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Saint Clément d'Alexandrie

(Titus Flavius Clemens)
(v. 150, à Athènes ou Alexandrie - v. 215 / 217, en Cappadoce)
Docteur de l'Eglise - Non inscrit au martyrologe romain, mais fêté en France le 04 décembre
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Biographie universelle ancienne et moderne

      Saint Clément d'Alexandrie (Titus Flavius Clemens), saint et docteur de l'Eglise, vécut vers la fin du IIème siècle, et dans les premières années du IIIème. Il naquit (1) dans le sein du paganisme, mais à une époque où ce culte ne se soutenait plus que par sa longue prescription. Clément fit ses premières études à Athènes ; il les continua en Italie et dans l'Asie Mineure, et vint les achever dans la capitale de l'Egypte, école célèbre, où, de toutes les parties de l'empire, on venait étudier l'éloquence et la philosophie platonicienne ; mais ces sciences avaient bien dégénéré depuis les siècles de Périclès et d'Auguste. Les écoles d'Alexandrie, comme celles de Rome et d'Athènes, étaient abandonnées aux déclamateurs et aux sophistes ; les uns occupés à vendre des éloges aux flatteurs ; les autres enfoncés dans de vaines disputes de mots. Clément ne tarda pas à se dégoûter de la subtilité des uns, et de la bassesse des autres. Une éloquence nouvelle commençait à s'élever avec une nouvelle religion. Des hommes qui semblaient au-dessus des faiblesses humaines, et indifférents aux grandeurs du monde ; qui, sans cesse menacés ou du mépris ou de l'échafaud, trouvaient dans leurs persécutions mêmes la source d'une énergie toujours croissante, et dans leurs opinions, des lumières supérieures à celles qui avaient éclairé Platon, Démosthène et Cicéron, fixaient alors l'attention des sophistes, qui les redoutaient ; des empereurs, auprès desquels on les calomniait sans cesse ; et des sages, qui cherchaient de bonne foi la vérité. L'histoire, en nous affligeant du récit des crimes qui furent alors, comme dans tous les temps, ceux de la tyrannie, du fanatisme et de l'ambition, nous offre le contraste de tant d'horreurs, dans le portrait fidèle et avoué des héros de l'Evangile. « L'histoire, dit à ce sujet Laharpe, nous présente en eux les plus touchants modèles des plus pures vertus, nous les fait voir réunissant la dignité du caractère à celle du sacerdoce, une douceur inaltérable à une fermeté intrépide, adressant aux empereurs le langage de la vérité, aux coupables celui de la conscience, à tous les malheureux celui des consolations fraternelles. Les lettres les réclament à leur tour, et s'applaudissent d'avoir été pour quelque chose dans le bien qu'ils ont fait à l'humanité, et d'être encore aujourd'hui, aux yeux du monde, une partie de leur gloire. Elles aiment à se couvrir de l'éclat qu'ils ont répandu sur leur siècle, et se croient toujours en droit de dire qu'avant d'être des confesseurs et des martyrs, ils ont été de grands hommes ; et qu'avant d'être des saints, ils ont été des orateurs. »

      Clément, dont l'esprit naturellement juste et le cœur droit cherchaient également la lumière et la vérité, ne put entendre parler de tels hommes sans chercher à les connaître, et ne put les connaître sans les admirer. Les leçons de saint Pantène, catéchiste d'Alexandrie, achevèrent de lui dessiller les yeux sur l'extravagance du culte de ses ancêtres, et sur la supériorité des dogmes du christianisme. Il se fit baptiser, et bientôt après. il fut choisi par l'Eglise d'Alexandrie pour remplacer saint Pantène, que l'évêque Démétrius venait d'envoyer en mission dans les Indes vers l'année 191. Son zèle et ses talents le rendirent célèbre, et donnèrent à son école une vogue prodigieuse. Sn méthode consistait à instruire d'abord ses élèves de ce qu'il y avait de plus judicieux dans la philosophie païenne, et principalement dans celle de Platon, dont il avait été autrefois le partisan le plus zélé, et pour laquelle il conserva toujours un secret attachement. Il insistait ensuite d'une manière particulière sur certains points de morale communs aux deux religions, tels que les principes de la loi naturelle, la haine du crime, l'amour de la vertu, existence d'un Etre suprême, l'immortalité de l'âme, etc. ; puis il arrivait par degrés à la doctrine évangélique, dont il développait, avec ses talents ordinaires, et les avantages sur toutes les doctrines philosophiques, et l'influence immédiate sur le bonheur des hommes.

      La persécution excitée par l'empereur Sévère l'atteignit en l'an 202. Jugeant à propos de céder à l'orage, et d'épargner un crime de plus aux bourreaux des chrétiens, il abandonna son école et Alexandrie pour se réfugier en Cappadoce ; de là il vint à Jérusalem, où la crainte des persécuteurs ne l'empêcha pas de prêcher la foi avec un éclat qui pouvait lui devenir funeste. De Jérusalem il se rendit à Antioche, la ville la plus considérable et la plus peuplée de l'Orient, où le christianisme naissant avait fait beaucoup de prosélytes, mais où les sophistes avaient aussi beaucoup de partisans. Clément en parcourut toutes les églises, eut de longues et fréquentes conférences avec les principaux néophytes, éclairant les uns par l'étendue de ses lumières, fortifiant les autres par l'intrépidité de son courage, les édifiant tous par la modestie de sa conduite. Enfin, la persécution cessant, il revint à Alexandrie, où il reprit ses fonctions de catéchiste, qu'il exerça jusqu'à sa mort, arrivée en 217, sous le règne de Caracalla.

      Eusèbe, Photius, saint Jean Chrysostome et autres ont donné de grands éloges à son savoir et à sa vertu, et ces éloges nous paraissent justifiés parce qui nous reste de ses ouvrages tous écrits en grec, qui sont : Hypotyposes, ou Instructions ; on pense généralement que saint Clément composa cet ouvrage, dont il ne nous reste que des fragments, peu de temps après sa conversion, et dans un temps où, peu instruit encore des dogmes de la religion chrétienne, il crut possible de les concilier et de les arranger avec les principes de la philosophie platonicienne. Cette erreur, qui lui a été souvent reprochée, était excusable, et devait être facilement pardonnée, à cause du zèle et de la bonne foi du jeune catéchumène.

      Son Proteptricon ad gentes, ou Exhortations aux gentils, a pour objet de faire ressortir l'absurdité de leur culte par une comparaison établie et suivie avec le culte des chrétiens. Saint Clément parle, dans cet ouvrage, des dieux du paganisme, comme en a parlé un des écrivains les plus éloquents de nos jours, qui n'a pas craint de les appeler « des dieux abominables, qu'on eût punis ici-bas comme des scélérats, et qui n'offraient pour tableau du bonheur suprême que des forfaits à commettre et des passions à contenter. » L'Exhortation aux gentils, quoi qu'ayant cessé d'avoir de l'intérêt pour nous dans son objet, se fait néanmoins lire encore avec plaisir, tant par l'élégance du style que par le grand nombre de faits curieux qu'elle renferme, dont l'auteur devait la connaissance à ses voyages, et qu'il fait merveilleusement servir à l'appui de ses raisonnements. (Voyez L. Cousin.)

      Les Stromates, ou Tapisseries. C'est un recueil en 8 livres, sans méthode et sans suite, de pensées chrétiennes et des maximes philosophiques, que l'auteur parait avoir écrites au jour le jour, et destinées à lui servir de répertoire et comme de supplément à sa mémoire. Il y traite pêle-mêle divers sujets de morale, de métaphysique et de théologie. On ne peut lire cet ouvrage de suite ; mais on y trouve, comme dans tous les écrits du même auteur, des observations judicieuses et des faits importants pour l'histoire. Dans le 6ème livre, par exemple, il trace le portrait du véritable chrétien, auquel il donne le nom de gnostique, qui signifie savant ou illuminé. Il distingue dans le 7ème livre les honnêtes gnostiques des hérétiques connus sous ce nom, et qui troublaient alors l'Eglise par leur abominable doctrine sur ta communauté des femmes et l'égalité des hommes. Il explique très bien la nature et l'étendue de chaque vertu théologale. Il apprend à ne pas confondre les superstitions avec la religion, le zèle avec le fanatisme, la résignation avec l'indifférence, l'humilité chrétienne avec la bassesse des sentiments, etc. On retrouve dans les Hypotyposes le secret penchant de saint Clément pour le platonisme ; mais ceux-la même qui lui font ce reproche avouent qu'il n'y a pas un endroit répréhensible qui ne puisse être interprété favorablement.

      Quis dives salutem consequi possit ?, ou Quel riche sera sauvé ? C'est une explication des paroles que Jésus-Christ adressa à un jeune riche qui lui demandait ce qu'il fallait faire pour arriver à la perfection : « Allez, lui dit le Sauveur, vendez vos biens, distribuez-en le prix aux pauvres, et vous acquerrez un trésor dans le ciel. » Saint Clément pense que ces paroles ne doivent pas être prises à la lettre, qu'il n'est pas nécessaire, pour être sauvé, de renoncer aux biens de la terre, mais qu'il est indispensable d'en faire un bon usage ; subsidiairement il y parle de l'amour de Dieu comme principe de vie, et de l'amour du prochain comme règle de nos actions. Cet opuscule a été imprimé, Paris, 1672 ; Oxford, 1683, avec quelques autres fragments en grec et en latin ; Utrecht, avec un commentaire de C. Segaar, 1816, in-8°. Le Pédagogue est un excellent traité de morale divisé en 3 livres. L'auteur s'attache à prouver, dans le 1er livre. que le législateur des chrétiens est aussi leur père et leur modèle ; que tous les hommes, ayant besoin d'instruction pour connaître la vertu, et de vertu pour être heureux, ne peuvent puiser à une meilleure source qu'à celle des leçons de leur divin maître. Dans le 2ème livre, il trace des règles de tempérance, tant sous le rapport de l'hygiène que sous celui de la morale. Suivant sa doctrine, la nourriture la plus simple est aussi la plus saine ; mais nous doutons que celle qu'il recommande ici comme la plus simple soit jamais introduite même parmi les anachorètes de notre temps, ou recommandée par nos médecins. Un seul repas, dit-il, ou deux tout au plus, suffisaient par jour, savoir un déjeuner de pain sec et un verre d'eau, et un souper très trugal. Il pense, contre les encratiques, que l'usage modéré du vin est permis ; mais il l'interdit à tous les jeunes gens au-dessous de trente ans. Il s'élève, dans le même livre, contre le luxe de la table, des habits, des ameublements. Il défend, comme l'a fait depuis l'école de Salerne, de dormir plus de six heures par nuit, et jamais le jour. Le 3ème livre est principalement consacré à relever les avantages de la modestie dans les femmes. Nous terminerons cette analyse, en disant que c'est dans cet ouvrage, qui longtemps après a servi de modèle à celui de l'abbé Fleury, qu'on peut prendre une juste idée des mœurs et de la vie des premiers chrétiens.

      Le style de saint Clément, dans Le Pédagogue et dans L'Exhortation aux gentils, est toujours fleuri, souvent éloquent, quelquefois sublime ; c'est la justice que lui rendent Eusèbe et Photius ; mais on trouve de l'obscurité, de la négligence, et même de la dureté dans celui des Stromates et des Hypotyposes. Saint Jérôme appelle saint Clément le plus savant des écrivains ecclésiastiques ; Théodoret prétend que nul ne l'a surpassé en lumières et en éloquence. Saint Alexandre de Jérusalem donne de grands éloges à la sainteté de sa vie. D'après tant et de si respectables témoignages, on a raison d'être surpris que le nom de ce saint docteur ne soit pas inscrit dans le martyrologe romain ; on l'est bien davantage encore d'apprendre que le savant Benoît XIV a publié, en 1749, une dissertation tendant à prouver qu'il n'y a pas de raison suffisante de l'y établir ; mais ni l'autorité de Benoît XIV, ni celle du martyrologe romain n'ont jamais empêché les églises de France de célébrer sa fête le 04 décembre, suivant le martyrologe et l'autorité d'Usuard.

      La première édition des œuvres de saint Clément d'Alexandrie est celle de P. Victorius, Florence, 1550, in-fol., grec et latin. Daniel Heinsius en adonné une à Leyde, 1616, in-fol., grec et latin, réimprimée à Paris, 1629, in-fol. ; mais la plus estimée est celle de Jean Potter, depuis archevêque de Cantorbéry, Oxford, 1715, 2 vol. in-fol. On fait moins de cas de la réimpression qu'on en a donnée à Venise, 1757, 2 vol. in-fol., quoiqu'elle ait des augmentations. Il y a aussi une édition de Wurtzbourg, 1780, 3 vol. in-8°, et une de Leipsick, 1831-54, 4 vol. in-12. Nicolas Fontaine a publié, en 1696, la traduction française d'une partie de ces œuvres, avec les opuscules de plusieurs autres Pères grecs, 1 vol. in-8°. Il aurait pu faire un meilleur choix, et respecter davantage le sens de l'auteur.


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(1)  Les uns le font naître à Athènes, d'autres à Alexandrie, d'où il aurait reçu son surnom, pour le distinguer de Clément le Romain (Clementus Romanus), qui figure parmi les papes.  (Biographie universelle ancienne et moderne - Tome 8 - Pages 389-391)




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