années, et aussi à cause de l'abus que je pensai que l'on pouvait faire de mes bons offices. M. Cottin a été tué à
.
Je vous rends grâce des nouveaux détails que vous me donnez. Je sais que je passe dans l'
esprit de beaucoup de monde, qui est quelquefois l'
esprit du monde, pour être auteur de quelques productions du même genre. Je sais que ceux qui ont bien voulu accorder leur estime à mes ouvrages leur ont prêté trop volontiers ce qui leur manquait. Je ne songe point à blâmer ces
Martinistes : n'est-ce pas le
destin des livres de devenir la proie des lecteurs ? Mais je suis étonné de ce que vous m'ayez jugé assez infatué de mon faible mérite pour que j'aie pu donner mon nom à mon ancienne école ou à une autre. Ces établissements servent quelquefois à mitiger les maux de l'homme, plus souvent à les augmenter, et jamais à les guérir, parce que les
arlequinades dont nous bariolons notre existence resteront toujours trop loin de l'il de la Province ; ceux qui y enseignent ne le font qu'en montrant des faits merveilleux ou en exigeant la soumission. Ma tâche a été moins brillante, car le silence est à tous égards le seul parti qui me convienne.
Adieu, Monsieur. Je ne puis m'entretenir plus longtemps avec vous. Si, grâce à
Dieu, je suis encore traité avec le même soin que
par le passé, notre Révolution a réduit mes moyens pécuniaires à si peu de chose que je regrette de ne pouvoir vous faire cadeau de l'objet de votre désir. Vous pouvez toujours m'écrire
jusqu'à nouvel avis.
SAINT-MARTIN [Note de l'auteur : Extrait du recueil de correspondance de Saint-Martin avec MM. Maglasson, De Gérando, Maubach, etc., appartenant à M. Munier. ]
Ce document, que M. Alexandre Munier a bien voulu nous autoriser à reproduire et dans lequel nous retrouvons pour la deuxième fois le mot
martinisme, nous permet d'apprécier la valeur de ce qualificatif. Le
passage relatif à un « arrangement écossais » pourrait s'appliquer à l'
Ecossais de Saint-Martin ; mais les détails qui y figurent rendent cette application difficile parce qu'ils sembleraient indiquer que
Saint-Martin n'aurait connu cet ouvrage qu'entre 1787 et 791.
Quoi qu'il en soit, il ressort clairement, de tout ce que nous avons exposé, que Willermoz et
Saint-Martin ne furent nullement les continuateurs de
Martinès de Pasqually, et que si
Saint-Martin se sépara de Willermoz après s'être séparé de l'Ordre des Maçons-Elus-Coëns, ce ne fût pas pour fonder un Ordre du Martinisme.
UN CHEVALIER DE LA ROSE CROISSANTE
Paris, 19 décembre 1899, jour anniversaire de la mort de
Caignet de Lestère, successeur de Martinès de
Pasqually.