CHAPITRE IV
Les aides
L'assistance peut donc venir de plusieurs des nombreuses catégories d'habitants
peuplant le plan astral : des dévas, d'
esprits de la nature ou de ceux
que nous appelons les morts, comme aussi de ceux qui, de leur vivant, vont et
viennent consciemment sur le plan astral. Ce sont surtout les
adeptes et leurs
élèves. Mais un examen plus attentif nous montrera que, si toutes
les catégories énumérées peuvent prendre, et prennent
part, en effet, à cette tâche, c'est dans une mesure si inégale
qu'en somme elle incombe presque entièrement à une seule classe.
Le fait que cette oeuvre d'assistance doit s'accomplir si
souvent sur le plan astral, ou de ce plan, en est à lui seul une explication
presque suffisante. Il saute aux yeux, quand on a la moindre idée de ce
que sont en réalité les pouvoirs dont dispose un
adepte, que, pour
lui, travailler sur le plan astral constituerait un gaspillage d'énergie
bien plus considérable que ne serait pour nos médecins et nos savants
les plus éminents, le fait de passer leur temps à casser des pierres
sur les routes.
Le travail de l'
adepte a pour domaine
des régions plus hautes, principalement les niveaux
arûpa
(1) du plan dévachanique ou monde céleste.
Là, il peut employer ses énergies à influencer la véritable
individualité humaine et non pas simplement la personnalité qui
seule peut être atteinte dans les mondes astral et physique. Les
forces
qu'il met en
jeu, dans ce milieu plus
exalté, produisent des résultats
plus considérables, plus importants par leurs conséquences et plus
durables qu'aucun de ceux pouvant s'obtenir ici-bas, même en dépensant
dix fois plus de
force. D'autre part la tâche est, là-haut, d'une
nature telle que l'
adepte seul peut la remplir.
Celle des plans inférieurs
peut au contraire, du moins dans une certaine mesure, être accomplie par
ceux dont les pieds sont encore sur les premières marches de l'immense
escalier qui un
jour leur permettra de rejoindre l'
adepte là où
il se tient maintenant.
Ces observations s'appliquent également aux dévas.
Appartenant à un règne naturel plus élevé que le nôtre,
leur travail semble généralement tout à fait étranger
à l'humanité. D'ailleurs, ceux d'entre eux il y en a quelques-uns
qui répondent parfois à nos aspirations ou appels les plus
élevés, le font plutôt sur le plan mental que sur les plans
physique ou astral et, le plus souvent, dans les périodes comprises entre
nos incarnations plutôt que pendant nos vies terrestres.
Quelques exemples d'assistance ainsi donnée
le lecteur s'en souviendra peut être furent notés au cours
des études entreprises dans les différents départements du
plan dévachanique, au moment où se préparait le manuel
théosophique
traitant ce sujet. Dans un de ces cas, un déva enseignait à un choriste
la musique céleste la plus merveilleuse. Dans un autre, un déva
d'une classe différente instruisait et guidait un astronome qui cherchait
à comprendre la forme et la structure de l'univers.
Ce ne sont là que deux exemples pris parmi des cas
nombreux où l'on remarque l'aide donnée à l'évolution
par le grand règne déva et la manière dont il répond
après la mort aux aspirations humaines les plus hautes. Il existe des méthodes
par lesquelles, même durant la vie terrestre, on peut se rapprocher de ces
grands êtres et en recevoir infiniment d'instruction ; cependant, même
dans ce cas, ces relations s'établissent plutôt en nous élevant
jusqu'à leur plan qu'en leur demandant de descendre au nôtre.
Le déva intervient rarement dans les événements
ordinaires de notre vie physique, A vrai dire, il est si absorbé par la
tâche infiniment plus grandiose, spéciale à son propre plan,
qu'il est, sans doute, à peine conscient de notre existence et, bien qu'il
puisse lui arriver parfois de remarquer une douleur ou des difficultés
humaines qui émeuvent sa pitié et lui inspirent le désir
de leur porter secours, sa vision plus vaste lui montre certainement qu'au point
actuel de l'évolution des interventions semblables feraient, dans la très
grande majorité des cas, beaucoup plus de mal que de bien.
Il y a certainement eu dans le passé, quand l'humanité
était dans l'enfance, une période où l'homme recevait du
dehors beaucoup plus d'aide qu'aujourd'hui. A l'époque où tous ses
Bouddhas et tous ses Manous, et même ses chefs et ses maîtres moins
élevés, sortaient des rangs, soit de l'évolution déva,
soit d'une humanité arrivée à la perfection et venant d'une
planète plus avancée, le genre d'assistance envisagé dans
cet ouvrage a dû incomber aussi à ces êtres exaltés.
Mais, à mesure qu'il progresse, l'homme devient lui-même capable
d'aider ses semblables, d'abord sur le plan physique, puis sur des plans supérieurs.
Nous sommes actuellement arrivés à un stade où l'humanité
devrait pouvoir fournir et elle le fait dans une faible mesure ses
propres aides invisibles. Elle donnerait ainsi aux êtres qui en sont susceptibles
la
liberté de se consacrer à un travail plus utile encore et plus
élevé.
Il est donc évident que le genre de secours dont nous
parlons ici peut parfaitement être donné par des hommes et par des
femmes arrivés à un certain degré d'évolution. Il
ne le sera ni par les
adeptes ils sont susceptibles de remplir une tâche
bien plus haute et d'une utilité bien plus vaste ni par les personnes
ordinaires, sans développement spirituel suffisant et incapables de se
rendre utiles. Comme ces considérations nous amèneraient à
le supposer, le travail pour autrui, sur les plans astral et mental inférieur,
revient principalement aux élèves des Maîtres, c'est-à-dire
à des hommes, qui, bien éloignés encore du moment de devenir
adeptes, se sont cependant suffisamment développés pour être
capables d'agir consciemment sur les plans en question.
Quelques-uns, faisant un pas de plus, ont rendu complète
l'union entre la conscience physique et celle des niveaux supérieurs ;
aussi ont-ils l'avantage incontestable de se rappeler, à l'état
de veille, ce qu'ils ont fait et appris dans ces autres mondes. Beaucoup d'autres,
encore incapables de conserver la continuité de leur conscience, sont loin
cependant de perdre leur temps alors qu'ils croient dormir, car ils le consacrent
à un travail généreux et désintéressé
en faveur de leurs semblables.
Nous allons voir maintenant en quoi consiste le travail mais,
avant d'aborder cette partie de notre sujet, nous irons au-devant d'une objection
qu'on oppose très souvent à ce genre de tâche. En même
temps nous citerons, pour mémoire, les cas relativement rares où
les
agents sont, soit des
esprits de la nature, soit des hommes ayant dépouillé
leur
corps physique.
Certaines personnes, comprenant encore imparfaitement les
idées
théosophiques, se demandent souvent s'il leur est permis de
chercher à aider les gens qu'elles voient affligés ou engagés
dans des situations difficiles, craignant par là de mettre obstacle à
l'accomplissement d'un décret prononcé, dans sa justice absolue,
par la loi éternelle du Karma. Cet homme, disent-elles, en effet, se trouve
dans sa situation présente parce qu'il l'a méritée ; il recueille
maintenant les conséquences parfaitement naturelles de quelque mauvaise
action commise dans le passé ; de quel droit entraverais-je l'action de
la grande loi cosmique, en essayant d'améliorer sa condition, soit sur
le plan astral, soit sur le plan physique ?
Les braves gens qui entretiennent de pareilles idées
font preuve en réalité, bien qu'à leur insu, de l'aplomb
le plus colossal, car leur attitude implique deux sous-entendus renversants :
le premier, qu'ils connaissent exactement la nature du Karma de leurs semblables
et la durée qu'il assigne à leur souffrance ; le second, qu'eux-mêmes,
insectes éphémères, sont capables d'influencer la loi cosmique
et d'empêcher, par telle ou telle action, les conséquences régulières
du Karma. Soyons-en bien assurés : les grandes divinités karmiques
sont parfaitement capables de se tirer d'affaire sans nous. N'ayons aucune crainte
; quelles que soient nos démarches, jamais elles ne pourront leur causer
la difficulté ni l'inquiétude la plus légère.
La nature de son karma empêche-t-elle un homme d'être
aidé, tous nos efforts et toute notre bonne volonté, déployés
en sa faveur, resteront vains. Néanmoins notre intention nous aura valu,
personnellement, un bon karma. La nature du karma de cet homme ne nous concerne
pas. Notre devoir est d'assister les autres de toutes nos
forces. Nous n'avons
droit qu'à l'action. Le résultat incombe à d'autres plus
élevés que nous. Comment nous serait-il possible de savoir où
en est le « compte » d'un homme ? Qui sait ? Peut-être vient-il
d'épuiser son mauvais karma et se trouve-t-il au point précis où
il lui faut une main secourable pour le soulager et le faire sortir de ses peines
on de son découragement. Pourquoi n'aurions-nous pas, aussi bien qu'un
autre, le plaisir et le privilège de cette bonne action ? Pouvons-nous
l'aider ? Le fait même indique qu'il le mérite. Impossible de le
savoir sans avoir, essayé. En tout cas, la loi karmique saura ne pas en
souffrir ; inutile de nous en préoccuper.
Il est rare que l'assistance donnée à l'humanité
lui vienne des
esprits de la nature. La plupart de ces êtres fuient le séjour
de l'homme et se retirent à son approche : ses émanations, l'inquiétude
et l'agitation perpétuelles qu'il crée autour de lui leur sont antipathiques.
D'autre part, à l'exception de quelques-unes des catégories les
plus élevées, ils sont en général fantasques et étourdis
et ressemblent beaucoup plus à des
enfants prenant leurs ébats,
dans des conditions physiques extrêmement favorables, qu'à des entités
sérieuses et raisonnables. Il arrive bien, parfois, qu'un de ces
esprits
éprouve de l'attachement pour un homme et lui rende maint service, mais,
au point actuellement atteint par son évolution, on ne peut compter sur
ce royaume de la nature pour prêter à un travail d'assistance invisible
rien qui ressemble à un concours régulier. Nous renvoyons le lecteur
qui désirerait plus de détails sur les
esprits de la nature au cinquième
de nos manuels
théosophiques (2).
Il peut arriver aussi que l'aide soit donnée par des
personnes récemment décédées, par celles qui, s'attardent
sur l'astral et suivent de près les affaires terrestres. C'est ce qui est
arrivé, probablement, dans le cas cité plus haut, où une
mère sauva ses
enfants en les empêchant de tomber dans un puits.
Mais on le comprendra, ce genre d'assistance ne peut être donné que
très rarement. Plus une personne est dévouée aux autres,
plus elle leur est utile, et moins il est probable de la rencontrer après
sa mort s'attardant, en y conservant sa pleine conscience, sur les niveaux inférieurs
du plan astral, où l'on est le plus facilement à portée de
la terre. En tout cas, à moins qu'il ne s'agisse d'une personne exceptionnellement
mauvaise, son séjour dans la seule région d'où il est possible
d'intervenir sera relativement court et, bien que du monde céleste elle
puisse encore répandre une
influence bienfaisante sur ceux qu'elle a aimés
sur la terre, cette
influence aura plutôt le caractère d'une bénédiction
générale que celui d'une
force capable d'amener un résultat
défini dans un cas spécial, comme ceux dont nous nous sommes occupés.
En outre, beaucoup de personnes décédées, désirant assister ceux qu'elles ont laissés derrière elles,
se trouvent dans l'impossibilité de les influencer en rien, car, pour agir d'un plan donné sur une entité vivant sur un autre, il faut soit
une très grande impressionnabilité chez cet autre, soit, chez l'opérateur, un certain degré d'expérience et d'adresse. Aussi, malgré
la fréquence des apparitions de suite après la mort, est-il rare de relever un cas où le défunt se soit vraiment rendu utile ou ait
réussi à faire comprendre son désir à l'ami ou au parent visité par lui. Evidemment il en existe des exemples, assez nombreux
quand on vient à les réunir, mais ils sont rares, relativement à la grande quantité de « revenants » qui ont réussi à
se rendre visibles. Les morts ne donnent donc généralement que peu d'assistance. Bien plus : comme nous l'expliquerons tout à l'heure, il
est beaucoup plus fréquent pour eux d'avoir besoin de secours que d'être aptes à en prêter aux autres.
Aussi, pour le moment, le travail à accomplir dans cet ordre d'idées incombe-t-il dans une très large mesure aux personnes « vivantes », capables de fonctionner consciemment sur le plan astral.
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(1) Où la forme, telle que nous la connaissons, cesse d'exister. (N. D. T.)
(2) Le Plan astral, par Charles Webster Leadbeater.