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L'Homme et ses Corps

Annie Besant
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LES CORPS MENTAUX
B – Le Corps causal

Passons à l'étude du deuxième corps mental, que nous désignons par son nom distinctif : « corps causal » . Cette appellation est motivée par le fait que dans ce corps résident toutes les causes dont les effets sont manifestés sur les plans inférieurs. C'est ici le « corps du Manas » , l'aspect « forme » de l'Individu, de l'Homme véritable. Le corps causal est le réceptacle, le grenier où s'accumulent pour l'éternité les trésors de l'Homme ; il se développe à mesure que la nature inférieure lui transmet, de plus en plus abondants, les matériaux susceptibles d'entrer dans sa structure. C'est dans le corps causal que sont assimilés tous les résultats durables de l'activité humaine ; c'est en lui que sont emmagasinés, pour être transmis à l'incarnation suivante, les germes de toutes les qualités. Les manifestations inférieures, étudiées jusqu'ici, dépendent donc entièrement de la croissance et du développement de cet Homme véritable « pour qui l'heure fatale ne sonne jamais ».

      Le corps causal, avons-nous dit plus haut, est l'aspect « forme » de l'Individu. Nous occupant ici du seul cycle actuel de l'humanité, nous pouvons dire, que, jusqu'à son apparition, il n'y a point d'Homme. Les tabernacles physique et éthérique peuvent exister déjà, attendant sa venue ; les passions, les émotions, les appétits peuvent être rassemblés, pour former sa nature Kâmique, dans le corps astral. Mais il n'y a point d'Homme tant que n'est pas parfaite la croissance de l'être à travers les plans physique et astral, et tant que la substance du plan mental n'a pas commencé à se manifester dans les véhicules inférieurs évolués. Lorsque, par la puissance du « Soi » préparant sa propre demeure, la matière du corps mental commence lentement à se manifester, il se produit une descente, un épanchement du vaste océan d'Atmâ Buddhi, de l'Esprit qui plane éternellement à la surface de l'évolution humaine. Ce courant descendant, si je puis m'exprimer ainsi, vient à la rencontre du courant ascendant de substance mentale évoluante, qu'il féconde. A ce point de jonction, le corps causal, l'Individu prend naissance.

      Ceux dont la vue pénètre ces régions sublimes nous disent que cet aspect « forme » de l'Homme véritable est alors semblable à un voile sphérique ténu, d'essence subtile, à peine perceptible, délimitant la sphère individuelle de l'être séparé. Ce voile délicat, incolore, de fine matière, est le corps qui perdure à travers toute l'évolution humaine, le fil qui soutient et relie toutes les vies, le « Sutrâtmâ » réincarnateur, le « Soi-fil » (14). Il est le réceptacle de tout ce qui est d'accord avec la Loi, de tout attribut noble, harmonieux et, par suite, durable. C'est en lui que se marque la croissance de l'Homme, le degré d'évolution atteint. Toute pensée grande et noble, toute émotion pure et sublime, monte jusqu'à lui pour être assimilée en sa propre substance.

      Considérons la vie d'un homme ordinaire et voyons ce qu'elle fournit en fait d'éléments propres à entrer dans la construction du corps causal. Ce dernier, nous nous l'imaginons semblable à un globe mince, à un voile ténu et délicat ; il doit être renforcé, il doit revêtir des couleurs splendides ; plein de vie, rayonnant, glorieux, il s'épanouira avec la croissance et l'évolution de l'Homme.

      Or, ce dernier, au début de son histoire, ne fait guère preuve de qualités mentales ; au contraire, ses passions, ses appétits sont sa manifestation dominante ; les sensations qu'il perçoit et qu'il recherche lui paraissent seules désirables.

      Pour figer les idées, nous pourrons imaginer le corps causal de l'Homme projetant, dans les régions inférieures de son propre plan, une petite portion de la substance délicate qui le compose, un appendice autour duquel le corps mental se forme. Ce dernier se prolonge à son tour vers le plan astral et reste en contact avec le corps astral ainsi formé, de sorte qu'un lien est établi, un pont est jeté sur lequel passe tout ce qui peut y passer. Par ce pont, l'Homme envoie ses pensées vers le monde des sensations, des passions, de la vie animale, et les pensées se mélangent à ces passions, à ces émotions animales. Ainsi, le corps mental s'enchevêtre avec le corps astral, et, quand vient la mort, il est difficile de les séparer l'un de l'autre.

      Mais, si l'Homme, pendant sa vie dans ces régions inférieures, émet une pensée désintéressée, une pensée secourable envers un être aimé, s'il fait un sacrifice quelconque pour rendre service, il a dès lors fait œuvre durable ; sa création est viable, car il a mis en elle la nature du monde supérieur. Elle pourra remonter jusqu'au corps causal et être assimilée en sa substance, qu'elle embellira, lui donnant peut-être sa première nuance de couleur vive. La vie entière de l'Homme peu évolué ne produira sans doute qu'un petit nombre de ces résultats durables, propres à nourrir le corps causal. La croissance de ce corps est donc très lente, car tout le reste de la vie n'y contribue point.

      Quant aux mauvaises tendances, leurs germes passent à l'état latent lorsque le corps astral, qui les a hébergées et entretenues de sa substance, est dispersé dans le monde astral. Ramenés à l'intérieur dans le corps mental, ces germes demeurent cachés, inertes, faute de moyens d'expression dans le monde dévakhanique. Lorsque le corps mental périt à son tour, ces germes sont attirés dans le corps causal et y restent, toujours latents, dans un état d'animation suspendue. Lorsque enfin l'Ego, à son retour vers la vie terrestre, atteint le monde astral, ils sont revivifiés et projetés en manifestation, et ils apparaissent dans l'enfant sous forme d'innéités mauvaises. Ainsi le corps causal peut être considéré comme le réceptacle du Mal comme du Bien, puisqu'il est tout ce qui reste de l'Homme après la dispersion des véhicules inférieurs. Remarquons, toutefois, que le Bien est assimilé en sa texture et aide à sa croissance, tandis que le Mal (sauf le cas exceptionnel que nous allons mentionner) n'y subsiste qu'à l'état germinal.

      Il n'en est pas de même lorsque l'Homme consacre à l'accomplissement du Mal la puissance de sa pensée : le tort fait au corps causal est autrement grave, alors, que la simple mise en réserve des germes du péché et du chagrin futurs. Non seulement la dépravation ne contribue en rien à la croissance de l'Homme véritable, mais, lorsqu'elle est subtile et persistante, elle entraîne et compromet, si je puis m'exprimer ainsi, une portion de l'Individualité elle-même. Le vice continuel, la constante recherche du Mal, aboutissent à un tel enchevêtrement du mental avec l'astral, qu'après la mort, Manas ne peut se libérer entièrement, et qu'une partie de sa propre substance est arrachée, perdue pour l'Individu, et finalement dissipée, restituée au Mental universel lors de la dispersion de l'enveloppe astrale. Le voile sphérique léger, semblable à une bulle de savon, auquel nous comparions tantôt le corps causal, peut donc être aminci, affaibli par une existence dépravée ; non seulement sa croissance est retardée, mais sa constitution même est altérée, en sorte que ses fonctions d'assimilation sont rendues plus pénibles. Sa capacité de croître, en un mot, paraît être affectée, stérilisée, atrophiée jusqu'à un certain point. Dans la majorité des cas, le tort fait au corps causal ne va pas plus loin.

      Mais, lorsque l'Ego est devenu puissant en intelligence et en volonté, sans croître simultanément en désintéressement et en amour ; lorsqu'il se contracte autour de son centre séparé, au lieu de s'épanouir par la croissance ; lorsqu'il s'entoure d'une muraille d'égoïsme, et qu'au lieu de consacrer ses puissances au service de l'Universel, il les emploie à satisfaire l'ambition du « moi » séparé ; alors surgit la possibilité d'un mal plus terrible et plus profond, possibilité à laquelle font allusion tant de traditions sacrées. Alors il peut se faire que l'Ego se mette consciemment en travers de la Loi, et qu'il combatte délibérément l'Evolution. Travaillé par les vibrations de l'intellect et de la volonté, par les activités du plan mental exclusivement orientées vers un but égoïste, le corps causal lui-même commence dès lors à revêtir les teintes sombres qui sont l'indice de la contraction ; il perd cette splendeur rayonnante qui était son attribut caractéristique. Une telle calamité ne peut survenir pour l'Ego médiocrement développé, ni comme conséquence de fautes passionnelles ou mentales ordinaires. Pour produire une perturbation aussi profonde, l'Individualité doit être hautement évoluée, et ses énergies doivent être puissantes sur le plan mânasique. C'est pourquoi l'ambition, l'orgueil et l'emploi égoïste des puissances intellectuelles sont des vices infiniment plus dangereux, plus mortels dans leurs conséquences, que les fautes grossières et palpables de la nature inférieure. C'est pourquoi le « Pharisien » est souvent plus loin du « Royaume de Dieu » que le « publicain et le pécheur ». Selon cette voie se développe le « mage noir » , l'homme qui subjugue ses passions et ses désirs, qui développe sa volonté et les puissances supérieures de son intelligence, non pour les offrir joyeusement à l'Universel, non pour venir en aide à l'évolution du Tout, mais afin de saisir ce qu'il pourra accaparer au profit de son « moi » séparé, afin de garder tout pour soi sans rien partager. De tels hommes travaillent à maintenir la séparation contre l'unification, ils contribuent à retarder l'évolution, au lieu de la hâter ; la vibration de leur être est, dès lors, en discordance avec l'Harmonie Universelle, c'est pourquoi ils sont menacés du déchirement de l'Ego, calamité qui implique la perte de tous les résultats acquis par l'évolution.

      Quoi qu'il en soit, nous tous, qui commençons à comprendre ce qu'est le corps causal, nous pouvons considérer son développement comme l'objet même de notre existence ; nous pouvons nous efforcer de penser toujours avec désintéressement, afin de contribuer à sa croissance et à son activité. A travers les vies et les âges, cette évolution de l'Individu se poursuit, et en hâtant sa croissance par nos efforts conscients, nous œuvrons en harmonie avec la Volonté Divine, et nous accomplissons la tâche qui nous est dévolue ici-bas. Le Bien, une fois tissé dans l'étoffe de ce corps causal, n'est jamais perdu : aucune parcelle ne peut en être distraite, car c'est ici l'Homme réel, qui vit à tout jamais.

      Nous voyons donc que le Mal, quelque puissant qu'il puisse sembler momentanément, porte en lui-même le germe de sa propre destruction, tandis que le Bien a toujours en lui le germe de l'immortalité. Le secret de cette différence gît en ce fait, que le Mal est toujours disharmonique, qu'il se met en opposition avec la Loi cosmique ; c'est pourquoi il est condamné, tôt ou tard, à être brisé par cette Loi, à être écrasé, réduit en poussière par l'irrésistible courant de l'Evolution. Tout ce qui est Bien, par contre, s'harmonisant avec la Loi, est soulevé, transporté par elle et devient partie intégrante du courant universel, de ce « je ne sais quoi qui, en dehors de nous-mêmes, tend vers la perfection ». C'est pourquoi le Bien est impérissable, indestructible. Ici repose non seulement l'espoir de l'homme, mais la certitude de son triomphe final. Quelque lente que soit sa croissance, elle est là ; quelque long que soit son chemin, il a une fin. L'Individualité qui est notre « Soi » évolue et ne peut plus désormais être entièrement détruite ; si même, par notre maladresse, nous rendons sa croissance plus lente qu'elle ne devrait être, il n'en subsiste pas moins que tout ce par quoi nous y contribuons, quelque infimes que soient nos efforts, perdure en elle à tout jamais et constitue notre héritage pour les siècles à venir.


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(14)  De Sutra, fil, et Atmâ, âme, ou « Soi » . Prononcez : Soutra. – De même pour tous les noms sanscrits employés : u se prononce ou.




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