Un vieux Maçon de Californie, le doyen probable des lecteurs du
Symbolisme, éprouve le besoin de plaider une cause qui lui est chère : celle des Mères, Filles, Epouses et Surs des Maçons. Réserver la Maçonnerie au sexe mâle est un
anachronisme, depuis que la construction matérielle est abandonnée. assurément, il ne convient pas aux femmes de tailler les pierres, de gâcher le mortier et de grimper sur des échafaudages. Mais puisque ces prouesses professionnelles ne sont plus demandées aux hommes qui deviennent
Francs-Maçons, il en résulte qu'en bonne logique, rien ne s'oppose plus à l'
initiation des femmes aux mystères de la Maçonnerie spéculative.
Les mâles seraient-ils fiers de l'uvre qu'ils ont accomplie depuis deux siècles ? Ils ne sont pas arrivés à s'entendre, et, tout en parlant avec emphase de fraternité universelle, ils se sont parqués en juridictions qui refusent de se reconnaître entre elles. C'est un scandale dont ne s'offusquent pas les Maçons anglo-saxons qui excommunient leurs FF
:. français, sans parler de l'ostracisme
antimaçonnique des hommes de
couleur aux Etats-Unis.
Sous la direction masculine, la Maçonnerie accorde des grades, des titres, des insignes ; elle amuse ses adhérents, les rapproche dans l'intérêt du commerce et de la politique, tout en exigeant d'eux des cotisations. C'est là son côté faible, comme le prouvent les 143.366 membres qui n'ont plus payé aux Etats-Unis en 1932. Il est évident que pour eux et beaucoup d'autres, la Maçonnerie est un objet de luxe que l'on ne s'offre qu'en temps de prospérité.
Si les femmes s'en étaient mêlées, la situation serait-elle pire ? Seraient-elles inférieures aux mâles en intelligence ? Leur concurrence victorieuse en de multiples domaines, démontre le contraire. Puisque le côté spirituel devrait dominer en Maçonnerie, n'est-il pas absurde d'en exclure l'élément humain le plus affiné quant aux qualités de l'
âme ? Si l'
Initiation s'applique à perfectionner l'être humain, de quel droit l'un des sexes prétend-il se la réserver ?
Plaignons-nous de voir la femme subir le despotisme du sacerdoce,
alors que nous ne savons rien faire pour elle ! L'homme a ses clubs et ses lieux de divertissements variés, mais l'
Eglise seule s'ouvre à la femme ; elle s'y réfugie et y subit des
influences hostiles à la Maçonnerie.
Jadis, la femme participa aux mystères païens ; or, les nôtres lui sont intellectuellement aussi bien et même mieux accessibles qu'à nos
adeptes masculins. Une sélection s'impose naturellement pour l'un et l'autre sexe, mais elle devrait être mieux comprise qu'aux Etats-Unis, où un homme est refusé s'il a une jambe de
bois, alors qu'un cerveau inerte n'est pas un obstacle à l'admission.
Toutes les institutions qui civilisent les peuples en adoucissant
les murs, sont dues à l'
influence féminine, opposée à la brutalité masculine. Or, puisque la Maçonnerie ambitionne de construire une Humanité meilleure, moins avide, moins féroce et convertie à la pure fraternité, ses efforts resteront vains, tant qu'elle se privera du concours de la femme.
Peut-être n'y a-t-il pas lieu de nous proposer en exemple
à nos surs, puisque nous ne pouvons être fiers du travail masculinement accompli. Procédons à notre examen de conscience et concevons une Maçonnerie plus
idéale, dont nous puissions faire les honneurs à
la moitié la plus affinée du genre humain. Réformons-nous en
vue de poursuivre notre tâche avec efficacité, parce que nous aurons réalisé l'unité dans l'immense effort humain qui construit le
Temple de la
Sagesse mariant la
Force à la
Beauté !
J.-B. Wilhelm
Masonic Home, Decoto (Californie)