Clément VI, élu
pape le 07 mai 1342, succéda à
Benoît XII.
Il s'appelait Pierre Roger, et était issu d'une famille
noble du Limousin. Ses talents lui procurèrent un avancement
rapide dans la carrière ecclésiastique, et pendant
qu'il était
évêque d'
Arras, Philippe de
Valois
le fit
Garde des
Sceaux.
Son élection se passa paisiblement
onze
jours après la mort de
Benoît XII, dans le palais
d'
Avignon, et son couronnement se fit avec la plus grande pompe,
le
jour de la Pentecôte, en présence des princes
du sang de France et de plusieurs seigneurs du royaume. Il eut
bientôt avec Edouard III, roi d'Angleterre, des démêlés
au sujet de la nomination aux
évêchés. Edouard
voulait que les élections des chapitres fussent libres.
Le pape prétendait que c'était à lui qu'appartenait
la pleine
disposition de tous les offices et dignités ecclésiastiques.
Edouard fit saisir le revenu des bénéficiers nommés
par le pape, et qui ne résidaient point. Clément
lui écrivit pour lui enjoindre de révoquer cet ordre,
sous peine d'
excommunication. Le roi convint avoir tort, et céda.
Clément VI fit une grande quantité de réserves qui tendaient à rendre nul le droit d'élection, et sur les remontrances qu'on lui fit que ses prédécesseurs n'en avaient pas agi ainsi, il répondit : «
Nos prédécesseurs ne savaient pas être
papes ». Les Romains l'invitèrent inutilement
à retourner à Rome. Dans la députation qu'ils
lui envoyèrent à ce sujet, parut Nicolas-Laurent,
ou Gabrino, connu depuis sous le nom de
Rienzi (1). Ce fut pendant le
pontificat de
Clément VI qu'éclatèrent à Rome les troubles excités par ce même Rienzi,
que le pape avait nommé son
notaire apostolique, en lui
accordant de grandes marques de distinction. (Voyez Rienzi)
Clément VI reprit contre Louis de Bavière les procédures
commencées par
Jean XXII ; il acheta de la reine Jeanne
de Naples la souveraineté d'
Avignon, moyennant 80.000 florins
d'or ; il ordonna la célébration du jubilé
tous les cinquante ans. Le nombre des
pèlerins qui trouvèrent
à Rome en 1350 s'éleva à 1.200.000 environ.
Sur la fin de 1351, le pape tomba malade,et, se croyant en danger,
il fit publier une constituion dans laquelle il se soumettait
à la correction du Saint-Siège s'il avait commus
quelque faute contre la foi
catholique et les bonnes moeurs, soit
avant, soit depuis son élévation à la première
dignité de l'
Eglise. Ce fut vers ces temps-là que
l'on répandit une satire attribuée à l'
archevêque
de Milan, Visconti, qui avait usurpé
Bologne, et contre
lequel
Clément VI avait fulminé des sentences de
condamnation. Le pape tenant un
jour une assemblée de
cardinaux,
l'un d'eux laissa tomber adroitement une lettre qui fut portée
au pape, et dont il ordonna la lecture ; elle était écrite
d'un style ridicule, au nom du prince des ténèbres,
au pape Clément, son
vicaire, et à ses conseillers-cardinaux.
Il rapportait les péchés particuliers à chacun,
qui les rendaient très recommandables auprès de
lui, et les exhortait à continuer ; elle finissait ainsi
: «
Votre mère, la Superbe, vous salue, avec vos
surs l'Avarice, et les autres qui se vantent que, par votre
secours, elles sont très bien dans leurs affaires. Donné
au centre de l'enfer, en présence d'une troupe de démons. » Le pape méprisa cette lettre, et l'
archevêque de Milan se réconcilia cependant avec lui, moyennant, dit-on, 12.000 florins d'or par an.
Clément VI couronna André roi
de Naples ; il couronna empereur Charles de Luxembourg à
la place de Louis de Bavière, avec lequel ses prédécesseurs
et lui avaient eu des démêlés, et qui n'était
pas encore relevé des censures dont on l'avait frappé.
Ce pape mourut le 06 décembre 1352,
après un
pontificat de 2 ans et 7 mois.
Son corps fut transféré à la
Chaise-Dieu, où l'on avait conservé son tombeau. Villani lui reproche sa cupidité, son luxe et la société continuelle des femmes ; d'autres, tels que Pétrarque, en ont fait l'éloge, en vantant ses lumières, sa générosité et ses manières aimables. Il s'occupa avec zèle de la réunion des Arméniens et des Grecs. On a de lui des sermons et un discours pour la canonisation de saint
Yves. Il eut pour successeur
Innocent VI.
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(1) Suivant les
historiens italiens, son nom était Nicolo di Lorenzo, et on l'appelait communément Cola di Ricazo
(Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 8 - Pages 394-395)