CHAPITRE VIII
VILLAGE CELTIQUE DE RENNES-LES-BAINS
IV - Les Romains et la source thermale de la Reine
La croix dans le cromleck des Redones
On a vu par l'explication des monuments
celtiques des
Redones du sud de la Gaule, quelles étaient les croyances
religieuses des
Celtes. Lorsque les étrangers, sous le voile du commerce et de l'alliance, ont foulé le sol
gaulois, ces croyances ont commencé de s'affaiblir dans l'
esprit de la population. Les chefs des diverses tribus, en s'affranchissant de l'autorité suprême du Neimheid, ont avancé la décadence, et quand la nation, vaincue par César, a fait désormais partie de l'empire romain, les anciennes et pures croyances
religieuses enseignées par les
Druides, ont fait place au culte
idolâtrique propagé par les vainqueurs. Les temples des
faux dieux ont souillé la terre
celtique, et le peuple perverti s'est abaissé à adorer
Teutatès, Belenus et Ogmius ou Oghan. [305]
Nous ne pouvons nous résoudre à étudier les noms de ces fausses divinités et les croyances idolâtriques des
Gaulois dégénérés. L'abîme dans lesquels on les a entraînés est trop horrible pour qu'on puisse s'attarder à le sonder.
A cette époque misérable qui précédait la venue nécessaire et immédiate du Sauveur attendu par les nations, la
signification vraie et
religieuse du
cromleck disparaît de tous les souvenirs. Le pays des
Redones méridionaux faisait depuis longtemps déjà partie de la Provincia, et les Romains avaient bâti un temple dans la vallée de la Sals, et des thermes à la source de la Reine. Un nouveau village fut construit sur le plateau de
Villanova qui domine les thermes du côté nord-est.
Les Romains ont laissé des traces nombreuses de leur séjour prolongé dans le
cromleck, médailles et monnaies d'or, d'
argent et de bronze, depuis le triumvirat d'Antoine,
Octave et Lépide, jusqu'au règne de l'empereur Gratien, amphores entières, débris de statues taillées dans le marbre blanc,
chapiteaux et socles de colonnes sculptés, inscriptions consulaires gravées dans la pierre.
Les
Redones du sud ont passé un temps relativement court dans les superstitions insensées du
paganisme. Le proconsul Sergius Paulus,
disciple de l'apôtre St-Paul était venu porter l'
Evangile dans le midi de la Gaule et avait fixé son siège à [306]
Narbonne. Les missionnaires chrétiens envoyés par l'
illustre et saint
Evêque pour conquérir à la vérité les
esprits et les curs des
Gaulois de la Narbonnaise, comprirent, en pénétrant dans le
cromleck des
Redones, que le respect dont on entourait ces pierres taillées ou levées,
était un respect devenu
idolâtrique, et ils firent graver des
croix grecques sur tous les points de ce cercle de pierres, à l'entrée du
Cromleck, aux Crossés, au Roukats, au Serbaïrou, sur la crête du
Pla de la Coste et de las Brugos et au Cugulhou du couchant.
Alors, à l'arête du cap dé l'Hommé sur le haut d'un ménir, en face du temple païen, converti en
église
chrétienne détruite plus tard par l'
incendie, fut sculptée une belle tête du Sauveur regardant la vallée, et dominant tous ces monuments
celtiques qui avaient perdu leurs enseignements. La
croix, victorieuse du
paganisme, n'a pas discontinué de régner dans le
cromleck de
Rennes-les-Bains, et maintient toujours, gravés dans le cur
religieux de ses habitants, les préceptes de vie donnés au monde par l'Eternelle Vérité.