Dr Fernand Rozier Se taire : C'est le verbe
de la discrétion. La première raison qui nous invite à
la discrétion est une raison de prudence. Le bavardage et la
vantardise sont dangereux pour la réalisation parce qu'ils éventent
nos plans et nos moyens d'action, nous suscitent des jalousies, des
concurrences, etc. Même après le succès, il est
imprudent d'éventer ses moyens d'action.
Tous les
jours, nous rencontrons des questionneurs
indiscrets et des conseillers fâcheux qui s'efforcent de savoir
nos projets et de nous diriger selon leurs idées personnelles.
C'est un fléau auquel il faut résister énergiquement.
Ce n'est pas une raison pour les dépister au moyen d'un mensonge
: le remède serait pire que le mal. Mais il est indispensable
de ne rien leur répondre ou de les arrêter d'un mot
en leur faisant sentir leur indiscrétion.
Nous ne devons jamais donner de conseils à
qui ne nous en demande pas. Nous avons le devoir de manifester nos
convictions. Nous avons le devoir d'avertir autrui des dangers qu'il
court lorsque nous le voyons. Mais nous n'avons pas le droit d'insister
de manière à agir sur la
liberté d'autrui.
Une fois le conseil donné, nos raisons bien expliquées,
nous ne devons plus rien dire et ne pas harceler autrui en lui disant
: «
Avez-vous suivi mon conseil ? »
La seconde raison, la raison majeure pour nous
taire, c'est qu'il faut éviter tout gaspillage d'énergie.
Et ici nous touchons déjà à l'étude
du monde invisible.
Nous ne pouvons accomplir un travail quelconque
qu'en dépensant une certaine quantité d'énergie
; c'est une loi physique bien connue. L'
âme, qui est
esprit,
ne peut se manifester qu'au moyen d'un ensemble d'organes, visibles
ou invisibles, et tous ces organes ont besoin d'énergie pour
agir. Nous avons donc le devoir d'économiser notre énergie
si nous voulons la trouver en réserve quand viendra le moment
d'agir, car nos organes ne peuvent contenir qu'une réserve
limitée d'énergie, et la provision est plus longue
à refaire qu'à dépenser.
Or, notre énergie peut être dépensée
de bien des façons ; elle peut se dépenser en travail
visible ou en travail invisible, et le bavardage est une grande
source de dissipation de l'énergie. Celui qui d'avance raconte
à tout venant ses plans, ses projets, ses espoirs, dépense
une quantité énorme d'énergie au détriment
de son travail. Après avoir réalisé son idée
en paroles, il n'a plus la
force nécessaire pour la réaliser
en action. L'homme silencieux et discret conserve et accumule au
contraire son énergie et peut agir avec une énergie
considérable. C'est là d'ailleurs une vérité
facile à observer et que beaucoup de personnes sentent d'instinct.
Les paroles oiseuses, les bavardages, les
histoires inutiles sont
une dissipation d'énergie pour celui qui les profère
et pour celui qui les écoute. C'est pourquoi l'
Evangile nous
dit que nous serons responsables même de nos paroles oiseuses.
La conversation peut inversement servir de
soupape de sûreté pour éviter une trop grande
tension d'énergie lorsque l'énergie n'est pas employée
ailleurs ; car une accumulation d'énergie excessive est chose
dangereuse. C'est pourquoi l'épreuve du silence absolu était
une épreuve aussi pénible que dangereuse pour le récipiendaire
qui y était soumis dans certaines
initiations anciennes,
et notamment l'
initiation pythagoricienne. Dans la pratique journalière
de la vie, il est nécessaire d'échanger de temps en
temps des idées ; il faut seulement le faire avec discrétion
et choisir ses idées pour éviter les vaines paroles.
Dr Fernand Rozier, Cours de Haute-Magie
- L'exploration du monde invisible, Editions Le Mercure
Dauphinois, pp. 28-30.
Eliphas Lévi
Lorsqu'on ne sait pas, il faut vouloir apprendre.
Tant qu'on ne sait pas, il est téméraire d'oser, mais
il est toujours bon de se taire.
Eliphas
Lévi, Le Grand Arcane ou L'occultisme
dévoilé, Livre Second - Chapitre VI : Le
Grand Secret.