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Les Grands Initiés

Edouard Schuré
© France-Spiritualités™






LIVRE VIII
JÉSUS – LA MISSION DU CHRIST


VII – LA PROMESSE ET L'ACCOMPLISSEMENT – LE TEMPLE

« En trois jours je renverserai le temple ; en trois jours je le relèverai », avait dit à ses disciples le fils de Marie, l'Essénien consacré Fils de l'Homme, c'est-à-dire l'héritier spirituel du Verbe de Moïse, d'Hermès et de tous les anciens fils de Dieu. Cette promesse audacieuse, cette parole d'initié et d'initiateur, l'a réalisée ? Oui, si l'on envisage les conséquences que l'enseignement du Christ, confirmé par sa mort et par sa résurrection spirituelle, ont eues pour l'humanité, et toutes celles que contient sa promesse pour un avenir illimité. Son verbe et son sacrifice ont posé les fondements d'un temple invisible, plus solide et plus indestructible que tous les temples de pierre ; mais il ne se continue et ne s'achève que dans la mesure où chaque homme et tous les siècles y travaillent.

      Ce temple, quel est-il ? Celui de l'humanité régénérée. Il est moral, social et spirituel.

      Le temple moral est la régénération de l'âme humaine, la transformation des individus par l'idéal humain, offert comme exemple à l'humanité en le personne de Jésus. L'harmonie merveilleuse et la plénitude de ses vertus le rendent difficile à définir. Raison équilibrée, intuition mystique, sympathie humaine, puissance du verbe et de l'action, la sensibilité jusqu'à la douleur, l'amour débordant jusqu'au sacrifice, le courage jusqu'à la mort, rien ne lui a manqué. Il y avait assez d'âme dans chaque goutte de son sang pour faire un héros ; mais avec cela quelle douceur divine ! L'union profonde de l'héroïsme et de l'amour, de la volonté et de l'intelligence, de l'Eternel-Masculin avec l'Eternel-Féminin, en font la fleur de l'idéal humain. Toute sa morale, qui a pour dernier mot l'amour fraternel sans limite et l'alliance humaine universelle, découle naturellement de cette grande personnalité. Le travail des dix-huit siècles écoulés depuis sa mort a eu pour résultat de faire pénétrer cet idéal dans la conscience de tous. Car il n'est plus guère d'homme dans le monde civilisé qui n'en ait une notion plus ou moins claire. On peut donc affirmer que le temple moral voulu par le Christ est non pas achevé, mais fondé sur des bases indestructibles dans l'humanité actuelle.

      Il n'en est pas de même du temple social. Celui-ci suppose l'établissement du règne de Dieu ou de la loi providentielle dans les institutions organiques de l'humanité ; il reste à construire tout entier. Car l'humanité vit encore à l'état de guerre, sous la loi de la Force et du Destin. La loi du Christ qui règne dans la conscience morale n'a pas encore passé dans les institutions. Je n'ai touché qu'incidemment aux questions d'organisation sociale et politique, dans ce livre uniquement destiné à éclairer la question philosophique et religieuse en son centre, par quelques-unes des essentielles vérités ésotériques et par la vie des grands initiés. Je ne m'en occuperai pas davantage dans cette conclusion. Elle est trop vaste et trop complexe et elle échappe trop à ma compétence pour que j'essaye même de la définir en quelques lignes. Je n'en dirai que ceci. La guerre sociale existe en principe dans tous les pays européens. Car il n'y a pas de principes économiques, sociaux et religieux admis par toutes les classes de la société. De même, les nations européennes entre elles n'ont cessé de vivre à l'état de guerre ouverte ou de paix armée. Car aucun principe fédératif commun ne les relie légalement. Leurs intérêts, leurs aspirations communes n'ont de recours chez aucune autorité reconnue, de sanction chez aucun tribunal suprême. Si la loi du Christ a pénétré dans les consciences individuelles, et jusqu'à un certain point dans la vie sociale, c'est encore la loi païenne et barbare qui gouverne nos institutions politiques. Actuellement le pouvoir politique est constitué partout sur des bases insuffisantes. Car d'une part, il émane du soi-disant droit divin des rois, qui n'est autre que la force militaire ; de l'autre, du suffrage universel, qui n'est que l'instinct des masses ou l'intelligence non sélectée. Une nation n'est pas un nombre de valeurs indistinctes ou de chiffres additionnés. Elle est un être vivant composé d'organes. Tant que la représentation nationale ne sera pas l'image de cet organisme, depuis ses corps de métiers jusqu'à ses corps enseignants, il n'y aura pas de représentation nationale organique et intelligente. Tant que les délégués de tous les corps scientifiques et de toutes les Eglises chrétiennes ne siègeront pas ensemble dans un conseil supérieur, nos sociétés seront gouvernées par l'instinct, la passion et la force ; et il n'y aura pas de temple social.

      D'où vient donc qu'au-dessus de l'Eglise trop petite pour le contenir tout entier, de la politique qui le nie et de la Science qui ne le comprend encore qu'à demi, le Christ est plus vivant que jamais ? C'est que sa morale sublime est le corollaire d'une science plus sublime encore. C'est que l'humanité commence seulement à pressentir la portée de son œuvre, l'étendue de sa promesse. C'est que derrière lui nous apercevons à côté et au-delà de Moïse toute l'antique théosophie des initiés de l'Inde, de l'Egypte et de la Grèce, dont il est la confirmation éclatante. Nous commençons à comprendre que Jésus à sa plus haute conscience, que le Christ transfiguré ouvre ses bras aimants à ses frères, aux autres Messies qui l'ont précédé, comme lui rayons du Verbe vivant, qu'il les ouvre tout grands à la Science intégrale, à l'Art divin et à la Vie complète. Mais sa promesse ne peut s'accomplir sans le concours de toutes les forces vives de l'humanité. Deux choses principales sont nécessaires aujourd'hui à la poursuite du grand œuvre : d'une part, l'ouverture progressive de la science expérimentale et de la philosophie intuitive, aux faits de l'ordre psychique, aux principes intellectuels et aux vérités spirituelles ; de l'autre, l'élargissement du dogme chrétien dans le sens de la tradition et de la science ésotérique, par suite, une réorganisation de l'Eglise selon l'initiation graduée, et cela par un mouvement libre et d'autant plus irrésistible de toutes les églises chrétiennes, qui sont toutes également et au même titre les filles du Christ. Il faut que la science devienne religieuse et que la religion devienne scientifique. Cette double évolution, qui déjà se prépare, amènerait finalement et forcément une réconciliation de la Science et de la Religion sur le terrain ésotérique. L'œuvre n'ira pas sans de grandes difficultés au début, mais l'avenir de la société européenne en dépend. La transformation du Christianisme dans le sens ésotérique entraînerait celle du Judaïsme et de l'Islam, ainsi qu'une régénération du Brahmanisme et du Bouddhisme dans le même sens ; il fournirait donc une base religieuse à la réconciliation de l'Asie et de l'Europe.

      Voilà le temple spirituel à construire ; voilà le couronnement de l'œuvre intuitivement conçue et voulue par Jésus. Son verbe d'amour peut-il former la chaîne magnétique des sciences et des arts, des religions et des peuples, et devenir ainsi le verbe universel ?

      Aujourd'hui, le Christ est maître du globe par les deux races les plus jeunes et les plus vigoureuses, encore pleines de foi. Par la Russie, il a le pied en Asie ; par la race anglo-saxonne, il tient le Nouveau Monde. L'Europe est plus vieille que l'Amérique, mais plus jeune que l'Asie. Ceux qui là croient vouée à une décadence irrémédiable la calomnient. Mais si elle continue à s'entre-déchirer, au lieu de se fédéraliser sous l'impulsion de la seule autorité valable : l'autorité scientifique et religieuse ; si, par l'extinction de cette foi, qui n'est que la lumière de l'esprit nourrie par l'amour, elle continue à préparer sa décomposition morale et sociale, sa civilisation risque de périr par les bouleversements sociaux d'abord, ensuite par l'invasion des races plus jeunes ; et celles-ci saisiront le flambeau qu'elle aura laissé échapper de ses mains.

      Elle aurait un plus beau rôle à remplir. Ce serait de garder la direction du monde, en achevant l'œuvre sociale du Christ, en formulant sa pensée intégrale, en couronnant par la Science, l'Art et la Justice, te temple spirituel du plus grand des fils de Dieu.


FIN




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