61.
"Que votre cur ne se trouble
point. Vous croyez en
Dieu, croyez aussi en moi. Il y a plusieurs demeures
dans la maison de mon père. Si cela n'était pas, je vous
l'aurais dit, car je m'en vais vous préparer le lieu. Et après
que je m'en serai allé, et que je vous aurai préparé
le lieu, je reviendrai, et vous retirerai à moi, afin que vous
soyez où je serai." Cette demeure qu'il devait préparer
était celle que la puissance perverse avait usurpée dans
l'univers, et dans l'homme à qui l'
esprit venait la rendre pour
l'accomplissement des décrets de l'
amour, et de la justice du
souverain être. Ces différentes demeures qui sont dans
la maison de son père, sont les différents dons, et les
différentes récompenses qui sont promises à ceux
qui les auront fait valoir.
Vous savez bien où je vais, et vous en
savez la voie. Je suis la voie, la vérité, et la vie.
Nul ne vient au père que par moi. Parce que nous avons vu
que s'il ne naissait pas un fils en nous, jamais notre être ne
serait ni connu, ni manifesté ; et tous les êtres de désir
qui s'élèvent en nous, n'atteindraient jamais jusqu'à
notre être fondamental et constitutif, sans l'
intermède
de ce fils qui doit naître en nous, si nous voulons que l'
harmonie universelle
s'y rétablisse.
"Ne croyez-vous pas que je suis dans mon père,
et que mon père est en moi ? Ce que je vous dis, je ne vous le
dis pas de moi-même, mais mon père qui demeure en moi,
fait lui-même les œuvres que je fais. Ne croyez-vous pas que je
suis dans mon père, et que mon père est dans moi ? Croyez-le
au moins à cause des uvres que je fais." Comment ne croirions-nous
pas à notre être essentiel, et fondamental, si nous lui
voyons naître un fils en nous ? En même temps ce fils peut-il
offrir de réels témoignages de son père, s'il n'est
pas continuellement dans ce père, et si son père n'est
pas continuellement en lui ? Observation qui aurait pu agir sur ceux
qui doutent de la divinité du Réparateur, et qui dans
le vrai, ne doutent tant de la divinité de ce Réparateur,
que parce qu'ils ne doutent pas assez de la divinité de la matière,
et parce qu'ils n'ont pas eu soin de travailler à faire naître
un fils en eux,
puisque si l'homme ne renaît de nouveau, il ne peut
entrer dans le royaume des cieux.
Mais s'ils avaient travaillé à faire
naître un fils en eux, c'est à eux que s'adresserait cette parole
: "Quoique vous demandiez à mon père en mon nom, je le
ferai afin que mon père soit glorifié ; en vérité,
en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera
les uvres que je fais, et en fera encore de plus grandes, parce
que je m'en vais à mon père," et que par ce moyen (comme
il a été indiqué dans
L'Homme de désir),
l'action que ce Réparateur enverra, sera plus abondante et plus
puissante dès qu'elle proviendra à la fois de l'action
du père et de l'action du fils réunies, puisque sur la
terre il n'a agi que comme homme, dans la puissance de l'
esprit, au
lieu que par sa réunion avec son père, il agira comme
Dieu, et par la puissance de l'unité même, image parfaite
de deux lois que nous avons déjà souvent observées,
et dont la dernière est celle qui peut seule compléter
notre réconciliation, en nous réunissant à notre
vraie source, comme le Réparateur, après son uvre
temporelle, s'est réuni avec son père.
"Si vous m'aimez, gardez mes commandements, et
je prierai mon père, et il vous donnera un autre consolateur
afin qu'il demeure éternellement avec vous, l'
esprit de vérité
que le monde ne peut recevoir, parce qu'il ne le voit point, et qu'il
ne le connaît point ; mais pour vous, vous le connaîtrez, parce qu'il
demeurera avec vous, et qu'il sera dans vous " ; c'est ce même
fils spirituel, né de nous, et en nous par l'opération
divine, qui devient notre consolateur, comme il est devenu notre libérateur,
et cela en imitation, et en conformité du consolateur universel,
et du libérateur éternel qui veut que nous répétions
tous en nous-mêmes l'œuvre qu'il a opérée dans tout
notre cercle ; ce consolateur doit en effet demeurer éternellement
avec nous dès qu'il est né de l'
esprit de
Dieu, au lieu
que les autres
enfants que nous laissons naître journellement dans nous-mêmes,
ne voient point subsister leur race, parce qu'ils ont des
enfants du
monde. Voilà pourquoi ce consolateur particulier ne peut être
reçu du monde, parce qu'il est étranger au monde, comme la lumière
est étrangère aux ténèbres, et parce que
le monde ne le voit point, et ne le connaît point.
"Je ne vous laisserai point orphelin, je viendrai
à vous. Encore un peu de temps, et le monde ne me verra plus.
Mais pour vous, vous me verrez parce que je vis, et que vous vivrez
aussi. En ce jour-là, vous connaîtrez que je suis en mon père,
et vous en moi, et moi en vous." L'
âme de l'homme nourrit son propre
fils.
Car comme le père a la vie en lui-même, il a donné
aussi au fils d'avoir la vie en lui-même. Aussi ce consolateur
ne doit laisser en nous aucun orphelin, parce qu'il a la vie en lui,
et qu'il peut la communiquer à tous les siens ; aussi tout ce
qui est en nous peut voir ce consolateur puisqu'il vit, et qu'il donne
à tout ce qui est en nous le pouvoir de vivre comme lui. C'est
alors que tout ce qui est en nous reconnaît que le consolateur est dans
son père, que tout ce qui est en nous est dans ce consolateur,
et que ce consolateur est dans tout ce qui est en nous.
Celui qui a reçu mes commandements, et qui les
garde, est celui qui m'aime. Celui qui m'aime sera aimé de mon
père ; et je l'aimerai aussi, et je me découvrirai à
lui. Tout ce qui en nous est fidèle à la voix de notre
consolateur particulier, et observe ses commandements, aime ce consolateur,
et sera aimé du père de ce consolateur, et ce consolateur
l'aimera, et se découvrira à lui. Mais comme ce consolateur,
ou le fils qui doit naître en nous, possède tout ce qui est dans
son père, quelles merveilles ne doit-il pas communiquer à
ceux à qui il veut bien se découvrir en nous, c'est-à-dire,
à tous ceux qui l'aiment, et qui observent ses commandements
?
Le mot de conscience a sans doute de grands droits
à nos
hommages, et c'est le plus grand mot que la sagesse vulgaire
puisse employer ; mais il est infiniment inférieur au nom de
ce fils, et de ce consolateur spirituel qui peut naître en nous, et
nous éclairer.
"Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et
mon père l'aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons
en lui notre demeure. Celui qui ne m'aime point ne garde point mes paroles,
et la parole que vous avez entendue n'est point ma parole, mais celle
de mon père qui m'a envoyé." Non seulement ce consolateur
ou ce fils spirituel qui doit naître en nous se découvre à
tout ce qui l'aime en nous, non seulement il communique à ce
qui l'aime en nous, et qui observe ses commandements, tout ce qu'il
reçoit de son père ; mais il fait que le père aime lui-même
en nous tout ce qui aime ce consolateur, et qu'ils viennent ensemble
en nous, et qu'ils y font leur demeure. Car la parole de ce consolateur,
ou de ce fils qui doit naître en nous n'étant point sa parole,
mais la parole de son père, il ne peut se montrer nous, que son
père ne s'y montre, et n'y naisse avec lui.
"Je vous ai dit ceci demeurant encore avec vous.
Mais le consolateur qui est le
Saint-Esprit que mon père enverra
en mon nom, vous enseignera toutes choses, et vous fera ressouvenir
de tout ce que je vous ai dit." Ce nouveau consolateur qui nous est
annoncé, est le même que celui qui est déjà
né dans le nouvel homme ; mais la différence qu'il y a
entre l'un et l'autre, c'est que le premier est né en nous dans
l'amertume et dans la douleur, et que le second y doit naître dans la
jubilation, ce qui ne peut arriver qu'autant qu'il réalise et
effectue en nous physiquement toutes ces consolations, tous ces développements,
toutes ces vertus, toutes ces lumières qu'il n'avait fait que
nous annoncer pendant le travail pénible de son uvre, et
pendant le séjour qu'il a bien voulu faire dans nos ténèbres,
et dans nos abîmes ; et c'est alors qu'il nous fait ressouvenir lui-même
de tout ce qu'il nous a dit d'avance.
"Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix,
je ne vous la donne pas comme le monde la donne... Que votre cur
ne se trouble et ne s'épouvante point... Vous avez ouï que je
vous ai dit : Je m'en vais et je reviens à vous." Il nous laisse
la paix de l'espérance, et cette paix est réelle, puisque
c'est la sienne elle-même. Il ne nous la donne point comme le
monde la donne, puisque la paix du monde n'est qu'une obscurité
qui nous conduit toujours par des routes ténébreuses pour
ne nous faire arriver qu'à des déceptions ; au lieu que
la paix du consolateur ou de l'
esprit qui naît en nous est une paix
vive, une paix de
feu qui devient chaque
jour plus claire, et qui ne
doit se terminer que par la splendeur de la lumière.
Aussi ne redoutons point la suspension où
cet
esprit nous laisse pour quelques moments. Nourrissons-nous de la
paix et de l'espérance qu'il nous a données, et soyons
sûrs qu'il ne retourne à son père que pour revenir vers
nous chargé de plus nombreuses richesses et de plus grands trésors.
Notre
ennemi ne va-t-il pas lui-même chercher sept autres
esprits
pour s'emparer de la maison qu'il a laissée ? Comment le consolateur,
et le prince de la paix et de la puissance n'aurait-il pas les mêmes
pouvoirs dans l'ordre de la vérité ?
"Si vous m'aimiez, vous vous réjouiriez
de ce que je vous ai dit, que je m'en vais à mon père,
parce que mon père est plus grand que moi." Désirons que
notre consolateur particulier ou l'
esprit qui doit naître en nous retourne
promptement vers son père, puisque son père est plus grand
que lui, et puisque par là nous devons obtenir de nouvelles
forces,
de nouvelles faveurs et de nouvelles consolations. Si nous l'aimons,
nous devons désirer ce retour vers son père, puisque non
seulement il doit par là faire notre bonheur, mais qu'il doit
aussi faire le sien propre par son union avec sa source.
Désormais je ne vous parlerai plus guère,
car le prince du monde va venir, et il n'a rien en moi qui lui appartienne.
La voix de la vérité ou de notre consolateur se tait lorsque
la voix du mensonge s'approche pour nous faire subir notre épreuve
; elle se tait pour nous faire développer nos
forces ; elle se
retire parce que ce n'est point avec elle que l'
ennemi a affaire, c'est
avec nous.
Mais je m'en vais afin que le monde connaisse
que j'aime mon père, et que je fais ce que mon père m'a
ordonné. Si nous aimons notre consolateur ou l'
esprit qui
doit naître en nous, nous ne cesserons de retourner vers lui, afin que
tout ce qui est en nous connaisse que nous l'aimons, et que nous sommes
fidèles au commandement qu'il nous a fait de le regarder comme
la source de nos joies et le salutaire
agent de notre délivrance.
Nous ne cesserons de lui rendre des actions de grâces pour tous ses
bienfaits, et c'est en nous approchant de lui le plus, qu'il nous sera
possible que nous lui donnerons de véritables témoignages
de notre reconnaissance et de notre
amour.
62.
Je suis la vraie vigne, et mon père est
le vigneron. Il retranchera toutes les branches qui ne portent point
de fruit en moi, et il taillera toutes celles qui portent du fruit,
afin qu'elles en portent davantage. Ce que le Réparateur
opère sur toute la famille humaine, l'
esprit l'opère sur
notre fils spirituel pour lui procurer une saine et robuste constitution,
et pour lui faire produire des
fruits nombreux ; et à son tour
ce fils spirituel le doit opérer en nous sur tout notre être.
Car ce fils spirituel est notre vraie vigne dont nos facultés
sont les branches, comme tout notre être est une branche de la
vigne universelle ou de l'éternel Réparateur.
Vous êtes déjà purs à
cause de la parole que je vous ai dite : Demeurez en moi, et moi en
vous. De la part de la vérité, cette simple invitation
a un effet actif, parce qu'elle ne peut avoir lieu que par la manifestation
de la parole, et que la parole de la vérité ne se prononce
point sans répandre autour d'elle la pureté dont elle
est le principe ; aussi c'est être déjà pur que
d'avoir entendu la parole ; voilà pourquoi celui qui l'a entendue,
et qui ne la pratique pas sera sans excuse, puisqu'il n'aura été
ni sans lumière ni sans moyens. L'
esprit nous fait aussi entendre
journellement cette parole :
"Comme la branche de la vigne ne peut point porter
de
fruit par elle-même, mais qu'il faut qu'elle demeure attachée
au cep ; ainsi vous n'en pouvez point porter si vous ne demeurez en
moi. Je suis le cep de la vigne, et vous en êtes les branches.
Celui qui demeure en moi, et en qui je demeure, porte beaucoup de
fruits,
car vous ne pouvez rien faire sans moi. " C'est une chose douce et consolante
de sentir véritablement que c'est de notre adhérence à
l'
esprit et à la parole que dépend notre fructification
; de sentir qu'il doit se former en nous un
mariage réel de la
parole avec notre être divin, et que c'est de là que résulte
ce fils spirituel, et ce nouvel homme qui nous fait revoir les belles
campagnes de la terre promise.
Mais toujours fidèles à la nature,
ne comptons sur la solidité de cette alliance, et sur les longs
jours de celui qui doit en recevoir en nous la naissance, qu'autant
que la vie divine vient s'établir en nous comme à notre
insu, et qu'il s'y forme comme dans le secret une source vivante et
intarissable dont tous les ruisseaux vont à leur tour former
des alliances particulières avec toutes les formes et toutes
les propriétés de notre être.
Nous ne pouvons sentir cette délicieuse
et active vérité sans reconnaître la certitude de ces
paroles : "Vous ne pouvez rien faire sans moi... celui qui ne demeure
pas en moi sera jeté dehors comme un sarment inutile. Il sèchera,
il sera ramassé et jeté au
feu, et il
brûlera."
Voulez-vous éviter cet effroyable danger ? Evitez que tout votre
être ne passe ses
jours dans la stérilité, et dans
la sécheresse. Voulez-vous, dis-je, éviter ce danger ?
Placez devant vous le nom du Seigneur ; que cet
autel soit toujours
dressé, et toujours prêt à recevoir vos offrandes.
Ne prenez pas une résolution, n'accordez pas un mouvement à
votre être sans venir auparavant le présenter au temple,
comme la loi des Hébreux l'ordonnait pour les prémices
de toutes les productions de la terre ; ayez sans cesse l'encensoir
à la main pour honorer celui de qui vous tenez ce fils de l'homme,
ce premier-né en vous qui devient votre guide pendant vos pénibles
voyages, et qui doit vous apprendre à célébrer
ce nom du Seigneur, dans vos triomphes, dans vos besoins, dans vos consolations,
dans vos détresses, puisque sans lui toutes les branches de votre
arbre spirituel demeureraient dans la sécheresse et seraient
condamnées au
feu, et que sans lui vous seriez sans activité,
sans pénitence, sans courage, sans humilité, sans
amour,
sans confiance ; puisqu'enfin sans lui, tout en vous serait sans parole.
Au contraire "Si nous demeurons en lui, et si ses
paroles demeurent en nous, nous demanderons tout ce que nous voudrons,
et il nous sera accordé, parce que la gloire de son père
est que nous rapportions beaucoup de
fruits et que nous devenions ses
vrais
disciples."
"Si vous gardez mes commandements vous demeurerez
dans mon
amour; comme j'ai gardé aussi les commandements de mon
père, et que je demeure dans son
amour. " Telle est en effet
la véritable demeure du nouvel homme, parce qu'il ne peut habiter
qu'avec son père, puisque c'est de lui qu'il reçoit continuellement
la vie, et c'est une semblable demeure que le nouvel, homme ou notre
fils spirituel nous promet si nous demeurons dans son
amour, comme il
demeure dans l'
amour de son père. Or demeurer dans l'
amour du
Seigneur, c'est n'en pas sortir, c'est ne pas aller ailleurs, c'est
ne pas même bouger de la place ; et si cet
amour du Seigneur pouvait
demeurer en nous avec la même constance, notre félicité
ne serait-elle pas dès lors imperturbable ? Oh combien sont grands
et puissants ceux qui sont calmes, fixes, et paisibles comme l'est la
vie de l'unité et dans l'unité?
Je vous ai dit ceci afin que ma joie demeure
en vous, et que votre joie soit pleine et parfaite. Si le nouvel
homme nous communique la joie dont il est rempli, et qu'il puise sans
interruption dans la joie de son père, notre joie sera pleine
et parfaite, parce qu'elle sera le
fruit divin de la vie éternelle,
lequel
fruit ne peut manifester sa maturité et toute la douceur
de ses sucs si salutaires, que quand il est parvenu jusque dans l'
âme
de l'homme, et qu'il en a tellement vivifié et pénétré
toutes les facultés, qu'elles soient devenues à leur tour
des
arbres superbes et fertiles, à l'imitation de cet
arbre dont
elles doivent être les représentants sur la terre.
"Nul ne peut avoir un plus grand
amour que de donner
sa vie pour ses amis. Vous serez mes amis si vous faites tout ce que
je vous commande." Qu'est-ce que l'
esprit nous commande ? C'est de le
laisser passer en nous, et se manifester par nous afin qu'il soit connu
des nations, et que tout soit rempli de sa lumière et de sa plénitude.
La manière dont nous devenons ses amis est qu'il ne peut passer
en nous, sans y laisser des rayons de la vie dont il est la source,
et sans se prononcer lui-même en nous selon notre propre mode,
et selon toutes les formes de notre être.
"Je ne vous appellerai plus maintenant serviteurs,
parce que le serviteur ne sait ce que fait son maître, mais je vous
appellerai mes amis parce que je vous ai fait savoir tout ce que j'ai
appris de mon père. Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, mais
c'est moi qui vous ai choisis, et je vous ai établis afin que
vous portiez beaucoup de
fruits." Voilà le véritable but
de l'
esprit sur nous, et tel est aussi celui du nouvel homme, et c'est
pour cela que l'
amour se propage, et que quand tout est ami en nous,
nous devenons les amis du Seigneur.
"Si le monde vous hait, sachez qu'il m'a haï avant
vous. Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui serait
à lui. Mais parce que vous n'êtes point du monde, je vous
ai choisis et séparés du monde." Nouveau tableau de la
destination primitive de l'homme par laquelle il devait planer au-dessus
de ce monde, et puiser continuellement sa mission divine dans la source
supérieure et éternelle.
"Le serviteur n'est pas plus grand que le maître
; s'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront.
Mais ils vous feront tous ces mauvais traitements à cause de
mon nom ; parce qu'ils ne connaissent point celui qui m'a envoyé."
L'
ennemi qui s'est emparé du royaume de ce monde comprend dans
sa haine tous ceux qui se rangent du parti de celui dont il s'est rendu
l'adversaire ; et si nous considérons comment il en a traité
les ouvrages, nous ne serons plus étonnés de la manière
dont il en traite les ouvriers. Mais que pourrons-nous craindre si nous
savons nous rallier à cette vérité ? L'
ennemi dans
ses projets n'a agi que contre lui-même, et n'a jamais rien pu
contre elle, il ne pourra donc rien contre nous si nous nous unissons
à elle, et qu'à son exemple nous planions au-dessus de
la région des destinées.
"Si je n'étais point venu, et que je ne
leur eusse point parlé, ils n'auraient point de péché,
mais maintenant ils n'ont point d'excuse de leur péché.
Celui qui me hait, hait aussi mon père." Voir le fils et ne pas
reconnaître le père, c'est manquer à la fois, et d'intelligence
et de volonté. C'est manquer d'intelligence, parce que qui voit
le fils, voit le père ; puisqu'il en est de cette manifestation
comme de celle de notre parole, dans laquelle ceux à qui nous
la manifestons peuvent voir notre pensée qui est le père
; c'est manquer de volonté, puisque cette parole qui se présente
sous la forme humaine nous annonce assez clairement quels sont nos droits
et nos privilèges, et ce qu'ils pourraient nous faire obtenir
pour peu que nous voulussions en user.
C'est pour cela que le Réparateur ajoute
: "Si je n'avais point fait parmi eux des uvres que nul autre
n'a faites, ils n'auraient point de péché ; mais maintenant
ils les ont
vues, et ils ont haï et moi, et mon père." Puisque
si celui qui voit le fils, voit le père, si celui qui aime le
fils, aime le père, il est impossible par la même raison
de haïr le fils sans haïr le père, attendu que le père
est dans le fils, comme le fils est dans le père.
"Mais quand le consolateur que je vous enverrai
de la part de mon père sera venu, comme l'
esprit de vérité
qui procède du père, il rendra témoignage de moi."
Malheureusement ceux qui n'auront pas vu le père dans le fils,
pourront n'y pas voir l'
esprit davantage, et c'est alors que leur faute
sera tellement constatée et confirmée, qu'ils seront sans
aucune excuse, et que pour eux la justice, au lieu de se convertir en
miséricorde et en
amour,
se convertira en jugement (Ps.
93:15).
Mais pour vous,
vous en rendez aussi témoignage,
parce que vous êtes dès le commencement avec moi. Comment
ceux qui auront vu le fils, et qui auront été avec lui
dès le commencement ne lui rendraient-ils pas témoignage
devant le consolateur, puisqu'ils peuvent même, ayant vu le fils,
rendre également témoignage du père ? Et c'est
un semblable témoignage que le nouvel homme attendra de tout
ce qui est en lui, puisque sa pensée, sa parole, et son action
seront intimement liées, et que rendre témoignage à
l'une, c'est nécessairement rendre témoignage aux deux
autres.
63.
"Je vous ai dit ces choses pour vous préserver
des scandales et des chutes. lis vous chasseront de leurs synagogues,
et le temps va venir que quiconque vous fera mourir, croira faire un
sacrifice à
Dieu. Ils vous traiteront de la sorte parce qu'ils
ne connaissent ni mon père, ni moi." Le scandale est la honte
de l'intelligence, tant de la part de celui qui le donne, que de la
part de celui qui le reçoit, parce que celui qui a les yeux ouverts
s'observe dans ses propres mesures, et discerne trop bien celles des
autres pour ne leur pas rendre ce qui leur appartient, soit l'intérêt
du dévouement lorsqu'elles sont justes, soit celui de la condescendance
et de la pitié lorsqu'elles ne le sont pas.
"Je ne vous les ai pas dites dès le commencement
parce que j'étais avec vous ; maintenant je m'en vais à
celui qui m'a envoyé et nul de vous ne me demande où je
vais ; mais parce que je vous ai dit ces choses, la tristesse a rempli
votre cur. " Ces scandales ne peuvent arriver que quand l'
esprit
de vérité est à demeure dans l'homme, parce qu'il
éclaire tout ; c'est pourquoi l'homme s'afflige quand il prévoit
des suspensions où il aura de la peine à démêler
en lui-même la lumière d'avec les ténèbres
parce qu'il sera seul. Mais il ne prévoit pas que ces suspensions
ne sont que pour lui préparer les voies à l'accomplissement
de son uvre, sans quoi il se remplirait de consolations.
"Il vous est utile que je m'en aille, car si je
ne m'en vais point, le consolateur ne viendra point à vous, mais
si je m'en vais, je vous l'enverrai." Comment le consolateur, ou l'uvre
effectif naîtrait-il en nous si la volonté, l'
amour, et la parole,
ne nous l'envoyaient ? Et comment cette parole nous l'enverrait-elle
si elle ne rentrait dans son père dont elle est née elle-même
?
"Et lorsqu'il sera venu, il convaincra le monde
touchant le péché, touchant la justice, et touchant le
jugement. Touchant le péché, parce qu'ils n'ont pas cru
en moi," malgré qu'ils eussent en eux une parole qui leur prouvait
l'existence de leur pensée, comme ma parole, et mes uvres
leur prouvaient l'existence de mon père.
Touchant la justice, parce que je m'en vais
vers mon père, et que vous ne me verrez plus, attendu que
je n'ai paru près de vous que pour vous délivrer de votre
esclavage, et de vos chaînes, et qu'il faut maintenant vous laisser
développer vos
forces pour que vous atteigniez le but, et que
vous obteniez les récompenses qui sont promises à tous
les fidèles serviteurs.
Touchant le jugement, parce que le prince du
monde est déjà jugé, et que la présence
du consolateur fera connaître à ce prince du monde qu'il n'a
plus rien à espérer, que ses projets sont déconcertés,
que ses
forces sont détruites, que la honte, la confusion, et
les plus horribles châtiments vont tomber sur lui, et sur ses adhérents
; tandis que la lumière, et les consolations vont remplir ceux
qu'il a voulu rendre ses victimes. Vous ne pouvez douter de l'existence
de ces trois témoignages de l'
esprit, puisque le nouvel homme
qui est l'image de cet
esprit peut vous les faire trouver tous les trois
en vous-mêmes.
"J'ai encore beaucoup de choses à vous dire
; mais vous ne pouvez pas les porter maintenant. Quand l'
esprit de vérité
sera venu, il vous enseignera toute vérité ; car il ne
parlera pas de lui-même, mais il dira tout ce qu'il aura entendu,
et il vous annoncera les choses à venir." Le nouvel homme découvre
en lui chaque
jour de nouvelles clartés dont les diverses intelligences
de son être ne sont point encore susceptibles ; il est obligé
de les renfermer en lui-même jusqu'à ce que ces intelligences
aient acquis plus de
forces, et plus de consistance, c'est-à-dire,
jusqu'à ce que les rayons de l'
esprit aient transformé
leur substance incomplète, en une substance de réalité,
et de vérité ; mais aussi il se remplit chaque
jour d'une
nouvelle espérance que ces salutaires effets s'accompliront,
parce qu'en combattant ardemment l'apparence dont il est environné
lui-même, il parvient à sentir en lui, comme le contact
de la vie même, comme ce
punctum saliens, dont il a tout
lieu de croire qu'avec le temps, il ne peut résulter que des
fleuves abondants qui ne laisseront dans la stérilité
aucune des régions de son être.
"C'est lui qui me glorifiera, parce qu'il prendra
de ce qui est en moi, et il vous l'annoncera; tout ce qu'a mon père
est à moi, c'est pourquoi je vous ai dit qu'il prendra de ce
qui est à moi, et qu'il vous l'annoncera." Lorsque l'
esprit prendra
de ce qui est au fils, il prendra de ce qui est au père, puisque
tout ce qui est au père, est au fils ; voilà pourquoi
il glorifiera le fils, puisqu'il développera, et manifestera
comme appartenant au fils, les merveilles dont le père est le
dépositaire et la source. Voilà pourquoi la gloire du
nouvel homme sera si grande quand toutes ses facultés auront
été renouvelées par l'
esprit, puisque cet
esprit
témoignera par là que le nouvel homme est lui-même
rempli des merveilles du père, et que cette Divinité suprême
a réellement passé en lui tout entière.
Encore un peu de temps, et vous ne me verrez
plus, et encore un peu de temps, et vous me verrez, parce que je m'en
vais à mon père. La première apparition du
nouvel homme en vous est une apparition voilée, et couverte des
nuages de la région figurative et passagère, aussi elle
ne peut avoir qu'un temps, et quand ce temps est accompli, elle doit
cesser ; mais elle ne cesse que pour revenir avec plus de splendeur,
puisque le nouvel homme, se rapprochant de la source d'où il
est émané, y prend une nouvelle vie, et une existence
toute spirituelle, paroles que
les apôtres ne pouvaient comprendre.
En vérité, en vérité,
je vous le dis, vous pleurerez, et vous gémirez vous autres,
et le monde sera dans la joie ; vous serez dans la tristesse, mais votre
tristesse se changera en joie. Pourquoi
le monde sera-t-il
dans la joie quand le nouvel homme sera disparu ? C'est qu'il croira
ce nouvel homme disparu pour jamais, et que ce nouvel homme est pour
lui un être scandaleux, et qui, par sa seule présence,
lui reproche son néant, et son
impiété. C'est que
le monde fait alors envers ce nouvel homme, ce qu'Hérode
a fait envers le précurseur à Jérusalem.
"Lorsqu'une femme enfante, elle est dans la tristesse
parce que son heure est venue, mais après qu'elle a enfanté
un fils, elle ne se souvient plus de ses maux dans la joie qu'elle a
de ce qu'un homme est né dans le monde." C'est cette joie que
le nouvel homme seul peut connaître quand il sent qu'il est sorti de
l'esclavage, et du lieu de ténèbres, et que l'
esprit lui
a donné la naissance ; il la sentira cette joie bien plus vivement
encore lorsque cette naissance sera confirmée en lui par la présence
du consolateur.
"Vous êtes donc maintenant, vous autres,
dans la tristesse, mais je vous verrai de nouveau, et votre cur
se réjouira, et nul ne vous ravira votre joie." Parce que l'homme
que vous aurez mis au monde ne sera né ni de la chair, ni du
sang, ni de la volonté de l'homme, mais de la volonté
de l'
esprit, et qu'ainsi cet homme sera nommé le fils de
Dieu.
En ce jour-là, vous ne m'interrogerez
plus de rien. Car comment pourriez-vous avoir besoin de m'interroger,
puisque celui qui doit venir et vous enseigner toute vérité
sera pour vous la continuelle expression du père, et du fils,
et qu'il développera sans cesse à votre cur et à
votre
esprit tous les trésors de la sagesse, et toutes les merveilles
de l'unité.
"Je vous ai dit ceci en paraboles. Le temps, vient
que je ne vous entretiendrai plus en paraboles, mais que je vous parlerai
ouvertement de mon père. En ce temps-là vous demanderez
en mon nom, et je ne vous dis point que je prierai mon père pour
vous, car mon père vous aime lui-même, parce que vous m'avez
aimé, et que vous avez cru que je suis sorti de
Dieu." Le temps
des paraboles est celui où nous sommes encore sous les ombres
de notre région ténébreuse qui, comme l'ancienne
alliance, ne nous permet de voir que des éclairs de la vérité
; lorsque l'âge de la maturité de l'
esprit est arrivé
pour le nouvel homme, il est au-dessus des paraboles, puisque la parole
ou la bouche du père est ouverte pour lui, et que le père
cherche à le récompenser de l'avoir reconnu dans la parole
et la bouche de son fils.
Je suis sorti de mon père, et je suis
venu dans le monde ; maintenant je laisse le monde, et je m'en vais
vers mon père. Comment le nouvel homme pourrait-il se montrer
à nous aux ténèbres qui nous composent, s'il ne
sortait de son père ? Comment la lumière supérieure,
et les ténèbres inférieures pourraient-elles habiter
ensemble ? Mais aussi puisque la lumière supérieure, et
les ténèbres inférieures ne peuvent demeurer ensemble,
comment le nouvel homme, après être sorti de son père
pour venir dans nous ou dans ce bas monde, ni quitterait-il pas ce bas
monde pour s'en retourner vers son père ?
"Vous croyez maintenant, mais le temps va venir
et il est déjà venu que vous serez dispersés, chacun
de son côté, et que vous me laisserez seul ; mais je ne suis
pas seul, parce que mon père est avec moi." La présence
du nouvel homme réjouit pour un temps nos facultés ténébreuses
; mais quand il se retire pour retourner vers son père, elles
restent livrées à leurs ténèbres, et ne
se souviennent plus de lui, jusqu'à ce qu'il revienne pour les
régénérer de nouveau. Mais elles ont beau le laisser
seul ; il ne peut être seul, puisqu'il est un témoignage
vivant de l'existence et de la présence de son père auprès
de lui.
"Je vous ai dit ceci afin que vous trouviez la
paix en moi vous aurez des afflictions dans le monde, mais ayez confiance,
j'ai vaincu le monde." Le nouvel homme ne vient au milieu de nous que
pour rompre nos liens, et pour vaincre
le monde qui est en nous
; ainsi les ténèbres qui nous environnent encore après
son retour vers son père, ne sont plus vivantes comme elles l'étaient
auparavant, et elles doivent finir par s'éclairer infailliblement,
puisque la racine en est coupée, et que le nouvel homme a vaincu
le monde. C'est sous ce rapport que ce nouvel homme est si précieux
pour nous, puisque sans lui toutes nos substances spirituelles auraient
conservé à jamais et leurs ténèbres, et
la racine de ces mêmes ténèbres.