L'ÉVANGILE SELON LE SPIRITISME
CHAPITRE XXVIII Recueil de prières spirites (1/2)
Préambule
1. Les
Esprits ont toujours dit : « La forme n'est rien, la pensée est tout.
Priez chacun selon vos convictions et le mode qui vous touche le plus ; une bonne pensée vaut mieux que de nombreuses paroles où le cur n'est pour rien. »
Les
Esprits ne prescrivent aucune formule absolue de prières
; lorsqu'ils en donnent, c'est afin de
fixer les idées, et surtout pour appeler l'attention sur certains principes de la doctrine spirite. C'est aussi dans le but de venir en aide aux personnes qui sont embarrassées pour rendre leurs idées, car il en est qui ne croiraient pas avoir réellement prié si leurs pensées n'étaient pas formulées.
Le recueil de prières contenues dans ce chapitre est un choix fait parmi celles qui ont été dictées par les
Esprits en différentes circonstances ; ils ont pu en dicter d'autres, et en d'autres termes, appropriées à certaines idées ou à des cas spéciaux, mais peu importe la forme, si la pensée fondamentale est la même. Le but de
la prière est d'élever notre
âme à
Dieu ; la diversité
des formules ne doit établir aucune différence entre ceux qui croient en lui, et encore moins entre les
adeptes du Spiritisme, car
Dieu les accepte toutes lorsqu'elles sont sincères.
Il ne faut donc point considérer ce recueil comme un formulaire absolu, mais comme une variété parmi les instructions que donnent les
Esprits. C'est une application des principes de la morale
évangélique développés dans ce livre, un complément à leurs dictées sur les devoirs envers
Dieu et le prochain, où sont rappelés tous les principes de la doctrine.
Le Spiritisme reconnaît comme bonnes les prières de tous les cultes quand elles sont dites par le cur et non par les lèvres ; il n'en impose aucune et n'en blâme aucune ;
Dieu est trop grand, selon lui, pour repousser la voix qui l'implore ou qui chante ses louanges, parce qu'elle le fait d'une manière plutôt que d'une autre.
Quiconque lancerait l'anathème contre les prières qui ne sont pas dans son formulaire prouverait qu'il méconnaît la grandeur de Dieu. Croire que
Dieu tient à une formule, c'est lui prêter la petitesse et les passions de l'humanité.
Une condition essentielle de la prière, selon
saint Paul (ch. XXVII, n° 16), est d'être intelligible, afin qu'elle puisse parler à notre
esprit ; pour cela il ne suffit pas qu'elle soit dite en une langue comprise de
celui qui prie ; il est des prières en langue vulgaire qui ne disent pas beaucoup plus à la pensée que si elles étaient en langue étrangère, et qui, par cela même, ne vont pas au cur ; les rares idées qu'elles renferment sont souvent étouffées sous la surabondance des mots et le
mysticisme du langage.
La principale qualité de la prière est d'être
claire, simple et concise, sans
phraséologie inutile, ni luxe d'épithètes qui ne sont que des parures de clinquant ; chaque mot doit avoir sa portée, réveiller une idée, remuer une fibre : en un mot,
elle doit faire réfléchir ; à cette seule condition la prière peut atteindre son but, autrement
ce n'est que du bruit. Aussi voyez avec quel
air de distraction et quelle volubilité elles sont dites la plupart
du temps ; on voit les lèvres qui remuent ; mais, à l'expression de la physionomie, au son même de la voix, on reconnaît un acte machinal, purement extérieur, auquel l'
âme reste indifférente.
Les prières réunies dans ce recueil sont divisées en cinq catégories :
1° Prières générales ;
2° Prières pour soi-même ;
3° Prières pour les vivants ;
4° Prières pour les morts ;
5° Prières spéciales pour les malades et les obsédés.
Dans le but d'appeler plus particulièrement l'attention
sur l'objet de chaque prière, et d'en mieux faire comprendre la portée,
elles sont toutes précédées d'une instruction préliminaire,
sorte d'exposé des motifs, sous le titre de
préface.
I. PRIÈRES GÉNÉRALES
Oraison dominicale
2. PRÉFACE. Les
Esprits ont recommandé
de placer
l'Oraison dominicale en tête de ce recueil, non seulement
comme prière, mais comme
symbole. De toutes les prières, c'est celle
qu'ils mettent au premier rang, soit parce qu'elle vient de
Jésus lui-même
(
saint Matthieu, ch. VI , v. de 9 à 13), soit parce qu'elle peut les suppléer toutes selon la pensée qu'on y attache ; c'est le plus parfait modèle de concision, véritable chef-d'uvre de sublimité dans sa simplicité. En effet, sous la forme la plus restreinte, elle résume tous les devoirs de l'homme envers
Dieu, envers lui-même et envers le prochain ; elle renferme une profession de foi, un acte d'adoration et de soumission, la demande des choses nécessaires à la vie, et le principe de la
charité. La dire
à l'intention de quelqu'un, c'est demander pour lui ce qu'on demanderait
pour soi.
Cependant, en raison même de sa brièveté, le sens profond renfermé dans les quelques mots dont elle se compose échappe
à la plupart ; c'est pourquoi on la dit généralement sans diriger sa pensée sur les applications de chacune de ses parties ; on la dit comme une formule dont l'efficacité est proportionnée au nombre de fois qu'elle est répétée ; or c'est presque toujours un des nombres cabalistiques
trois,
sept ou
neuf, tirés de l'antique croyance superstitieuse à la vertu des nombres, et en usage dans les opérations de la magie.
Pour suppléer au vague que la concision de cette prière laisse dans la pensée, d'après le conseil et avec l'assistance des bons
Esprits, il a été ajouté à chaque proposition un commentaire qui en développe le sens et en montre les applications.
Selon les circonstances et le temps disponible, on peut donc dire l'
Oraison dominicale
simple ou
développée.
3. PRIÈRE.
I. Notre Père,
qui êtes aux cieux, que votre nom soit sanctifié !
Nous croyons en vous, Seigneur, parce que tout révèle votre puissance et votre bonté. L'
harmonie de l'univers témoigne d'une sagesse, d'une prudence et d'une prévoyance qui surpassent toutes les facultés humaines ; le nom d'un être souverainement grand et sage est inscrit dans toutes les uvres de la création, depuis le brin d'herbe et le plus petit insecte jusqu'aux astres qui se meuvent dans l'espace ; partout nous voyons
la preuve d'une sollicitude paternelle ; c'est pourquoi aveugle est celui qui ne vous reconnaît pas dans vos uvres, orgueilleux celui qui ne vous glorifie pas, et ingrat celui qui ne vous rend pas des actions de grâce.
II. Que votre règne arrive !
Seigneur, vous avez donné aux hommes des lois pleines de sagesse et qui feraient leur bonheur s'ils les observaient. Avec ces lois, ils feraient régner entre eux la paix et la justice ; ils s'entraideraient mutuellement, au lieu de se nuire comme ils le font ; le fort soutiendrait le faible au lieu de l'écraser ; ils éviteraient les maux qu'engendrent les abus et les excès de tous genres. Toutes les misères d'ici-bas viennent de la violation de vos lois, car il n'est pas une seule infraction qui n'ait ses conséquences
fatales.
Vous avez donné à la brute l'instinct qui lui trace la limite du nécessaire, et elle s'y conforme machinalement ; mais à l'homme,
outre cet instinct, vous avez donné l'intelligence et la raison ; vous lui avez aussi donné la
liberté d'observer ou d'enfreindre celles de vos lois qui le concernent personnellement, c'est-à-dire de choisir entre le bien et le mal, afin qu'il ait le mérite et la responsabilité de ses actions.
Nul ne peut prétexter
ignorance de vos lois, car, dans votre prévoyance paternelle, vous avez voulu qu'elles fussent gravées dans la conscience de chacun, sans distinction de culte ni de nations ; ceux qui les violent, c'est qu'ils vous méconnaissent.
Un
jour viendra où, selon votre promesse, tous les
pratiqueront ; alors l'incrédulité aura disparu ; tous vous reconnaîtront
pour le souverain Maître de toutes choses, et le règne de vos lois
sera votre règne sur la terre.
Daignez, Seigneur, hâter son avènement, en donnant aux hommes la
lumière nécessaire pour les conduire sur le chemin de la vérité.
III. Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel !
Si la soumission est un devoir du fils à l'égard du père,
de l'inférieur envers son supérieur, combien ne doit pas être
plus grande celle de la créature à l'égard de son Créateur
! Faire votre volonté, Seigneur, c'est observer vos lois et se soumettre
sans murmure à vos décrets divins ; l'homme s'y soumettra quand
il comprendra que vous êtes la source de toute sagesse, et que sans vous
il ne peut rien ; alors il fera votre volonté sue la terre comme les élus
dans le
ciel.
IV. Donnez-nous notre pain de chaque jour.
Donnez-nous la nourriture pour l'entretien des
forces du
corps ; donnez-nous aussi
la nourriture spirituelle pour le développement de notre
Esprit.
La brute trouve sa pâture, mais l'homme la doit à sa propre activité
et aux ressources de son intelligence, parce que vous l'avez créé
libre.
Vous lui avez dit : « Tu tireras ta nourriture de la
terre à la sueur de ton front » ; par là, vous lui avez fait
une obligation du travail, afin qu'il exerçât son intelligence par
la recherche des moyens de pourvoir à ses besoins et à son bien-être,
les uns par le travail matériel, les autres par le travail intellectuel
; sans le travail, il resterait stationnaire et ne pourrait aspirer à la
félicité des
Esprits supérieurs.
Vous secondez l'homme de bonne volonté qui se confie à vous pour
le nécessaire, mais non celui qui se complaît dans l'oisiveté
et voudrait tout obtenir sans peine, ni celui qui cherche le superflu. (Ch. XXV.)
Combien en est-il qui succombent par leur propre faute, par leur incurie, leur
imprévoyance ou leur ambition, et pour n'avoir pas voulu se contenter de
ce que vous leur aviez donné ! Ceux-là sont les artisans de leur
propre infortune et n'ont pas le droit de se plaindre, car ils sont punis par
où ils ont péché. Mais ceux-là mêmes, vous ne
les abandonnez pas, parce que vous êtes infiniment
miséricordieux
; vous leur tendez une main secourable dès que, comme l'
enfant prodigue,
ils reviennent sincèrement à vous. (Ch. V, n° 4.)
Avant de nous plaindre de notre sort, demandons-nous s'il n'est pas notre ouvrage
; à chaque malheur qui nous arrive, demandons-nous s'il n'eût pas
dépendu de nous de l'éviter ; mais disons aussi que
Dieu nous a
donné l'intelligence pour nous tirer du bourbier, et qu'il dépend
de nous d'en faire usage.
Puisque la loi du travail est la condition de l'homme sur la terre, donnez-nous
le courage et la
force de l'accomplir ; donnez-nous aussi la prudence, la prévoyance
et la modération, afin de n'en pas perdre le
fruit.
Donnez-nous donc, Seigneur, notre pain de chaque
jour, c'est-à-dire les
moyens d'acquérir, par le travail, les choses nécessaires à
la vie, car nul n'a droit de réclamer le superflu.
Si le travail nous est impossible, nous nous confions en votre divine providence.
S'il entre dans vos desseins de nous éprouver par les plus dures privations,
malgré nos efforts, nous les acceptons comme une juste
expiation des fautes
que nous avons pu commettre dans cette vie ou dans une vie précédente,
car vous êtes juste ; nous savons qu'il n'y a point de peines
imméritées,
et que vous ne châtiez jamais sans cause.
Préservez-nous, ô mon
Dieu, de concevoir de
l'
envie contre ceux qui possèdent ce que nous n'avons pas, ni même
contre ceux qui ont le superflu, alors que nous manquons du nécessaire.
Pardonnez-leur s'ils oublient la loi de
charité et d'
amour du prochain
que vous leur avez enseignée. (Ch. XVI, n° 8.)
Ecartez aussi de notre
esprit la pensée de nier votre
justice, en
voyant la prospérité du méchant et le malheur
qui accable parfois l'homme de bien. Nous savons maintenant, grâce aux nouvelles
lumières qu'il vous a plu de nous donner, que votre justice reçoit
toujours son accomplissement et ne fait défaut à personne ; que
la prospérité matérielle du méchant est éphémère
comme son existence corporelle, et qu'elle aura de terribles retours, tandis que
la joie réservée à celui qui souffre avec résignation
sera éternelle. (Ch. V, n° 7, 9, 12, 18.)
V. Remettez-nous nos dettes comme nous les remettons à ceux qui nous
doivent. Pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux
qui nous ont offensés.
Chacune de nos infractions à vos lois, Seigneur, est une offense envers vous, et une dette contractée qu'il nous faudra tôt ou tard acquitter. Nous en sollicitons la remise de votre infinie
miséricorde, sous la promesse de faire nos efforts pour n'en pas contracter de nouvelles.
Vous nous avez fait une loi expresse de la
charité ; mais la
charité ne consiste pas seulement à assister son semblable dans le besoin ; elle est aussi dans l'oubli et le pardon des offenses. De quel droit réclamerions-nous votre
indulgence, si nous en manquons nous-mêmes à l'égard de ceux dont nous avons à nous plaindre ?
Donnez-nous, ô mon
Dieu, la
force d'étouffer dans notre
âme tout ressentiment, toute haine et toute rancune ;
faites que la mort ne nous surprenne pas avec un désir de vengeance dans le cur. S'il vous plaît de nous retirer aujourd'hui même d'ici-bas, faites que nous puissions nous présenter à vous purs de toute animosité, à l'exemple du Christ, dont les dernières paroles furent pour ses bourreaux. (Ch. X.)
Les persécutions que nous font endurer les méchants font partie de nos épreuves terrestres ; nous devons les accepter sans murmure, comme toutes les autres épreuves, et ne pas maudire ceux qui, par leurs méchancetés, nous frayent le chemin du bonheur éternel, car vous nous avez dit, par la bouche de
Jésus : « Bienheureux ceux qui souffrent pour la justice ! » Bénissons donc la main qui nous frappe et nous humilie, car les meurtrissures du
corps fortifient notre
âme, et nous serons relevés
de notre humilité. (Ch. XII, n° 4.)
Béni soit votre nom, Seigneur, de nous avoir appris que notre sort n'est point irrévocablement fixé après la mort ; que nous trouverons dans d'autres existences les moyens de racheter et de réparer nos fautes passées, d'accomplir dans une nouvelle vie ce que nous ne pouvons faire
en celle-ci pour notre avancement. (Ch. IV ; ch. V, n° 5.)
Par là s'expliquent enfin toutes les anomalies apparentes de la vie ; c'est la lumière jetée sur notre passé et notre avenir, le signe éclatant de votre souveraine justice et de votre bonté infinie.
VI. Ne nous abandonnez point à la tentation, mais délivrez-nous du mal (10).
Donnez-nous, Seigneur, la
force de résister aux suggestions des mauvais
Esprits qui tenteraient de nous détourner de la voie du bien en nous inspirant de mauvaises pensées.
Mais nous sommes nous-mêmes des
Esprits imparfaits, incarnés sur cette terre pour
expier et nous améliorer. La cause première du mal est en nous, et les mauvais
Esprits ne font que profiter de nos penchants vicieux, dans lesquels ils nous entretiennent, pour nous tenter.
Chaque imperfection est une porte ouverte à leur
influence,
tandis qu'ils sont impuissants et renoncent à toute tentative contre les
êtres parfaits. Tout ce que nous pourrions faire pour les écarter est inutile, si nous ne leur opposons une volonté inébranlable dans le bien, et un renoncement absolu au mal. C'est donc contre nous-mêmes qu'il faut diriger nos efforts, et alors les mauvais
Esprits s'éloigneront naturellement, car c'est le mal qui les attire, tandis que le bien les repousse. (Voyez ci-après, Prières pour les obsédés.)
Seigneur, soutenez-nous dans notre faiblesse ; inspirez-nous, par la voix de nos
anges gardiens et des bons
Esprits, la volonté de nous corriger de nos
imperfections, afin de
fermer aux
Esprits impurs l'accès de notre
âme.
(V. ci-après, n° 11.)
Le mal n'est point votre ouvrage, Seigneur, car la source de tout bien ne peut rien engendrer de mauvais ; c'est nous-mêmes qui le créons en enfreignant vos lois, et par le mauvais usage que nous faisons de la
liberté que vous nous avez donnée. Quand les hommes observeront vos lois, le mal disparaîtra de la terre, comme il a déjà disparu dans les mondes plus avancés.
Le mal n'est une nécessité fatale pour personne, et il ne paraît irrésistible qu'à ceux qui s'y abandonnent avec complaisance. Si nous avons la volonté de le faire, nous pouvons avoir aussi celle de faire le bien ; c'est pourquoi, ô mon
Dieu, nous demandons votre assistance et
celle des bons
Esprits pour résister à la tentation.
VII. Ainsi soit-il.
Plaise à vous, Seigneur, que nos désirs s'accomplissent ! Mais nous nous inclinons devant votre sagesse infinie. Sur toutes les choses qu'il ne nous est pas donné de comprendre, qu'il soit fait selon votre sainte volonté, et non selon la nôtre, car vous ne voulez que notre bien, et vous savez mieux que nous ce qui nous est utile.
Nous vous adressons cette prière, ô mon
Dieu ! pour nous-mêmes ; nous vous l'adressons aussi pour toutes les
âmes souffrantes, incarnées ou désincarnées, pour nos amis et nos
ennemis, pour tous ceux qui réclament notre assistance, et en particulier pour N....
Nous appelons sur tous votre
miséricorde et votre
bénédiction.
Nota. On peut formuler ici ce dont on remercie
Dieu, et ce
que l'on demande pour soi-même ou pour autrui. (Voir ci-après les
prières n° 26, 27.)
__________________________________________________________________________________________________
(10) Certaines traductions portent :
Ne nous induisez point en tentation (et ne nos inducas in tentationem) ; cette expression donnerait à entendre que la tentation vient de
Dieu, qu'il pousse volontairement les hommes au mal, pensée blasphématoire qui assimilerait
Dieu à Satan, et ne peut avoir été celle de
Jésus. Elle est du reste conforme à la doctrine vulgaire sur le rôle des démons. (Voyez
Ciel et Enfer, ch. X, les Démons.)