Vous êtes ici : Religions, fois & philosophie | RELIGIONS & PHILOSOPHIES ORIENTALES | Hindouisme | La voie de l'occultiste - Tome 2 | XV - Science de tête et Sagesse d’âme

La voie de l'occultiste - Tome 2

Annie Besant
© France-Spiritualités™






FRAGMENT II : LES DEUX SENTIERS
Chapitre XV : Science de tête et Sagesse d'âme

      L'élève demande :
      Ô Maître, que dois-je faire pour atteindre la sagesse ? Ô sage, que faire pour acquérir la perfection ?
      Cherche les sentiers. Mais, ô Lanou., aie le cœur pur avant d'entreprendre ton voyage. Avant de faire ton premier pas, apprends à distinguer le vrai du faux, le toujours éphémère du toujours durable. Apprends par dessus tout à séparer la science de tête de la sagesse d'Ame, la doctrine de l' « œil » de celle du « cœur ».



      Charles Webster Leadbeater : Tout ce que nous pourrions dire ici au sujet du réel et de l'irréel a déjà été longuement exposé dans le commentaire sur la sentence « de l'irréel conduis-moi au réel », dans Aux Pieds du Maître (47).


      Oui, l'ignorance est comme un vase clos et sans air ; l'âme comme un oiseau enfermé dans un vase. Il ne gazouille pas, il ne peut remuer une plume ; le chanteur reste muet et engourdi, et meurt d'épuisement.
      Cependant, l'ignorance même vaut mieux que la science de tête sans la sagesse d'âme pour l'illuminer et la guider.


      Aucun progrès n'est possible à l'homme tout à fait ignorant, quel que soit son développement à d'autres égards ; sans une certaine connaissance de la Vérité et du Sentier, il ne sait où diriger ses pas. La plupart des gens ne se doutent guère de ce qu'est l'homme véritable, ni des qualités et des activités dont résultent soit le progrès, soit la régression ; ils n'ont aucune idée de la grande destinée vers laquelle nous nous dirigeons tous. C'est pourquoi ils avancent avec une lenteur infinie. Nous avons examiné par la clairvoyance jusqu'à cent vies de quelques pitris de deuxième catégorie, sans finalement découvrir aucun signe perceptible de développement.

      Il n'est pas moins vrai que la vie intégrale est soumise à une évolution, lente mais continue, et que l'homme a participé au progrès général. Absolument parlant, il a avancé, mais relativement il n'a pas fait grand'chose. M. Sinnett a comparé cette progression à celle d'une personne qui s'élèverait dans une tour par un escalier à vis ; constamment elle se retrouve dans la même position et devant la même vue, mais chaque fois elle est un peu plus haut. On serait tenté de juger que les hommes sont traités un peu mieux qu'ils ne méritent, car nous constatons que même l'ignorant, dont neuf fois sur dix les pensées sont égoïstes, avance de cette façon. Mais le fait est qu'à elle seule, un peu d'énergie appliquée à des fins supérieures est bien plus efficace qu'une très forte énergie dont l'objectif est moins relevé. La dixième partie des pensées d'un homme est-elle spirituelle, cet homme est au-dessus de la moyenne ; même dans ce cas, il fait neuf pas en arrière pour un pas en avant ; les neuf pas en arrière sont heureusement très courts et l'unique pas en avant très long. Il faut une vie bien perverse pour que s'équilibrent le bien et le mal et, pour rétrograder, l'homme doit être exceptionnellement dévoyé. En outre, l'effet d'un bien minime peut avoir les conséquences les plus lointaines, étant donné l'étroite association qui règne entre les hommes, et celui qui met en mouvement ce bien-là s'assure beaucoup de bon Karma.

      Mais si l'ignorance est pour le progrès un sérieux obstacle, les connaissances que l'on n'applique pas ne valent guère mieux et ne comptent pas pour beaucoup. Un homme qui s'intéresse à l'occultisme peut apparemment s'attarder, vie après vie, au même niveau, car si le savoir n'est pas employé, il fait peu de bien. Utiliser nos connaissances est pour nos progrès une condition absolument nécessaire.


      Les semences de sagesse ne peuvent germer et croître dans un espace sans air. Pour vivre et moissonner l'expérience, il faut au mental de la largeur et de la profondeur, et des pointes pour attirer cette expérience vers l'Ame-Diamant. Ne cherche pas ces pointes dans le royaume de Maya ; mais plane au-dessus des illusions, cherche l'éternel et immuable Sat et défie-toi des trompeuses suggestions de la fantaisie.

      Dans sa note, Mme Blavatsky dit que « l'âme diamant », « Vajrasattva », est un titre du suprême Bouddha, le Seigneur de tous les mystères, appelé Vajradhara et Adi Bouddha. Dans La Doctrine Secrète, elle établit pourtant une distinction entre Vajrasattva et Vajradhara. Vajra est un diamant, sattva signifie dans le cas présent « par nature », c'est-à-dire un caractère ou âme ; Vajrasattva est donc un être dont le caractère ressemble au diamant. Dhara signifie tenir ou porter ; Vajradhara est donc un être qui tient un diamant. Avalokiteshvara, « le Seigneur qui est vu », est Vajrasattva, l'Ame-Diamant ou Cœur-Diamant et représente la réalité synthétique de tous les Dhyanis-Bouddhas. Le Premier Logos est Vajradhara ou Vajrapani, Celui qui tient le Diamant, ou l'Etre à la main de Diamant, aussi appelé en thibétain Dorjechang ; Il est au delà de toute condition ou manifestation, mais Il envoie dans le monde de manifestation subjective l'expression de Son Cœur – Vajrasattva ou Dorjesampa, le Deuxième Logos (48).

      La nécessité de pointes spéciales pour établir pleinement le contact entre le candidat et Cela, présente une analogie avec ce qui se passe dans l'individualisation d'un animal. Dans le cas présent, les pointes sont les qualités supérieures acquises par l'animal, telles que l'affection et la dévotion, au moyen desquelles il parvient à la conscience humaine. Le mental de l'homme doit émettre de même des pointes spéciales afin de pouvoir s'unir à l'Ame ; pour l'Initié, ces pointes doivent s'élever en bouddhi qui, dans le moi soumis à la réincarnation, est le principe correspondant, sur un niveau supérieur, au Vajrasattva. D'après le Swami T. Subba Rao, il s'agit ici de l'atma qui attire l'ego dans la Monade. La même image peut donc être employée à de nombreux niveaux.


    Car le mental est comme un miroir : il amasse la poussière tout en reflétant.

      Ceci, dit Mme Blavatsky, vient de la doctrine de Shin-Sien ; il enseignait que le mental humain, semblable à un miroir qui attire et reflète chaque atome de poussière, doit, comme ce miroir, être surveillé et chaque jour épousseté. Shin Sien était le sixième patriarche de la Chine septentrionale ; il enseignait la doctrine ésotérique du Bodhidharma. Dans La Doctrine Secrète, Mme Blavatsky explique en ces termes le rôle du Bodhidharma :

      Lorsque le mauvais usage du Bouddhisme orthodoxe dogmatique atteignit son apogée, et que le véritable esprit de la philosophie du Bouddha fut presque perdu, il arriva des Indes plusieurs réformateurs qui instituèrent un enseignement oral. Tels furent Bodhidharma et Nagardjouna, auteurs des plus importants ouvrages de l'école contemplative de Chine, durant les premiers siècles de notre ère.

      La poussière sur le miroir représente les préjugés, les illusions et les lubies propres aux corps astral et mental, et qui, pour l'observateur doué de la vision des plans correspondants, sont de vrais obstacles empêchant les pensées et les sentiments de progresser. Nous avons déjà étudié avec soin dans nos entretiens sur Aux Pieds du Maître (49), l'effet de ces obstacles et les moyens de les supprimer.


      Il faut la douce brise de la sagesse de l'Ame pour enlever la poussière de nos illusions. Cherche, ô débutant, à fusionner ton mental et ton âme.
      Fuis l'ignorance et fuis de même l'illusion. Détourne la face des déceptions du monde ; méfie-toi de tes sens, ils sont faux. Mais dans ton corps, tabernacle de tes sensations, cherche l'Homme Eternel dans l'impersonnel ; et, l'ayant trouvé, regarde au-dedans : tu es Bouddha.


      L'expérience nous apprend sans cesse qu'il faut se méfier des sens. Ainsi, les impressions visuelles doivent être contrôlées par une étude attentive des faits, suivie d'un jugement motivé, comme par exemple en ce qui concerne le mouvement apparent du soleil autour de la terre. Gardons-nous cependant de faire dire à notre texte qu'il ne faut pas employer nos sens ; ils doivent nous servir sur chaque plan pour nous instruire et pour remplir la tâche et les devoirs sans lesquels aucun progrès n'est possible.

      L'homme éternel est l'ego soumis à la réincarnation, l'ego dont la vie est immensément longue en comparaison de celle de la personnalité, car elle persiste jusqu'à l'achèvement de la série des vies et des morts humaines.

      Le mot Bouddha peut être pris dans trois sens différents. Parfois, comme dans le cas présent, il signifie simplement éclairé, illuminé ou sage. Parfois, c'est un nom donné à notre Seigneur Gautama. Dans d'autres cas, il désigne les hautes fonctions remplies dans la Hiérarchie Occulte par le Chef du Deuxième Rayon, qui dirige le département de l'enseignement et de la religion et dont il a été parlé dans Les Maîtres et le Sentier. Les Bouddhistes possèdent une liste de vingt-quatre Bouddhas ; le titulaire actuel est Notre Seigneur Gautama, que remplacera dans un avenir très lointain, Notre Seigneur Maitreya.


      Fuis la louange, ô dévot ! La louange conduit à l'illusion de soi-même. Ton corps n'est pas le Soi, ton Soi est en soi-même sans corps, et la louange ni le blâme ne l'affectent.
      La congratulation de soi-même, ô disciple, est comme une tour élevée sur laquelle est monté un vaniteux insensé. Là, assis dans sa hautaine solitude, il n'est aperçu de nul autre que de lui-même.


      Que d'hommes ont été gâtés par l'éloge immérité qui pousse à l'orgueil tous ceux qui ne voient clairement, ni devant eux, ni au-dessus d'eux. Les élèves assez clairvoyants pour voir souvent les Maîtres sont moins exposés que beaucoup d'autres à ce danger ; ils sont bien obligés de comparer leur propre insignifiance à la grandeur du Maître, leur veilleuse d'un liard à l'éclat de son radieux soleil. C'est l'homme qui regarde au-dessous de soi et se compare aux hommes moins élevés – c'est lui qui est le plus exposé à tomber par orgueil.

      Le mieux est de ne pas penser à soi et de s'occuper constamment de l'œuvre du Maître. Pour nous, dans cet ordre d'idées, la tâche dépasse de beaucoup notre capacité de travail ; or, l'énergie et le temps gaspillés en pensant à nos petites personnalités sont autant de perdu pour elle. Si les Maîtres ne Se montrent pas davantage à ceux qui sont entrés depuis peu à Leur service, c'est sans doute pour plusieurs raisons. En voici une : l'élève, se voyant à ce point dépassé par son Maître, pourrait être accablé par le sentiment de sa propre faiblesse et perdre confiance dans sa capacité de service. Si donc il est nécessaire d'éviter l'orgueil, il faut également éviter d'estimer nos facultés au-dessous de leur valeur. Ici, comme toujours, la voie du milieu est la bonne.

      La tour est certainement un bon terme de comparaison, car l'orgueil enferme l'homme et le sépare de son prochain. Si par exemple il est fier de son instruction, il voudra maintenir les autres dans une ignorance plus grande que la sienne afin de jouir de sa supériorité, et, s'il exhibe ses connaissances, ce ne sera que pour en faire montre. Un tel homme travaille sans cesse à élargir l'abîme qui le sépare des autres, afin de pouvoir les regarder d'en haut.


      La fausse science est rejetée par le sage, et dispersée au vent par la Bonne Loi. Sa roue tourne pour tous, pour l'humble et le fier. La doctrine de l'œil est pour la foule, la doctrine du cœur pour les élus. Les premiers répètent avec orgueil : « Voyez, je sais » ; les derniers, ceux qui humblement ont amassé, avouent tout bas : « Voilà ce que j'ai entendu dire ».

      A toute religion s'ajoutent avec le temps de nombreuses spéculations et autres additions. Dans l'hindouisme, par exemple, les Pouranas renferment une foule de prescriptions et de défenses, dont beaucoup ont été inventées par les prêtres, soit pour leur commodité ou leurs avantages personnels, soit que la valeur de beaucoup de prières et de cérémonies ait été exagérée. Citons encore les interprétations spéciales des sentences les plus anciennes, interprétations qui, transformées en dogmes, ont été rattachées à la doctrine primitive : par exemple, l'horrible dogme des peines éternelles, auquel sont encore attachés la plupart des Chrétiens.

      La doctrine ésotérique disperse tout cela au vent et ramène l'attention aux vérités essentielles et vitales. Pour agir du cœur, il faut cependant un homme énergique et avancé. Pour les masses marchant sans hâte sur la route large de l'évolution qui s'élève sur le flanc de la montagne en lacets faciles, les livres sont le guide principal. Ces hommes n'en sont pas arrivés encore au point décrit par le Garouda Pourana : « Ayant pratiqué les Védas et les Shastras, ayant connu la vérité, le sage peut abandonner toutes les écritures ; tel un homme riche en grains abandonne la paille ».

      Les textes bouddhiques commencent tous par : « Ainsi dit », ou « Voici ce que j'ai entendu dire ». Ils ne disent pas « Ceci est absolument vrai ; vous devez le croire », mais : « Voici ce qui a été dit ; vous feriez bien de chercher à le comprendre et ainsi à vous rendre compte de la réalité ». Esprit d'investigation et non pas de dogmatisme. Et pourtant, chose étrange, on a quelquefois interprété ces formules dans un sens différent et complètement faux. On a dit : « Inutile de proposer à ce sujet aucune autre explication, car ce qui a été dit, l'a été avec autorité ! ».


      « Le grand Crible » est le nom de la doctrine du Cœur, ô disciple.
      La roue de la Bonne Loi se meut rapidement. Nuit et jour, elle moud. Elle ôte du grain doré la balle sans valeur, de la farine le rebut. La main du Karma guide la roue ; les révolutions marquent les battements du cœur karmique.
      La vraie connaissance est la farine, la fausse science est la balle. Si tu veux manger le pain de sagesse, il te faut pétrir la farine avec les eaux claires d'Amrita. Mais si tu pétris de la balle avec la rosée de Maya, tu ne peux que créer de la nourriture pour les noires tourterelles de la mort, les oiseaux de la naissance, de la décrépitude et de la douleur.


      La doctrine du cœur est appelée le grand Crible parce que si l'homme se conforme à elle dans ses activités terrestres, les erreurs qu'il commet et les défauts qu'il possède se trouvent graduellement criblés et supprimés. Travailler sans l'idéal de la doctrine intérieure, c'est vouloir renouveler sans cesse, vie après vie, le même genre d'erreurs. Mme Blavatsky a dit quelque part : désirer faire le bien est une chose ; savoir ce qu'il est bon de faire en est une autre. Et pourtant, malgré nos connaissances imparfaites, il faut avancer et faire de notre mieux. C'est un peu comme si l'on apprenait une langue. On se tromperait en essayant de l'apprendre parfaitement, au moyen des livres, avant de vouloir la parler ; il faut s'y plonger, faire des fautes et, grâce à ces efforts, on arrivera un jour à parler correctement. Mais, bien entendu, ceci ne sera possible que si l'on converse avec d'autres personnes qui déjà savent bien cette langue.

      De même, le Maître, bien qu'il soit invisible, guidera l'élève qui cherche sincèrement à travailler de son mieux ; il le fera passer par des expériences destinées à cribler ses fautes et ses erreurs. Demeurez-en convaincus : le bien final se réalisera inévitablement ; que l'amour emplisse votre âme ; alors vous pourrez travailler sans craindre les erreurs ; elles diminueront en nombre et en importance, et finiront par disparaître.

      Il y a une morale à tirer de l'analogie de la farine et du pain. Les vérités que vous avez acquises ne vous donnent pas le pain mais simplement la farine dont sera fait le pain de la sagesse. Le pétrissage, c'est l'action du Moi supérieur qui fait usage des expériences et les transforme en sagesse véritable. Chez les hommes ordinaires, ce pétrissage se fait presque entièrement pendant la période dévakhanique, mais l'élève du Maître a si bien élargi le canal entre le Moi supérieur et le moi inférieur qu'il croît sans cesse en sagesse.

      Se contenter de la connaissance extérieure et l'étudier au moyen du mental inférieur, simplement par nécessité ou en vue de satisfactions personnelles, c'est en vérité pétrir de la balle avec la rosée de Maya ; ce n'est pas préparer le triomphe du Moi supérieur, ni suivre le Sentier, mais préparer le Karma de naissances et de morts futures, pour des véhicules et des personnalités qui devront plus tard s'user et périr.


________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
(47)  La Voie de l'Occultiste, tome I, chap. IV, volume I.

(48)  Chapitre V

(49)  Op. cit., vol. I, p. 179.




Site et boutique déposés auprès de Copyrightfrance.com - Toute reproduction interdite
© 2000-2024  LB
Tous droits réservés - Reproduction intégrale ou partielle interdite

Taille des
caractères

Interlignes

Cambria


Mot de passe oublié
Créer un compte BIBLE CHRISTIANISME JUDAÏSME & KABBALE RELIGIONS & PHILOSOPHIES ORIENTALES DICTIONNAIRE RELIGIEUX GÉNÉRAL PHILOSOPHIE & HUMANISME