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Le développement de l'âme

Alfred Percy Sinnett
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CHAPITRE XIII :
LA THÉOSOPHIE AU MOYEN-ÂGE (3/3)

Voici maintenant une citation alchimique plus obscure, tirée de Aula Lucis, par Thomas Vaughan. Vaughan écrivait généralement sous le nom d'Eugène Philalèthes, vers le milieu du XVIIème siècle. Certains écrivains, dit-il, ont préféré, au début, cacher la vérité plutôt que la déguiser. Il se propose de prendre un moyen terme et de n'être ni trop clair ni trop obscur ; mais nos lecteurs modernes trouveront probablement qu'il craignait surtout d'être trop clair. Il parle en ces termes de la pierre philosophale, de cet esprit divin nécessaire à la transmutation de la nature inférieure de l'homme :

      « C'est un dissolvant minéral et subtil, une eau tellement fluide et spirituelle, d'un éclat si translucide, qu'aucune liqueur semblable n'existe dans la nature, qu'elle seule... Et je dis qu'on l'a jusqu'à la fin appelée une pierre, afin qu'aucun homme ne puisse connaître ce qu'on désignait par ce terme. » Puis il s'étend longuement sur la « matière primordiale », qui, dit-il, pourrait se décrire assez exactement par des contraires – étant très faible et cependant très puissante, semblable au feu qui ne brûle pas, à l'eau qui ne mouille pas, etc. Il la nomme le mercure, la risée des fols et le prodige des sages. Ceci doit certainement représenter la conscience, l'aspiration spirituelle chez l'homme incarné, ou encore la première influence du Soi supérieur dans la conscience physique.

      Changeant ensuite de métaphore, il appelle le sujet qu'il traite « notre source scellée ». « Au fond de ce puits est étendu un vieux dragon, presque endormi. Si vous le pouvez, éveillez-le et faites-le boire ; il recouvrera alors sa jeunesse, et ses services vous seront acquis à jamais. Eu un mot, séparez l'aigle du lion vert, puis coupez-lui les ailes, et vous aurez accompli un miracle... »

      « L'aigle (45) représente l'eau, car elle est volatile et, pareille à l'aigle, s'élève dans les nues. Mais je n'entends nullement parler ici d'une eau ordinaire. Le lion vert est le corps, la terre magique avec laquelle il faut couper les ailes à l'aigle, c'est-à-dire que vous devez le retenir, afin qu'il ne puisse plus s'envoler. »

      Cette incertitude, ces changements constants dans les allégories alchimiques les rendent assurément très difficiles à traduire en langage intelligible. Pourtant, il est clair que Vaughan fait ici allusion aux facultés psychiques supérieures que l'on peut employer pour prendre conscience, sur un plan élevé, de la Nature, tout en les laissant en relation avec la conscience psychique .

      Dans un traité très fantastique du XVIIIème siècle, intitulé The Hermetical Triumph, on insiste spécialement sur l'avertissement habituel, au cours d'un dialogue entre « l'Or » et « la Pierre ». L'Or soutient avec persistance l'opinion matérialiste de la science, tandis que la Pierre lui oppose sans cesse des idées dans ce genre :

      « Mais, quand ils – les vrais philosophes – désignent clairement l'or et le mercure comme les principes de leur art, ils n'emploient ces termes que pour dérober leur science aux ignorants et à ceux qui en sont indignes, parce qu'ils savent très bien que ces esprits vulgaires ne s'attachent qu'au nom des choses, aux recettes et aux directions qui sont écrites, sans examiner si leurs opérations reposent sur une base solide. Les sages, au contraire, considèrent toutes choses avec prudence, regardant comment elles concordent et s'harmonisent entre elles, et par ce moyen ils pénètrent jusqu'au cœur même de l'art. »

      Jusqu'ici, toutes mes citations ont été tirées des quelques ouvrages que j'ai indiqués ; mais, de seconde main, il sera facile d'en trouver beaucoup d'analogues dans deux ouvrages, de date récente, écrits dans le but d'exposer la signification réelle et les mystères des sciences hermétique et alchimique, j'y renvoie donc ceux de mes lecteurs désireux de pousser ce sujet plus loin et d'acquérir la notion complète des principes que j'ai sommairement exposés. Le premier de ces ouvrages, et le plus important, est devenu très rare : l'auteur a fait son possible pour le retirer de la circulation, sous l'impression que son exposé péchait trop contre cette règle : « Ne donnez pas aux chiens ce qui est saint, et ne jetez pas vos perles aux pourceaux. » Le titre complet de cet ouvrage est : Recherche suggestive sur le Mystère Hermétique, accompagnée d'une dissertation sur les plus célèbres philosophes alchimistes ; essai entrepris pour retrouver l'ancienne expérience de la Nature. Ce traité anonyme fut publié en 1850. Il renferme de très nombreux et très intéressants témoignages, constatant que quelques vrais alchimistes – ceux que leur développement spirituel avait préalablement rendus Adeptes dans la manipulation des forces secrètes de la Nature – ont positivement accompli l'expérience physique de l'alchimie à laquelle s'attaquèrent en vain tant d'autres qui n'étaient pas adeptes. Ce livre entre profondément dans le sens ésotérique du sujet, et donne, au cours d'une revue très complète de la littérature alchimique, de nombreuses citations se rapportant à l'interprétation spirituelle de l'allégorie entière.

      Entre autres extraits, il donne une traduction du Tractatus Aureus, ou Livre d'or d'Hermès, concernant le secret physique de la Pierre philosophale, « lequel, dit-il, est considéré comme l'un des écrits alchimiques les plus anciens et les plus complets qui soient et comme un exposé en forme d'épitome de l'ensemble de cette science ».

      De nos jours, on ne trouverait pas ce traité d'une clarté lumineuse. Nous y lisons, par exemple :

      « Sachez donc que les anciens philosophes faisaient de l'eau un composé de quatre substances ; une en deux, et trois en une, dont le tiers est la couleur, c'est-à-dire une sorte d'humidité coagulée ; mais les deuxième et troisième eaux sont la valeur du Sage. »

      On retrouve jusque dans le Tractatus Aureus les avertissements habituels dont nous connaissons la raison ; par exemple :

      « Sachez que je donne à cette matière le nom de pierre ; mais on l'appelle aussi la partie féminine de la magnésie, ou la peule, ou le lait volatil, ou encore l'huile incombustible, afin qu'elle demeure cachée au sôt et à l'ignorant. »

      Et plus loin :

      « Ô vous, fils de la Sagesse, brûlez donc ce corps d'Airain dans un brasier ardent ; il vous cèdera alors de bonne grâce tout ce que vous en souhaitez. Et faites en sorte d'empêcher ce qui est volatil de s'envoler, au moyen de ce qui ne peut voler. »

      Nous retrouvons ici une autre version du Lion vert et de l'Aigle de Vaughan, allusion voilée aux possibilités contenues dans la culture des facultés psychiques supérieures.

      Sans paraître avoir eu connaissance de l'ouvrage Recherche suggestive, un écrivain américain, nommé Hitchcock, publia, en 1857, comme amplification d'un petit pamphlet écrit deux ans auparavant sur le même sujet, un petit livre intitulé : Remarques sur l'Alchimie et les Alchimistes. Une introduction un peu surannée nous fait pressentir les convictions que va développer l'auteur. L'annonce que son livre « indique une méthode pour découvrir la véritable nature de la Philosophie Hermétique ; il démontre que la recherche de la Pierre Philosophale n'avait pas pour objet la découverte d'un agent de transmutation pour les métaux et, enfin, que son livre est publié dans l'intention de laver d'un opprobre immérité la réputation de toute l'association de ces grands penseurs des temps passés ». Au début du livre, l'auteur explique comment le pamphlet original eut pour but de répandre une idée qui l'avait fortement impressionné, celle que la Pierre Philosophale était un simple symbole, et que les alchimistes ne recherchaient pas l'or, mais, en réalité, la sagesse, tout en se gardant soigneusement d'en laisser échapper le nom. Ce pamphlet ayant été attaqué, d'une façon aussi violente que stupide, dans la Westminster Review, l'auteur, en 1856, revint à la charge, justifiant à nouveau ses arguments ; il les amplifie encore dans le livre que nous avons sous les yeux.

      « J'affirme, dit-il, que l'unique sujet de l'alchimie est l'Homme. Mais chaque écrivain le désigne généralement par un pseudonyme du son choix : c'est pourquoi l'un parle d'antimoine, l'autre de plomb, celui-ci de zinc, celui-là d'arsenic. » Il cite à l'appui cette phrase d'un écrivain alchimiste : « Lorsque notre ouvrage est encore brut, nous l'appelons notre eau permanente, notre plomb, notre Saturne, notre Jupiter ; s'il a déjà subi la décoction, nous le nommons argent, puis magnésie ou soufre blanc. Lorsqu'il est rouge, on l'appelle pigment aurifère, corail, or, ferment ou pierre ; ou bien encore on le désigne comme l'eau translucide de couleur céleste. »

      Il est aussi intéressant qu'instructif de suivre M. Hitchcock, recherchant ces métaphores compliquées dans le dédale des deux cents volumes d'alchimie qu'il assure avoir compulsés. Et je ne puis comprendre comment un esprit réfléchi le suivrait jusqu'au bout sans être convaincu qu'il se trouve sur la piste de la véritable interprétation. M. Hitchcock n'était pas assez occultiste pour découvrir tout ce que renferme la philosophie alchimique ; mais le théosophe de notre génération, s'il a profité de toutes les opportunités qui lui sont offertes, doit être à même de comprendre mieux encore que lui ce sujet. Bref, l'excellent ouvrage de M. Hitchcock servira toujours à quelques-uns de mes lecteurs comme introduction au sujet, si, intéressés parce que j'en ai dit ici, ils désirent poursuivre une investigation tout à la fois rebulante et captivante, si je puis employer cette expression paradoxale bien en harmonie avec l'esprit des auteurs que j'ai cités. L'alchimie, M. Hitchcock en convient, peut avoir passé à jamais, sans espoir de retour : « Cela peut être, dit-il ; mais les questions qui ont préoccupé les alchimistes n'ont pas passé et ne passeront pas tant que l'homme sera errant sur cette terre, parce que ce sont les plus intéressantes qu'il soit donné au cœur humain d'approfondir. Et si ces questions prennent leur origine dans l'homme, leur solution doit embrasser à la fois le microcosme et le macrocosme. »


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(45)  L'Aigle, ou oiseau d'Hermès, représente l'eau fugitive dans ses sublimations ; le Lion vert, ou minerai de Mercure, est cette terre magique des philosophes qui ne mouille pas les mains et a la propriété de réduire et de volatiliser tous les métaux, comme le lion, roi des animaux, a le pouvoir de les tous détruire. Dans ce jargon obscur des alchimistes, nous trouvons encore les expressions de : Lion vert des fols (vert-de-gris et mercure sublimés), Lion rouge (teinture d'or, ou élixir parvenu au rouge parfait), Lion volant (synonyme d'aigle ou de sublimation), Lion ravissant (correspondant au dissolvant universel). Pour plus de détails, voir : Les Douze Clefs de la Philosophie, de Basile Valentin, traduit de l'original en 1670. N. D. T.




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