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La vraie langue celtique et Le Cromleck de Rennes-les-Bains

Henri Boudet
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CHAPITRE V
LANGUE CELTIQUE

I - L'Armorique et ses tribus

      Après avoir appliqué la langue des Tectosages à interpréter le basque, nous pouvons tenter son efficacité dans l'explication de Britanni et des noms celtiques des tribus armoricaines.

      La langue bretonne est, croit-on, la vraie langue celtique parlée par nos aïeux. Que les bretons aient conservé un nombre très considérable d'expressions gauloises, c'est incontestable ; mais ils n'ont point gardé cette langue dans sa pureté, et il suffit de jeter un coup d'œil sur leurs pronoms pour juger de l'altération profonde de leur langage. Ce qui démontre au grand jour cette altération, c'est la difficulté éprouvée par les Bretons eux-mêmes pour éclaircir les dénominations de leurs anciennes tribus, et surtout les noms les plus chers à leur patriotisme, ceux de Britanni et d'Armorique.

      Suivant Le Gonidec, Breton ou Bretoun ou mieux Brizard, vient de Briz, qui signifie peint de diverses couleurs. Lehuerou dit que Breton (Brython dans les traditions gauloises) dérive de Bro, pays et de thon, than, ou den, hommes, c'est-à-dire, hommes du pays, indigènes. C'est là, malheureusement, tout ce qu'a pu dévoiler le breton pour l'étymologie de Britanni. L'idiôme de Tectosages sera plus heureux, nous l'espérons du moins, tout en conservant une prononciation plus exacte. Britanni dérive de to breath (brith), vivre, et de to annoy (annoï), incommoder, ennuyer. L'île de Bretagne devait sans doute être occupée par des hommes vivant d'une manière incommode et dure. César, parlant de son expédition militaire dans cette île, rapporte que les anciens habitants en tenaient l'intérieur, tandis que les côtes étaient au pouvoir des Belges venus du continent. Ces Belges commencèrent à cultiver et à ensemencer les champs : l'île était fort peuplée, les troupeaux très nombreux ; les habitants de l'intérieur vivaient de lait et de viande, ne semaient point de blé, et étaient vêtus de peaux. (67) La privation volontaire de blé et de pain, l'alimentation exclusive par le lait et la viande, les vêtements de peaux avaient paru, aux yeux du Neimheid constituer un genre de vie assez dur et assez incommode pour faire nommer ces insulaires, Britanni.

      Le terme Armorique est aussi une véritable énigme dans la langue bretonne. D'après tous les auteurs, Armorique dériverait de ar-mor, sur mer. Mor en effet, signifie mer, en breton ; mais ar, que signifie-t-il d'une manière sûre ? Et la terminaison ique est-elle donc inutile et deviendrait-elle un simple ornement ? Dans l'idiôme des Tectosages, armorique se décompose ainsi : – arm, bras, – oar (ôr), aviron, rame, – to eke (ike), allonger, perfectionner, – c'est-à-dire, un bras qui se sert de rames fort longues.

      Ce sens d'Armorique devient saisissant de vérité, lorsqu'on se souvient des indications données par César sur la marine Vénète, assez puissante pour rendre ce peuple indomptable. Les vaisseaux armoricains à carène plate défiaient les bas-fonds ; construits dans leur entier en cœur de chêne, ils pouvaient se jouer du choc des éperons romains ; leur proue et leur pouppe fort élevées, résistaient admirablement aux vagues les plus fortes : les voiles étaient faites de peaux, afin qu'elles ne fussent point déchirées et mises en pièces par la furie des ouragans et des tempêtes. (68)

      Il n'est donc pas étonnant, que construisant des navires à rebords si élevés, les marins de l'Armorique aient dû se servir de rames fort longues, et c'est là l'origine de leur nom, Armorici.

      Parcourons encore cette terre si intéressante de l'Armorique et nous y retrouverons, par les dénominations de ses tribus et de ses cités, bien des choses dignes de fixer l'attention.

      La tribu la plus puissante de confédération armoricaine était celle des Vénètes. Ces marins redoutés étaient fort religieux ; mais ils ne connaissaient pas de temple pour y prier : ils se réunissaient en plein air, lorsqu'ils remplissaient leurs exercices religieux, dédaignant de se mettre à l'abri des intempéries des saisons pour accomplir les actions les plus nobles de la vie. Le nom de Vénètes indique cette fière coutume, qui était d'ailleurs commune à tous les Gaulois, tout aussi religieux que les Vénètes, – vane (véne), temple, – to hate (héte), détester –.

      Leur ville principale était Dariorigum, aujourd'hui Vannes. Nous avons déjà constaté l'habileté des Aquitains et des Bituriges à élever et dompter les chevaux, et maintenant dans une autre partie de la Gaule, nous pourrons nous convaincre de quels soins vigilants les Celtes entouraient l'espèce chevaline ; – to dare, oser, – to hew (hiou) tailler, – rig, cheval à demi châtré –.

      Au sud du Morbihan, près des côtes de la mer, se trouve Carnac, si remarquables par ses alignements. Les pierres levées y sont rangées en longues files régulières et figurent des allées dont la largeur varie entre quatre et huit mètres. Une distance de sept, huit et dix mètres est ménagée entre chacune des pierres levées. Les allées du centre sont plus grandes que les allées latérales, et à une extrémité, on voit un grand espace libre, semblable à une place publique.

      On cherche depuis bien longtemps la signification de ces alignements faits de pierres levées et mesurant plusieurs kilomètres. S'il nous était permis de hasarder une opinion sur ces alignements, nous serions porté à y voir, non pas un monument religieux, mais bien un lieu d'exercices, où les Gaulois se formaient à conduire avec habileté, au milieu d'obstacles multipliés, leurs chariots de guerre, armés de faux, leurs [155] cobhains, – kob, cheval, – to hem, entourer –, et on sait quelle adresse redoutable les Celtes y déployaient.

      César en avait été si vivement frappé qu'il n'a pu cacher son admiration. « Les exercices journaliers, dit-il, les ont rendus tellement habiles, qu'ils savent arrêter leurs chevaux dans la course la plus fougueuse, dans les pentes les plus raides, et qu'ils les font tourner de court : eux-mêmes sont accoutumés à courir sur le timon, à se tenir sur le joug, et puis d'un bond à se rejeter dans le char. &#raquo; (69)

      Les alignements de Carnac étaient bien disposés pour former l'œil et la main des jeunes Gaulois, obligés de conduire leurs chariots entre les pierres levées qu'ils devaient s'étudier à tourner et à éviter.

      Au reste, ce qui nous porte à mettre en avant cette hypothèse, c'est le nom même de Carnac, signifiant un chariot attelé d'un jeune cheval, – car, chariot, – nag, jeune cheval. – Est-il inadmissible que ces longues files de pierres levées de Carnac fussent, pour ainsi dire, un champ de courses, où les Celtes montraient leur force et leur habileté en maîtrisant, au milieu des obstacles, de jeunes et vigoureux chevaux ?

      Les amateurs de monuments mégalithiques peuvent voir à Locmariaguer, chez les Vénètes, une allée couverte, dite de César. Locmariaguer est placé tout près du lac de Vannes. Voici la composition de ce nom : un lac qui empêche les chasseurs, – loch, (lok) lac, – to mar, empêcher, – yager (iagueur), chasseur –.

      Tous les auteurs qui se sont occupés des industries celtiques nous apprennent que les tamis de crin sont d'invention gauloise ; mais ils ne disent pas où était le lieu d'invention et de fabrication. Sarzeau, dans la presqu'île de Rhuis nous instruit amplement à ce sujet, – sarce (sarse), tamis, tissu de crin, – to sew (), attacher, coudre.

      Au nord des Vénètes, était établie la tribu des Curiosolites. Leurs mains façonnaient ces voiles de peaux, dont se servaient les marins de l'Armorique et qui avaient tant surpris César. Les Curiosolites étaient les corroyeurs, obligés de coudre et d'attacher les peaux puantes, – to curry (keurri), corroyer, – to owe (ô), être obligé, – to sew (), coudre, attacher, – olid, puant, fétide –. Est-ce en souvenir des Curiosolites que la ville de Saint-Malo fait encore un si grand commerce de cuirs et de peaux ?

      Dans cette tribu et sur les bords de la mer, existait Reginea, dont le nom seul indique l'importance pour la marine armoricaine : on taillait les agrès des vaisseaux, – rigging (rigguign), agrès, – to hew (hiou), tailler –.

      Dans le terrain limitrophe des Curiosolites, se trouvait une cité du nom d'Aleth, située à peu près à l'endroit occupé aujourd'hui par la ville de Saint-Servan. La cité d'Aleth, – allay (allé), mélange, alliage, – to etch, graver à l'eau forte sur le cuivre –, fabriquait-elle des ouvrages de cuivre et de bronze, ou bien, a-t-elle reçu ce nom à cause du sol qui aurait renfermé du minerai de cuivre ? Il est bien difficile de se prononcer. Cependant notre Aleth du département de l'Aude pourrait peut-être nous renseigner ; la similitude de noms semble devoir provenir de la similitude d'industrie ou de terrain contenant des métaux de même nature dans les deux localités. L'industrie métallurgique a toujours été nulle dans notre Aleth, et il n'existe rien dans les traditions populaires qui permette même de soupçonner l'exploitation de ses pyrites cuivreuses.

      Le Neimheid a dû appliquer une dénomination semblable à ces deux cités, si éloignées l'une de l'autre, probablement à cause de leur sol renfermant quantité de pyrites de cuivre mêlées à d'autres minerais.

      La cité bretonne d'Aleth appartenait à la tribu des Diablintes, – to dye (daï), teindre, colorer, – able, habile, – to hint, inventer, [158-12] suggérer –, les ouvriers ingénieux et habiles qui savaient donner aux tissus dont se composaient les vêtements des Celtes, ces couleurs vives et variées dont ils aimaient l'éclat.

      Les Diablintes possédaient une autre cité appelée Fines, – to fine, affiner, purifier, – haze (hèze), brouillard. A t-on voulu dans la dénomination de Fines faire allusion aux vapeurs semblables à des brouillards s'élevant au-dessus des foyers d'affinage ? Situé à proximité d'Aleth, Fines aurait bien pu posséder des foyers, destinés à purifier les pyrites de cuivre provenant de cette localité. En admettant cette hypothèse, qui n'est pas improbable, d'une fonderie de cuivre ou de bronze, dans la ville de Fines, les fourneaux ne devaient jamais s'éteindre, surtout si elle était dans l'obligation de fournir les timons et les roues de bronze aux habitants de Carife, dont l'industrie consistait à ajuster les différentes parties des chariots celtiques, – car, chariot, – to eye (), avoir l'œil sur, – to fay (), ajuster –. Carife était à dix lieues au sud-est d'Aleth.

      A l'ouest des Vénètes, dans la partie de l'ancien comté de Cornouailles se terminant au cap ou bec du Raz, vivaient les Corisopites. Pour bien juger et apprécier cette contrée, il suffit d'en citer la description faite par Châteaubriand qui connaissait sa chère Bretagne : « Région triste et solitaire, enveloppée de brouillards, retentissant du bruit des vents, et dont les côtes hérissées de rochers étaient battues d'un Océan sauvage. » Ces paroles sont la traduction fidèle et complète de Corisopites, – cor, cœur, – hiss, sifflement, – sob, soupir, sanglot, – to hit, frapper, toucher –. Les sifflements aigus, les gémissements incessants produits dans les rochers par la furie des ouragans, n'étaient-ils pas de nature à frapper, à attrister le cœur des Corisopites ?

      Les Agnotes, qui occupaient, au nord des Corisopites, la pointe armoricaine appelée le cap Finisterre, étaient, eux aussi, fatigués et tourmentés par le mauvais temps et les orages, – to hag, tourmenter, – naught (naût), mauvais –.

      Les Agnotes étaient compris dans la tribu des Osismiens ou Osismii. Ces derniers avaient reçu cette appellation à cause de l'abondance des marsouins et des piettes qui fréquentaient leurs côtes, – hog-sea (hog-si), marsouin, – smew (smiou), piette, oiseau aquatique –.

      Placée sur la rive droite de la Loire ou Ligeris, – lickerish, délicieux –, la tribu des Namnetes s'était rendue célèbre par son habileté à tendre des filets, – name, réputation, célébrité, – to net, prendre au filet –.

      D'après Ptolémée, la cité principale des Namnetes était Condivicum, aujourd'hui Nantes, – to con, apprendre par cœur, – device (divaïce), invention –. Quelles inventions avaient donc fait dénommer cette ville Condivicum, inventions que l'on apprenait par cœur ? Y avait-il une école où l'on enseignait la pratique des arts manuels, ou bien était-ce une école de navigation dans laquelle les intrépides marins Vénètes venaient se former et se tenir au courant de la science et des inventions nautiques ? Il est toujours bien certain que Condivicum possédait un chantier de construction pour les vaisseaux, puisque, dans le fleuve baignant la ville, furent lancées, par ordre de César, les galères romaines destinées à combattre la flotte des Vénètes, qui comptait deux cent vingt navires. (70)


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(67)  De bell. gall. lib., V. 12. 14.

(68)  De bell. gall., lib. III. 13.

(69)  De bell. gall., lib. IV. 33.

(70)  De bell. gall., lib. III. 9.




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