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Saint Paul, apôtre

(Saül de Tarse)
(2, à Tarse - 66, à Rome)
Apôtre des Gentils - Martyr - Fêté le 29 juin - Sa conversion est fêtée le 25 janvier
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Biographie universelle ancienne et moderne

      Saint Paul, l'apôtre des Gentils, nommé d'abord Saül, naquit deux ans avant l'ère vulgaire (la 2ème année de J.-C.), de parents juifs, à Tarse, ville municipale de Cilicie, dont le dévouement à l'empereur Auguste avait valu à ses habitants le titre de citoyens romains. Après que Saül eut appris les lettres grecques, qui, selon la remarque de Strabon, étaient florissantes chez les Ciliciens, son père, de la secte pharisienne, l'envoya étudier à Jérusalem, où Saül fut instruit par le docteur Gamaliel dans la loi de Moïse, dont l'observance sévère l'attacha surtout à cette secte. Cependant, suivant la pratique des Juifs commerçants des villes maritimes, on lui fit exercer un art d'industrie, celui de faire des tentes pour les marins, comme on le voit dans les Actes des apôtres (Bible Louis Segond">Actes des Apôtres, 18).

      Mais, zélé observateur de la loi judaïque, il ne fut que trop occupé à persécuter ceux qui embrassaient le christianisme naissant. Lors du martyre de saint Etienne, Saül, âgé de trente-deux ans, gardait les manteaux des lapidateurs miliciens, et devint leur complice : il eut néanmoins une part efficace aux prières du saint en faveur de ses bourreaux. Cette mort était le prélude de la première persécution contre l'Eglise. Saül en fut d'abord l'instrument : il chargeait de chaînes ou faisait battre de verges ceux qui croyaient en Jésus-Christ. Dans l'ardeur de son zèle, il se rendit l'exécuteur des ordres des chefs de sa synagogue, pour aller en Syrie rechercher les nouveaux chrétiens et les conduire à Jérusalem. Jusqu'alors, mû par un fanatisme aveugle, il n'avait pas réfléchi sur les motifs dont étaient animées les malheureuses victimes de l'animadversion des pontifes. Mais lorsqu'il était en route pour Damas, et qu'il fut parvenu aux montagnes qui avoisinent la ville, une vision soudaine, le frappant d'un éclat céleste, lui fit entendre cette voix : Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu ? et lui montra en même temps Jésus-Christ, qui l'éclairait de sa lumière et l'appelait à la foi. Ebloui et atterré, on le conduisit à Damas, où un disciple de Jésus, Ananie, lui imposa les mains, éclaircit sa vue, et le baptisa.

      Saül converti, devenu un autre homme, sentit dès lors toute l'horreur de la guerre acharnée qu'il avait faite aux nouveaux chrétiens ; et on le vit tout à coup animé d'une ardeur aussi grande pour défendre la foi chrétienne, qu'il en avait montré pour la combattre. Après être resté quelque temps avec les disciples de Damas, il ne rougit point de professer Jésus-Christ devant les Juifs, dans leur synagogue, en annonçant que les prophéties étaient accomplies, que Jésus était le Christ et le Messie promis à leurs pères. Le nouvel apôtre savait parfaitement les Ecritures. Doué d'un esprit vif et pénétrant, l'éloquence, qui était en lui celle d'un homme persuadé, et surtout sa connaissance de la religion des Juifs, donnèrent d'autant plus d'autorité à ses paroles, qu'on était assuré qu'il n'avait pu changer de sentiment que par conviction et par choix. La pratique de la charité, l'âme de ses discours comme de la religion qu'il avait embrassée, acheva de lui gagner les cœurs de ceux qui l'entendaient. Ses prédications à Damas, et dans les lieux environnants, opérèrent un si grand nombre de conversions, que les principaux Juifs tentèrent de le faire arrêter ; mais les disciples le descendirent la nuit dans une corbeille hors des murs de la ville.

      L'apôtre vint à Jérusalem, où il fut présenté par Barnabé aux autres apôtres, qui d'abord avaient peine à croire à sa métamorphose, mais qui, frappés par l'éclat de sa conversion et l'efficacité de ses paroles, le reçurent comme un frère et l'envoyèrent porter la foi à Tarse, dans son propre pays. Saint Barnabé vint l'y trouver, et l'emmena à Antioche, qui devint illustre par l'Eglise de ce nom, dont les fidèles furent appelés chrétiens, en l'an 43 de Jésus-Christ. Une sublime vision que l'apôtre eut à Antioche, où il fut, dit-il, ravi en esprit, et vit et entendit ce qu'aucun mortel ne peut ni figurer ni exprimer, paraît dater de l'époque de sa promotion à l'apostolat. Malgré cette exaltation de son esprit, il se plaint des affections terrestres qui le rabaissaient, et qui lui faisaient, suivant son expression, réduire son corps en servitude (Bible Louis Segond">I Corinthiens, 9). Il travaillait des mains pour vaincre son amour-propre, et ne pas se laisser amollir par l'oisiveté, autant que pour exercer sa charité et sa patience. Mais la sage médiocrité qu'il recommandait et pratiquait en même temps montre que son humilité n'était point celle d'un philosophe cynique ; et sa modestie ne se refusait pas aux secours et à l'hospitalité qui lui étaient offerts, à lui et a ses disciples (Bible Louis Segond">Epître aux Philippiens, 4).

      Les détails et la suite des voyages dont toute sa vie apostolique se compose, et que décrivent les Actes des apôtres, nous offrent une infinité de faits, parmi lesquels nous ne pouvons que nous borner aux plus marquants, comme à ceux des séjours principaux qui ont donné lieu à ses discours et à ses épîtres, dont les monuments nous sont restés. Sa première mission en quittant Antioche fut d'aller à Paphos, dans l'île de Chypre, dont Sergius Paulus était gouverneur pour les Romains. Un Juif magicien, Elymas, ayant voulu détourner le proconsul d'entendre la prédication de celui que sa réputation avait précédé, fut foudroyé par les paroles de l'apôtre, et, frappé d'aveuglement, il ne put empêcher la conversion du proconsul. C'est à cette occasion que saint Luc donne à l'apôtre le nom de Paul, soit comme dénomination romaine, soit comme marque d'affection envers le gouverneur de ce nom. Saint Paul ne fit que passer dans sa mission en Chypre et alla porter l'Evangile à Antioche de Pisidie, ville peuplée de Juifs et de Gentils, auxquels la foi n'avait pas encore été prêchée. Saint Paul, à qui Barnabé cédait partout la parole, annonça d'abord aux Juifs le Christ ressuscité, comme le Messie promis par David, en rejetant sur ceux de Jérusalem la mort de Jésus, prédite par les prophètes. L'affluence des auditeurs pour recevoir sa parole était telle, qu'un concours de Gentils venait l'entendre jusque dans la synagogue. Mais plusieurs des Juifs, zélateurs de leur loi, soulevèrent contre lui les principaux de leur secte, et les apôtres, forcés de se retirer, secouèrent la poussière de leurs pieds et quittèrent cette cité inhospitalière. C'est de cette époque (en 45) que date la prédication de l'Evangile aux Gentils.

      Cependant Paul ne se rebuta point. A Icone, dans la Lycaonie, il se montra encore dans la synagogue, et il fit des prosélytes chez les Juifs comme chez les Gentils : on croit que sainte Thècle fut du nombre et le premier martyr de son sexe. Mais il s'y forma deux partis : les Jujfs opposants et les Gentils prévenus suscitèrent les magistrats contre Paul et Barnabé, qui, après avoir été d'abord honorés comme des dieux par le peuple, témoin de la guérison d'un perclus d'après les prières des apôtres, faillirent être lapídés à la suggestion des Juifs et périr du même supplice dont Etienne avait été victime. Accablé de maux qui passaient, comme il le dit, la mesure de ses forces, chargé de coups, traîné de prison en prison, exposé à mille dangers, essuyant toutes sortes de mauvais traitements, saint Paul déployait partout une égale constance de caractère que soutenait le zèle de sa foi : et bien qu'il fût revenu d'Asie après de nouvelles traverses à Antioche de Syrie, il en repartit plusieurs fois jusqu'au concile de Jérusalem pour aller prêcher l'Evangile dans la Pamphilie, la Macédoine et jusqu'en Illyrie : c'était avant qu'il eût écrit ses premières épîtres, où il détaille ses souffrances et ses travaux, c'est-à-dire dans le temps dont saint Luc a tracé l'histoire, quoiqu'il n'énumère point tous les voyages que saint Paul paraît désigner dans ses Epîtres.

      A mesure que la loi évangélique s'étendait, un nouveau sujet de trouble naissait de ce que des chrétiens qui avaient été pharisiens prétendaient soumettre préalablement les Gentils qui se convertissaient à la circoncision et aux observances prescrites par la loi de Moïse. L'autorité déjà puissante de saint Paul, se déclarant en faveur de l'affranchissement de cette loi par l'Evangile, n'empêcha point qu'il ne crût devoir se rendre à Jérusalem pour en conférer avec les apôtres et les anciens disciples. Le concile de Jérusalem, en décrétant la liberté évangélique, décida ce point important qui sépare l'ancienne loi de la nouvelle, sauf la faculté de pratiquer, suivant les convenances, quelques-unes des observations de la loi, jusqu'à l'entier établissement du christianisme. C'est ce qui fit refuser par saint Paul, comme n'étant pas nécessaire, la circoncision à Tite, pour ne pas choquer les Gentils, et au contraire accorder, comme n'étant pas mauvaise, à Timothée, afin de gagner les Juifs. S'il reprit postérieurement saint Pierre à Antioche, c'est parce que cet apôtre, en vivant d'abord avec les Gentils, en judaïsant ensuite devant eux, les scandalisait en leur donnant lieu de croire à la nécessité des observances judaïques ; ce qui était contraire à l'esprit comme à la décision du concile. Saint Paul exposa devant les apôtres à Jérusalem la doctrine qu'il avait prêchée. Ils reconnurent et confirmèrent sa vocation à l'apostolat des nations, et tous se donnèrent la main pour marquer l'unité de communion entre eux.

      Après son retour à Antioche, saint Paul, dans de nouveaux voyages, s'adjoignit Timothée, l'un de ses plus fidèles disciples. Ayant porté l'Evangile chez les Galates, dont il fut parfaitement accueilli, il passa en Macédoine avec saint Luc, qui en parle comme entrant alors en société avec lui et qui fut depuis son historien particulier, comme Timothée fut son secrétaire intime. Arrivé à Philippes, colonie romaine de la Macédoine, il logea chez une dame qui lui devait sa conversion, et il délivra une esclave de l'obsession dans laquelle ses maîtres la retenaient. Ce fut le prétexte d'une émeute suscitée contre saint Paul et ses disciples, qui, par l'ordre des magistrats, furent battus de verges et chargés de fers. Mais les portes de sa prison, dont le geôlier se convertit, s'étant ouvertes, il sortit librement de la ville, en déclarant sa qualité de citoyen romain ; et il y laissa des amis, qui firent, à leur tour, de nouveaux chrétiens, et lui restèrent constamment attachés.

      Malgré ce qu'il avait souffert chez les Philippiens, il se rendit dans la métropole de la Macédoine, et ses lettres aux Thessaloniciens, qu'il aimait paternellement, prouvent les fruits que ses prédications produisirent parmi eux. Aussi les Juifs, indignés de ses succès, persécutèrent-ils Jason et d'autres chrétiens notables qui l'avaient accueilli, et qui ne furent laissés libres que sous caution de le représenter. Cependant, conduit de nuit hors des murs, mais poursuivi de ville en ville, il s'embarqua pour Athènes, comme le rendez-vous des lumières et en même temps le foyer de la superstition. Livrée au polythéisme et à l'idolâtrie, elle avait néanmoins un temple avec un autel dédié au Dieu inconnu, par lequel Lucien semble désigner le Dieu des Juifs adoré par les chrétiens. Saint Paul, frappé par cette vue, et animé encore plus par le zèle de la vérité, se mit à prêcher non seulement au peuple athénien, mais aux épicuriens et aux stoïciens, le Dieu inconnu, qui était nouveau pour les premiers, incommode ou étranger aux seconds, importun pour les derniers. Bientôt il fut conduit par eux à l'Aréopage, afin de rendre compte de sa doctrine, bien plus opposée au culte des dieux que ne l'était celle des philosophes qui avaient été punis pour l'avoir combattu. Notre sage apôtre ne fut point ébranlé : sans choquer les juges, ni rabaisser les objets de la vénération publique, il profita de la circonstance de l'érection d'un autel au Dieu inconnu pour leur manifester le Dieu qu'ils adoraient sans le savoir. Il établit ainsi « l'existence d'un Dieu créateur du ciel et de la terre, qui n'habite pas matériellement les temples, qui a formé d'un seul toute la race des hommes, et leur a ordonné de le chercher pour le connaître. Il les nomme les enfants de la Divinité, d'après le poète même, et conclut qu'il est indigne d'eux de faire Dieu semblable à l'or ou à l'argent, et inférieur aux hommes mêmes, dont il est l'auteur. Il les engage à se repentir de l'avoir méconnu et à se le rendre agréable, en recevant le nouveau bienfait de sa grâce, par le mérite du Christ descendu sur la terre pour les réconcilier avec Dieu. » Les Athéniens, avides de nouveautés, entendirent avec empressement, et plusieurs même, en dépit des philosophes, reçurent la doctrine du Christ mort et ressuscité. Un juge de l'Aréopage, entre autres, Denys, depuis premier évêque d'Athènes, se convertit.

      Mais saint Paul, pressentant l'inconstance de ce même peuple, après quelques mois, vint à Corinthe, la métropole de la Grèce. Il y remplit plus fructueusement l'œuvre de son ministère, mais en y joignant le travail des mains pour ne pas être à charge aux Corinthiens et pour leur donner un exemple utile, ou du moins désintéressé. A force de patience et de douceur, il les conquit à la religion, et y fonda (en 52) l'église de Corinthe, qui le retint assez longtemps. C'est de là qu'il écrivit ses premières Epîtres, celles dans lesquelles il témoigne aux Thessaloniciens sa tendresse et son estime pour leur foi constante, et surtout pour la charité qu'ils exerçaient envers tous les chrétiens de la Macédoine. Il eut plus de peine, dans une ville de luxe telle que Corinthe, à combattre par ses discours les mœurs cyniques, en y recommandant la modestie aux femmes, la décence aux hommes, et à tous les vertus évangéliques. Les progrès de ses prédications, plus encore que sa sévérité, tempérée par sa modération, lui suscitèrent de nouveaux ennemis et principalement parmi les Juifs, quoiqu'il s'efforçât de les gagner eux-mêmes, en montrant qu'il honorait leur loi, dont il eût voulu faire les obsèques de concert avec eux. Toujours opiniâtres et jaloux, ils se saisirent de Paul, et le menèrent devant le proconsul Gaillon. Mais le frère de Sénèque déclara qu'il ne se mêlait point de leurs contestations, et les renvoya.

      Plus sensible à leur dureté qu'aux mauvais traitements, saint Paul quitta Corinthe et s'embarqua pour Jérusalem, où il remit les aumônes destinées aux chrétiens pauvres on dépouillés de leurs biens. De la, il vint séjourner quelques années à Ephèse, où, par beaucoup de patience et de zèle, et en confirmant sa mission par des miracles de bienfaisance, à l'imitation de Jésus-Christ, il fonda (de 53 à 56) cette église que l'apôtre saint Jean devait dans la suite élever et affermir. Il prêcha de nouveau, mais vainement, aux Juifs, qui restèrent la plupart attachés à leur loi. Les Gentils étaient plus dociles à la voix de Paul ; il les eût arrachés facilement à l'idolâtrie, s'il n'eût eu à combattre, à Ephèse, une philosophie superstitieuse, qui, par ses illusions, en imposait au vulgaire. Philostrate, si on l'en croit, y place notamment à cette époque Apollonius de Tyane. Saint Paul, dévoré du zèle de la vérité, non seulement prêchait en public chez les Ephésiens, mais il leur faisait des exhortations particulières en joignant les supplications et les larmes à ses instructions. C'est par l'effet de cette prédication devenue célèbre, et qui a été l'objet du pinceau sublime du Raphaël français (Voyez Lesueur), que les Ephésiens, adonnés à l'astrologie et à la magie, apportèrent publiquement leurs livres et les jetèrent dans les flammes. On vit aussi une foule de chrétiens venir confesser publiquement leurs fautes aux pieds de l'apôtre. Il paraît avoir écrit d'Ephèse (en 56) son Bible Louis Segond">Epître aux Galates, où, après s'être justifié du reproche d'avoir blâmé la trop grande condescendance envers les Juifs qui sobstinaient à vouloir imposer aux Gentils le joug de leur loi, il défend l'esprit de l'Evangile et son propre apostolat contre ces mêmes Juifs, qui troublaient la Galatie, en cherchant à semer la division entre les nouveaux chrétiens. Ce fut la même année qu'il adressa d'Ephèse et, un an après, de la Macédoine ses Lettres aux Corinthiens, dont l'Eglise était troublée par les divisions des chrétiens, les uns s'attachant de préférence à Pierre, les autres à Paul et même à Apollon, son disciple. Il leur retrace et développe, en leur envoyant Tite, les règles de la charité chrétienne et de la concorde, dont les apôtres, par leur bonne union, malgré quelques dissentiments passagers, leur avaient donné l'exemple. Il y relève avec une éloquence vive et forte ce véritable esprit de la loi évangélique, qui la distingue des pratiques de la loi judaïque avec lesquelles la malveillance, auteur de ces troubles, affectait de confondre les préceptes du christianisme.

      Saint Paul ne quitta lui-même Ephèse que dans cet esprit de paix, lors d'une sédition excitée contre lui par la cupidité des artisans qui fabriquaient et vendaient des figures de la Grande Diane aux étrangers attirés à Ephèse par la célébrité de son temple. Craignant la ruine de ce genre d'industrie, les ouvriers s'étaient ameutés en foule, ayant à leur tête l'orfèvre Démétrius. Mais les magistrats redoutaient bien davantage les suites d'un mouvement dirigé contre la multitude des chrétiens, encore plus nombreuse. La sédition s'apaisa par le départ de Paul. De la Macédoine, où il passa, il vint de nouveau à Corinthe, en l'an 58, et de là il écrivit sa Lettre aux Romains. Cette épître, quoique écrite après plusieurs autres, a été placée la première dans le canon, par son importance pour la doctrine. Il y traita la question si les Juifs avaient été admis à recevoir l'Evangile en vertu des œuvres de la loi, ou s'ils avaient été justifiés, ainsi que les Gentils. par la seule grâce de Jésus-Christ. Son but était surtout de terminer les disputes qu'élevaient les chrétiens circoncis, à Rome comme ailleurs, contre les Gentils qui, pour s'affranchir de l'ancienne loi que les Juifs convertis prétendaient devoir précéder la nouvelle, leur opposaient les lumières de la philosophie dont ils avaient été éclairés. Saint Paul leur prouve que ni la loi des Juifs ni la philosophie des païens n'opéraient la justification, qui vient de la foi animée par la charité. Le sujet élevé de sa Lettre, sous le rapport du mérite des œuvres, en exerçant la sagacité des commentateurs, a présenté d'autant plus d'obscurités, que, s'appuyant de part et d'autre sur saint Augustin, qui n'avait pas osé lui-même commenter cette épître, on a tenté de l'expliquer à l'aide de ses écrits sur la grâce ; mais on n'a point considéré que les motifs de l'apôtre sont principalement circonscrits dans la question relative aux disputes des Juifs et des Gentils ; et l'esprit d'union qu'il recommande comme étant l'effet de l'uníté de sentiments et l'objet de la religion du Christ, eût dû prévenir toute dispute générale à ce sujet.

      Après avoir parcouru les provinces d'Orient pour y prêcher l'Evangile, saint Paul se proposa de retourner d'abord à Jérusalem pour y porter de nouveau les aumônes qu'il avait recueillies, de passer ensuite à Rome pour visiter l'Eglise que Pierre y avait établie, et enfin d'aller jusqu'en Espagne pour y annoncer la foi. Mais les divisions entre les fidèles de cette Eglise lui avaient fait, en attendant, écrire à ses frères de Rome, dont il nomme et salue les plus notables, Hérodion son parent, Aristobule. et la famille de Narcisse (peut-être l'affranchi de l'empereur Claude) ; et il leur demande l'assistance morale de leurs prières contre les tribulations qu'il s'attend à essuyer à Jérusalem de la part des Juifs, dont il n'avait cessé de déclarer la loi comme étant superflue depuis la publication de l'Evangile. Saint Paul célébra, en partant, la Pâque, avec ses chers Philippiens, rompit à Troade le pain eucharistique avec les fidèles, fit à Milet ses exhortations aux anciens d'Ephèse, et, à Tyr ainsi qu'à Césarée, ses adieux aux chrétiens, qui le détournèrent en vain d'aller à Jérusalem. Rendu dans cette ville aux fêtes de la Pentecôte, et voulant, d'après le conseil de l'apôtre saint Jacques, détruire l'opinion que lui et ses disciples traitaient de sacrilèges les cérémonies judaïques, il fit lui-même au temple les oblations prescrites par la loi. Mais, comme il était accompagné de quelques étrangers convertis qui l'avaient suivi, des Juifs d'Asie l'accusèrent de dogmatiser contre cette loi, et de profaner le lieu saint. A leurs clameurs, il fut traîné hors du temple et battu par la multitude, qui voulait le mettre à mort. Mais le tribun Lysias l'arracha des mains des furieux, et, pour apaiser le peuple, le fit détenir à la forteresse Antonia, gardée par la cohorte romaine. Amené devant le tribun, saint Paul, accusé par le grand prêtre des Juifs, et même souffleté, ne répondit à cette violence qu'en faisant avec dignité et avec douceur l'apologie de sa conduite, et en même temps de sa croyance à la résurrection future, qui était celle de la secte à laquelle il avait appartenu, ainsi que son père. Les pharisiens présents s'étant alors déclarés pour lui, et saint Paul invoquant la qualité de citoyen romain qui lui était acquise par son origine, Lysias, après avoir révoqué l'ordre de le torturer, et voulant le soustraire aux mains des Juifs, le fit conduire à Césarée, où résidait Félix, gouverneur de Judée. Le grand prêtre renouvela devant Félix son accusation contre l'apôtre, qu'il signala comme profanateur séditieux et comme chef de la secte des nazaréens, qualification que les Juifs donnaient aux chrétiens. Saint Paul, sans désavouer ce titre, et sans se plaindre des outrages du pontife, se justifia noblement des griefs qu'on lui imputait. Cependant il fut retenu deux ans en prison, par ménagement pour les Juifs. Festus ayant succédé à Félix, en l'an 60, les pontifes demandèrent la mise en jugement de Paul ; mais ne pouvant le faire condamner pour contravention à leur loi, ils l'accusèrent de crime d'Etat, ainsi qu'ils en avaient agi à l'égard du Christ (Voyez Jésus). L'apôtre fut donc traduit devant Ie tribunal du gouverneur. Là, saint Paul se défendit si fortement contre ses accusateurs, que Festus, n'osant le mettre en liberté, vu l'opposition des Juifs, prétexta une plus ample information, et proposa de le renvoyer pour être jugé à Jérusalem. Mais saint Paul, qui se devait à l'Eglise entière, afin de n'être pas livré entre les mains de ses ennemis, en appela à l'empereur. Sur ces entrefaites, le roi Agrippa, étant venu à Césarée, désira entendre l'illustre prisonnier. Une nouvelle comparution eut lieu. Saint Paul en profita non seulement pour sa défense, mais pour l'instruction d'Agrippa lui-même et de Festus. Lorsqu'il parla de Jésus-Christ ressuscité d'entre les morts, le gouverneur s'écria : Paul, vous avez perdu l'esprit. Mais, malgré cette interpellation, Paul ayant continué son éloquent discours, Agrippa finit par lui dire : Je pense que vous voudriez presque me persuader de me faire chrétien ; à quoi saint Paul répondit d'un ton serein et animé : Plût à Dieu que vous, seigneur, et tous ceux qui m'écoutent devinssiez tels que je suis, à la réserve de ces liens ! Le prince ne put s'empêcher d'avouer à Festus que, sans l'appel du prisonnier à César, on eût pu lui donner la liberté.

      Saint Paul fut confié à un centurion romain, et embarqué d'abord sur un vaisseau d'Adramytte avec saint Luc et ses autres disciples. Contrariés par les vents, ils côtoyèrent l'île de Chypre et, traversant la mer, arrivèrent en Lycie, où ils prirent un vaisseau d'Alexandrie qui allait en Italie. Le vent continuant de leur être contraire, ils cherchèrent à gagner l'île de Crète, qu'ils longèrent pour atteindre le port de Phénice. Mais un vent d'Orient, s'étant élevé, les porta avec violence au sud-ouest de Candie. On abaissa les mâts, et l'on jeta les marchandises à la mer. Après avoir erré quatorze jours au gré de la tempête et dans la détresse, le vaisseau échoua sur la côte d'une île de la mer Adriatique, nommée Mélina (Bible Louis Segond">Actes des Apôtres, 28), et qu'on croit être l'île de Malte. Le nom d'Adriatique s'étendait alors à toute la mer qui borde l'Italie et la Sicile (Adriæ curvantis Calabros sinus, dit Horace) ; et le rhumb de vent (l'Eurus) qui poussait le vaisseau, ainsi que la direction ultérieure de la route à Syracuse et à Rhegium (Reggio), permettent difficilement de croire, comme quelques critiques l'ont pensé (Voyez Ladvocat), qu'il faille entendre l'île de Mélite, sur la côte de Dalmatie, et moins encore, ainsi qu'on lit dans une épître de saint Jérôme, une île de Mitylène, qui est une ville de l'île de Lesbos.

      Saint Paul et les compagnons de son voyage furent bien accueillis à Malte. Tandis qu'il se séchait au feu, une vipère, sortie des sarments, lui mordit la main. Il se contenta de secouer l'animal ; et quoiqu'on sût que le venin de la piqûre était mortel, il ne lui en arriva aucun mal ; ce qui remplit ses hôtes d'étonnement et de vénération. Publius, l'un des principaux de l'île, offrit à saint Paul et aux siens l'hospitalité, que les apôtres reconnurent par le bienfait de la parole évangélique. Aussi furent-ils pourvus par les Maltais de tout ce qui était nécessaire pour la suite de leur voyage ; et ils s'embarquèrent, après l'hiver, sur un autre vaisseau d'Alexandrie.

      Saint Paul fit route de Malte à Syracuse, puis à Reggio, d'où ayant abordé à Pouzzoles, il se rendit à Rome, où il fit son entrée, chargé de chaînes et joyeux, au milieu du cortège des chrétiens qui étaient venus courageusement au-devant de lui. Remis au préfet du prétoire par le centurion, il fut permis à Paul de prendre un logement, et on lui donna une garde, plutôt pour sa sûreté que par précaution. Quoique traînant ses liens, et sous le poids d'une accusation, il ne laissa pas de prêcher hautement l'Evangile, soit en donnant chez lui ses instructions, soit en allant les répandre jusque dans la cour du prince, où, avec la réputation de l'apôtre, avait pénétré la foi. On a supposé qu'il avait eu des liaisons avec Sénèque ; mais les lettres sur lesquelles on s'est appuyé sont loin d'être authentiques. Les philosophes de la cour ne furent pas ceux qui prirent intérêt au généreux prisonnier, quoique à Rome et au loin on s'intéressât à son sort. Les chrétiens de Macédoine, qui ne cessaient de lui être affectionnés, informés de sa captivité, lui envoyèrent des secours et des consolations. il remit à leur envoyé une Bible Louis Segond">Lettre pour les Philippiens. En reconnaissance de leurs soins, il demande que le fruit de ses liens soit l'affermissement de leur foi contre toute doctrine qui tendrait à les diviser, et il les exhorte à continuer de vivre fraternellement unis en Jésus-Christ. La fin de sa lettre où il leur dit : « Tous les saints vous saluent, et principalement ceux qui appartiennent à la maison de César, » prouve qu'il y avait des chrétiens dans le palais même de Néron, qui régnait alors. Parmi les quatorze lettres qui nous restent de saint Paul, presque toutes sont adressées collectivement aux chrétiens des différentes Eglises. Mais son zèle pour la charité lui fit écrire en particulier à l'un des principaux habitants de Colosses, qui avait fait de sa maison une église par sa piété et son hospitalité. Il sollicite de Philémon la grâce de son esclave Onésime, converti à la foi, et repentant de l'infidélité commise envers son maître. Onésime, rentré en grâce, fut chargé d'une Bible Louis Segond">Lettre aux Colossiens : de la part de l'apôtre, qui les engage à reconnaître, par leur bon esprit, la générosité de Philémon, en leur recommandant de conserver la pureté de leur foi sans y mêler les opinions des gnostiques ou des disciples de Simon le Magicien, et en leur représentant Jésus-Christ comme le seul médiateur et conciliateur des hommes avec Dieu. Une autre Bible Louis Segond">Lettre qui est adressée au Ephésiens paraît dater de la même époque. Elle a pour objet le même point de doctrine, et s'étend davantage sur les effets de la rédemption, et en particulier sur la vocation et la réunion des Gentils et des Juifs. Saint Paul n'oubliait point ceux de sa nation, dont il avait la conversion à cœur. On croit qu'il écrivit, vers l'an 63, sa Bible Louis Segond">Lettre au Hébreux, c'est-à-dire aux Juifs convertis de la Palestine, pour fortifier leur foi contre la persécution des autres Juifs. Cette longue épître, la dernière dans l'ordre des canons, ne porte ni le nom de saint Paul, ni son titre d'apôtre, et quoique en grec, comme les autres lettres, elle ne paraît pas du même style. Eusèbe pense qu'elle a été écrite dans la langue syriaque que les Juifs parlaient alors, et traduite par l'un des disciples de l'apôtre. Origène donne à entendre qu'elle a pu être, sur les instructions de saint Paul, originairement rédigée en grec par saint Luc, vu la conformité du style avec celui des Actes, et la citation des passages suivant les Septante. Quoi qu'il en soit, l'élévation des idées et le caractère d'autorité qu'elle présente confirment la tradition ancienne de l'Eglise, soit romaine, soit grecque, qui la donne à saint Paul. Les ariens seuls des temps postérieurs la rejetaient, contre l'autorité de l'Eglise, à cause de la force avec laquelle la divinité de Jésus-Christ y est prouvée, soit par l'accomplissement des prophéties, soit par l'élévation du sacerdoce de Jésus-Christ, mis autant au-dessus de celui de Moïse et des autres patriarches, dans cette épître, que la loi nouvelle l'est, comparativement à la loi ancienne, dans l'Bible Louis Segond">Epître aux Romains. L'annonce faite aux Hébreux de la liberté de Timothée et de la visite prochaine de l'apôtre, qui les salue de la part de ses frères d'Italie, montre que saint Paul, s'il était à Rome, n'était plus lui-même dans les liens dont il parlait précédemment, et qu'il s'était alors justifié.

      Les Actes des apôtres ne le suivent pas plus loin. Selon Théodoret et saint Chrysostome, il retourna en Orient (vers 64), laissant Tite à Candie, et Timothée à Ephèse. Son dessein d'aller en Espagne, d'après sa Bible Louis Segond">Lettre aux Romains, ne paraît pas s'être accompli. Aucun vestige, aucune tradition ancienne ne s'y conserve ; non plus que dans les Gaules, où le saint Crescent de Vienne, qui n'est pas antérieur à saint Irénée (Voyez le Gallia christ.), ne saurait être celui de Galatie, disciple de saint Paul. Le soin d'affermir les églises de Grèce et d'Asie l'occupait. Ce lut dans un voyage qu'il fit en Macédoine, qu'on croit qu'il écrivit sa Bible Louis Segond">première Lettre à Timothée et sa Bible Louis Segond">Lettre à Tite, pour régler leur conduite comme ministres. Il instruit, par ces lettres, tous les pasteurs, tant dans leurs fonctions que dans leur vie privée.

      Après avoir rempli l'objet de ses voyages, mais non sans essuyer de nouvelles persécutions, il ne craignit pas de retourner à Rome, où l'attendait sa dernière captivité, suite du zèle extraordinaire qu'il y déploya. Selon Denis de Corinthe, il s'y trouva en même temps que saint Pierre, auquel il se joignit pour prêcher la morale évangélique. La cour de Néron était alors livrée à tous les désordres. Saint Chrysostome nous apprend que, saint Paul ayant voulu, par ses exhortations, détacher une femme du commerce avec Néron, qui la convoitait, ce prince irrité le fit arrêter. L'apôtre continua d'instruire, de la prison, cette femme, qu'il convertit, ainsi qu'un officier de la cour ; ce qui ne fit qu'aggraver ses fers. Dans la Bible Louis Segond">seconde Lettre à Timothée. qu'il écrivit, à ce que l'on présume, de sa nouvelle prison, il annonce qu'il avait comparu devant le prince, et que tous ses amis, hors saint Luc, l'avaient quitté. Saint Chrysostome, qui dépeint admirablement la comparution de l'apôtre chargé de chaînes devant Néron, nomme cette dernière lettre le testament de saint Paul. Dans la même épître qui s'adresse, en la personne de Timothée, à toutes les églises d'Asie, après avoir donné en quelque sorte le complément de la doctrine qu'il avait annoncée, et fini par tracer aux chrétiens les règles à suivre pour s'y conformer, il semble pressentir son martyre ; il dit à Timothée : « Je suis comme une victime à qui le prêtre a donné l'aspersion avant de l'immoler... Je n'ai plus qu'à attendre la couronne de justice qui m'est réservée. »

      La palme du martyre ne pouvait manquer à la gloire du plus courageux disciple de Jésus-Christ, sous le plus cruel persécuteur des chrétiens et de l'humanité. Quelques-uns des Pères rapportent que, Simon le Magicien ayant prétendu s'élever dans les airs en présence de Néron, la chute de l'imposteur, attribuée aux prières de saint Pierre et de saint Paul, détermina le supplice des deux apôtres, qui, suivant l'autorité et la tradition anciennes, auraient été martyrisés en même temps, en l'an 65, et le 3 des calendes de juillet (29 juin), jour où l'Eglise célèbre leur mort. Tillemont la place en 66, lors de l'absence de Néron, et Pearson, en 68, qui est l'époque de la fin tragique de cet empereur. Selon la plupart des anciens Pères et historiens, saint Paul, en sa qualité de citoyen romain, eut la tête tranchée. Il reçut la mort au lieu appelé Eaux Salviennes, et fut enterré sur le chemin d'Ostie, où Grégoire le Grand fit construire une église du nom du saint, qui conserve une partie des corps des deux apôtres ; l'autre partie est à la basilique de St-Pierre. Leurs chefs se trouvent réunis à celle de St-Jean de Latran.

      Nicéphore, qui a tracé un portrait de saint Paul, le représente comme étant de petite stature, et ayant le nez aquilin et la tête chauve. L'ancienne tradition le dépeint ainsi. Il était digne de l'auteur déjà cité du tableau de la Prédication de saint Paul, en nous montrant la physionomie animée de l'apôtre, de donner à sa figure l'apparence de la stature héroïque, de même qu'il appartenait au grand peintre de l'idéal, le Poussin, d'exprimer cette joie rayonnante, sur ce front élevé, dans le Ravissement de saint Paul, désigné en particulier, d'après la tradition, par l'accessoire symbolique d'une épée, figurant l'ardeur militante de son zèle. Un témoin contemporain respectable, saint Clément pape, a signalé en quelques mots le caractère de saint Paul, qu'il nomme « le plus grand exemple de patience, de vertu et d'éloquence donné aux différentes contrées du monde, dans un intervalle de trente années ».
      Saint Paul a aussi écrit plus éloquemment, plus longtemps et beaucoup plus qu'aucun autre apôtre pour l'édification des peuples qu'il a visités ou instruits par lui-même ou par ses nombreux disciples. C'est cette prééminence qui l'a fait nommer par excellence l'Apôtre en citant ses épîtres, lesquelles précèdent, dans l'ordre canonique, celles de saint Pierre, de saint Jean et d'autres apôtres. Aucun monument, après l'Evangile, n'est plus cité et n'a été plus commenté par toutes les communions chrétiennes, que ses épîtres, qui sont elles-mêmes le plus riche et le plus éloquent commentaire de l'Ecriture. Nous ne pourrons donner une idée plus caractéristique de l'esprit et de l'éloquence de leur auteur qu'en rapportant ce qu'en témoigne saint Chrysostome, qui l'avait tant étudié, et qui le connaissait si bien : « Les discours de saint Paul, dit ce Père, ne sont point préparés avec art : il n'assujettit point l'Evangile aux lois de la grammaire ou de la dialectique ; mais il raisonne avec justesse, en employant une vérité connue, pour conduire à des conséquences inconnues. Il sait étendre ou resserrer son discours ; adoucir, exciter ses mouvements ; presser, encourager, captiver, étonner ses auditeurs, à son gré. On peut dire qu'il possédait le fond et en quelque sorte la moelle de l'éloquence, et qu'il ne lui manquait que l'écorce ou la superficie du langage. Accablé, comme il l'était, de travaux, et fatigué par les voyages, comment aurait-il trouvé le loisir de choisir, de ranger, de polir ses paroles ? D'ailleurs, dans le langage humain, il ne trouvait point de terme qui pût exprimer la hauteur de ses pensées. Son grec n'est point pur ; souvent la construction est hébraïque, et la phrase n'est point achevée : il faut chercher la suite d'une période dans le mouvement de la pensée ou du sentiment. Ses paroles partent du cœur. Saint Paul dictait rapidement, suivant l'impétuosité de l'esprit divin qui l'animait : la lumière dont il était plein ne cherchait qu'à s'épancher et à se répandre au dehors. » Ces traits, quoiqu'ils s'appliquent plus spécialement à ses Epîtres aux Corinthiens, où respire si vivement l'ardeur de la charité qui animait sa foi, conviennent généralement à toutes ses épîtres, et se modifient selon le plus ou moins d'élévation et de profondeur dans les Epîtres aux Romains et aux Galates, etc., ou de tendresse et de bonté dans les lettres particulières à Timothée, à Tite, etc. En général, les épîtres de saint Paul, dans un style sans parure et sans art, mais simple et clair, fort et touchant, élevé et abstrait, selon le sujet, développent et renferment toute la religion des Evangiles, ses mystères et sa morale. Les dogmes de la foi chrétienne s'y trouvent établis ou confirmés ; et, ce qui est surtout bien important dans la pratique, les devoirs communs à tous les chrétiens y sont nettement exposés, ainsi que les devoirs propres et respectifs de chaque condition et de chaque état, relativement à Dieu, au prince et à la société (1).


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(1)  On sait que dans ces derniers temps la critique allemande, examinant les livres de la Bible avec autant d'indépendance que s'il s'agissait des écrits d'Homère ou de Cicéron, a contesté l'authenticité de diverses épîtres de saint Paul, ou en a donné des explications qui s'écartent complètement de celles qui dominaient dans les siècles passés. Nous sortirions tout à fait du cadre dans lequel nous devons nous renfermer si nous abordions ce sujet délicat, si nous voulions exposer les aperçus de Paulus, de Baur et de l'école rationaliste, mais nous devons une mention au grand travail de K.Schader, l'Apôtre Paul (Leipsick, 1830-l834), divisé en 4 volumes ; les deux premiers sont consacrés à la vie de l'apôtre, le troisième à l'exposition de sa doctrine, le quatrième à ses épîtres. Les Horæ Paulinæ, de l'Anglais W. Palcy, sont un travail savant et judicieux en faveur de l'authenticité de l'histoire de l'apôtre. On estime l'ouvrage de Conybeare et Howson : Vie et épîtres de saint Paul, Londres, 1850, 2 vol. in-4°. On trouvera d'ailleurs dans la Bibliographie biographique de M. Œttinger, et dans le Dictionnaire de la littérature théologique de Dunz, l'indication de nombreux écrits sur la vie et les épîtres de saint Paul ; nous nous contenterons de mentionner quelques-unes de ces monographies dans lesquelles l'érudition allemande se plaît à épuiser un sujet qu'elle tourne sous ses divers points de vue, en accumulant les citations qu'il peut fournir : S. Peterson, De cæcitate Pauli, Lund, 1790, in-4° ; J. Weber, De verisimili Pauli in Hispania martyrio, , 1787, in-4° ; J.-G. Altmann, Exercitatio in quæstionem : An Paulus apostolus Ephesi cum bestiis pugnaverit, Bâle, 1782 ; S.-G. Eberhardt De Initinitate S. Paulina, 1763; G. Kirchmayer, De jurisprudentia Paulina, Wittenerg, 1780.  (Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 32 - Pages 273-279)



Dictionnaire universel d'histoire et de géographie de Bouillet

       Marie-Nicolas Bouillet, Dictionnaire universel d'histoire et de géographie, 20ème édition (1866), p. 1444.




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