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Mythologie grecque et romaine

Pierre Commelin
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LES ORACLES

      Le désir de connaître l'avenir et d'apprendre la volonté des dieux donna naissance aux oracles. Outre ceux de Delphes, de Cumes, de Claros, de Didyme ou de Milet que rendait Apollon et ceux de Dodone et d'Ammon réservés à Jupiter, Mars en avait un en Thrace, Mercure à Patras, Vénus à Paphos, Minerve à Mycènes, Diane en Colchide, Pan en Arcadie, Esculape à Epidaure et à Rome, Hercule à Gadès, Trophonius en Béotie, etc.

      Les oracles se rendaient de différentes mani&eg rave;res. Tantôt il fallait, pour en obtenir, beaucoup de formalités préparatoires, des jeûnes, des sacrifices, des lustrations, etc.. ; tantôt le consultant recevait une réponse immédiate, en arrivant. L'ambiguïté était un des caractères les plus ordinaires des oracles, et le double sens ne pouvait que leur être favorable.



La Pythie ou Pythonisse

      Les Grecs donnaient le nom de Pythonisses à toutes les femmes qui faisaient le métier de devineresses, parce que le dieu de la divination, Apollon, était surnommé Pythius, soit pour avoir tué le serpent Python, soit pour avoir établi son oracle à Delphes, ville primitivement appelée Pytho.

      La Pythie ou Pythonisse proprement dite était la prêtresse de l'oracle de Delphes. Assise sur un trépied ou siège élevé sur trois supports, au-dessus du gouffre béant d'où s'échappaient les prétendues exhalaisons prophétiques, elle rendait ses oracles une fois seulement chaque année, vers le commencement du printemps.

      A l'origine, il n'y eut qu'une seule Pythie ; ensuite, lorsque l'oracle fut tout à fait accrédité, on en élut plusieurs qui se remplaçaient et pouvaient être toujours prêtes à répondre, s'il survenait un cas important ou exceptionnel.

      Avant de monter sur le trépied, la Pythie se baignait dans la fontaine de Castalie, jeûnait trois jours, mâchait des feuilles de laurier, et accomplissait avec un religieux recueillement plusieurs cérémonies. Ces préambules achevés, Apollon avertissait lui-même de son arrivée dans le temple qui tremblait jusque dans ses fondements. Alors la Pythie était conduite à son trépied par les prêtres. C'était toujours dans des transports frénétiques que la Pythie remplissait ses fonctions ; elle proférait des cris, des hurlements et paraissait être comme possédée du dieu. L'oracle prononcé, elle tombait dans une sorte d'anéantissement qui durait parfois plusieurs jours. « Souvent, dit Lucain, une mort prompte fut le prix ou la peine de son enthousiasme. »

      La Pythie était choisie avec soin par les prêtres de Delphes qui eux-mêmes étaient préposés à l'interprétation ou à la rédaction de ses oracles. On voulait qu'elle fût née légitimement, qu'elle eût été élevée simplement et que cette simplicité parût dans ses habits. Elle ne connaissait ni essences, ni tout ce qu'un luxe raffiné a fait imaginer aux femmes. On la cherchait de préférence dans une maison pauvre où elle eût vécu dans une ignorance entière de toutes choses. Pourvu qu'elle sût parler et répéter ce que le dieu lui dictait, elle en savait assez.

      L'oracle n'était pas toujours désintéressé. Plus d'une fois, à l'instigation de ses ministres, Apollon, par la bouche de sa prêtresse, se fit courtisan de la richesse ou du pouvoir. Les Athéniens, par exemple, accusèrent la Pythie de philippizer, c'est-à-dire de s'être laissé corrompre par l'or de Philippe de Macédoine.

      La coutume de consulter la Pythie remontait aux temps héroïques de la Grèce. Phémonoé fut, dit-on, la première prêtresse de l'oracle de Delphes qui fit parler le dieu en vers hexamètres, et l'on ajoute qu'elle vivait sous le règne d'Acrisius, grand-père de Persée.



Les Sibylles

      La Sibylle était aussi une femme devineresse ou versée dans la divination. Mais ce mot a plus d'extension que celui de Pythie, et s'applique par conséquent à un grand nombre de prophétesses. Les Sibylles, dont le nom en grec dorien signifie « volonté de Jupiter », ne furent probablement à l'origine que les prêtresses de ce dieu, mais bientôt leur ministère s'étendit à toutes les divinités et s'exerça même dans les pays éloignés de la Grèce.

      La plus célèbre d'entre elles est la Sibylle de Cumes où Apollon avait son sanctuaire sur un antre presque aussi mystérieux que celui de Delphes. Elle rendait ses oracles avec l'exaltation d'une pythonisse, et, de plus, il lui arrivait de les écrire, mais sur des feuilles volantes. Ainsi furent rédigés les fameux Livres sibyllins contenant les destinées de Rome et dont l'acquisition fut faite par Tarquin l'Ancien.

      Ces livres, confiés à la garde de deux prêtres particuliers appelés duumvirs, étaient consultés dans les grandes calamités ; mais il fallait un décret du sénat pour y avoir recours ; et il était défendu, sous peine de mort, aux duumvirs de les laisser voir à personne.



La Divination

      De tout temps, et chez tous les peuples, l'homme, inquiet sur l'avenir, s'est ingénié à trouver les moyens de le connaître ou de le prévoir, non seulement dans les grandes circonstances, mais pour ainsi dire au jour le jour, et dans le train ordinaire de sa vie. Aussi, en Grèce pas plus qu'à Rome, on ne se borna à chercher l'avenir dans les oracles des Pythies ou des Sibylles ; on entreprit de le découvrir de mille autres manières, et l'on inventa la divination.

      Cette prétendue science, dont l'origine prête à tant de conjectures et de commentaires, avait fleuri dans l'ancienne Asie, en Egypte et surtout en Chaldée. Elle faisait partie de la théologie des Grecs, et fut érigée, à Rome, au rang des institutions de l'Etat. Elle avait ses maximes, ses règles précises et nettement formulées.

      On distinguait deux sortes de divinations : l'une artificielle, l'autre naturelle.

      On appelait divination artificielle un pronostic ou une induction fondée sur des signes extérieurs, liés avec des événements à venir ; et, divination naturelle, celle qui présageait les choses par un mouvement purement intérieur, et une impulsion de l'esprit indépendamment de tout signe extérieur. D'une part, on supposait que la divinité qui préside à la marche des événements manifeste d'avance sa volonté par des phénomènes sensibles, dans le ciel, dans les astres, dans l'air, sur terre, dans les animaux, dans les plantes, dans les entrailles des victimes, sur la physionomie des hommes et jusque dans les lignes de la main. D'autre part, on attribuait à l'âme, non sans raison toujours, le don de prévoyance naturelle, mais on exagérait cette faculté divinatrice, en la considérant comme une gardienne intérieure du corps, se détachant parfois de ses liens, et venant soit dans l'extase, soit dans les songes, dévoiler à l'homme les secrets de l'avenir.

      En Grèce, les devins, les interprètes des songes, les prêtres ou aruspices chargés de l'inspection des victimes jouissaient d'une grande considération, et avaient de l'autorité. Ils étaient attachés au service des temples et des autels ; ils accompagnaient même les armées dans leurs expéditions. Mais c'est à Rome surtout que leurs fonctions revêtaient un caractère officiel.



Les Augures

      L'augure, divination qui consistait primitivement dans l'observation du chant et du vol des oiseaux, et de la manière dont ils mangeaient, s'étendit ensuite à l'interprétation des météores et des phénomènes célestes. A Rome, les ministres officiellement préposés à cette divination portaient aussi le nom d'augures.

      Le collège des augures, institué, dit-on, par Romulus, fut d'abord composé de trois, puis de quatre et enfin de neuf membres dont quatre patriciens et cinq plébéiens. Ces ministres étaient en grande considération ; une loi des Douze Tables défendait même, sous peine de mort, de désobéir aux augures.

      On n'entreprenait aucune affaire importante sans les consulter. Cependant il paraît que, vers la fin de la république, leur autorité était un peu tombée dans le discrédit, et les Romains éclairés disaient sans doute, avec Cicéron, qu'ils ne concevaient pas comment un augure pouvait en regarder un autre sans rire.

      La science augurale se trouvait contenue dans des livres que les devins étaient obligés d'apprendre ou de consulter. Cette science se réduisait à douze chefs ou articles principaux, conformément aux douze signes du zodiaque.

      De tous les météores qui servaient à prendre l'augure, les plus importants étaient le tonnerre et les éclairs : s'ils venaient de l'orient, ils étaient réputés heureux ; s'ils passaient du nord à l'ouest, c'était tout le contraire. Les vents étaient aussi des signes de bons ou de mauvais présages. Les oiseaux dont on observait avec le plus d'attention le vol et le chant étaient l'aigle, le vautour, le milan, le hibou, le corbeau, la corneille.

Prendre les auspices, c'était spécialement observer les oiseaux. Cette observation était astreinte à des formalités religieuses, et, s'il s'agissait d'une affaire d'Etat, elle ne devait être faite que par un augure qualifié. Celui-ci, en présence des magistrats, élevait sa baguette divinatoire, et, avec elle, traçait dans le ciel un cercle imaginaire, déterminant ainsi l'espace et le délai dans lesquels les signes devaient être observés. Si l'augure était favorable, l'affaire était entreprise sans hésitation ; s'il était défavorable, elle était ajournée jusqu'au moment jugé propice par un nouvel augure. On vit plus d'une fois les armées sortir de Rome pour se mettre en campagne et revenir sur leurs pas, sous prétexte de prendre de nouveaux auspices.

      Afin que le chef d'une armée eût toujours à sa disposition les moyens de consulter les dieux par l'entremise des oiseaux, il se faisait accompagner d'augures portant dans des cages les poulets sacrés. Ces augures appelés « pullaires » avaient pour unique fonction de nourrir cette volaille, et de l'observer à toute heure du jour.

      La foi dans les augures soutenait le courage du soldat romain, et le mépris des auspices était, à ses yeux, un signe certain d'une défaite. Durant la première guerre punique, le consul Appius Claudius Pulcher étant sur le point d'engager sur mer une bataille contre la flotte carthaginoise, prit d'abord les auspices. Le pullaire vint lui annoncer que les poulets sacrés refusaient de sortir de leur cage et même de manger. – « Eh bien ! reprit le consul, qu'on les jette à la mer : au moins ils boiront. » Cette parole répétée aux soldats superstitieux abattit leur courage, et l'armée subit un désastre.

      Ce qui ajoutait à la considération dont jouissaient les augures, c'est que, indépendamment de leur science qui les éclairait sur beaucoup de choses, ils étaient parfois admirablement servis par le hasard : témoin Accius Navius. Cet augure vivait du temps de Tarquin l'Ancien. Il s'opposa au dessein de ce prince qui voulait augmenter le nombre des centuries de chevaliers, prétendant qu'il ne le pouvait sans être autorisé par les augures. Le roi, blessé de cette opposition, et voulant l'humilier, lui proposa de deviner si ce qu'il pensait dans le moment pouvait s'exécuter. – « Cela se peut faire », lui dit Accius Navius. – « Or, reprit Tarquin, je me demandais si je pourrais couper cette pierre à aiguiser avec un rasoir. » – « Vous le pouvez donc », répondit l'augure. Sur-le-champ, la chose fut faite, et les Romains, frappés d'admiration, érigèrent une statue à Accius Navius.

      On donnait le nom d'aruspices aux ministres chargés spécialement d'examiner les entrailles des victimes pour en tirer des présages. Ils étaient, en général, choisis dans les meilleures familles de Rome.



Les Présages et les Sorts

      On distinguait les présages des augures, en ce que ceux-ci s'entendaient de signes recherchés et interprétés suivant les règles de l'art augural, et que les présages, qui s'ofraient fortuitement, étaient interprétés par chaque particulier, d'une manière plus vague et plus arbitraire. On peut, dit-on, les réduire à sept classes, savoir : 1° les paroles fortuites ; 2° les tressaillements de quelques parties du corps, principalement du cœur, des yeux, des sourcils ; 3° les tintements d'oreille ; 4° les éternuements du matin, du midi et du soir ; 5° les chutes imprévues ; 6° la rencontre de certaines personnes étranges, étrangères ou contrefaites, et aussi la rencontre de certains animaux ; 7° les noms et prénoms. On peut y joindre l'observation de la lumière d'une lampe, l'usage puéril de compter les pétales de certaines fleurs, ou les pépins d'un fruit, etc...

      Il ne suffisait pas d'observer simplement les présages, il fallait de plus les accepter, et remercier la divinité s'ils étaient favorables. Si, au contraire, ils étaient fâcheux, on priait les dieux d'en détourner les effets.

      A Rome, dans les temps de calamités, et, en général, toutes les fois qu'un présage avait paru défavorable, on invoquait le dieu Averruncus, dans la persuasion qu'il avait la puissance de détourner les maux ou d'y mettre fin. Ce surnom, d'un mot latin qui signifie « détourner », se donnait même assez souvent aux autres dieux, quand on les priait de conjurer un malheur.

      Dans toute circonstance on avait recours aux présages, mais on les observait surtout au commencement d'une affaire importante, aux premières heures du jour, au premier jour d'un mois et principalement d'une année : de là l'usage des paroles de bon augure dans les rencontres, les salutations, les souhaits, et jusque dans le langage le plus ordinaire de la conversation.

      Non seulement les Romains évitaient les paroles de mauvais augure, mais ils prenaient garde d'évoquer quelque malheur par certains gestes, certaines attitudes, certains regards. Les esprits crédules attribuaient à telle ou telle personne le pouvoir de fasciner, et de jeter un sort, le plus souvent mauvais.

      Le Sort pour les anciens, est la part d'existence, ou, pour mieux dire, la part de biens et de maux dévolue à chaque être vivant, par le Destin. Ce mot étant du féminin en latin, les Romains avaient fait de la déesse Sors une fille de Saturne, et on lui rendait les mêmes hommages qu'au Destin ou à la Destinée. Elle était représentée sous les traits d'une jeune fille, à la parure recherchée, tenant sur sa poitrine une petite boîte carrée, propre à contenir ce qui est nécessaire pour tirer les sort.

      On tirait les sorts généralement au moyen de dés : dans quelques temples on les jetait soi-même, d'où est venue cette expression si ordinaire aux Romains et même aux Grecs : « le sort est tombé », ou « le dé en est jeté ».

      Ce genre de divination était pratiqué en maint endroit de la Grèce, et notamment a Dodone. Deux petites villes d'Italie, Préneste et Antium, avaient le privilège de contenir les sorts ; et de Rome on allait fréquemment les y interroger. Mais on allait aussi les interroger en Sicile, au temple des frères Palices.

      Ceux-ci, frères jumeaux, étaient fils de Jupiter et de la nymphe Thalie. Cette nymphe, craignant le ressentiment de Junon, pria le maître de l'Olympe de la cacher dans les entrailles de la terre. Peu après, il sortit de terre deux enfants qui furent, appelés Palices et mis au rang des dieux. Près de leur temple était un petit lac d'eau bouillante et sulfureuse, toujours plein, sans jamais déborder : on le regardait comme le berceau d'où les deux frères étaient sortis. Longtemps ce fut près de ce lac que les Grecs allaient faire des serments solennels ; plus tard le temple des Palices devint un asile pour les esclaves maltraités par leurs maîtres ; enfin le lac des frères Palices fut utilisé pour tirer les sorts. On y jetait des formules écrites sur des billets qui surnageaient ou tombaient au fond, suivant que le présage était ou n'était pas favorable.




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