37.
Vous savez qu'il est écrit
(
Ezéchiel, 33:8),
si lorsque je dirai à l'impie : impie,
vous mourrez très certainement, vous ne parlez point à
l'impie afin qu'il se retire de sa mauvaise voie, et qu'il meure ensuite
dans son iniquité, je vous redemanderai son sang à vous-mêmes.
Et moi je vous dis que ce n'est pas seulement le sang des autres que
la justice vous redemandera, mais qu'elle vous redemandera le vôtre
même si nous avez négligé de l'employer à la défense
de votre propre règne, que vous vous soyez contentés d'en
chasser l'
iniquité, et que vous n'en ayez pas chassé jusqu'à
la moindre faiblesse."
"Vous êtes l'or, vous êtes le talent distribué
par le maître à ses serviteurs ; souvenez-vous qu'il ne le distribue
que pour en retirer des
fruits abondants, et pour qu'il soit continuellement
dans la main des banquiers. Si vous ne l'avez pas fait valoir, la justice
vous redemandera non seulement le fonds, mais encore les intérêts
que ce fonds aurait dû lui rapporter, et elle vous ôtera même ce fonds
avec lequel vous auriez pu obtenir de ces intérêts à l'avenir.
Comment parviendrez-vous à vous acquitter avec elle ? Vous êtes
le sel de votre terre, s'il devient fade, avec quoi le salera-t-on ?
Et votre terre ne deviendra-t-elle pas fade elle-même ?"
"Votre leçon entière est dans ces paroles
:
Les serviteurs que mon père aime sont ceux qui le servent
en esprit et en vérité. Ainsi ne vous en tenez pas
à une simple croyance au principe divin dont votre
âme immortelle
a reçu la vie. Ne vous en tenez pas même à cette foi vive que
par votre union avec lui vous pouvez tout opérer pour votre bien,
et celui de
vos frères qui demeurent avec vous dans votre
temple particulier, mais faites en sorte de ne vous donner aucun repos
jusqu'à ce que cette vive foi se soit convertie en actes positifs,
et en faits réels. Les serviteurs que le père aime, ce
sont ceux qui prouvent leur foi en la divinité de leur nature
par la divinité des
fruits qu'ils produisent, et par le soin
qu'ils prennent que dans eux les triples nombres s'accomplissent ; sans
quoi le cercle reste ouvert, l'uvre n'est pas achevée et
reste incomplète, et vous ne pourrez pas dire que vous serviez
Dieu en vérité, puisque vous ne le servez pas en uvres
effectives."
"Vous pouvez honorer
Dieu par vos prières,
mais vous pouvez l'honorer encore plus par les services que vous vous
rendrez à vous-mêmes en son nom, et dans l'
esprit de sa gloire
et de la manifestation de sa lumière, car ces sortes de services
seront pour lui, au lieu que vos prières sont principalement
pour vous, et comme des préservatifs contre les dangers qui vous
menacent et des appuis contre les faiblesses qui vous rongent."
"Ceux qui ne servent leur
Dieu qu'en intelligence,
ne connaissent pas la vie réelle, puisqu'ils ne vivent que dans
les images, aussi ne sont-ils récompensés que par des
images. Il faut que votre cur et toutes les propriétés
de votre être deviennent autant d'
agents et d'organes actifs sans aucune
interruption, si vous voulez vivre dans les réalités et
servir votre meure en
esprit et en vérité."
"On vous a dit que le cur de l'homme était
la terre où
Dieu voulait continuellement semer le grain. Vous
avez donc la propriété de le faire
fermenter et produire
en y joignant les sucs nourrissiers et végétatifs dont
vous êtes l'organe et le foyer. La vérité sème
moins en vous qu'elle n'espère en recueillir, afin de vous laisser
la gloire et le mérite d'avoir concouru à l'uvre,
et le droit de demander votre rétribution lors de la récolte.
Voyez combien la terre périssable que vous habitez rend de richesses
et de
fruits innombrables, pour quelques grains d'un blé corruptible
que le laboureur sème dans son sein. Lors donc que le grain de
l'éternelle vérité se sème dans la terre
vive, jugez quelle immense moisson il en doit résulter, surtout
si vous ne cessez de sentir que c'est de
Dieu que viennent à
la fois la terre vivante, le grain, et le laboureur."
"Lorsque le Seigneur sème quelque grain
en vous, commencez donc par le recouvrir précieusement de toutes
les
terres déjà remuées auparavant, c'est-à-dire
de la confiance, de la vigilance, et de la constance à veiller
à la conservation de ce dépôt précieux. Que jamais
les séduisantes amorces de la contemplation ne laissent à
votre
esprit le temps d'interrompre votre cur dans son uvre
; sans quoi vous mettrez le grain à découvert au lieu
de le laisser
fermenter dans
la terre ; il se desséchera,
ne pourra porter aucun
fruit, ou bien il sera dévoré par
les
oiseaux."
"Souvenez-vous que si l'
âme de l'homme est destinée
à servir de temple à l'éternel auteur de ce qui
est, il faut qu'elle ait en elle, à la fois, toutes les formes
capables de contenir toutes les propriétés de cet être
infini, selon toutes leurs
vertus,
actions, et
subdivisions,
sans quoi ce suprême et majestueux Créateur de tout ce qui existe,
ne pourrait pas entièrement et librement habiter en elle. Souvenez-vous
alors que si l'
âme de l'homme est destinée à servir de
temple à l'Eternel, vous n'avez plus un seul mouvement qui doive
demeurer en votre possession, puisque le souverain auteur qui a produit
ces formes pour lui servir de demeure et qui vient les habiter, doit
être le seul à qui en appartienne la
disposition ; c'est pourquoi
le Réparateur nous a défendu de jurer par notre tête,
puisque nous n'en pouvons rendre un seul
cheveu blanc ou noir ; car
pour jurer par quelque chose, il faut posséder quelque chose
; or nous ne possédons rien, pas même
notre être puisqu'il
n'est que la forme, et le domaine de
Dieu."
"Vous avez appris du Réparateur, à
dire :
notre père ; et vous ne pouviez l'apprendre que
de lui, puisque, jusqu'à lui, vous étiez sans
Dieu en
ce monde (
Ephésiens 2:12) vu que vous n'étiez venus en
ce monde que pour vous être séparés de
Dieu ; et s'il
ne s'était pas rendu fils de
Dieu pour vous enseigner par ces
paroles consolantes, et par sa personne, que l'homme est le fils de
Dieu, vous auriez oublié à jamais, que
Dieu est votre
père. Vous n'auriez pu prononcer ce nom qu'il fallait reconnaître
pour ouvrir la porte à votre réconciliation, et vous auriez
été assimilés à celui qui ne se souvient
plus qu'il a porté autrefois le glorieux titre de fils de
Dieu."
"Ce Réparateur vous a enseigné à
demander à votre père, votre pain quotidien, et à
être préservés du mal ; si votre âge l'eût permis, il
vous eût découvert de plus grandes merveilles encore dans les
miséricordes de votre
Dieu, il vous eût découvert que
ce
Dieu ne cesse de vous offrir ce pain quotidien, en ne cessant de
vous communiquer sa sainte et exclusive action qui devrait nous
animer
tous ; ainsi toute notre sagesse devrait se porter à ne pas refuser
les secours qu'il nous offre journellement, et notre seule prière
pourrait se réduire à lui demander la grâce de ne pas
repousser, comme nous le faisons, les dons, et les faveurs dont il nous
accable. Car le nouvel homme n'a de différence d'avec les imprudents,
qu'en ce qu'il accepte ce pain quotidien, et qu'il s'en nourrit, tandis
que les autres le rejettent, le dédaignent, et nient ensuite
son existence."
"Vous savez ce que le Réparateur déclara
à ceux qui espéraient être reconnus comme
enfants de
Dieu
pour avoir guéri des maladies, et chassé des démons
en son nom ; il leur dit : le Seigneur répondra :
Allez-vous
en, je ne vous ai jamais connus. En effet, le nouvel homme vous
apprendra que ces uvres sont au nombre des droits de votre être,
et qu'elles ne sont pas, à beaucoup près, l'objet principal
de votre renaissance. Les Juifs n'avaient-ils pas été
traités avec colère ? Oui, ces uvres sont tellement
au nombre des droits de votre être, qu'il vous est recommandé
de vous purifier de vos péchés. Or, cette purification
ne peut se faire qu'en chassant de chez vous l'
ennemi, qui est le prince
de l'
iniquité, et de la souillure ; et quand vous serez parvenus
à le chasser entièrement de chez vous, ne sera-ce pas
une propriété naturelle de votre
essence pure que de le
chasser de chez les autres ?"
"Songez donc que l'objet véritable de l'uvre
du nouvel homme est de se régénérer dans la vie
divine, qui est l'
amour, et la lumière : songez que
vous ne
pouvez obtenir de degré de jouissance sans que Dieu vous connaisse,
et sans qu'il soit intimement uni avec vous, comme il le fut avec Moïse
lorsqu'il l'appela, et qu'il le connut par son nom. Songez que vous
ne pouvez être ressuscités (Romains 8:9)
et être sauvés
sans confesser que le Réparateur est ressuscité, parce
que vous ne pouvez le confesser sans le savoir, sans le sentir, et dès
lors, sans être ressuscités avec lui. Souvenez-vous ensuite que
le Réparateur n'était pas encore ressuscité, lorsqu'il
dit aux Juifs ces paroles que vous venez d'entendre sur le pouvoir de
chasser les démons, et que c'est une preuve de plus que ce pouvoir
n'est que secondaire dans l'ordre de votre régénération."
"Il vous a été dit que quelque chose
que vous demandassiez au père, au nom du Réparateur, vous
l'obtiendriez ; mais comment demanderez-vous au nom du Réparateur
si ce nom ne vous est pas connu, c'est-à-dire, s'il n'a pas pénétré
jusque dans l'intelligence de votre cur, par la douceur de sa
vivante activité ? Voici donc comment vous pouvez espérer
que ce nom se fasse connaître à vous, et comment vous pouvez
vous en servir utilement."
"Toutes les fois que votre
esprit se sentira dans
l'indigence, et dans le besoin, présentez au Réparateur
le dénombrement des grâces antérieures qu'il vous a faites.
Dites-lui : " Je suis celui à qui vous avez remis telle et telle
dette, je suis celui que vous avez fortifié dans telle occasion,
je suis celui en qui vous avez développé telle lumière,
je suis celui que vous avez préservé dans telles circonstances,
je suis celui que vous avez étonné tant de fois par la
douceur si inattendue de vos joies toujours nouvelles ; enfin je suis
celui pour qui vous avez fait, et pour qui vous faites encore de continuels
miracles de
miséricorde, et d'allègement dans nos peines,
dans nos dangers, et dans nos ténèbres. Il reconnaîtra
ses propres uvres dans ce dénombrement que vous lui présenterez,
et il s'approchera encore davantage de vous, afin que vous puissiez
parvenir un
jour à demander en son nom, à son père,
tous vos besoins."
38. "Vous
savez qu'il est écrit que
vous ne devez point jeter vos perles devant
les pourceaux, de peur qu'ils ne les foulent aux pieds, et qu'ils ne se tournent
contre vous. Ce précepte regarde en particulier l'homme qui soupire
après sa régénération ; il prend une telle idée
de la grandeur des trésors qui lui sont promis, et une idée si horrible
de la souillure de son être, qu'il craint toujours de laisser en lui quelque substance
corrompue qui, comme les pourceaux, aille fouler aux pieds les perles qu'on lui
présenterait, et qui ne se tourne contre celui qui lui aurait offert tous
ces trésors. Lorsque vous deviendrez des hommes nouveaux, ne parlez point
de la vérité à ce qui, dans vous, ne sera pas encore régénéré
dans l'innocence, et dans la foi de l'
esprit ; contemplez-vous pour savoir s'il
n'y a pas encore en vous quelque chose qui soit à un tel point de faiblesse,
et de ravalement, qu'on doive lui laisser ignorer même qu'il y a un remède
universel ; savoir, celui de l'amertume."
"Ce n'est
qu'aux facultés, déjà dans le sentier de la vie, que vous
devez communiquer l'utile mystère des douleurs de la pénitence de
l'
esprit, qui seule nous découvre si clairement les deux êtres qui sont
en nous, et qui, seule, offre à l'homme comme autant d'échelons,
pour l'aider à monter sur l'
autel du sacrifice, jusqu'à ce que le
feu de l'
esprit descende sur lui, comme au temps de la loi des holocaustes, et
l'enlève ensuite avec lui dans la région de la vie."
"Ainsi vous reconnaîtrez que vos péchés sont couverts,
quand vous sentirez que la sagesse laisse descendre en vous quelque base nouvelle
et féconde, sur laquelle puisse s'élever l'universel édifice
; car cette sagesse ne vous enverrait pas un tel présent, si elle n'avait
auparavant, emporté tous les décombres et toutes les ruines que
vos égarements avaient produits."
"Ayez donc
constamment le soin de rompre la chaîne de vos crimes, et de la laisser à
demeure sous vos pieds, afin que rien en vous ne repousse les trésors qui
vous seront prodigués par la sagesse qui veille sur vous ; car elle vous
en enverra de plus considérables encore que ceux que l'
ennemi vous avait
fait perdre, parce qu'elle est mille fois plus riche, et plus bienfaisante qu'il
ne peut être méchant et pervers. Elle enverra des
anges pour enlever les
pierres de vos
sépulcres, et après vous avoir fait sortir vivants
de vos tombeaux, ils s'assoiront sur ces pierres comme un signe éternel
que la mort ne reprendra plus ses droits sur vous."
"Le terme final, et la destination du nouvel homme ne doivent-ils pas l'emporter
sur les degrés obscurs et pénibles de sa réconciliation,
et n'est-il pas attendu dans un temple plus brillant, et plus vaste que ne peut
le lui faire concevoir aujourd'hui toute l'étendue de ses pensées
? Ne faut-il pas que tout soit précipité pour que la grande
clarté
lui soit rendue ?
Sanctifiez-vous, disait Josué au peuple, car le Seigneur
fera demain parmi vous des choses merveilleuses."
"Quelles sont ces merveilles ? C'est de faire planer le nouvel homme au-dessus
des mondes, d'être pour lui un signe perpétuel de gloire et de triomphe,
et de le faire asseoir sous les portiques sacrés, pour y chanter éternellement
les
cantiques du Seigneur. Car, si vous êtes assez fidèles aux lois, et
aux ordonnances du Seigneur pour que son nom vous remplisse, et se mette en possession
de tout votre être, c'est ce même nom qui engendrera en vous toutes vos substances
vives, ou toutes les formes des
vertus divines ; vos facultés seront
les
agents, et les organes de ces formes, la sagesse les conservera dans leurs
justes mesures, et dans leurs proportions, pour que tout ce qui est en vous manifeste
l'
harmonie du Père céleste qui vous a donné la vie ; ainsi
votre
Dieu tout entier passera en vous : et voilà comment vous deviendrez
la ressemblance de votre principe, et l'image active du
grand monde et de l'éternité."
"Ne vous attachez qu'aux désirs que la sagesse
vous envoie : vous les connaîtrez au calme qu'ils feront naître dans votre cur,
et à la lumière qui les accompagnera, puisqu'ils seront les fils
de la lumière, et que la sagesse n'envoie jamais des désirs au cur
de l'homme, sans lui envoyer, en même temps, tous les moyens de les satisfaire,
parce qu'elle est l'unité, parce qu'elle n'opère, et n'engendre
que l'unité, et qu'elle ne peut agir que dans ses propres lois qui sont
toutes liées dans cette unité. Défiez-vous donc des désirs
qui ne viendront que de votre propre sagesse. Vous les reconnaîtrez aux mouvements
impétueux, et inquiets qu'ils exciteront en vous, de même qu'aux innombrables
difficultés dont leur accomplissement se trouvera hérissé,
et qui ne pourra jamais avoir lieu sans retarder, au moins pour un temps, votre
avancement dans la carrière simple et libre de la vérité."
"Pressez-vous de faire votre uvre, fût-ce même
avant son temps, s'il était possible ; non seulement vous acquerrez par
là les moyens d'obtenir de plus grandes richesses dans les possessions
de la lumière, et de l'
esprit, mais vous pourrez encore jouir paisiblement
du repos pendant
la chaleur du jour, tandis que ceux qui auront été
moins actifs, ainsi que ceux qui se seront abandonnés à l'insouciance,
et à la négligence, seront obligés de supporter tant de fatigues,
que peut-être ils n'y résisteront pas, et finiront par être réduits
à la disette, et à une effroyable misère."
Ne vous arrêtez donc pas aux obstacles que
les infidèles
qui demeurent dans votre sein voudront opposer à votre uvre. Dites-leur
: vous aurez beau rejeter ma parole, j'en étourdirai vos oreilles, et je
vous poursuivrai jusqu'à ce que les ordres de mon maître soient exécutés,
et que vous rendiez
hommage à sa gloire. Est-ce à moi de mesurer,
et de juger les voies du Seigneur ? J'ai accepté dans l'humilité
de mon
âme, le nom de son prophète, et de son envoyé, et plein du
désir de faire honorer son nom, et sa puissance, je ne veux pas qu'il ait
à me reprocher de n'avoir pas averti ceux qui s'égarent. C'est sur
vous qui habitez en moi, et qui êtes les plus proches de mes semblables, que je
dois manifester son empire, et à qui je dois annoncer son nom. C'est sur
vous que je dois faire tomber toutes les plaies d'Egypte, jusqu'à ce que
vous ayez rendu la
liberté au peuple choisi."
"Je ne dirai pas même, en allant vers vous, comme disait Moïse :
A quels
signes me reconnaîtront-ils ? Vous me reconnaîtrez à la puissance du
Seigneur qui est descendue dans l'
âme de l'homme, et qui a fait que
nul prophète
égal à l'homme ne s'est élevé dans Israël. Vous
me reconnaîtrez à ce que tout homme est né pour être triomphant
dans son propre royaume, quoiqu'il doive s'attendre à la vérification
de cette parole,
nul prophète n'est bien reçu dans son pays terrestre."
"Donnez donc un libre cours aux paroles du salut, et
de la régénération qui ont été accordées
au nouvel homme. Aidez-le à exterminer les
agents de l'
iniquité,
à précipiter dans la mer
les animaux impurs qui auront servi
d'asile aux
esprits de ténèbres, et à faire ouvrir à
demeure les sept canaux de la sainteté ; la vie qui en descendra vous communiquera
un nom dont vous ne pouvez concevoir les merveilleuses puissances, et les richesses
ineffables ; faites-vous seconder du
feu du
ciel pour que tout ce qui est en vous
tremble devant le Seigneur, et pour que vous marchiez sur les traces du fils du
grand Azarias, en qui la parole sainte et divine consumait toutes les substances
qui sont étrangères à l'
esprit."
"De même que l'action continuelle de
Dieu est de chasser loin de lui l'erreur
et les ténèbres, et d'étendre perpétuellement le royaume
de la vie, malgré tous les
ennemis dont ce royaume est environné
et menacé, de même lorsque ce
Dieu s'unit à vous, il vous est possible
d'opérer les mêmes uvres dans votre royaume particulier, puisque
l'action de
Dieu, en changeant de lieu, ne change ni de
force, ni de pouvoir,
et qu'elle ne fait alors en vous, que ce qu'elle fait sans interruption hors de
vous."
"Il vous a été dit
de ne
point vous mettre en peine pour le lendemain, et qu'à chaque jour suffisait
son mal. Cela vous a été dit alors
de la nourriture et du
vêtement, et de toutes ces choses dont les païens se mettent en peine, comme si
Dieu ne savait pas qu'ils en ont besoins, et qu'ils ne sût pas les donner par
surcroît à ceux qui cherchaient premièrement le royaume de Dieu
et la justice ; mais vous pouvez également appliquer ces paroles à
la nourriture, et au vêtement de vos
âmes, qui vous seront donnés en abondance,
si vous cherchez réellement le royaume de
Dieu, et sa justice ; car s'il
est vrai qu'à chaque
jour suffit son mal, à chaque
jour aussi suffit
sa consolation, puisqu'il est dit
que votre père qui est dans le ciel
fait lever son soleil sur les bons, et sur les méchants, et qu'il fait
pleuvoir sur le champ des justes, et des injustes. Ainsi il n'y a pas de
jour
que le
Soleil divin ne se lève pour vous sur la terre de vos
âmes, de vos
esprits, et de vos curs."
"Il est écrit
que
si votre main droite vous est un sujet de scandale, et de chute, vous la
devez couper, et la jeter loin de vous, parce qu'il vaut mieux qu'une partie de
votre corps périsse, que non pas que tout votre corps soit jeté
dans l'enfer. Ces paroles ne tombaient alors que sur les crimes où
les désordres de votre matière pouvaient vous entraîner. Mais elles
frappaient secrètement aussi sur les cupidités de l'
esprit, et sur
ces
faux prophètes qui vous portent perpétuellement à rompre
l'alliance que vous avez faite avec votre
Dieu, et à en contracter avec
des
dieux qui ne sont point des
dieux, qui se présentent à vous
vêtus comme des brebis, et qui au-dedans, sont des
loups ravissants.
Car la
porte de la vie est étroite, et il y en a peu qui la trouvent ' et qui
y entrent, tandis que la porte de la perdition est large, et le chemin qui y mène
est spacieux, et il y en a beaucoup qui y passent."
C'est ainsi que le nouvel homme,
assis sur la montagne, versera
dans lui-même la lumière d'en haut et qu'il s'enseignera avec une doctrine
intérieure et vivante, et non pas avec une doctrine extérieure,
morte et superficielle, comme font les docteurs et les
Pharisiens.
39.
Le nouvel homme entrera dans son temple aux
jours septenaires, ou
aux
jours du sabbat de l'esprit, parce qu'il sera fidèle à
la loi ; quand il sera entré et qu'il se lèvera pour lire, on lui
présentera le livre du prophète Isaïe: et il l'ouvrira (61:1) où
sont écrites ces paroles :
L'esprit du Seigneur s'est reposé
sur moi. C'est pourquoi il m'a consacré par son onction. Il m'a envoyé
pour prêcher l'Evangile aux pauvres, pour guérir ceux qui ont le cur
brisé, pour annoncer aux captifs qu'ils vont être délivrés,
et aux aveugles qu'ils vont recouvrer la vue, pour renvoyer libres ceux qui sont
accablés sous leurs fers ; pour publier l'année des miséricordes,
et des grâces du Seigneur, et le jour auquel Dieu rendra à chacun selon
ses uvres. Il
fermera le livre et dira
:
C'est de moi que ces paroles.ont été écrites. J'ai
attiré sur moi l'
esprit du Seigneur par les désirs, et les larmes
de mon
esprit ; j'ai attiré sur moi
les vertus du Seigneur par ma
soif de sa justice, et mon ardeur pour sa sagesse ; j'ai attiré sur moi
la mission du Seigneur en faveur des affligés par mon zèle pour
sa gloire, et pour le soulagement de mes
frères ; j'ai attiré sur
moi la parole du Seigneur par la constance, et l'importunité de ma parole,
parce que nous ne pouvons rien obtenir du Seigneur qu'en lui présentant
des similitudes sur lesquelles il puisse faire descendre, et reposer son action.
Mais cette action ne peut descendre, et se reposer sur
nous, sans
ajouter à la purification que nous avons commencée par
nos efforts, et qui n'est jamais complète, si la main du Seigneur ne vient
elle-même consommer l'uvre.
C'est pourquoi
cette action du Seigneur ne vient jamais sur l'homme sans exciter en lui de saints
frémissements qui, en le purgeant de ses souillures, lui font sentir physiquement
combien est effroyable la faiblesse à laquelle il est réduit, tant
que l'alliance n'est pas renouvelée, et en même temps, combien est grande
la puissance de l'être
infini qui embrasse tout, que meut tout, qui pénètre
tout, et qui a donné à l'
âme humaine le droit de le contempler,
et de sentir sa vivante activité.
Malheur
à l'
âme humaine qui, après avoir ainsi renouvelé son alliance
avec l'
esprit, et la parole du Seigneur, ne tremble pas de respect pour la mission
dont elle est chargée, et ne remplit pas avec une sainte faveur, toutes
les fonctions de son ministère ! Malheur à elle si, ayant obtenu
de nouveaux pouvoirs, et des dons plus vastes pour faire descendre plus abondamment
sur elle, et dans sa région, les grâces, et les frayeurs de la parole,
.et de l'
esprit du Seigneur, elle use de ces dons avec des désirs qui ne
soient pas ceux de l'
esprit même, avec une foi qui ne soit pas celle de l'
amour
et de la lumière, et avec des facultés qui ne soient pas entièrement,
et exclusivement dévouées à l'uvre qu'elle doit accomplir
sur la terre !
Elle se rendra coupable du corps et du sang du Seigneur
(Ière Corinth. 11:27) ;
elle mangera et boira sa propre condamnation,
elle deviendra faible et malade, et tombera dans le sommeil.
Mais si elle n'écoute que les désirs de l'
esprit de
vérité, quelque dures que ses paroles puissent paraître à
tous ceux de la
synagogue, elle ne doit point craindre leur colère,
ni les vengeances dont ils la menacent. Elle prospérera malgré eux,
parce qu'elle sera soutenue par la main du Seigneur, ils auront beau
la chasser
de leur ville, et la mener jusque sur la pointe de la montagne où leur
ville est bâtie, afin de la précipiter, elle passera au milieu d'eux, et
se retirera.
Quand elle sera ainsi unie à
la main vigilante du Seigneur, celles de ses facultés qui seront possédées
des démons impurs ne pourront approcher d'elle sans que ces
esprits de
ténèbres ne jettent de grands cris, et ne lui disent :
Laissez-nous,
qu'y a-t-il entre vous et nous, âme nazaréenne ? Je sais qui vous êtes,
vous êtes le saint de Dieu ; êtes-vous venue pour nous tourmenter avant le temps
? Mais elle leur répondra avec menaces :
Taisez-vous, et sortez
de moi, et ils en sortiront sans leur avoir fait aucun mal.
Ce nouvel homme
voyant en lui tant de ces
hommes tourmentés
par des esprits impurs, tant de malades, et d'infirmes qu'on lui apportera de
tous côtés pour qu'ils les guérisse, sentira ses entrailles émues
de compassion, de les voir ainsi languissants, et dispersés comme des brebis
qui n'ont point de pasteurs ; et il dira à ses bons intellects : la moisson
est grande, mais il y a bien peu d'ouvriers ; priez donc le maître de la moisson
pour qu'il envoie des ouvriers en sa moisson. Il ne cessera de les encourager
par son exemple, à devenir eux-mêmes des ouvriers qui puissent l'aider
dans son uvre. Il ne cessera de les prévenir combien cette uvre
rencontrera d'invisibles contradicteurs qui ne pourront pas en avoir l'intelligence,
parce qu'ils ne demeurent que dans les ténèbres.
Aussi ces contradicteurs diront-ils que
c'est par le prince des
démons que tous ces ouvriers chassent les démons,
aimant mieux
se couvrir eux-mêmes de confusion par cette réponse insensée, que
d'avouer leur défaite, et la supériorité de celui qui vient
manifester leur
ignorance. Car ils verront des
hommes muets possédés
du démon ; ils verront que c'est par la parole du nouvel homme que ces
hommes muets recouvreront l'usage de leur langue, après qu'il les
a délivrés de leur démon ; et cependant ils ne craindront
pas de confondre celui qui guérit, avec celui qui occasionne la maladie;
celui qui ôte la parole, avec celui qui la rend. Bien plus, ils ne craindront
point de tomber en contradiction devant ces démons même qu'ils veulent
regarder comme les princes de ces uvres puissantes, et merveilleuses, puisque
ces démons reconnaîtront eux-mêmes la
force, et le nom de celui qui les
chasse, et lui diront : Vous êtes le nouvel homme,
vous êtes le Christ, vous
êtes le fils de Dieu (
Luc, 4:41).
Ils se
scandaliseront de le voir enseigner d'une manière qui remplira tout le
monde d'étonnement, parce que sa parole sera accompagnée de puissance
et d'autorité ; et il sera en butte aux contradictions des Pharisiens,
des docteurs de la loi qui viendront de tous les villages de la Galilée,
du pays de Judée, et de la ville de Jérusalem, et qui étant
assis près de lui, verront sa vertu agir par des prodiges, et la guérison
des malades. Car le nouvel homme
voyant en lui-même
un paralytique, et la foi de ceux qui l'apportent à ses pieds, lui dira
:
Mon ami, vos péchés vous sont remis.
Alors les
Pharisiens, et les docteurs de la loi, l'accuseront de blasphèmes,
prétendant qu'il n'y a que
Dieu qui puisse remettre les péchés,
tandis que par leur loi même, dont ils sont les docteurs, et les princes, il y
avait des sacrifices pour l'
expiation, et pour le péché, et que
ces sacrifices étaient offerts par la main d'un homme qui, dans cette circonstance,
était l'
intermède, l'organe, et l'
agent de la divinité.
Mais le nouvel homme, connaissant d'avance leurs pensées,
aura commencé par la guérison intérieure
du malade,
afin d'avoir l'occasion de leur donner une instruction salutaire, et lumineuse,
en leur représentant qu'il n'est pas plus difficile de dire
levez-vous,
et marchez, que de dire
vos péchés vous sont remis ;
parce qu'aux yeux du fils de l'homme, toutes les puissances émanent de
la même source, et que, sûrement, le premier service qu'il puisse se rendre à
lui-même, c'est d'employer celles qui tombent sur la guérison de ses facultés
intérieures, et de ne s'occuper de la guérison de son
corps, que
quand son intérieur est rétabli, sans quoi, loin d'avancer son perfectionnement,
et sa régénération, il ne ferait que rendre ses facultés
plus coupables, en les dispensant de la coulpe de leurs péchés,
tandis qu'il leur laisserait la substance de leurs péchés.
Mais ayant commencé à user des droits originels
de l'
âme humaine (qui étaient de remettre les péchés) par
remettre les péchés au
paralytique, en récompense
de la foi qui l'animait, il voudra encore
frapper les yeux matériels
des
docteurs de la loi par un prodige corporel, et par la guérison matérielle
du
malade ; et sachant combien les puissances sur l'
esprit s'élèvent
au-dessus des puissances qui ne tombent que sur le
corps, il prouvera la guérison
intérieure, ou le pouvoir qu'il a eu de remettre les péchés
par la guérison extérieure, puisqu'une puissance moindre est nécessairement
comprise dans une puissance supérieure, ce qui nous enseigne combien nos
maux sont liés à nos désordres moraux, et que si notre intérieur
était mieux réglé, nous aurions infiniment moins d'infirmités
corporelles. Pénétré de ces principes, le nouvel homme, ayant
délié dans le
paralytique les chaînes du péché
qui suspendraient l'action de tous ses organes, dira, avec assurance, à
ces organes délivrés de leurs entraves :
Levez-vous, je vous
le commande, emportez votre lit, et vous en allez en votre maison. Le paralytique
se lèvera, emportera son
lit, et s'en ira
en sa maison au grand
étonnement de
ceux qui seront les témoins de ce glorieux
événement.
Le nouvel homme sera si
constamment occupé de son uvre, qu'il pourra ramener ainsi tout son
être à ses
éléments primitifs, en travaillant sans relâche,
à réaliser ce qui est dit dans les prophètes :
Je serai
leur Dieu, et ils seront mon peuple. C'est-à-dire, en faisant en sorte
que chaque portion de son être exprime activement la sainteté de
Dieu,
et dise :
saint, saint, saint, comme nous avons vu précédem-ment,
que telle était la vraie propriété que nous découvrait
l'analyse divine de notre être ; c'est-à-dire enfin, que tous les points
de cet être qui est en nous, devaient être mûs par les consciences vives, et progressives
des diverses régions de l'
esprit, par où nous pouvons, et devons
passer, jusqu'à ce que nous soyons universellement pleins de la conscience
divine. Or, si l'être intérieur du nouvel homme arrivait à cet heureux
terme, quels maux physiques pourraient, dans son
corps, résister à
sa puissance ? Et ne pourrait-il pas dire avec assurance, à tout ce qui
sera
paralytique, en lui :
Levez-vous, je vous le commande, emportez
votre lit, et vous en allez votre maison ?