
L'année 1964 aura été
une année noire pour tous ceux aux yeux desquels les recherches
alchimiques traditionnelles sont un domaine sacré.
Dans le domaine des sciences traditionnelles,
et de la philosophie
hermétique au tout premier chef, peu
d'hommes en France pouvaient se targuer d'une culture aussi poussée
que celle de notre fidèle ami
Claude d'Ygé.
Beaucoup, parmi les chercheurs qui se penchent
sur l'
alchimie, lui doivent en fait d'avoir toujours été
très méthodiquement, sagement guidés tout
au long de leurs études. Voici, par exemple, la belle dédicace
du livre
Deux Traités alchimiques
du XIXème siècle, par laquelle
Bernard
Husson remerciait celui qu'il considérait à si juste
titre comme son vrai Maître : «
Pour Claude d'Ygé,
qui m'a mis sur la voie, et grâce à qui j'ai pu réunir
la documentation de ce livre. »
Pour notre part, nous reconnaissons pleinement
l'étendue de notre dette personnelle envers
Claude d'Ygé
: c'est lui qui nous guida dans nos toutes premières recherches
en littérature
hermétique, et nous lui devons une
aide précieuse pour les belles recherches
iconographiques
très étendues que nécessitait la publication
de notre ouvrage
illustré (en collaboration avec Michel
Caron) sur
Les alchimistes.
D'une très ancienne famille d'authentique
noblesse française,
Claude de Lablatinière est né
à
Paris le 06
janvier 1912. Très tôt, il manifesta
un intérêt passionné pour l'
ésotérisme
traditionnel, et son père, avocat, fut son premier instructeur
en Haute Science.
Claude d'Ygé devint, très jeune
encore, l'une des personnalités les plus remarquables des
milieux initiatiques parisiens, littéraires et artistiques
aussi. Il fut l'ami personnel de presque toutes les gloires
européennes
de l'
ésotérisme d'entre les deux guerres : astrologues,
mages, alchimistes. C'était un précieux maillon
dans la millénaire chaîne initiatique se rattachant
à Fulcanelli : plusieurs représentants actuels de
l'
alchimie lui doivent beaucoup de leur Savoir.
Mort beaucoup trop tôt, le 19 mars
1964, à
Saint-Gratien, et n'ayant pu se consacrer intégralement
aux recherches qui lui tenaient tant à cur, Claude
d'Ygé n'a pu écrire qu'une bien faible partie de
ce qu'il projetait de publier. On lui doit pourtant, outre de
très nombreux articles dans les revues spécialisées
(et notamment dans
Initiation & Science, dont il était
un collaborateur très fidèle), deux
anthologies
remarquables :
Anthologie de la poésie
hermétique (dont il préparait une
nouvelle édition très augmentée), et
Nouvelle
assemblée des Philosophes chymiques. Quand
la mort l'emporta, si prématurément, il travaillait
à deux beaux ouvrages plus personnels :
Verbe,
Son et Lumière et
Le
symbolisme des pierres précieuses, ainsi
qu'à un Catalogue bio-bibliographique des reproductions
d'ouvrages alchimiques de la Collection
Le Scaphandrier.
Après celle (tout aussi regrettable)
du Docteur Henri Hunwald, la mort subite de
Claude d'Ygé
laisse un énorme vide dans les rangs des hermétistes.
Et tous ceux qui l'ont connu regrettent cet ami toujours si serviable,
ne ménageant jamais son temps ni sa gentillesse.