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La voie de l'occultiste - Tome 2

Annie Besant
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FRAGMENT I : LA VOIX DU SILENCE
Chapitre XII : Les derniers pas

      La lumière qui vient du seul Maître, la lumière d'or, spirituelle, unique, lance dès le début ses ondes éclatantes sur le disciple. Ses rayons franchissent les nuages de matière épais et sombres.
      Ces rayons l'illuminent çà et là, comme des étincelles de soleil éclairent la terre à travers l'épais feuillage de la jungle. Mais, ô disciple, à moins que la chair ne soit passive, la tête froide, l'âme aussi ferme et pure qu'un lumineux diamant, le rayonnement et les sons mystiques venus des hauteurs akasiques n'atteindront pas l'oreille, si attentive qu'elle soit, au stade initial.



      Charles Webster Leadbeater : Comme le soleil resplendit toujours derrière les nuages, de même le Moi supérieur répand toujours sa lumière sur l'aspirant. De cette haute région procèdent les éclairs d'inspiration et d'intuition qui de temps à autre sillonnent nos ténèbres mentales, dans ce que nous appelons nos meilleurs moments. Il est sage de chercher à saisir ces meilleurs moments, de les retenir par l'imagination, de nous y attacher par la méditation et ainsi de faire ressembler notre vie entière au diamant mentionné dans le texte.

      A propos des « sons mystiques venus des hauteurs akasiques, Mme Blavatsky ajoute la note suivante :

      Ces sons mystiques, cette mélodie qu'entend l'ascète au début de son cycle de méditation, sont appelés Anahad-shabd par les yoguis. L'Anahata est le quatrième des chakras.

      Le quatrième centre ou chakra est celui du cœur. C'est quand la conscience se fixe dans le cœur pendant la méditation qu'elle se prête le mieux à l'influence de l'âme spirituelle ou Moi supérieur. Pour la triade supérieure, atma-bouddhi-manas, le cœur est le centre du corps. La tête est le siège de l'homme psycho-intellectuel ; elle remplit, dans sept de ses cavités (en y comprenant le corps pituitaire et la glande pinéale), diverses fonctions. L'homme qui, pendant la concentration, peut faire passer sa conscience de l'encéphale au cœur, devrait être capable d'unir kama-manas au manas supérieur, en passant par le manas inférieur qui, purifié et délivré de kama, est l'antahkarana ; dès lors, il serait en état de recevoir quelques-unes des inspirations de la triade supérieure. Cette haute conscience s'efforce de le diriger au moyen de sa propre conscience, mais l'homme ne peut guider celle-ci avant d'être uni en bouddhi-manas. L'explication qui précède est le résumé de notes sur certaines leçons orales de Mme Blavatsky, notes ajoutées au troisième volume de La Doctrine Secrète (37).

      Suivant la tradition indienne, Koundalini en s'élevant dissout les qualités des divers chakras qu'elle traverse et emporte leur essence. Quand elle atteint le quatrième, celui du cœur, le yogui entend le son qui vient d'en-haut, nommé anabata-shabda. Shabda est le son. An-ahata signifie « non battu » ; c'est par conséquent le son qui est obtenu sans heurt. Ce terme symbolise ce qui est au-dessus des plans de la personnalité. A ce point, l'aspirant commence à entrer en contact avec la triade supérieure. Si l'on veut rendre plus complet le contact entre les manas supérieur et inférieur, il ne faut pas s'attacher pendant la méditation à rien de moins élevé. La méditation ci-dessous, traduite du Gheranda Samhita, est l'une de celles prescrites pour le centre cardiaque. Elle montre la manière dont le yogui retire graduellement son attention de son entourage et la concentre sur son Idéal.

      Qu'il découvre en son cœur un vaste océan de nectar – dont les flots baignent une belle île formée de gemmes – où les sables sont d'or et parsemés de joyaux. – Les plages en sont ombragées par des arbres aux fleurs innombrables. – Dans l'île croissent arbustes rares, arbres, lianes et roseaux, – qui partout répandent les parfums les plus suaves.
      Pour goûter entièrement la douceur divine – il faut s'y représenter un arbre très merveilleux – dont les branches qui s'étendent au loin portent des fruits pour tous – les quatre puissantes doctrines qui maintiennent le monde. – Là, ni le fruit, ni la fleur ne connaissent la mort ni la peine ; – pour eux les abeilles bourdonnent et les coucous lancent leur doux appel.
      Maintenant, sous l'ombre de ce bosquet paisible – apparaît un temple de rubis flamboyants. – Celui qui cherche y trouvera, assis sur un trône et comme en un sanctuaire, l'Etre très aimé. – Suivant les conseils de son Maître, qu'il pense longtemps – à cette Forme Divine, à Ses apparences et à Ses signes
(38).


      A moins d'entendre, tu ne peux voir. A moins de voir, tu ne peux entendre. Entendre et voir, c'est là le second stade.
..................................

      Nous avons déjà exposé le sens des mots voir et entendre (39). A moins de pouvoir répondre à la voix intérieure, c'est-à-dire à moins de comprendre les lois spirituelles, le candidat ne verra jamais les objets extérieurs sous leur véritlable jour. Il doit apprendre à fixer sur les objets matériels les yeux de l'esprit, comme l'a dit une fois un Maître. Quand il verra de la sorte les objets matériels ou extérieurs, il comprendra de mieux en mieux la voix intérieure. Ceci rappelle la nécessité d'alterner la méditation et l'expérience. Traverser la vie en homme affairé, sans s'arrêter pour méditer sur elle, c'est ignorer en grande partie la signification des événements ; on devrait chaque jour réserver quelques instants afin de laisser la lumière intérieure les éclairer. D'autre part, s'enfermer dans sa bibliothèque et consacrer tout son temps à la réflexion ne serait pas très profitable ; on se formerait ainsi d'innombrables idées fausses, car l'expérience est nécessaire pour corriger et élargir notre méditation. Conserver l'équilibre entre l'intérieur et l'extérieur, c'est à quoi doit s'appliquer l'élève. Il doit chercher l'harmonie, pour employer un terme qui revient sans cesse dans la Gîta.

      Dans le système divin, les mondes intérieur et extérieur se correspondent parfaitement et en tout point. Mme Blavatsky dit dans La Doctrine Secrète :

      Dans le domaine des Forces occultes, un son qui impressionne l'oreille n'est qu'une couleur subjective ; une couleur perceptible n'est qu'un son inaudible. (40)

      C'est la couleur et non la forme qui se trouve mentionnée ici ; d'où plus de précision, car en réalité nous ne voyons que des couleurs et pas de formes.

      Impossible de dire avec certitude pourquoi cet accord auditif et visuel est appelé la deuxième phase. Nous ignorons combien en comportait le système d'Aryasanga, car ici un voile recouvre sa doctrine. La ligne de points remplace un passage manquant, relatif à la troisième phase. Quand, après cet hiatus, l'enseignement reprend son cours, nous voyons qu'Aryasanga définit les derniers pas exactement comme le font les Yoga Soutras, c'est-à-dire : 5) pratyahara ou contrôle absolu des sens, 6) dharana ou concentration, 7) dhyana ou méditation, enfin 8 samadhi ou concentration.


      Quand le disciple voit et entend, qu'il sent et goûte, yeux et oreilles fermés, bouche et narines closes ; quand les quatre sens se confondent et sont prêts à passer dans le cinquième, celui du toucher intérieur, alors il a passé dans le quatrième stade.

      Certains yoguis ferment littéralement la bouche et le nez lorsqu'ils se livrent à la méditation ou à la transe. Les doigts sont placés de façon à maintenir clos les yeux, les narines et la bouche. De plus, ces hommes sont parvenus à retourner leur langue vers le haut et en arrière dans la cavité qui se trouve au-dessus de la bouche, de façon à empêcher l'accès de l'air. Dans les pratiques de certains hatha yoguis, cet exercice est nommé khechari moudra. Les raja yoguis ne le font pas et nous ne le recommandons pas ici. Il y a un moment où l'élève peut fermer les yeux et reproduire en soi-même (ou éprouver dans la région astro-mentale) les sensations olfactive, gustative, visuelle et tactile. Afin de s'élever à un état supérieur encore, il doit s'occuper du toucher intérieur, qui est l'ouïe. En fixant son attention sur le son intérieur et en le suivant jusque dans ses ramifications toujours plus ténues, il parvient au point où il devient possible de s'exercer à pratyahara, à l'inhibition de toutes les sensations, intérieures ou extérieures, celles de la salle de l'apprentissage comme celles de la salle de l'ignorance. Cette pratique est décrite dans la sentence suivante :


      Et dans le cinquième, ô destructeur de tes pensées, tout cela doit être tué encore une fois au delà de toute réanimation possible.

      Il arrive constamment et presque chez tout le monde, que l'attention se détourne de l'extérieur, par exemple pendant une lecture particulièrement intéressante ; alors on ne répond pas aux impressions produites sur les sens par les odeurs, les spectacles ou les sons. La faculté de se mettre à volonté dans cette condition est pratyahara ; elle prépare une méditation fructueuse. Tuer « au delà de toute réanimation possible » signifie simplement que les sens, comme de bons chiens, se couchent au commandement et ne se relèvent pas avant d'être appelés. Ici se trouve une note :


      Ceci veut dire qu'au sixième stade de développement, qui dans le système occulte est Dharana, tout sens, comme faculté individuelle, doit être tué (ou paralysé) sur ce plan, en passant et se plongeant dans le septième sens, le plus spirituel.

    Dharana est en yoga le sixième pas, suivant les Yoga Soutras ; c'est la concentration mentale que nous avons déjà étudiée (41) ; elle suit pratyahara. Le mental ou chitta est regardé comme un sixième sens ; aussi quand, dharana étant complet, ce mental cesse d'agir en relation avec les objets du monde extérieur, l'intuition ici nommée le septième sens se manifeste. La vie nous instruit de deux manières, par les leçons que nous recevons du monde et par l'intuition ou influence du moi intérieur. A mesure que les hommes avancent dans leur pèlerinage évolutif, leur intuition augmente et ils sont moins assujettis aux leçons que leur donne le monde. C'est une autre façon de dire que l'homme qui met en jeu ses facultés intérieures tire d'un peu d'expérience beaucoup plus de profit que ne le feraient d'autres hommes d'expériences nombreuses. Grâce à l'activité de son intelligence innée, l'homme développé se rend compte de la grande importance des choses les plus minimes ; tandis que le mental est plein de curiosité ; toujours il désire du nouveau car, sa pensée étant débile, il a vite épuisé le sens évident des choses ordinaires. C'est ce mental qui dans l'ordre des expériences religieuses réclame des miracles, mais reste aveugle aux innombrables miracles qui l'entourent.


      Tiens ton esprit à l'écart de tout objet du dehors, de tout spectacle extérieur. Tiens à l'écart les images intétérieures, de peur qu'elles ne projettent une ombre sur ta lumière d'âme.
      Tu es maintenant en Dharana, le sixième stade.


      Dans la pratique de la concentration, il est toujours nécessaire de considérer à la fois les causes d'interruption extérieures et intérieures. Il faut empêcher le mental de s'intéresser à un objet extérieur quelconque ; autrement, le moindre bruit provoque sa curiosité et nuit à la concentration. Il faut aussi l'empêcher d'évoquer en soi-même des images relatives au passé ou à l'avenir ; au cours de l'exercice, il faut perdre tout intérêt à ce qui s'est passé hier ou à ce qui arrivera probablement demain. Quand cette concentration est devenue complète, commence la période suivante, la septième, appelée dyana, c'est-à-dire la méditation.


      Quand tu auras passé dans la septième, ô fortuné, tu ne percevras plus le Trois sacré, car tu seras toi-même devenu ce Trois : toi-même et le mental, comme des jumeaux dle front, et l'étoile qui est ton but et brûle au-dessus de ta tête. Les Trois qui résident dans la gloire et la béatitude ineffables ont maintenant perdu leurs noms dans le monde de Maya. Ils sont devenus une seule étoile, le feu qui brûle sans consumer, ce feu qui est l'Oupadhi de la flamme.
      C'est là, ô Yogui de succès, ce que les hommes appellent Dhyana, véritable précurseur de Samadhi.


      Sur ce Sentier, l'aspirant passe de dharana à dhyana, de la concentration à la méditation, puis il arrive à la conscience bouddhique. C'est là le « toi-même ». Le mental dont il est ici parlé est le mental supérieur, car le mental inférieur a été réduit au silence. Le principe manasique a été transféré dans le bouddhi, de sorte qu'ils ressemblent à « des jumeaux de front », les deux angles inférieurs du triangle, comme l'indique la note suivante :

      Chaque stade de développement en Raja Yoga est symbolisé par une figure géométrique. Celle-ci est le triangle sacré et précède Dharana. Le Δ est le signe des hauts Tchélas, tandis qu'un triangle d'une autre sorte est celui des hauts Initiés. C'est le signe « I » dont parle Bouddha et qu'il emploie comme symbole de la forme incarnée de Tathâgatha lorsqu'il est débarrassé des trois méthodes du Pradjna. Une fois franchis les stades préliminaires et inférieurs, le disciple ne voit plus le Δ, mais le — abréviation du, — le septénaire complet. Sa vraie forme ne peut être donnée ici, car il est presque sûr qu'elle serait saisie au vol par des charlatans et employée à des usages sacrilèges et malhonnêtes.

      L'étoile qui brûle au-dessus de nos têtes est l'atma, mais, comme le dit Mme Blavatsky dans une autre note, elle représente aussi l'étoile de l'Initiation qui resplendit au-dessus de la tête de l'Initié. Comme l'objectif poursuivi est la Quatrième Initiation, celle de l'Arhat, c'est l'étoile de cette Initiation conduisant au plan atmique ou nirvanique qui est son but.

      A ce moment, au lieu de lever mentalement les yeux vers le ciel et de regarder la triade supérieure (atma-bouddhi-manas) comme placée au-dessus de soi, comme auparavant, on se trouve être dans l'état bouddhique, car manas s'est uni bouddhi, constituant ainsi manas-taijasi. La « méditation » de l'Initié dans cette période amènera l'union de bouddhi et d'atma ; quand celle-ci sera obtenue, la triade supérieure sera devenue une seule étoile, décrite dans une note comme « la base (oupadhi) de la flamme qui ne peut jamais être atteinte, tant que l'ascète est encore dans cette vie. » Le combustible est la personnalité ; le feu est ce triple esprit ; la flamme est la Monade. L'Adepte lui-même, tant qu'il demeure physiquement incarné, n'atteint pas entièrement l'état de la Monade. Mme Blavatsky ajoute ces mots :

      Dhyana est l'avant-dernier stade sur cette terre, à moins qu'on ne devienne un Mahatma complet. Comme on l'a déjà dit, dans cet état, le Raja yogui est encore spirituellement conscient de soi et du travail de ses principes supérieurs. Un pas de plus et il sera sur le plan au delà du septième (ou quatrième suivant certaines écoles). Celles-ci, après la pratique de Pratyahara – entraînement préliminaire qui consiste à contrôler son mental et ses pensées – comptent Dhasena, Dhyana et Samadhi, et embrassent les trois sous le nom générique de Sannyama.

      Il est significatif que les trois perdent leurs noms. Ce ne sont pas des formes, car leur région propre est celle de la conscience. Les plans inférieurs de la personnalité sont ceux de la forme ; puis viennent les plans du nom ou du « sens », mais la Monade est au-dessus du nom, au delà de ce que l'homme appelle conscience.

      Le texte indique ensuite que l'aspirant, étant maintenant devenu Arhat, est parvenu au terme des efforts faisant le sujet de ce fragment.


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(37)  Op. cit., vol. III, pp. 582-584.

(38)  Voyez Concentration, chap. X.

(39)  Chapitre IV.

(40)  Op. cit., vol. VI, p. 310.

(41)  Chapitre II




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