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Le développement de l'âme

Alfred Percy Sinnett
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CHAPITRE IX :
LE PLAN SPIRITUEL (3/3)

Prenons l'exemple d'un être désincarné qui, pendant sa vie terrestre, se serait attaché à un ami au point de lui assigner une place dans la vision subjective qu'il se crée en Dévakhan. Dans l'état normal des choses, la conscience individuelle de son ami n'y prendrait aucune part volontaire. Mais si celui-ci est déjà entré dans le sentier du développement occulte, s'il est capable d'activité sur le plan dévakhanique, la situation change aussitôt. Cet ami peut, en tous temps, vivifier et animer à volonté sa propre image sur ce plan, en sorte qu'elle devient un autre lui-même, capable de traduire ses pensées personnelles, au lieu de se borner à refléter celles que lui attribue l'être désincarné qui l'a créée.

      En sorte que cette âme plongée dans la félicité dévakhanique pourra profiter de l'enseignement spirituel de son ami et dépassera même le stade évolutif où l'auraient amenée les seuls efforts de sa vie précédente. Les progrès ainsi réalisés seront assimilés par le véritable Ego (21) et le seront pour toujours.

      Quelques-uns de mes lecteurs pourraient voir ici une infraction à la loi du Karma, en faveur de la personne qui reçoit cette bienfaisante influence ; je me hâte d'ajouter pour les rassurer que cette infraction n'est qu'apparente. C'est le Karma de son attachement, de son affection pour un frère plus évolué spirituellement qu'elle ne l'est elle-même. Et, dans une certaine mesure, cette loi dont je viens de parler s'applique également aux individus qui, sans être évolués pour agir librement sur le plan dévakhanique pendant leur vie terrestre, le sont néanmoins suffisamment pour vitaliser inconsciemment leur propre image, idéalisée et évoquée par le penseur dévakhanique.

      Une explication scientifique de ce fait nous entraînerait à des développements bien subtils au sujet de l'unité, sur les plans supérieurs, de toutes les natures vraiment spirituelles, et il est préférable de ne pas aborder ici cette partie obscure de métaphysique occulte. A tous égards, l'étudiant en occultisme qui ne peut encore se considérer comme « sur le sentier », c'est-à-dire comme un disciple régulier, dont le sort futur est soumis à des lois différentes de celles qui régissent la vie dévakhanique normale, se réjouira des possibilités auxquelles j'ai fait allusion. Si sa ferveur spirituelle s'accompagne d'une sympathie particulière pour quelque grand Adepte, dont la renommée soit parvenue jusqu'à lui, et dont le caractère sublime lui inspire une confiance justifiée, lors même qu'il ne serait pas encore prêt à entrer positivement dans le sentier de l'initiation, ses expériences dévakhaniques seront glorifiées par la présence de ce grand Adepte, dans une vision dévakhanique très réelle. Peut-être ne pourra-t-il pas profiter de son enseignement aussi entièrement qu'il le ferait à un stade ultérieur de son évolution, mais rien ne saurait interrompre le lien qui les unit, sauf une grave dégénérescence dans ses existences suivantes.

      En interprétant les mystères occultes, on ne peut tout dire à la fois, aussi n'ai-je pas encore abordé une question qui frappera l'esprit de tout lecteur voulant se rendre compte des expériences de ceux qui pénètrent à volonté sur le plan dévakhanique.

      Quel aspect leur présente ce lieu ? ou plutôt – car il ne s'agit pas d'un lieu, au sens physique du mot, – sous quelle apparence voient-ils la Nature, au point où ils se trouvent placés ?

      Ceci nous amène à l'un des côtés les plus importants de notre sujet – l'aspect des subdivisions du plan dévakhanique. Tout comme le plan astral, il se divise en plusieurs régions dont les caractéristiques diffèrent largement ; mais il ne faut pas oublier que le sous-plan inférieur est déjà si merveilleux que l'âme, à son premier éveil sur cette région, la considère comme l'infini et la perfection mêmes. Il n'est pourtant que le premier degré d'une nouvelle échelle de perfection. Le Dévakhan comporte sept stades progressifs bien définis que nous considérerons, pour en faciliter la description, comme sept sous-plans. Les quatre premiers sont nommés « plans roupiques » ou plans dévakhaniques avec formes, et les trois autres « plans aroupiques » (22) ou régions sans formes.

      Ces distinctions ne sont bien comprises que par le voyant éclairé ou initié qui fonctionne librement sur le plan dévakhanique. L'entité qui, après la vie terrestre, jouit de l'ineffable repos dévakhanique, se trouve localisée dans une région correspondante à ses affinités et n'est pas en position d'étudier les caractéristiques des régions immédiatement supérieures ou inférieures. L'être pourra par la suite s'élever de l'une à l'autre de ces régions, mais, à son premier éveil en Dévakhan, il s'établit, – ou plutôt il se trouve localisé, sans s'en rendre compte, – sur le plan qui développera l'émotion dominante de sa nature. Après cette parenthèse, bien nécessaire pour l'intelligence du sujet, nous pouvons reprendre la description des sous-plans qui, je le répète, ne peuvent être bien compris que par un voyant éclairé.

      Le premier sous-plan roupiquc ou sous-plan inférieur (quelques auteurs ont compté ces plans de haut en bas, mais je préfère suivre le même ordre que dans l'étude des Sept Principes) concerne principalement le développement des affections humaines. L'atmosphère de joie, la sensation de bonheur propre à l'état dévakhanique en pénètre naturellement tous les sous-plans. Le deuxième et le troisième favorisent le développement intense de la dévotion religieuse – sous son aspect le plus noble et le plus pur, dépassant de beaucoup les images conventionnelles et ecclésiastiques qui s'expriment dans la sixième subdivision du plan astral. Le quatrième favorise surtout l'expansion du génie artistique élevé, lorsqu'il s'accompagne de développement spirituel et intellectuel ; ce génie qui ne se contente pas d'approfondir son art sous son aspect essentiel (et de repousser toute recherche excessive dans les détails matériels), mais dont le zèle s'inspire aussi du désir d'en faire bénéficier l'humanité. Dans le développement de la conscience sur le 4ème plan roupique, tout sentiment doit s'allier à l'amour du prochain, qu'il soit provoqué par l'ardeur intellectuelle ou par l'amour de l'art. Aucun sentiment d'ambition, aucun espoir d'une grande renommée artistique n'y peuvent trouver place. Ce doit être le pur amour de l'art, sans nul égoïsme, et ennobli du désir d'élever et d'améliorer l'humanité.

      Parmi les aspirations diverses qui conduisent une âme au Dévakhan, celles qui prédominent l'entraîneront sur un plan approprié, et c'est là qu'elle s'éveillera tout d'abord. Mais si cet éveil se produit sur un plan supérieur, cette âme ne sera point pour cela privée de développer, par exemple, les émotions de l'amour humain, qui s'expriment spécialement sur le premier sous-plan. En pareil cas, le plan supérieur embrasse l'inférieur ; de même sur le deuxième ou troisième plan, le fervent religieux, plongé dans sa douce extase, se verra entouré de tous ceux qu'il chérissait sur terre : l'artiste aussi, si son bonheur parfait l'exige, peuplera sa vision d'une façon identique. Prenons l'exemple d'un Ego dont le désir dominant serait l'amour humain : il s'éveillera d'abord sur le premier plan dévakhanique, et s'il a éprouvé, à un degré secondaire, la ferveur religieuse ou l'amour de l'art, il s'élèvera ensuite plus haut, emportant avec lui sa vision préférée.

      La Nature possède le pouvoir de satisfaire surabondamment à tous les désirs de l'âme, et c'est précisément sur le plan roupique supérieur que celle-ci peut commencer à user de ce privilège. Si pendant sa vie terrestre, cette âme a éprouvé un goût très prononcé pour la science (j'entends une science d'ordre élevé), sur le plan dévakhanique, ce penchant revivra dans sa mémoire à un moment donné, et recevra une réponse appropriée, car, sur ces niveaux, un désir non satisfait est chose impossible, qu'il s'agisse ici du désir d'apprendre ou d'un sentiment d'affection.

      Ces conditions concourent également dans l'évolution normale, à la réalisation, par l'âme, de la vraie connaissance qu'un éveil précoce de l'esprit lui fait rechercher sur terre et qui constitue le véritable développement de l'Ego. On n'engendre pas, selon l'expression consacrée, de nouveau Karma pendant la période dévakhanique, on ne génère aucune cause nouvelle ; mais celles qui ont évolué en forces arrivent alors à maturité et produisent leurs fruits. Cette pensée, bien approfondie, élucidera deux points de l'évolution qui embarrassent quelquefois, parce qu'ils sont mal compris. Tout le travail évolutif de l'âme a été, pour ainsi dire, accompli pendant la vie terrestre et, à la fin de cette vie, les qualités du prochain véhicule physique de l'Ego sont déjà déterminées. Les expériences de sa vie dévakhanique, fruit des semences de la vie terrestre, lui fourniront les moyens de s'adapter à ce nouveau véhicule.

      Essayons maintenant de rassembler toutes les idées que nous avons semées, bien qu'il soit impossible de les suivre toutes à la fois, et cherchons à expliquer quelle peut être « l'apparence du Dévakhan ». Chacun aspire, instinctivement, à quelque description précise de son aspect extérieur, car si cette région est de la matière, si subtile soit-elle, l'esprit ne peut la concevoir sans un aspect extérieur. Les termes mêmes par lesquels on la désigne semblent lui attribuer une existence objective. En effet, cette déduction n'est pas fausse en ce qui concerne le plan dévakhanique.

      Mais l'aspect de la Nature, dans cette région, diffère si largement de celui que nous connaissons ici-bas que l'esprit ne peut arriver à la conception désirée – et encore très imparfaitement – que pas à pas, lorsqu'il commence à comprendre les caractères variés de cette Nature si sublime. Pour tout être qui, pour la première fois, entre en contact conscient avec le plan dévakhanique, l'impression dominante semble être celle de la lumière ; mais une lumière si éclatante qu'elle ne saurait être comparée exactement à celle que peuvent percevoir nos yeux ; car cette lumière, quoique extraordinairement brillante, n'est pas éblouissante. La sensation d'éblouissement caractérise d'ailleurs l'imperfection du sens par lequel nous percevons le phénomène de lumière sur le plan physique.

      La lumière des plans spirituels est d'autant plus agréable, pourrais-je dire, qu'elle est plus éclatante. On doit se la représenter aussi comme associée, de quelque insaisissable façon, avec la vie. Ceux qui peuvent voir la dépeignent comme « une lumière vivante ». En outre, son irradiation n'est pas blanche, elle renferme des couleurs nombreuses dont les nuances varient à l'infini et dans des limites que nos sens physiques ne peuvent saisir.

      Avant même d'atteindre aux niveaux dévakhaniques, quelques individus en état de veille, dont les sens astrals sont en activité, peuvent apercevoir, dans la partie invisible du spectre, des couleurs qui ne ressemblent à aucune de celles connues par les peintres et absolument indescriptibles, car une couleur ne peut se décrire que dans des termes déjà connus.

      Dans l'irradiation splendide de la nature dévakhanique, on discerne plus de couleurs encore que dans la vision astrale, et ce n'est pas là seulement une des beautés de ce plan ; ces couleurs ont une signification qui, sur certains niveaux dévakhaniques, est comprise par celui qui y fonctionne consciemment. De même que les vibrations sonores ont acquis, dans le langage que nous employons, une signification intellectuelle spéciale, les vibrations de la couleur transmettent aussi, sur certains niveaux dévakhaniques, les pensées d'esprit à esprit, et forment une des principales caractéristiques des régions inférieures comme des régions plus élevées de ce plan.

      En outre, il faut toujours nous rappeler que sur le plan dévakhanique, la plasticité de la matière, son obéissance à l'impulsion et à la volonté, sont telles que la pensée y devient un pouvoir créatif bien plus intense que sur les niveaux supérieurs mêmes du plan astral. Cette différence paraît porter en quelque sorte sur l'effort intentionnel. Sur le plan astral, on recherche encore des résultats objectifs ; sur le plan dévakhanique, nul effort n'intervient entre la pensée et sa réalisation. De plus, nous nous y trouvons en relation plus directe avec cette mémoire de la nature, dont le véritable agent, bion que pénétrant les plans inférieurs, fait partie des plans essentiellement spirituels.

      Lorsque la pensée considère une période quelconque du passé, elle en évoque aussitôt une image absolument exacte. En sorte que si nous observons l'ensemble du plan dévakhanique, abstraction faite de ses subdivisions, nous remarquons qu'une certaine omniscience des affaires de ce monde fait partie intégrante de l'étal conscient sur ces régions. Il est cependant un fait dont il faut toujours nous souvenir au cours de cette étude : la nature, même sur ces plans élevés de conscience, ne peut donner à la conscience en rapport avec elle, qu'une réponse adéquate à son développement. Ceci s'applique aussi bien à l'élève en occultisme, commençant à pénétrer sur les plans dévakhaniques, qu'aux entités qui y passent après la mort. Ce n'est pas sans difficulté, et degré après degré, que l'étude de l'évolution et de la croissance de l'âme pourra nous affranchir de cette erreur considérant l'état futur comme une élévation soudaine qui transforme les êtres humains, les plus ordinaires, en anges de lumière, aussitôt qu'ils sont libérés de leur corps grossier. Ce changement soudain est aussi impossible qu'il l'est, pour le nouveau-né faisant son entrée dans le monde physique, d'écrire, le jour suivant, les Principes de Newton, ou le Cosmos d'Humboldt. L'évolution normale de l'âme s'accomplit, sur le plan physique, par stades progressifs et lents ; la même progression, quoique considérablement accélérée, s'applique au disciple qui commence à fonctionner sur les niveaux dévakhaniques.

      Au delà des quatre subdivisions que nous avons décrites jusqu'à présent – les plans roupiques du Dévakhan, c'est-à-dire ceux où l'état de conscience est encore en quelque sorte associé à l'idée de forme – il existe trois plans aroupiques ou sans formes, dont il est extrêmement difficile de donner une explication raisonnée daus notre langage terrestre. Ici, l'entité capable d'y accéder consciemment commence à réaliser l'unité de tous les états de conscience ; l'unité ainsi comprise est à une distance si transcendante de notre conscience à l'état de veille, qu'il est presque impossible de la définir d'une façon intelligible dans un langage humain. Ces plans supérieurs sont nommés sans formes, non qu'ils soient incompatibles avec la manifestation même de la forme ; mais plutôt parce que l'âme qui s'élève à ces sommets est capable de percevoir les réalités indépendamment de toute manifestation extérieure.

      Ceux d'entre nous auxquels l'évolution spirituelle permet d'entrer en relations en tous temps avec les plans aroupiques du Dévakhan ne peuvent se servir, à cet effet, que d'un seul véhicule, celui que la terminologie occulte désigne sous le nom de Karana Sharira (ou corps causal) (23).

      C'est, en ce qui concerne le Manvantara actuel, le véhicule absolument permanent de l'individualité humaine. C'est dans ce véhicule, que, dépouillé de ses manifestations inférieures, l'homme s'élève aux plus hautes régions, qu'il lui soit donné d'atteindre, pendant l'intervalle qui sépare la mort de la renaissance. Avec ce même véhicule, il redescend dans les états intermédiaires, s'y manifeste à nouveau dans divers véhicules appropriés et revêt enfin le corps physique qui doit servir à sa prochaine incarnation terrestre.

      Les entités fonctionnant sur les plans aroupiques, dans leur corps causal, sont les unes pour les autres des réalités objectives, et la véritable raison pour laquelle ces plans ont été appelés plans sans formes provient de ce qu'on n'y aperçoit pas d'autres formes que celles revêtues par les êtres qui en font partie. Ceux qui peuvent fonctionner consciemment sur ces plans et imprimer, au retour, dans leur mémoire physique, le souvenir de leurs sensations et de leurs perceptions, décrivent ces régions comme des mers de lumière vivante, de son et de couleur. Avant de chercher à nous rendre compte de leurs caractéristiques, il faut comprendre que l'existence seule dans ces régions constitue la plus intense félicité.

      Mais le caractère le plus significatif des plans aroupiques, surtout au point d'observation où nous nous plaçons, les distingue précisément des plans dévakhaniques inférieurs, si beaux déjà eux-mêmes et si sublimes, qu'il ne reste plus d'expression pour qualifier la condition aroupique. Sur les couches roupiques. nous l'avons vu, le monde qui environne chaque entité est un monde idéal ; – abstraction faite ici des êtres qu'un certain développement met en état d'y fonctionner temporairement ; – il est permanent pour elle et lui représente l'ensemble parfait de ses désirs et de ses sentiments les plus élevés. Mais si son évolution spirituelle se trouve de nature à l'élever éventuellement jusqu'aux plans aroupiques, elle n'aura d'autre idéal que la réalité absolue des choses.

      Sur les plans aroupiques, un être voit ses semblables exactement tels qu'ils sont ; et cette perception n'est point un obstacle à la béatitude parfaite de chacun d'entre eux ; parce que tout individu, capable d'exister consciemment sur ces plans, est tellement au-dessus des limitations de l'existence, telle que nous la comprenons ici-bas, que l'illusion n'est plus nécessaire à son bonheur. Les sentiments d'amour et d'affection que nous ressentons ici-bas sont en quelque sorte le résultat de notre conscience limitée et cependant cette pensée sera difficile à faire accepter à celui qui n'a jamais cherché à dépasser les confins de l'existence terrestre. Pourtant, ces sentiments ne sont pas étouffés ou dissipés par leur transfert sur des régions où les limitations qui les ont générés se fondent dans l'unité spirituelle ; mais leur nature se modifie entièrement sous l'influence de cet état transcendant. Ils perdent toute relation avec les circonstances transitoires qui donnent naissance à l'idéal, aux illusions même les plus sublimes. Les mots peuvent à peine rendre des pensées d'un caractère aussi subtil. Toutefois, que celui qui désire se former une conception de l'état aroupique concilie ces deux idées : Il est impossible de méconnaître la vraie réalité sur ce plan ; d'autre part, le regret et le désappointement ne peuvent y trouver place.

      Le véhicule du Soi Supérieur appelé, comme je l'ai dit, Karana Sharira, dans la terminologie occulte et Corps Causal, dans un langage plus simple, est la forme que doit revêtir toute entité qui se manifeste sur l'un quelconque des plans aroupiques. Le Soi Supérieur fonctionne dans cet unique véhicule permanent, pendant toute la durée du Manvantara, animant successivement de nombreuses personnalités.

      Le développement de l'âme étant le but final de notre évolution, nous en déduirons avec raison que, dans les périodes primitives, le Corps Causal dut être fort peu développé chez l'individu. La grande majorité de l'humanité, à notre stade actuel, est encore incapable d'activité consciente sur les niveaux aroupiques. Le Corps Causal évolue graduellement, recueillant,comme entité permanente, les quelques fruits que lui apportent les expériences terrestres de ses diverses personnalités. En observant les populations qui couvrent la surface du globe, nous remarquons que, chez la plupart des humains, le Soi Supérieur est à peine assez évolué pour représenter un embryon de conscience sur les plans même roupiques du Dévakhan. Il a seulement appris à être en quelque sorte conscient dans ses manifestations astrales et physiques. Le Soi Supérieur, même dans les spécimens inférieurs de l'humanité, existe, en un certain sens, sur les plans aroupiques ; et c'est là que la conscience se retire après chaque existence physique. Mais l'âme brille d'une flamme qui s'affaiblit graduellement jusqu'à n'être plus qu'un point. Elle retourne alors en incarnation, se recouvrant, en traversant les plans d'existence inférieurs, des véhicules matériels adaptés aux états de conscience qu'elle a appris à exprimer.

      Mais, pour comprendre les plans aroupiques, fixons plutôt notre attention sur les êtres déjà suffisamment développés pour y être véritablement conscients et capables d'exercer les facultés et les énergies propres à cette région de la nature.

      Sur ce plan d'existence, tous les sens se confondent en une seule et unique faculté de perception qui remplace absolument les organes des sens toujours associés, dans notre pensée, à l'être humain. Cette idée est l'une des plus difficiles à saisir. Nous ne pouvons concevoir l'existence sans y adjoindre l'idée d'une forme humaine ; aussi les poètes et les peintres ont-ils suivi sur ce point l'impulsion de la théologie anthropomorphe dans tous les essais qu'ils tentèrent pour représenter les êtres célestes. Leurs plus grands efforts en ce sens paraissent quelque peu naïfs à ceux que l'imagination ou l'expérience a rendu capables de comprendre, dans une certaine mesure, l'état de conscience spéciale de ces régions.

      On se rappellera que l'Aura qui entoure l'homme est elle-même (à l'exception des éléments constitutifs correspondant aux conditions magnétiques du corps), composée de véritables véhicules qui lui permettent de fonctionner sur les plans supérieurs de la nature. L'Aura, qui n'a ni membres ni visage, est pourtant, dans un sens plus positif encore que les membres ou le visage, le véhicule de nos pensées et de nos émotions, de notre connaissance et de notre volonté. En conséquence, celui qui voudra comprendre, dans une certaine mesure, les caractéristiques de ces niveaux aroupiques, fera bien de renoncer à cette erreur propre à l'existence physique d'associer la conscience à l'organisme différencié.

      Il est à présumer que le Corps Causal de tout être humain doit exister déjà à l'état d'embryon plus ou moins développé sur le plan aroupique inférieur. Sur le plan intermédiaire se trouvent les Corps Causals, parvenus à un développement intellectuel et spirituel, déjà très important, et sur le plan supérieur, les êtres seuls qui ont ajouté à ce développement l'acquisition volontaire de la connaissance et du pouvoir correspondant, pour le moins, au premier des grands stades d'initiation. Ce processus de l'initiation nous représente l'accomplissement prématuré de l'évolution que doit atteindre l'humanité vers la deuxième moitié du Manvantara. Cette période, une fois dépassée, l'évolution aura entraîné le plus grand nombre des hommes sur ces niveaux qui ne sont accessibles présentement qu'à ceux d'entre eux qui ont gravi ce sentier avec une rapidité surprenante.

      En conséquence, nous en apprendrons davantage sur le plan aroupique supérieur, en étudiant l'évolution anormale, que si nous nous en tenons à son développement normal.

      Nous reprendrons ce sujet plus tard, en décrivant spécialement le processus de l'initiation. Pour l'instant, il n'est pas nécessaire d'introduire le plan aroupique supérieur dans une étude restreinte du cours normal de l'évolution que poursuit l'entité humaine et des progrès qu'elle accomplit dans la période qui sépare deux incarnations.

      Nous pouvons néanmoins faire pressentir en terminant ce sujet que les conditions spirituelles accessibles à l'âme humaine, encore en relations avec cette terre, ne s'arrêtent pas aux plans de la Nature que nous avons décrits jusqu'ici. La donnée occulte nous enseigne qu'au delà des niveaux aroupiques se trouve un état spirituel, plus transcendant encore, et cependant accessible à l'homme. Mais il est inutile, dans un langage physique, de chercher à décrire les caractéristiques de ce plan, qui se trouve d'ailleurs en dehors des cycles naturels de l'existence humaine ; au cours normal des choses, l'âme, après la mort, ne s'élève pas jusque-là. Elle redescend, au contraire, des plans spirituels que nous avons dépeints, pour se réincarner en temps voulu. Il n'est donc pas nécessaire de considérer maintenant cette région transcendante ; mentionnons seulement en passant qu'elle constitue cet état de ravissement spirituel inénarrable que la Théosophie orientale désigne sous le nom de Nirvana.


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(21)  Ego supérieur, corps causal. N. D. T.

(22)  En sanscrit, ces deux divisions se nomment : Rûpa et Arûpa (le û se prononce toujours ou). N. D. T.

(23)  L'usage a consacré, dans la littérature théosophique française, le nom de Corps causal pour le Karana Sharira, de Karana, cause ; Sharira, Corps. Nous remplacerons donc dans le texte anglais les mots Karana Sharira par Corps causal. N. D. T.




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