Pierre Commelin Scylla, nymphe d'une éclatante beauté, avait
inspiré un violent
amour à
Glaucus, qui se joue des tempêtes et se complaît dans les flots azurés. Moitié homme, moitié poisson, ne se rendant compte ni de sa laideur ni de sa difformité, ce
dieu marin avait beau prendre à témoin le
ciel, la terre et la mer de la sincérité de son cur, la nymphe restait insensible à ses adjurations et à ses transports. Il eut recours à
Circé. La magicienne, qui aimait
Glaucus au point d'en être jalouse, lui fit de perfides promesses. Elle composa un poison qu'elle jeta ensuite dans la fontaine où la nymphe avait coutume de se
baigner.
A peine Scylla fut-elle entrée dans la fontaine, qu'elle se vit changée en un monstre qui avait six griffes, six gueules et six têtes ; une meute de
chiens lui sortait du
corps autour de sa ceinture, et leurs hurlements continuels frappaient d'effroi tous les passants. Scylla, effrayée elle-même de sa forme monstrueuse, se jeta dans la mer près des rochers et des écueils qui, dans le détroit de
Sicile, portèrent son nom.
Scylla a une voix terrible, et ses cris affreux ressemblent au rugissement du lion : c'est un monstre dont l'aspect ferait frémir un
dieu même. Lorsqu'elle voit passer des vaisseaux dans le détroit, elle s'avance hors de son antre, et les attire à elle pour les engloutir. C'est ainsi qu'elle se vengea de
Circé en faisant périr les vaisseaux d'
Ulysse, son amant.
Charybde, fille de
Neptune et de la
Terre, ayant volé des bufs à
Hercule, fut foudroyée par Jupiter et changée en un
gouffre dangereux qui se trouve dans le détroit de
Sicile, en face de l'antre de Scylla.
Homère suppose qu'il engloutit les flots trois fois par
jour, et trois fois les rejette avec des mugissements horribles.
De ces deux
gouffres le moins dangereux est celui de Charybde ; de là le proverbe : « Tomber de Charybde en Scylla ».<
Pierre Commelin, Mythologie grecque et romaine, pp. 142-143.