Dom Antoine-Joseph Pernéty Fils de Jupiter et de
Sémélé, fille de
Cadmus. La
Fable dit qu'il naquit des cendres de sa mère, comme Esculape. Elle nous le représente ailé, ayant des cornes, une tête de taureau, mâle et
femelle, jeune et vieil, barbu, et sans barbe. C'est le même que les Egyptiens
nommaient
Dyonisius. Toutes les
histoires que l'on fait de lui, ne
sont, au sentiment des Philosophes Spagyriques, qu'une
allégorie des opérations de leur Art, qu'ils appellent par excellence
le grand 8uvre.
Bacchus est le même, selon eux, qu'
Adonis,
Apollon, le
Soleil, Osiris et tant d'autres, comme le témoigne Orphée dans son
Hymne à Adonis, où il dit que tous ces noms différents n'indiquent que la même personne. On le feint quelquefois ailé pour désigner le moment de sa volatilisation, ayant une tête de taureau ou de
bouc, parce que ces
animaux lui étaient consacrés comme
à Osiris ; mâle et
femelle, à cause que la matière des Philosophes, ou leur
Rebis, est
androgyne ; jeune et vieil, parce que cette matière semble rajeunir dans les opérations, comme on peut le voir dans l'article
Vieillard. Voyez les
Fables
Egyptiennes et Grecques dévoilées, livre 3, chap. 14, par. 2.
Dom Antoine-Joseph Pernety, Dictionnaire mytho-hermétique, Edition de 1758 - Français modernisé par France-Spiritualités.
Pierre Commelin Bacchus ou
Dionysos était fils de Jupiter et de
Sémélé, princesse thébaine, fille de
Cadmus.
Junon, toujours jalouse, et voulant faire périr à la fois la mère et l'
enfant qui allait naître, vint trouver la princesse, sous les traits de Béroé, sa nourrice, et lui conseilla d'exiger de Jupiter qu'il se présentât devant elle dans tout l'appareil de sa gloire.
Sémélé suivit ce perfide conseil. Jupiter, après bien des résistances, céda enfin aux sollicitations de celle qu'il aimait, et lui apparut bientôt au milieu des foudres et des éclairs. Le palais s'embrasa, et
Sémélé périt
au milieu des
flammes. Cependant
Junon fut trompée dans son
attente. Jupiter fit retirer
Bacchus du brasier par
Vulcain.
Macris,
fille d'Aristée, reçut l'
enfant dans ses bras, et
le donna à Jupiter, qui le mit dans sa cuisse où il
le garda le temps nécessaire pour qu'il vit le
jour.
D'autres racontent que les Nymphes le retirèrent
du milieu des cendres maternelles, et se chargèrent de l'élever.
Quoi qu'il en soit,
Bacchus passa toute son enfance loin de l'
Olympe
et des regards malveillants de
Junon, dans les campagnes de
Nysa,
ville
fabuleuse de l'Arabie Heureuse ou peut-être des Indes.
Là, sa tante
Ino, par ordre de Jupiter, veilla à sa
première éducation avec le secours des
Hyades, des
Heures et des Nymphes, jusqu'à ce qu'il fût en âge
d'être instruit par les Muses et Silène.
Devenu grand, il fit la conquête des Indes
avec une troupe d'hommes et de femmes portant, au lieu d'armes, des
thyrses et des tambours.
Son retour fut une marche triomphale de
jour
et de nuit. Ensuite, il passa en Egypte, où il enseigna l'agriculture
et l'art d'extraire le miel ; il planta la vigne, et fut adoré
comme le
dieu du vin.
Il punit sévèrement tous ceux
qui voulurent s'opposer à l'établissement de son culte.
A Thèbes,
Penthée, successeur de
Cadmus, fut mis en
pièces par les
Bacchantes ; les Ménéides ou
filles de
Minyas furent changées en chauves-souris. Elles
étaient trois,
Iris, Clymène, Alcithoé. Soutenant
que
Bacchus n'était pas fils de Jupiter, elles continuèrent
à travailler pendant ses fêtes, et refusèrent
d'assister à la célébration des
Orgies.
Bacchus triompha de tous ses
ennemis et de tous les dangers auxquels les persécutions
incessantes de
Junon l'exposaient. Un
jour, fuyant devant l'implacable
déesse, il tomba de fatigue et s'endormit. Un
serpent à
deux têtes l'attaqua, et le
dieu, à son réveil,
le tua d'un coup de sarment.
Junon finit par le
frapper de folie,
et le fit errer dans une grande partie du monde. Il fut d'abord
accueilli avec bienveillance par
Protée, roi d'Egypte, puis
il passa en
Phrygie, où, ayant été admis aux
expiations,
il fut
initié aux mystères de
Cybèle. Dans
la guerre des
géants, il se transforma en
lion, et combattit
avec rage. Pour l'
animer, Jupiter lui criait sans cesse : «
Evohé,
courage, mon fils. »
Venu dans l'île de Naxos, il consola
et épousa
Ariane abandonnée par
Thésée,
et lui donna la fameuse
couronne d'or, chef-d'uvre de
Vulcain.
C'est
Bacchus, dit-on, qui le premier établit une école
de musique ; c'est en son honneur que furent données les
premières représentations théâtrales.
Silène, son père nourricier et en
même temps son précepteur, était fils de
Mercure
ou de
Pan et d'une nymphe. On le représente d'ordinaire avec
une tête chauve, des cornes, un gros nez retroussé, une
petite taille et une corpulence charnue, le plus souvent monté
sur un âne, et, comme il est en état d'ivresse, il a peine
à se tenir sur sa monture. S'il est à pied, il marche
d'un pas chancelant, appuyé sur un bâton ou sur un thyrse,
sorte de long javelot. On le reconnaît aisément à
sa
couronne de lierre, à la tasse qu'il tient, à son
air
jovial et même un peu goguenard.
Malgré son portrait si peu flatteur, Silène,
quand il n'était pas ivre, était un grand sage, capable
de donner à son divin élève des leçons de
philosophie.
Dans une églogue de Virgile, les vapeurs
du vin n'empêchent pas cet étrange vieillard d'exposer
sa doctrine sur la formation du monde.
Le cortège de
Bacchus était fort
nombreux. Sans compter Silène et les
Bacchantes, on y remarquait
des nymphes, des satyres, des bergers, des bergères, et même
le
dieu Pan. Tous portaient le thyrse enlacé de feuillage,
des ceps de vigne, des
couronnes de lierre, des coupes et des grappes
de raisin.
Bacchus ouvre la marche, et tout le cortège le
suit, en poussant des cris et faisant retentir de bruyants instruments
de musique.
Les
Bacchantes ou Ménades étaient
primitivement les nymphes ou les femmes que
Bacchus avait emmenées
avec lui à la conquête des Indes. Plus tard, on désigna
de ce nom des jeunes filles qui, simulant un transport bachique,
célébraient les
Orgies ou fêtes de
Bacchus
par une attitude, des cris et des bonds désordonnés.
Elles avaient les yeux hagards, la voix menaçante : leur
chevelure flottait éparse sur leurs épaules nues.
Bacchus est représenté ordinairement
avec des cornes,
symboles de la
force et de la puissance, couronné
de pampre, de lierre ou de figuier, sous les traits d'un jeune homme
riant et enjoué. D'une main, il tient une grappe de raisin
ou une corne en forme de coupe ; de l'autre, un thyrse entouré
de feuillage et de bandelettes. Il a les yeux noirs, et, sur ses
épaules descend en tresses ondoyantes sa longue chevelure
blonde aux reflets d'or. Il est le plus souvent imberbe, sa
jeunesse
étant éternelle comme celle d'
Apollon. Il est vêtu
d'un manteau de pourpre.
Il est tantôt assis sur un tonneau, tantôt
monté sur un char traîné par des tigres ou des
panthères, quelquefois par des centaures dont les uns jouent
de la lyre, les autres de la double flûte. Sur les monuments
les plus anciens, il est représenté avec une tête
de taureau ; sur quelques médailles, on le représente
debout, barbu, avec une robe triomphale qui tombe jusque sur ses
pieds. Le musée du Louvre possède plusieurs statues
de
Bacchus, entre autres celle de
Bacchus au repos.
On lui
immolait la pie, parce que le vin délie
les langues, et rend les buveurs indiscrets ; le
bouc et le lièvre,
parce qu'ils mangent les bourgeons de la vigne. Parmi les
oiseaux fabuleux,
le
phénix lui était consacré ; parmi les quadrupèdes,
la panthère ; et parmi les
arbres, la vigne, le lierre, le chêne
et le sapin.
Ce
dieu avait, en
Arcadie, un temple où
l'on flagellait cruellement les jeunes filles devant ses autels.
Il est parfois nommé
Liber (Libre), parce
que le
dieu du vin délivre l'
esprit de tout souci ;
Evan,
parce que ses
prêtresses, dans leurs
orgies, couraient de tous
côtés en criant :
Evohé ;
Bacchus,
dérivé d'un mot grec qui signifie "
crier",
allusion aux cris des
bacchantes ou des grands buveurs. Il porte encore
d'autres surnoms empruntés à son pays d'origine ou aux
effets de l'ivresse :
Nysaeus, de
Nysa,
Lyaeus, qui chasse
le chagrin,
Bromius, bruyant, etc.
Les
orgies ou bacchanales étaient célébrées
primitivement par des femmes, dans les
bois, les
montagnes, au milieu
des rochers. Elles affectaient un caractère mystérieux. Plus
tard, elles admirent des personnes des deux sexes à leur célébration.
Il en résulta souvent d'
infâmes désordres.
A Athènes, les fêtes de
Bacchus,
les Dionysiaques, se célébraient officiellement avec
plus de pompe que dans tout le reste de la Grèce. C'était
le premier archonte qui y présidait. Les principales cérémonies
consistaient en processions où l'on portait des thyrses,
des vases remplis de vin, des
couronnes de pampre, et les principaux
attributs de
Bacchus. Des jeunes filles, appelées "
canéphores",
portaient sur leurs têtes des corbeilles dorées, pleines
de
fruits d'où s'échappaient des
serpents apprivoisés
qui terrifiaient les spectateurs. Dans le cortège figuraient
aussi des hommes travestis en Silènes, Pans et Satyres qui
faisaient mille gestes bizarres, mille gambades, simulant ainsi
les folies de l'ivresse. On distinguait les grandes et les petites
dionysiaques : celles-là se célébraient vers
le mois de
février, celles-ci en
automne. A l'occasion des
dionysiaques, on instituait non seulement des courses, des luttes,
des
jeux, mais encore des concours de
poésie et de représentations dramatiques.
A Rome, on célébrait, en l'honneur
de
Bacchus ou Liber, des fêtes dites Libérales. Dans
ces fêtes très licencieuses, les
dames romaines ne
rougissaient pas de tenir des propos indécents, et de couronner
les moins honnêtes représentations du
dieu. L'an 558
de la fondation de la ville, le sénat rendit un décret
pour remédier à cette licence, remède inefficace,
les coutumes ou les murs étant plus fortes que les
lois.
Chose remarquable, on lui faisait, ainsi qu'à
Mercure, des
libations avec du vin coupé d'
eau, tandis que les
libations se faisaient aux autres
dieux avec du vin pur.
Le culte de
Bacchus ou
Dionysos fut introduit
assez tard dans la
religion grecque ; il est du moins bien postérieur
à celui des grands
dieux proprement dits ; il semble avoir
été importé en Grèce de la Haute Asie
ou peut-être de l'Egypte. En tout cas, si
Bacchus apparut
tardivement, il n'en eut pas moins d'adorateurs.
Il eut d'
Ariane plusieurs
enfants : Céranus,
Thoas, Enopion, Tauropolis, etc., qui ne sont guère connus
que de nom.
Pierre Commelin, Mythologie grecque et romaine, pp. 75-80.