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Les précurseurs de la Franc-Maçonnerie

au XVIème et au XVIIème siècle
Claudio Jannet
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XIII – L’Humanisme et la Renaissance païenne en Italie

Le naturalisme, qui est le fond des doctrines de la maçonnerie, avait eu, en dehors des Sociniens et des Anabaptistes, d'autres propagateurs dans ces lettres de la Renaissance, qui s'appelaient eux-mêmes les humanistes.

      L'Humanisme a pour caractère extérieur le culte et l'admiration exclusive des œuvres de l'antiquité. Sans doute, les chefs-d'œuvres littéraires et artistiques de la Grèce et de Rome devront toujours tenir une grande place dans la formation intellectuelle, et, depuis saint Jérôme et saint Augustin, l'Eglise leur a fait une large part dans l'éducation de la jeunesse. Mais les humanistes du XVème et du XVIème siècle dépassaient cette sage mesure. Leur thèse était que les pensées, les institutions, les hommes de l'antiquité, étaient supérieurs à ceux des âges chrétiens et qu'on y trouvait le type de la perfection absolue. Lisez toutes leurs œuvres : l'homme seul, considéré objectivement dans ses perfections physiques et ses aptitudes intellectuelles ou dans le rôle qu'il joue sur le théâtre du monde, apparaît comme le grand objet de l'intérêt humain. De Dieu, de la vie future, de la lutte religieuse intérieure, il n'est jamais question. M. Bersot l'a dit – et son appréciation est d'autant plus autorisée qu'il est imbu lui-même de l'esprit de l'humanisme : – « à l'homme déchu et racheté, la Renaissance opposa l'homme ni déchu ni racheté, s'élevant à une admirable hauteur par les seules forces de sa raison et de son libre arbitre. » Enfin les humanistes introduisaient dans le monde une distinction nouvelle bien plus profonde que les différences de classes du Moyen-Age, celle de la supériorité de l'homme qui sait sur celui qui ne sait pas. Or pour eux, l'homme qui sait est le lettré qui s'est nourri de la littérature aux sources païennes, qui cultive exclusivement l'humanisme.

      Au fond, ce sont là les idées de la maçonnerie.

      Il ne faut pas attacher trop d'importance aux cérémonies païennes que célébraient les plus fous parmi eux, quoique le mystère dont ils s'entouraient leur ait parfois fait prendre les allures d'une société secrète (64). Plus sérieux et plus dangereux était l'enseignement philosophique donné par les néo-platoniciens qui se rattachaient à l'école théurgique d'Alexandrie, et par les néo-aristotéliciens qui invoquaient encore plus Averrhoes qu'Aristote. Comme l'a dit un auteur du temps : utrique religionem omnem funditus æque tollunt. L'un des plus célèbres fut Pomponazi, qui professait à l'Université de Padoue (1462-1526), le grand foyer intellectuel des Etats vénitiens (65). Cremonini (1550-1631) y continua son enseignement.

      Un autre, Marsile Ficin, avait fondé à Florence une académie platonicienne composée de Mecénes, d'auditeurs et d'élèves, qui fêtait les jours anniversaires de la naissance de Platon et de Cicéron. Un écrivain franc-maçon anglais de la fin du XVIIIème siècle a prétendu que cette académie était une loge et qu'on y trouvait encore de son temps des symboles maçonniques (66). Ce qui est certain, c'est que, comme le dit l'historien allemand contemporain M. Burckhardt, « le théisme supplantait le christianisme chez la plupart des humanistes, que l'académie platonicienne de Florence était le centre de ce théisme et qu'à l'époque de la Réforme, lorsque la lumière se fit dans les esprits, les théistes virent plus clair dans leurs idées : nombre de protestants italiens se déclarèrent antitrinitaires et sociniens, s'exilèrent même de leur pays et essayèrent de fonder à l'étranger une Eglise nouvelle (67). »


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(64)  César Cantu dans Les Hérétiques italiens, t. III, p.389 (traduction française), s'exprime ainsi au sujet du plus fameux de ces maniaques de l'antiquité, Pomponius Lætus : « Il est singulier que dans les récentes recherches faites par le chevalier de Rossi dans l'intérieur des catacombes de Saint-Sébastien, à Rome, on ait trouvé, parmi les noms de ceux qui les visitèrent au XVème siècle, cette inscription : « Regnante Pom. pont. max. ; et Pomponius pont. max. et Oantagathus sacerdos academiae romanae : » titres qui feraient croire à une hiérarchie établie et qui remettraient en question l'accusation dont Lætus paraissait s'être disculpé avec sincérité. » D'autre part un historien contemporain, Canensius, dans sa vie de Paul II dit que le pape fit dissoudre « une secte de jeunes gens aux mœurs corrompues, qui affirmaient que notre foi orthodoxe était établie, moins d'après le témoignage réel des faits, qu'à l'aide de quelques jongleries des saints et qui soutenaient qu'il était permis à chacun d'user à son gré des voluptés. » Voyez dans le tome I de la Revue des questions historiques : Paul II et Pomponius Lætus par Henri de l'Epinois.

(65)  Voyez Demonstracion de la Armonia entre la Religion catolica y la Ciencia, par don Antonio Comellas y Cluet, in-8°, Barcelone, 1880, pp. 213 et suiv., pp. 294 et suiv.

(66)  Watson, Masonic Essayist (London, 1797), p. 238, cité par Cantu, Histoire des Italiens, t. VII, p. 465, traduction française.

(67)  Jacob Burckhardt, La Civilisation en Italie au temps de la Renaissance, t. II, p. 345, Paris, 1885.




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