CHAPITRE IV
FAMILLE DE JAPHETH
II - Tubal et ls Ibères
Parmi les
frères de
Gomer, Tubal est le seul qui nous intéresse en ce moment. Il s'était fixé avec sa famille ou son peuple au pied des
montagnes du
Caucase entre le
Pont-Euxin et la mer [109] Caspienne. Cette position fit de Tubal et de ses
enfants de hardis
marins, et son nom justifie cette pensée, puisque Tubal signifie une maison, une habitation en forme de baquet,
tub (
teub) baquet, cuve,
hall (
hâul) habitation, salle .
Ptolémée désigne les descendans de Tubal par le nom de Tobéliens, tandis que Josèphe les connaît sous celui d'Ibériens. Une partie de ces Ibères abandonna le pays où ils s'étaient d'abord propagés, et se mettant, au dire des traditions basques, sous la conduite de Tharsis, neveu de Thubal, ils affrontèrent les périls de la navigation, à la recherche d'une nouvelle contrée dans laquelle ils pourraient s'établir, en conservant leurs habitudes et leurs murs particulières. Il est tout à fait curieux de constater que le nom de Tharsis, chef des Ibères
émigrants, s'explique par la langue
celtique aussi bien que celui de Tubal. Il nous révèle que les vaisseaux des Ibères, quelque forme qu'ils eussent d'ailleurs, étaient parfaitement goudronnés et en état de tenir la mer
tar, goudron, marin,
to size (
saïze), enduire d'une matière visqueuse .
Les Ibères portaient-ils déjà ce nom avant de se diriger vers l'Espagne, ou bien l'ont-ils reçu des
Celtes lorsque les deux peuples se sont heurtés au midi de la Gaule ? Il serait bien difficile de l'affirmer d'une manière absolue ; d'ail- [110] leurs, la solution de cette question ne nous paraît point nécessaire. La seule chose que nous tenions à faire remarquer, c'est que les Ibères formaient une population bien clair-semée, lorsque les
Celtes les ont rencontrés et noyés, pour ainsi dire, dans le flot de leur nation immense.
Transportés par leurs vaisseaux sur les côtes de la Péninsule
Hispanique, pendant que les
Celtes suivaient lentement le cours du Danube, il n'est pas étonnant que les Ibères aient occupé l'Espagne avec tranquillité, et se soient répandus sur le terrain
Gaulois encore désert, jusqu'à ce que l'arrivée des
Celtes les ait peu à peu refoulés au delà des
Pyrénées.
Les Basques se considèrent avec raison comme les véritables descendans des Ibères, ayant pleinement conservé leurs traditions et une langue particulière.
Quelques
esprits audacieux auraient voulu faire de ces Basques des hommes primitifs, n'ayant aucun rapport, aucune liaison avec les autres variétés humaines qu'ils auraient précédées
dans le monde. Cette pensée est en contradiction complète avec ce que nous dit la Genèse : «
Noé avait donc trois fils qui sortirent de l'arche,
Sem,
Cham et
Japheth. Ce sont là les trois fils de
Noé : et c'est d'eux qu'est sortie [111] toute la race des hommes qui sont sur la terre. »
(57)
L'Ecriture-Sainte contenant l'inaltérable vérité, il faut de toute nécessité que la langue basque, que l'on voudrait considérer comme ne se rattachant à aucune autre, ne soit, en réalité, qu'un des nombreux rameaux de langue primitive.
Ce langage, conservé au milieu des
montagnes par des hommes de fer, d'une opiniâtreté et d'un courage indomptables, s'est perpétué dans une remarquable pureté et montre dans sa formation une dérivation certaine de la langue parlée par
Noé et
Japheth, puisque c'est un
composé dont les
éléments sont pris dans la langue primitive.
La langue basque se trouve par ce fait impuissante à donner aucune dénomination raisonnable, puisque chacun de ses termes forme déjà une phrase complète ; et de la sorte, elle ne possède plus les mots élémentaires, pour les associer et arriver à former des expressions nouvelles énonçant les qualités diverses des hommes ou de la nature dont elle voudrait présenter une idée exacte. Ce fait important explique comment les Ibères ont dû subir les [112] dénominations imposées par le Neimheid
Gaulois et qui exprimaient,
par l'association des monosyllabes
celtiques, ce qu'ils étaient eux-mêmes impuissants à traduire.
Du reste, les noms de
Cantabres, Gascons, Vardulles et Ibères qui leur furent donnés, sont pris avec tant de vérité dans le vif de leurs murs, qu'il leur était impossible, soit de les changer, soit de les rejeter.
Avant d'expliquer les noms particuliers de ces tribus Ibériennes, nous essaierons d'interpréter quelques mots de la langue basque
afin que sa filiation avec la langue primitive reste
indubitable.
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(57) Genèse, chap. IX. v. 18, 19.