Biographie universelle ancienne et moderne Jean VIII, élu pape le 14 décembre 872, était
archidiacre de l'
Eglise romaine, et succéda à Adrien II. Les incursions des
Sarrasins, à cette époque, désolaient l'Italie. Le pape demanda des secours contre eux à l'empereur
Charles le Chauve, qui lui en avait promis, mais qui fut obligé de retarder l'accomplissement de ses promesses, à cause de la guerre que lui faisait son neveu, Louis II, et des incursions des Normands. Charles se mit enfin en chemin pour l'Italie. Le pape vint à sa rencontre ; mais la révolte de Carloman et la lenteur des seigneurs français, qui ne venaient point
joindre leur prince, rendirent tous ces projets inutiles. Le pape se contenta de couronner à Tortone l'
impératrice Richilde, et revint à Rome avec un crucifix d'or, orné de pierreries, que l'empereur lui avait donné ; celui-ci, en retournant en France, mourut dans un village auprès du mont Cenis.
Jean VIII, se
voyant ainsi trompé dans ses espérances, fut obligé de traiter avec les Sarrasins, et de leur payer un tribut de 25 mille marcs d'
argent par an.
Le pape voulut ensuite s'appuyer de la protection de Basile, empereur d'Orient, et lui envoya une
légation à ce sujet. Mais il eut d'autres occupations dans Rome. Lambert,
duc de Spolète, vint à Rome, sous prétexte d'amener des secours au pape, mais en effet pour le traiter en
ennemi. Il se saisit de sa personne, et l'enferma dans l'
église de St-Pierre, sans permettre à qui que ce fût de communiquer avec lui, ni même de lui porter des vivres. Des
évêques, des
prêtres, des moines, qui venaient pour officier dans l'
église, furent chassés à coups de bâton. Lambert disait qu'il agissait ainsi par l'ordre du roi Carloman ; mais on le soupçonnait de vouloir se faire empereur lui-même. Quand il eut abandonné Rome, le pape l'excommunia, et résolut de venir en France se plaindre de ces outrages ; mais Lambert lui ayant
fermé le chemin par terre, Jean fut obligé d'y aller par mer.
Il tint un grand
concile à
Troyes, y couronna Louis le Bègue, fit de vaines exhortations pour obtenir des secours de troupes, et ne trouva qu'un seul
évêque qui l'accompagnât dans son retour en Italie. Le pape fit des instances non moins infructueuses auprès des souverains d'Italie, pour les détacher de l'alliance des Sarrasins. Dans sa détresse, il eut encore recours à l'empereur Basile ; et, pour le flatter, il écrivit des lettres favorables à Photius, qu'il résolut de reconnaître pour
patriarche légitime, et qui fut en effet reconnu dans un
concile tenu à Constantinople au mois de novembre 879, mais auquel le pape mit ensuite des restrictions, après s'être convaincu qu'il avait été trompé par ses
légats. Une flotte envoyée par Basile en Italie eut des succès considérables contre les Sarrasins ; mais Rome ne s'en trouva pas mieux. Alors
Jean VIII tourna ses
vues vers Charles le Gros, auquel il promit l'empire, et qui vint effectivement se faire couronner à Rome, par
Jean VIII, le
jour de
Noël 881. Le pape n'en fut pas plus heureux pour obtenir ce qu'il demandait.
Il mourut le 11 décembre 882, après dix ans de
pontificat. On lui reproche d'avoir.été beaucoup trop occupé du gouvernement temporel et d'avoir prodigué les
excommunications au point de les rendre indifférentes. Ce fut par l'ordre de
Jean VIII que Jean, diacre de l'
Eglise romaine, écrivit en quatre livres la vie de Grégoire le Grand, qui avait vécu trois cents ans auparavant. Il est resté 326 lettres de
Jean VIII, insérées dans la collection des
conciles. Il eut pour successeur
Martin II.
(Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 20 - Page 606)