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La Voix du Silence

Helena Petrovna Blavatsky
© France-Spiritualités™






FRAGMENT III – LES SEPT PORTAILS

« Oupâdhya (1), mon choix est fait, j'ai soif de sagesse. Tu as maintenant déchiré le voile placé devant le sentier secret, et enseigné le Yâna majeur (2).

      Voici ton serviteur prêt à se laisser guider par toi. »

      C'est bien, Shrâvaka (3). Prépare-toi, car tu devras voyager seul. Le Maître ne peut que t'indiquer la route. Le Sentier est un pour tous, les moyens d'atteindre le but doivent varier avec les pèlerins.

      Que choisiras-tu, ô homme au cœur indomptable ? Le Samtan (4) de la Doctrine de l'œil, le quadruple Dhyânâ ? Ou bien feras-tu route par les Pâramitâs (5) au nombre de six, ces nobles portes de vertu qui mènent à Bodhi et à Prajna, la septième marche de sagesse ?

      Le rude Sentier du quadruple Dhyâna est tortueux et à pic. Trois fois grand celui qui gravit le sommet sublime.

      Les hauteurs Pâramitâ se traversent par un sentier encore plus ardu. Il faut te frayer une route à travers sept portails, sept redoutes occupées par des puissances cruelles et rusées, – les passions incarnées.

      Bon courage, disciple, rappelle-toi la règle d'or. Une fois que tu auras franchi la porte, Srotâpatti (6), une fois que ton pied aura foulé le lit du courant nirvânique dans cette vie ou toute vie future tu n'auras plus devant toi que sept autres naissances, ô toi dont la volonté est de diamant.

      – Regarde. Que vois-tu devant ton œil, ô aspirant à la sagesse des dieux ?

      « Le manteau de l'obscurité est sur la profondeur de la matière ; dans ses plis je me débats. Sous mon regard, elle s'approfondit, Seigneur ; elle se disperse sous le mouvement de ta main. Une ombre se meut, rampante, comme les plis du serpent qui s'allonge... Elle grandit, s'enfle et disparaît dans l'obscurité ».

      – C'est l'ombre de toi-même, hors du sentier, projetée sur les ténèbres de tes péchés.

      « Oui, Seigneur : je vois le Sentier, son pied est dans la boue, ses sommets perdus dans la glorieuse lumière nirvânique. Et maintenant je vois les portails, qui vont en se rétrécissant, sur la route âpre et épineuse de Jnâna ».

      Tu vois bien, lanou. Ces portails mènent l'aspirant, à travers les ondes, sur l'autre rive (7). Chaque portail s'ouvre avec une clef d'or, et ces clefs sont :

      1. DANA, la clef de charité et d'immortel amour.

      2. SHILA, la clef d'harmonie dans les paroles et les actes, la clef qui contrebalance la cause avec l'effet, et ne laisse plus de place à l'action karmique.

      3. KSHANTI, la douce patience, que rien ne peut froisser.

      4. VIRAGA, l'indifférence au plaisir et à la douleur, l'illusion vaincue, la vérité seule perçue.

      5. VIRYA, l'énergie indomptable qui se fraye une route vers la surnaturelle vérité, hors de la boue des mensonges terrestres.

      6. DHYANA, dont la porte d'or, une fois ouverte, conduit le Naljor (un homme sans péchés, un saint) vers le royaume de l'éternel Sat et contemplation incessante.

      7. PRAJNA, dont la clef fait de l'homme un dieu, et le crée Bodhisattva, fils des Dhyânis.

      Telles sont les clefs d'or des Portails.

      Avant que tu puisses t'approcher du dernier, ô tisserand de ta liberté, il te faudra conquérir, le long du sentier aride, ces Pâramitâs de perfection, les vertus transcendantes, au nombre de six et de dix.

      Car, ô disciple, de t'avoir mis à même de rencontrer ton Instructeur face à face, ton Maître lumière à lumière, que t'a-t-on dit ?

      Avant de pouvoir approcher la première porte, il te faut apprendre à séparer ton corps de ton mental, à dissiper l'ombre, et à vivre dans l'éternel. Dans ce but, tu dois vivre et respirer en tout, comme tout ce que tu perçois respire en toi, sentir que tu résides en toutes choses, et toutes choses dans le Soi.

      Tu ne laisseras pas tes sens faire un terrain de jeux de ton mental.

      Point ne sépareras ton être de l'Etre et du reste, mais tu engloutiras l'océan dans la goutte, la goutte dans l'océan.

      Ainsi tu seras en parfait accord avec tout ce qui vit ; tu aimeras les hommes comme s'ils étaient tes frères disciples, les élèves d'un même Maîtres, les fils d'une douce mère.

      Les Maîtres sont nombreux : l'Ame-Maîtresse est une (8), Alaya, l'Ame universelle. Vis dans ce Maître comme son rayon vit en toi. Vis en tes compagnons comme ils vivent en Lui.

      Avant d'apparaître au seuil du Sentier ; avant de franchir la première porte, tu dois immerger les deux dans l'Un, sacrifier le personnel au Soi impersonnel, et détruire ainsi le sentier entre les deux, l'Antahkarana (9).

      Tu dois être préparé à répondre à Dharma, la loi rigide, dont la voix te demandera dès le début, à ton tout premier pas :

      « T'es-tu conformé à toutes les règles, Toi dont les espérances sont sublimes ? »

      « As-tu accordé ton cœur et ton mental avec le grand mental et le cœur de tout le genre humain ? Car, semblable à la voix mugissante de la rivière sainte qui fait écho à tous les sons de la nature (10), ainsi, le cœur de celui « qui veut entrer dans le courant » doit vibrer en réponse à tout soupir, à toute pensée de ce qui vit et respire ».

      On peut comparer les disciples aux cordes de la vînâ qui éveille les échos de l'âme, l'humanité à sa table d'harmonie et la main qui la caresse, au souffle harmonisant de la grande Ame du monde. La corde incapable de répondre au toucher du Maître, en suave harmonie avec toutes les autres, se brise et est rejetée. De même les esprits collectifs des lanou-shravakas. Ils doivent s'accorder avec l'esprit de l'Oupâdhya, un avec l'Ame transcendante, ou se briser.

      Ainsi font les Frères de l'ombre, les meurtriers de leur âme, le clan redouté des Dad-Dougpas (11).

      As-tu accordé ton âme avec la grande peine de l'humanité, ô candidat à la lumière ?

      Tu l'as fait ?... Tu peux entrer. Pourtant, avant de mettre pied sur le sentier désolé de la douleur, il est bon que tu connaisses d'abord les fondrières de cette route.

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      Armé de la clef de charité, d'amour et de tendre pitié, tu peux être tranquille devant la porte de Dâna, la porte qui se dresse à l'entrée du Sentier.

      Regarde, heureux pèlerin ! Le portail qui te fait face est haut et large, et semble d'accès facile. La route qui le traverse est droite, unie et verdoyante. C'est comme une clairière ensoleillée dans les sombres profondeurs de la forêt, un point réfléchi sur terre du paradis d'Amitâbha. Là, les rossignols d'espoir, les oiseaux au radieux plumage chantent dans les verts bosquets, chantent le succès pour les pèlerins sans crainte. Ils chantent les cinq vertus des Bodhisattvas, la quintuple source du pouvoir Bodhi, et les sept pas dans la connaissance.

      Passe ! tu as la clef ; tu es en sûreté.

      Et, menant à la seconde porte, la route est verdoyante encore : mais elle est montante et tortueuse, oui, jusqu'au sommet rocailleux. De grises brumes se suspendront à ses hauteurs rudes et pierreuses, tout sera sombre au delà. A mesure que le pèlerin avance, le chant d'espoir sonne plus faible dans son cœur. Le frisson du doute est maintenant sur lui, son pas devient moins assuré.

      Prends garde à cela, ô candidat ! Prends garde à la crainte qui s'étend comme les ailes noires et silencieuses de la chauve-souris de minuit, entre le clair de lune de ton âAme et le grand but qui s'estompe dans la distance lointaine.

      La crainte, ô disciple, tue la volonté et paralyse toute action. S'il lui manque la vertu Shîla, le pèlerin trébuche, et les cailloux karmiques meurtrissent ses pieds sur l'aride sentier.

      Aie le pied sûr, ô candidat. Baigne ton âme dans l'essence de Kshânti ; car voici que tu approches du portail de ce nom, de la porte de courage et de patience.

      Ne ferme pas les yeux, et ne perds pas de vue Dorje (12) ; les flèches de Mâra frappent toujours l'homme qui n'a pas atteint Virâga (13).

      Prends garde de trembler. Sous le souffle de la crainte, la clef de Kshanti se rouille, la clef rouillée refuse d'ouvrir.

      Plus tu avances, plus tes pieds rencontreront de fondrières. Le sentier où tu marches est éclairé par un feu, par la lumière de l'audace, qui brûle dans le cœur, Plus on ose, plus on obtiendra. Plus on craint, plus la lumière pâlira, et elle seule peut guider. De même que le rayon attardé sur le sommet d'une haute montagne, dès qu'il s'efface, est suivi par la nuit noire ; ainsi, quand la lumière du cœur s'éteint, une ombre profonde et menaçante tombe de ton propre cœur sur le Sentier, et la terreur rive tes pieds sur place.

      Prends garde, disciple, à cette ombre léthargique. Nul rayonnement de l'Esprit ne peut dissiper l'obscurité de l'âme d'en bas, à moins que toute pensée égoïste ne se soit enfuie d'elle, et que le pèlerin ne dise : « J'ai renoncé à cette forme passagère ; j'ai détruit la cause, les ombres projetées ne peuvent plus exister comme effets ». Car voici qu'a eu lieu le grand combat suprême, la lutte finale entre le Soi supérieur et l'inférieur. Vois, le champ de bataille même s'est maintenant engouffré dans la grande guerre et n'est plus.

      Mais une fois franchie la porte de Kshanti, ton troisième pas est fait. Ton corps est ton esclave. Maintenant, prépare-toi pour le quatrième, le portail des tentations qui captivent l'homme intérieur.

      Avant que tu puisses approcher de ce but, avant d'étendre la main pour soulever le loquet de la quatrième porte, tu dois avoir maîtrisé tous les changements mentaux dans toi, et tué l'armée des pensées-sensations qui, subtiles et insidieuses, se glissent inaperçues dans le brillant sanctuaire de l'âme.

      Si tu ne veux pas être tué par elles, tu dois rendre inoffensives tes propres créations, les enfants de tes pensées, invisibles, impalpables, dont les essaims tourbillonnent autour du genre humain, qui sont les descendants et les héritiers de l'homme et de ses dépouilles terrestres. Tu dois étudier la vacuité de ce qui semble plein, la plénitude de ce qui semble vide. Intrépide aspirant, regarde bien au fond du puits de ton cœur et réponds. Connais-tu les pouvoirs du Soi, ô toi qui perçois les ombres extérieures ?

      Si tu ne les connais pas, alors tu es perdu.

      Car, sur le quatrième sentier, la plus légère brise de passion ou de désir fera remuer la lumière tranquille sur les murs blancs et purs de l'âme. La plus petite vague d'aspiration ou de regret pour les dons illusoires de Mâyâ, ondulant le long d'Antahkarana – le sentier qui relie ton Esprit à ton soi, la grand'route des sensations, ces rudes excitants, d'Ahamkâra(14) toute pensée, même rapide comme l'éclair, te fera perdre tes trois prix, les récompenses par toi gagnées.

      Car, sache-le, l'ÉTERNEL ne connaît pas de changement.

      « Abandonne à jamais les huit cruelles misères. Sinon, sûrement, tu ne peux venir à la sagesse, encore moins à la libération », dit le grand Seigneur, le Tathâgata de perfection « celui qui suivit les traces de ses prédécesseurs » (15).

      Rigide et exigeante est la vertu de Virâga. Si tu veux maîtriser sa voie, tu dois garder ton esprit et tes perceptions beaucoup plus purs qu'avant de toute action dissolvante.

      Tu dois te saturer de pur Alaya, devenir comme un avec l'Ame-pensée de la nature. Uni à elle, tu es invincible ; séparé d'elle, tu deviens la lice de Samvritti (16), origine de toutes les illusions du monde.

      Tout est impermanent chez l'homme excepté la pure essence d'Alaya. L'homme est son rayon cristallin : une flèche de lumière immaculée au dedans, une forme d'argile matérielle sur la face inférieure. Ce rayon est le guide de ta vie et ton vrai Soi, le Veilleur et le Penseur silencieux, la victime de ton soi inférieur. Ton âme ne peut être blessée qu'au moyen de ton corps ignorant ; dirige-les et maîtrise-les tous les deux, et tu pourras franchir sain et sauf le prochain portail de l'équilibre .

      Aie bon courage, ô pèlerin hardi, va vers l'autre rive. N'écoute pas les murmures des légions de Mâra ; écarte les tentateurs, ces esprits malveillants, les jaloux Lhamayin (17) de l'espace sans fin.

      Tiens bon ! Tu approches maintenant du portail du milieu, de la porte de douleur, avec ses dix mille pièges.

      Sois maître de tes pensées, ô lutteur pour la perfection, si tu veux en franchir le seuil.

      Sois maître de ton âme, ô chercheur de vérités immortelles, si tu veux atteindre le but.

      Concentre ton regard d'âme sur l'unique et pure lumière, la lumière que rien n'affecte et fais usage de ta clef d'or.

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      La tâche ardue est accomplie, ton labeur est presque fini. Le large abîme qui s'ouvrait pour t'engloutir est presque franchi.

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      Tu as maintenant traversé le fossé qui environne la porte des passions humaines. Tu as maintenant vaincu Mâra et sa furieuse légion.

      Tu as nettoyé ton cœur de la souillure et tu l'as saigné du désir impur. Mais, ô glorieux combattant, ta tâche n'est pas encore accomplie. Bâtis haut, lanou, le mur qui clôturera l'Ile Sainte (18), digue qui protégera ton esprit de l'orgueil et de la satisfaction, à la pensée de la grande œuvre accomplie.

      Un sentiment d'orgueil endommagerait l'ouvrage. Oui, bâtis-le fort, de peur que l'élan furieux des vagues assaillantes, qui montent du grand océan de la Mâyâ cosmique et viennent battre son rivage, n'engloutisse le pèlerin et l'île – oui, même quand la victoire est remportée.

      Ton île est le daim, tes pensées sont les chiens qui le fatiguent et le poursuivent dans sa course vers le fleuve de vie. Malheur au daim qui est rejoint par les démons aboyeurs avant d'avoir atteint la vallée du refuge, appelée le Jnâna Mârga, le sentier de la connaissance pure.

      Avant que tu puisses t'établir dans le Jnâna Mârga (19) et l'appeler tien, ton âme doit devenir comme le fruit mûr du manguier, aussi douce et tendre que sa belle pulpe d'or pour les douleurs des autres, aussi dure que son noyau pour tes propres affilctions, ô conquérant du bien et du mal.

      Endurcis ton âme contre les ruses du soi ; mérite pour elle le nom d'Ame-diamant (20).

      Car, de même que le diamant profondément enfoui dans le cœur palpitant de la terre ne peut jamais réfléchir les terrestres lumières, ainsi sont ton mental et ton âme ; plongés dans le Jnâna Mârga, ils ne peuvent rien refléter du royaume illusoire de Mâyâ.

      Quand tu as atteint cet état, les portails que tu as franchis sur le sentier ouvrent leurs portes toutes grandes pour te laisser passer et les plus puissantes forces de la nature ne possèdent pas le pouvoir d'arrêter ta course. Tu seras maître du septuple sentier : mais pas avant, ô candidat, d'avoir subi des épreuves qui dépassent la parole.

      Jusqu'alors, une tâche bien plus dure t'attend encore : tu dois te sentir toi-même TOUTE PENSÉE, et pourtant exiler toutes les pensées de ton âme.

      Tu dois atteindre cette fixité d'esprit dans laquelle aucune brise, si forte qu'elle soit, ne peut introduire nulle une pensée terrestre. Ainsi purifié, le sanctuaire doit être vide de toute action, son ou lumière terrestre ; tout comme le papillon, saisi par la gelée, tombe sans vie sur le seuil, ainsi toutes les pensées terrestres doivent tomber mortes devant le temple.

      Vois, c'est écrit :

      « Avant que la flamme d'or puisse brûler d'une lumière tranquille, la lampe doit être placée bien à l'abri dans un lieu où il n'y a aucun vent » (Bhagavad-Gîtâ).

      Exposé à la remuante brise, le jet vacillera et la flamme frémissante jettera des ombres trompeuses, sombres et toujours changeantes, sur le blanc sanctuaire de l'Ame.

      Et alors, ô poursuivant de la vérité, ton âme deviendra comme un éléphant fou qui fait rage dans la jungle. Prenant les arbres de la forêt pour des ennemis vivants, il périt en essayant de tuer les ombres mouvantes qui dansent sur le mur des rochers exposés au soleil.

      Prends garde que par souci du Soi, ton âme ne perde pied sur le sol de la connaissance-Déva.

      Prends garde que par oubli du Soi, ton âme ne perde son autorité sur son mental tremblant, et ne soit ainsi frustrée du fruit légitime de ses conquêtes.

      Prends garde à l'inconstance, car l'inconstance est ton grand ennemi. Cette inconstance t'attaquera et te rejettera, hors du sentier que tu foules, dans les marais visqueux du doute.

      Prépare-toi, et sois averti à temps. Si tu as essayé et échoué, ô combattant indomptable, ne perds pourtant pas courage ; continue de combattre et reviens à la charge, encore et toujours.

      L'intrépide guerrier, quand sa vie coule avec son sang précieux de ses blessures béantes, attaquera encore l'ennemi, le chassera de sa forteresse, et le vaincra avant d'expirer lui-même. Agissez donc, vous tous qui échouez et souffrez, agissez comme lui, et de la forteresse de votre âme, chassez tous vos ennemis – ambition, colère, haine, et jusqu'à l'ombre du désir, – lors même que vous avez échoué...

      Souviens-t-en, toi qui combats pour la libération de l'homme (21), chaque échec est un succès, et chaque effort sincère gagne avec le temps sa récompense. Des germes saints bourgeonnent et croissent, invisibles, dans l'âme du disciple, leurs tiges s'affermissent à chaque nouvelle épreuve ; ils plient comme des roseaux mais ne rompent pas, et ils ne peuvent jamais être perdus. Mais quand l'heure est venue, ils fleurissent (22).

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      Mais si tu es venu préparé, alors sois sans crainte.

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      Désormais ta route est nette, droit au travers de la porte Virya, le cinquième des sept portails. Tu es maintenant sur la voie qui conduit au port de Dhyâna, au portail Bodhi, le sixième.

      La porte Dhyâna est comme un vase d'albâtre blanc et transparent, dans lequel brûle tranquille une flamme d'or, la flamme de Prâjnâ qui rayonne d'Atmâ.

      Tu es ce vase.

      Tu as rompu avec les objets des sens, tu as voyagé sur le sentier de la vue, sur le sentier de l'ouïe, et tu te tiens debout dans la lumière de la connaissance. Tu as atteint maintenant l'état Titikshâ (23).

      Ô Naljor, tu es en sûreté.

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      Sache-le, conquérant des péchés, une fois qu'un Sowani (23bis) a traversé le septième sentier, toute la nature vibre d'une joyeuse terreur et se sent soumise. L'étoile argentée transmet scintille cette nouvelle aux fleurs nocturnes, le ruisseau frémit cette histoire pour les cailloux ; les vagues de l'océan la rugiront aux rochers ceinturés de brisants, les brises chargées de parfums la chanteront aux vallons, et les pins majestueux murmureront avec mystère : « Un Maître s'est élevé, Un MAÎTRE DU JOUR (24) ».

      Il se dresse maintenant comme un blanc pilier à l'ouest, sur la face duquel le soleil levant de la pensée éternelle verse ses vagues les plus glorieuses. Son mental, comme un océan calme et sans bornes, s'étend dans l'espace sans rivages. Il tient la vie et la mort dans sa forte main.

      Oui, Il est puissant. Le pouvoir vivant libéré en lui, ce pouvoir qui est LUI-MÊME, peut soulever le tabernacle d'illusion haut au-dessus des dieux, au-dessus du grand Brahm et d'Indra. Maintenant, il atteindra sûrement sa grande récompense !

      N'emploiera-t-il pas les dons que ce pouvoir confère pour son propre repos et sa béatitude, sa richesse et sa gloire bien gagnées – lui, le victorieux de la grande Illusion ?

      Non, candidat au savoir caché de la nature ! Si l'on veut suivre les traces du saint Tathâgata, ces dons et ces pouvoirs ne sont pas pour soi.

      Voudras-tu endiguer ainsi les eaux nées sur le Soumérou (25) ? Voudras-tu détourner le courant pour l'amour de toi-même, ou le renvoyer à sa source première le long de la crête des cycles ?

      Si tu veux que ce courant de connaissance durement gagnée, de sagesse née du ciel, reste une eau douce et courante, il ne faut pas le laisser devenir un marais stagnant.

      Sache-le ; si d'Amitâbha, l'Age sans bornes, tu veux devenir le coopérateur, alors tu dois répandre la lumière acquise, comme font les Bodhisattvas (26) jumeaux, sur toute l'étendue des trois mondes (27).

      Sache que le courant de connaissance surhumaine et de sagesse-déva que tu as gagné, doit, de toi-même, canal d'Alaya, être versé dans un autre lit.

      Sache, Ô Naljor du sentier secret, que les eaux pures et fraîches doivent être employées à rendre plus douces les vagues amères de l'océan – cette puissante mer de douleur formée des larmes des hommes.

      Hélas ! Tu vas devenir comme l'étoile établie au plus haut des cieux : des profondeurs de l'espace, ce céleste luminaire doit briller pour tous, excepté pour lui-même ; donner de la lumière à tous, mais n'en prendre à personne.

      Hélas ! Tu vas devenir comme la neige pure dans les vallées des montagnes, froide et insensible au toucher, chaude et protectrice pour la semence qui dort profondément sous son sein : – c'est maintenant cette neige qui doit recevoir la mordante gelée, les rafales du Nord, abritant ainsi de leur dent aiguë et cruelle la terre qui contient la moisson promise, la moisson qui nourrira les affamés.

      Volontairement condamné à vivre au cours des Kalpas futurs, sans être remercié ni perçu par l'homme ; immobilisé comme une pierre parmi les autres pierres innombrables qui forment le Mur gardien (28) ; tel est ton avenir si tu passes la septième porte. Bâti par les mains de nombreux Maîtres de compassion, élevé par leur torture, cimenté par leur sang, il abrite le genre humain, depuis que l'homme est l'homme, et le protège contre plus de misères et bien plus profondes douleurs.

      Cependant l'homme ne voit point cela, il ne le percevra pas, et ne prendra pas garde à la parole de sagesse... car il ne la sait pas.

      Mais toi tu l'as entendue et tu sais tout, toi dont l'âme est sincère et sans artifice.... et tu dois choisir. Alors écoute encore.

      Sur le Sentier de Sowan, ô Srotâpatti, tu es en sûreté. Oui, sur ce Mârga où le pèlerin fatigué ne rencontre qu'obscurité, où saignent les mains déchirées par les épines, où les pieds sont coupés par les silex aigus et durs, et où Mâra dirige ses armes les plus fortes, là, immédiatement au delà, attend une grande récompense.

      Calme et immuable, le pèlerin glisse et monte sur le courant qui mène à Nirvâna. Il sait que plus ses pieds saigneront, mieux il sera lavé lui-même. Il sait bien qu'après sept courtes et rapides naissances, Nirvâna sera à lui.

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      Tel est le Sentier de Dhyâna, le port du Yogi, le but béni que les Srotâpattis désirent.

      Il n'en est pas ainsi quand il a franchi et gagné le sentier d'Arhat.

      Là, Kleshâ (29) est détruit à jamais, les racines de Tanhâ (30) sont arrachées. Mais attends, disciple... encore un mot. Peux-tu détruire la divine Compassion ? La Compassion n'est pas un attribut. C'est la Loi des Lois, l'harmonie éternelle, le Soi d'Alaya, une essence sans rivages et universelle, la lumière du juste sans fin, l'à-propos de toutes choses, la loi de l'éternel amour.

      Plus tu deviens un avec elle, ton être fondu dans son être, plus ton âme s'unit avec ce qui Est, et plus tu deviendras Compassion absolue (31).

      Tel est le sentier Arya, le sentier des Bouddhas de perfection.

      Cependant, quel est le sens des rouleaux de parchemin qui te font dire les paroles suivantes ?

      « Om ! je crois que ce ne sont pas tous les Arhats qui obtiennent les doux fruits du Sentier nirvânique. »

      « Om ! je crois que tous les Bouddhas n'entrent pas au Nirvâna Dharma (32). »

      Oui ! Sur le sentier Arya tu n'es plus un Srotâpatti, tu es un Bodhisattva (33). Le courant est traversé. Il est vrai que tu as droit au vêtement Dharmakâya ; mais le Sambhogakâya est plus grand qu'un Nirvâni, et plus grand encore est le Nirmânakâya, – le Bouddha de Compassion (34).

      Baisse la tête et écoute bien, ô Bodhisattva. La compassion parle et dit : « Peut-il y avoir de la béatitude quand tout ce qui vit doit souffrir ? Seras-tu sauvé pour entendre gémir le monde entier ? »

      Maintenant tu as entendu ce qui a été dit.

      Tu n'atteindras le septième degré et tu ne franchiras la porte de la connaissance finale que pour épouser la douleur, – si tu veux être Tathâgata, suis les pas de tes prédécesseurs, reste sans égoïsme jusqu'à la fin sans fin.

      Tu es éclairé, choisis ta route.

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      Regarde la tendre lumière qui inonde le ciel d'orient. En signe de louange le ciel et la terre s'unissent. Et des quadruples pouvoirs manifestés s'élève un chant d'amour, du feu flamboyant et de l'eau fluide, de la terre odorante et du vent impétueux.

      Ecoute !... du profond et insondable tourbillon de cette lumière d'or où se baigne le Vainqueur, la voix sans parole de toute la nature élève ses mille accents pour proclamer :

JOIE À VOUS, HOMMES DE MYALBA (35).

UN PÈLERIN EST REVENU « DE L'AUTRE RIVE ».

UN NOUVEL ARHAN (36) EST NÉ...


Paix à tous les êtres (37)


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(1)  Oupâdhya est un précepteur spirituel, un Gourou. Les Bouddhistes du nord choisissent généralement ces précepteurs parmi les « Naljor », les saints hommes, savants en Gôtrabhou-Jnâna, et Jnâna-darshanashouddhi, professeurs de sagesse occulte.

(2)  Yâna, véhicule : ainsi Mahâyâna est le « grand véhicule » et Hinayâna le « véhicule mineur » : noms des deux écoles de science religieuse et philosophique dans le Bouddhisme du nord.

(3)  Shrâvaka – quelqu'un qui écoute, ou un étudiant qui suit les instructions religieuses. De la racine « Shrou ». Quand, de la théorie, ils passent à la pratique ou à l'accomplissement de l'ascétisme, ils deviennent Shramanas, ceux qui s'exercent, de Shrama, action. Comme le montre Hardy, les deux dénominations répondent aux mots grecs αχονστιχοι et ασχηται.

(4)  Samtan (tibétain), le même que le sanscrit Dhyâna, ou l'état de méditation : il y a quatre degrés.

(5)  Pâramitâs, les six vertus transcendantes. Elles sont : charité, moralité, patience, énergie, contemplation, sagesse. Pour les prêtres, elles sont dix, celles déjà nommées, et de plus : l'action juste, la science, vœu de piété, résolution ferme. (Titel Chinese Buddhism)

(6)  Srotâpatti – littéralement « celui qui est entré dans le courant » qui mène à l'océan Nirvânique. Ce nom indique le premier sentier. Le nom du second est le sentier de Sakridâgâmin, « celui qui reverra la naissance une fois seulement ». Le troisième est appelé Anagâmin, « celui qui ne se réincarnera plus » à moins qu'il ne le veuille pour aider le genre humain. Le quatrième sentier est connu comme celui de Rahat ou Arhat. C'est le plus haut. Un Arhat voit le Nirvâna durant sa vie. Pour lui ce n'est pas un état post-mortem, mais le Samâdhi, pendant lequel il éprouve toute la béatitude nirvânique.
      Combien on doit peu compter sur les Orientalistes pour l'exactitude des mots, et le sens exact est prouvé par le cas de trois prétendues autorités. Ainsi les quatre noms que nous venons d'expliquer sont donnés par R. Spence Hardy comme : 1 Sowân ; 2 Sakradâgâmi ; 3 Anâgâmi ; et 4 Arya. Le révérend J. Edkins donne : 1 Srôtâpanna ; 2 Sagardagam : 3 Anâgânim ; et 4 Arhan. Schlagintweit les épelle encore différemment, et, en outre, chacun donne de nouvelles variantes dans le sens des termes).

(7)  Pour les Bouddhistes du nord, « atteindre la rive » est synonyme d'atteindre Nirvâna par l'exercice des six et des dix Pâramitâs (vertus).

(8)  L'AME MAÎTRESSE est Alaya, l'âme Universelle ou Atman, dont chaque homme possède en lui-même un rayon avec lequel il peut s'identifier et dans lequel il peut s'absorber.

(9)  Antahkarana est le Manas inférieur, le sentier de communication entre la personnalité et Manas supérieur ou âme humaine. A la mort, il est détruit comme sentier ou médium de communication et ses restes survivent dans une certaine forme à l'état de Kâmaroupa, la « coque ».

(10)  Les Bouddhistes du nord, et, de fait, tous les Chinois, trouvent dans le profond mugissement de quelques-unes des grandes et saintes rivières la tonique de la Nature. De là la comparaison. C'est un fait bien connu en science physique, aussi bien qu'en occultisme, que la résultante des sons de la Nature, telle qu'on l'entend dans le mugissement des grandes rivières, dans le bruit produit par les sommets des arbres se balançant dans les forêts, ou les bruits d'une ville à distance, forme un seul son bien défini et dont le ton est très appréciable. Ceci est prouvé par les professeurs de sciences physiques et par les musiciens. Ainsi le professeur Rice (musique chinoise) montre que les Chinois ont reconnu ce fait il y a des milliers d'années en disant que les eaux du Hoang-ho, en courant, entonnèrent le Kung, appelé la grande note en musique chinoise : et il montre que cette note correspond au Fa, « considéré par la science physique moderne comme étant la véritable tonique de la Nature ». Le Professeur B. Silliman en parle aussi dans ses Principles of Physics : « Cette note, croit-on, est le Fa moyen du piano, que l'on peut considérer comme la tonique de ce qui vit et respire ».

(11)  Les Bhons ou Dougpas, la secte des « Bonnets rouges », sont regardés comme les plus versés en sorcellerie. Ils habitent le Tibet occidental, le petit Tibet et le Bhoutan. Ils sont tous Tantrikas. Il est souverainement ridicule de voir des Orientalistes, qui ont visité les frontières du Tibet, comme Schlagintweit et autres, confondre les rites et les dégoûtantes pratiques de ces gens avec les croyances religieuses des Lamas orientaux, les « Bonnets jaunes » et de leurs Naljors ou saints hommes. La note suivante est un exemple.

(12)  Dorje est le Vajra sanscrit ; c'est un outil ou instrument qui est entre les mains de certains dieux (les Dragshed tibétains, les Dévas qui protègent les hommes), et on lui attribue la propriété occulte de repousser les mauvaises influences en purifiant l'air comme l'ozone en chimie. C'est aussi un moudra, un geste et une posture, employés en méditation. En résumé, posture ou talisman, c'est un symbole de puissance sur les mauvaises influences invisibles. Cependant, les Bhons ou Dougpas se sont appropriés ce symbole et en abusent pour la magie noire. Pour les Bonnets Jaunes ou Gelougpas, c'est un symbole de pouvoir, comme la croix pour les chrétiens, et cela n'a rien de plus superstitieux. Pour les Dougpas, c'est, comme le pentagramme inversé, le signe de la sorcellerie.

(13)  Virâga est le sentiment d'indifférence absolue pour l'univers objectif, pour le plaisir et la douleur. Le mot « dégoût » ne rend pas le sens, mais s'en approche.

(14)  Ahamkâra – le « je » ou sentiment de sa propre personnalité : « l'état d'être je ».

(15)  « Quelqu'un qui marche dans les pas de ses prédécesseurs » ou « de ceux qui sont venus avant lui », tel est le vrai sens du nom de Tathâgata.

(16)  Samvritti est celle des deux vérités qui démontre le caractère illusoire ou le vide de toutes choses. C'est la vérité relative dans ce cas. L'Ecole Mahâyâna enseigne la différence entre ces deux vérités – Paramârthasatya et Samvrittisatya (Satya, « vérité »). C'est là la point en litige entre les Madhyâmikas et les Yogâcharyas, les premiers niant et les seconds affirmant que tout objet existe grâce à une cause précédente, ou par enchaînement. Les Madhyâmikas sont les grands nihilistes et négateurs, pour qui tout est Parikalpita, une illusion et une erreur dans le monde de la pensée et dans l'univers subjectif aussi bien que dans l'objectif. Les Yogâcharyas sont les grands spiritualistes. Samvritti donc, comme vérité relative seulement, est l'origine de toute illusion.

(17)  Les Lhamayin sont les élémentals et les mauvais esprits, ennemis et adversaires de l'homme.

(18)  L'ego supérieur, ou le Penseur.

(19)  Jnâna Mârga est littéralement « le sentier de Jnâna » ou le sentier de la pure connaissance de Paramârtha, ou (en sanscrit) de Svasamvedanâ, « la réflexion évidente par elle-même ou s'analysant elle-même ».

(20)  Voir Fragment II - Note 5. « L'âme-Diamant » ou Vajradhara préside sur les Dhyâni-Bouddhas.

(21)  Ceci est une allusion à une croyance bien connue en Orient (et même en Occident après tout), à savoir que chaque nouveau Bouddha ou saint est un soldat de plus dans l'armée de ceux qui travaillent pour la libération ou le salut du genre humain. Dans les pays bouddhistes du nord, où est enseignée la doctrine des Nirmânakâyas – les Bodhisattvas qui renoncent à un Nirvâna bien gagné ou au vêtement Dharmakâya (l'un et l'autre leur fermant à jamais le monde des hommes) pour assister invisiblement l'humanité et la conduire finalement au Paranirvâna, – chaque nouveau Bodhisattva ou grand adepte initié est appelé « libérateur du genre humain ». Quand Schlagintweit, dans son Buddhism in Tibet, déclare que Proulpaï-Kou ou Nirmânakâya est « le corps dans lequel les Bouddhas ou Bodhisattvas apparaissent sur terre pour instruire les hommes », cette affirmation n'explique rien et est inexacte jusqu'à l'absurde.

(22)  Allusion aux passions humaines et aux péchés qui sont tués durant les épreuves du noviciat et servent de terrain bien engraissé où peuvent germer les saints germes ou semences des vertus transcendantes. Les vertus préexistantes ou innées, les talents ou les dons sont regardés comme ayant été acquis dans une vie précédente. Le génie est, sans exception, un talent ou une aptitude apportés d'une autre existence.

(23)  Titikshâ est le cinquième état du Raja-Yoga – un état de suprême indifférence ; de soumission, s'il est nécessaire, à ce qu'on appelle « plaisirs et peines pour tous », mais sans tirer de cette soumission ni plaisir ni peine ; un état, en un mot, où l'on devient physiquement, mentalement et moralement indifférent et insensible au plaisir comme à la peine.

(23bis)  Un Sowani est celui qui pratique Sowan, le premier sentier de Dhyâna, un Srotâpatti.

(24)  Jour veut dire ici un Manvantara entier, une période d'une durée incalculable.

(25)  Le mont Mérou, la montagne sacrée des dieux.

(26)  Dans la symbolique Bouddhique du nord, Amitâbha ou « l'Espace sans bornes » (Parabrahm) a dans son paradis, dit-on, deux Bodhisattvas – Kwan-shih-yin et Tashishi –, qui rayonnent à jamais la lumière sur les trois mondes où ils ont vécu, y compris le nôtre, pour aider de cette lumière (de la connaissance) l'instruction des Yogis qui, à leur tour, sauveront des hommes. Leur position élevée dans le royaume d'Amitabha est due aux actes de connaissance accomplis par eux deux, lorsqu'ils étaient des Yogis eux aussi, sur la terre, dit l'allégorie.

(27)  Ces trois mondes sont les plans de l'être : le terrestre, l'astral et le spirituel.

(28)  Le « mur gardien » ou « mur de protection ». Il est enseigné que les efforts accumulés de longues générations de Yogis, de Saints et d'Adeptes, spécialement des Nirmânakâyas, ont créé, pour ainsi dire autour de l'humanité un mur de protection qui l'abrite invisiblement contre des maux encore pires.

(29)  Klesha est l'amour du plaisir ou de la jouissance mondaine, bonne ou mauvaise.

(30)  Tanhâ, la volonté de vivre, ce qui cause la renaissance.

(31)  Cette compassion ne doit pas être regardée sous le même jour que « Dieu, l'amour divin » des théistes. La compassion est ici une loi abstraite et impersonnelle, dont la nature, étant l'harmonie absolue, est jetée en confusion par la discorde, la souffrance et le péché.

(32)  En phraséologie Bouddhique du Nord, tous les grands Arhats, Adeptes et Saints, sont appelés Bouddhas.

(33)  Un Bodhisattva est, dans la hiérarchie, moins qu'un « Bouddha parfait ». En parler exotérique, les deux sont souvent confondus. Pourtant la perception populaire innée et juste a placé, à cause de ce sacrifice de soi-même, un Bodhisattva plus haut dans son esprit qu'un Bouddha.

(34)  Le même respect populaire appelle « Bouddhas de Compassion » les Bodhisattvas qui, ayant atteint le rang d'Arhat (c'est-à-dire ayant achevé le quatrième ou septième sentier), refusent de passer à l'état nirvânique ou « de prendre la robe Dharmakâya et d'atteindre ainsi l'autre rive », sans quoi il deviendrait au delà de leur pouvoir d'aider les hommes, si peu même que Karma le permette. Ils préfèrent rester invisiblement (en Esprit, pour ainsi dire), dans le monde, et contribuer au salut des hommes en les influençant pour leur faire suivre la bonne loi, c'est-à-dire en les conduisant sur le sentier de la justice. Il est d'usage dans le Bouddhisme exotérique du Nord, d'honorer tous ces grands personnages comme des Saints, et de leur offrir la même des prières, comme font les Grecs et les Catholiques pour leurs Saints et Patrons ; d'autre part, les doctrines ésotériques n'encouragent rien de pareil. Il y a une grande différence entre les deux enseignements. Le laïque exotérique connaît à peine le vrai sens du mot Nirmânakâya – de là la confusion et les explications insuffisantes des Orientalistes. Par exemple, Schlagintweit croit que Nirmânakâya veut dire la forme physique prise par les Bouddhas quand ils s'incarnent sur terre – « la moins sublime de leurs entraves terrestres » (Voir Buddhism in Tibet) – et il part de là pour donner une vue complètement fausse du sujet. Voici cependant la vraie doctrine :
      Les trois corps ou formes bouddhiques sont appelés :
          1. Nirmânakâya ;
          2. Sambhogakâya ;
          3. Dharmakâya.
      Le premier est cette forme éthérée que l'on prendrait lorsque quittant le corps physique, on apparaîtrait dans son corps astral, si l'on avait en outre toute la connaissance d'un adepte. Le Bodhisattva développe cette forme en lui-même à mesure qu'il avance sur le sentier. Ayant atteint le but et refusé son fruit, il reste sur cette terre comme adepte ; et quand il meurt, au lieu d'aller en Nirvâna, il reste dans ce corps glorieux qu'il a tissé pour lui-même, invisible à l'humanité non initiée, pour la surveiller et la protéger.
      Sambhogakâya est la même chose, mais avec le lustre additionnel de « trois perfections » dont l'une est l'oblitération entière de tout rapport terrestre.
      Le corps Dharmakâya est celui d'un Bouddha complet, c'est-à-dire pas de corps du tout, mais un souffle idéal ; la conscience engloutie dans la conscience universelle, ou l'âme vide de tout attribut. Une fois devenu un Dharmakâya, un Adepte ou Bouddha laisse derrière lui toute relation possible avec la terre, toute pensée même de la terre. Ainsi, pour pouvoir aider l'humanité, un Adepte qui a gagné le droit an Nirvâna « renonce au corps Dharmakâya » en langage mystique ; ne garde de Sambhogakâya que la grande et complète connaissance, et reste dans son corps Nirmânakâya. L'école ésotérique enseigne que Gautama Bouddha, de même que plusieurs de ses Arhats, est un Nirmânakâya de ce genre, et qu'au-dessus de lui, à cause de son grand renoncement et de son sacrifice au genre humain, il n'y en a pas de connu.

(35)  Myalba est notre terre fort justement appelée « Enfer », et le plus grand de tous les enfers par l'école ésotérique. La doctrine ésotérique ne connaît pas d'autre enfer ou lieu de punition qu'une planète ou terre portant des hommes. Avitchi est un état et non une localité.

(36)  C'est-à-dire qu'un nouveau Sauveur du genre humain est né, qui guidera les hommes au Nirvâna final, après la fin du cycle de vie.

(37)  Ceci est une des variantes de la formule qui termine sans exception tous les traités, invocations ou instructions ; « Paix à tous les êtres », « Béni soit tout ce qui vit », etc., etc.




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